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16/01/2003 | LUXEMBOURG | N°15455

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 janvier 2003, 15455


Tribunal administratif N° 15455 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 octobre 2002 Audience publique du 16 janvier 2003

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Requête en relevé de forclusion introduite par Madame …, … en présence du ministre de la Justice

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15455 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 octobre 2002 par Maître Yvette NGONO YAH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocat

s à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Bijelo Polje (Monténégro / Yougoslavie), de national...

Tribunal administratif N° 15455 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 octobre 2002 Audience publique du 16 janvier 2003

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Requête en relevé de forclusion introduite par Madame …, … en présence du ministre de la Justice

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 15455 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 octobre 2002 par Maître Yvette NGONO YAH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à Bijelo Polje (Monténégro / Yougoslavie), de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision du ministre de la Justice du 1er août 2002, lui notifiée le 5 août 2002, portant refus du statut de réfugié politique dans son chef ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 novembre 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif au nom de la demanderesse en date du 6 janvier 2003 ;

Vu les pièces versées en cause ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Yvette NGONO YAH, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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En date du 5 août 2002, le ministre de la Justice a envoyé par lettre recommandée simple à l’adresse de Madame … une décision du ministre de la Justice du 1er août 2002 portant refus dans son chef du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, prononcée sur base de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2. d’un régime de protection temporaire.

Ledit courrier fut retourné au ministère de la Justice accompagné de la mention « pas de boîte à ce nom ».

Par requête déposée en date du 14 octobre 2002, Madame … a fait déposer une demande tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 1er août 2002.

A l’appui de sa requête, la demanderesse fait valoir qu’elle n’aurait jamais réceptionné l’envoi recommandé du 1er août 2002 et que ce ne serait qu’en date du 10 octobre 2002, sans préjudice quant à la date exacte, qu’un agent du ministère de la Justice lui aurait appris que sa demande avait été rejetée et que les délais pour agir en justice avaient expiré. Partant elle aurait été dans l’impossibilité d’introduire un recours gracieux respectivement un recours en réformation ou en annulation à l’encontre de la décision précitée du 1er août 2002. Comme ladite décision du 1er août 2002 ne lui aurait jamais été notifiée, elle n’aurait pas pu agir en justice pour défendre ses intérêts, de sorte qu’elle satisferait aux dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance.

Le délégué du gouvernement soutient que la décision litigieuse du 1er août 2002 aurait été notifiée à l’adresse officielle de la demanderesse à …. Il estime que cette notification serait intervenue en conformité avec les dispositions de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et que la demanderesse aurait clairement commis une faute en n’indiquant pas son nom sur la boîte à lettres de sa résidence. Il s’ensuit qu’on ne saurait reprocher au ministre de la Justice de n’avoir notifié la décision litigieuse que par envoi recommandé simple. Partant le délégué du gouvernement conclut au rejet de la requête comme étant non fondée.

Il convient en premier lieu d’examiner le moyen soulevé oralement par le délégué du gouvernement lors de l’audience fixée pour les plaidoiries tendant à voir écarter le mémoire en réplique déposé au nom de la demanderesse le 6 janvier 2003 pour cause de non-respect du délai légal.

L’article 5 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit en ses paragraphes (5) et (6) que :

« (5) Le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse, la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois.

(6) Les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus à peine de forclusion. Ils ne sont pas susceptibles d’augmentation en raison de la distance. Ils sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 septembre ».

Il convient encore de relever qu’aucune prorogation de délai n’a été demandée au président du tribunal conformément à l’article 5 paragraphe (7) ni, par la force des choses, accordée par ce dernier.

Il se dégage de l’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 que la question de la communication des mémoires dans les délais prévus par la loi touche à l’organisation juridictionnelle, étant donné que le législateur a prévu les délais émargés sous peine de forclusion.

Dans la mesure où le mémoire en réponse du délégué du gouvernement a été communiqué au mandataire de la demanderesse en date du 22 novembre 2002, le dépôt du mémoire en réplique de la demanderesse a dû intervenir pour le 23 décembre 2002 au plus tard, le 22 décembre 2002 étant un dimanche. Or, force est de constater que le dépôt du mémoire en réplique n’est intervenu qu’en date du 6 janvier 2003, soit après l’expiration du prédit délai. Par conséquent, à défaut par la demanderesse d’avoir déposé le mémoire en réplique dans le délai d’un mois légalement prévu à peine de forclusion, le tribunal est dans l’obligation de l’écarter des débats.

Une requête en relevé de déchéance basée sur l’article 1er de la loi modifiée du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice présuppose qu’« une personne n’a pas agi en justice dans le délai imparti », impliquant à la base qu’un délai ait expiré sans qu’une partie demanderesse n’ait utilement agi.

Il convient dès lors avant tout autre progrès en cause de vérifier si en l’espèce relativement à la décision ministérielle de refus dont il s’agit, datée du 1er août 2002, le délai contentieux avait commencé à courir et avait expiré tel qu’énoncé dans la requête introductive d’instance de la demanderesse.

Il échet dans ce contexte de vérifier notamment si la décision précitée du 1er août 2002 a été notifiée conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables.

S’il est exact que les notifications par voie de lettre recommandée sont valablement faites à l’adresse indiquée par la partie ou résultant de déclarations officielles, force est de retenir qu’en l’espèce le facteur n’a pas laissé, respectivement remis à une personne se trouvant à l’adresse préindiquée, le pli recommandé en question, de sorte que la demanderesse était dans l’impossibilité de prendre connaissance de l’existence et a fortiori du contenu de la décision du 1er août 2002.

L’inobservation de l’obligation de notifier la décision finale à la partie concernée n’est pas de nature à entacher la décision querellée de nullité, mais elle a pour effet d’empêcher que le délai du recours contentieux ne commence à courir. – En effet, le non respect de cette prescription ne saurait se résoudre impérativement en une annulation de la décision administrative, étant donné que cette omission est indépendante du contenu même de la décision prise et que, dès lors, le seul grief susceptible d’affecter le destinataire de la décision est celui de ne pas avoir pu exercer utilement les voies de recours. Par conséquent, la sanction adéquate et conforme à la finalité de la prescription est la suspension des délais de recours jusqu’à une notification de la décision (trib. adm. 20 mai 1999, n° 10913 du rôle, Pas. adm.

2002, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 84, p. 440 et autres décisions y citées).

En l’espèce, comme la preuve de la notification de la décision du 1er août 2002 n’a pas été rapportée, aucun délai de recours n’a commencé à courir.

Il s’ensuit qu’à défaut d’expiration vérifiée du délai imparti pour agir en justice en date du 14 octobre 2002, au sujet duquel la demande en relevé de forclusion sous examen a été introduite, celle-ci est à considérer comme étant sans objet.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

écarte des débats le mémoire en réplique déposé au nom et pour compte de la demanderesse ;

déclare la demande en relevé de forclusion sans objet ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 16 janvier 2003, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 15455
Date de la décision : 16/01/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-01-16;15455 ?

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