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24/10/2002 | LUXEMBOURG | N°14737

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 octobre 2002, 14737


Tribunal administratif N° 14737 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 mars 2002 Audience publique du 24 octobre 2002 Recours formé par Monsieur … , … contre deux décisions du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14737 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 26 mars 2002 par Maître Richard STURM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de Monsieur … , né le … à Santa Antâo (Cap-

Vert), de nationalité cap-verdienne, dem...

Tribunal administratif N° 14737 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 mars 2002 Audience publique du 24 octobre 2002 Recours formé par Monsieur … , … contre deux décisions du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14737 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 26 mars 2002 par Maître Richard STURM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … , né le … à Santa Antâo (Cap-

Vert), de nationalité cap-verdienne, demeurant à L-…, tendant à l’annulation sinon à la réformation d’un arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi du 2 octobre 2001 lui refusant la délivrance d’un permis de travail, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 3 janvier 2002 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 juin 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2002 par Maître Richard STURM pour compte de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 septembre 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, et Maître Richard STURM ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Par déclaration d’engagement datée au 27 juin 2001, parvenue à l’administration de l’Emploi, ci-après dénommée « ADEM », le même jour, la société à responsabilité limitée … s.à r.l., sollicita un permis de travail en faveur de Monsieur , pour un poste de peintre, l’entrée en service étant indiquée pour le 1er janvier 2001.

Par arrêté du 2 octobre 2001, le ministre du Travail et de l’Emploi refusa un permis de travail à Monsieur « pour les raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi suivantes - des demandeurs d’emploi appropriés sont disponibles sur place : 98 peintres inscrits comme demandeurs d’emploi aux bureaux de placement de l’Administration de l’Emploi - priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) - poste de travail non déclaré vacant par l’employeur - occupation irrégulière depuis le 01.01.2001 - recrutement à l’étranger non-autorisé ».

Le recours gracieux formé par courrier de son mandataire en date du 31 décembre 2001 s’étant soldé par une décision confirmative du même ministre du 3 janvier 2002, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation sinon en réformation à l’encontre de l’arrêté ministériel du 2 octobre 2001 et de la décision confirmative du 3 janvier 2002 par requête déposée le 26 mars 2002.

Quant au recours en réformation Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande subsidiaire en réformation des décisions critiquées.

Quant au recours en annulation Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable Le demandeur reproche en premier lieu à l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi déféré, confirmé par décision du même ministre du 3 janvier 2002, de reprendre comme motifs des formules générales et abstraites, telles que prévues par la loi, sans que le ministre ait tenté de préciser concrètement comment, dans le cas d’espèce, des raisons de fait permettraient de justifier la décision en question. Le juge administratif serait de ce fait dans l’impossibilité de contrôler la légalité de l’acte.

Le délégué du gouvernement conclut toutefois à bon droit au rejet de ce moyen. En effet, en application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux et une décision refusant de faire droit à la demande de l’intéressé doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base.

Dès lors que la motivation expresse d’une décision peut se limiter, conformément à l’article 6 précité, à un énoncé sommaire de son contenu, il suffit en l’occurrence, pour que l’acte de refus soit valable, que les motifs aient existé au moment du refus, quitte à ce que l’administration concernée les fournisse a posteriori sur demande de l’administré, le cas échéant au cours d’une procédure contentieuse (cf. Cour adm. 13 janvier 1998, n° 10241C du rôle, Pas. adm. 2001, V° Travail, III. Permis de travail, n° 28 et autres références y citées).

En l’espèce, l’arrêté ministériel attaqué du 2 octobre 2001 énonce 5 motifs tirés de la législation sur l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, de manière à suffire aux exigences de l’article 6 précité, cette motivation ayant par ailleurs été utilement complétée en cours d’instance contentieuse par le représentant étatique, de sorte que le demandeur n’a pas pu se méprendre sur la portée à attribuer à la décision litigieuse.

L’existence de motifs ayant été vérifiée, il s’agit encore d’examiner si lesdits motifs, sinon certains d’entre eux, sont de nature à justifier les décisions critiquées.

Quant au motif de refus de délivrance d’un permis de travail en faveur de Monsieur …, tiré de la non-déclaration du poste vacant par l’employeur, à savoir la société à responsabilité limitée …, le demandeur expose que l’omission de déclarer la vacance de poste ne saurait justifier de plein droit le refus d’un permis pour un travail spécifique.

C’est toutefois à bon droit que le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen, en soutenant que le motif tiré de l’absence de déclaration du poste vacant a valablement pu être invoqué par le ministre du Travail et de l’Emploi à la base de la décision litigieuse, en se référant à l’article 10 (1) du règlement grand-ducal modifié du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, dans sa teneur lui conférée par le règlement grand-ducal du 29 avril 1999. En effet, ladite disposition réglementaire dispose dans son deuxième alinéa que « la non-déclaration formelle et explicite de la vacance de poste à l’Administration de l’Emploi, conformément à l’article 9, paragraphe (2) de la loi modifiée du 21 février 1976 concernant l’organisation et le fonctionnement de l’Administration de l’Emploi et portant création d’une commission nationale de l’emploi, constitue un motif valable et suffisant de refus du permis de travail ».

En l’espèce, il se dégage de la déclaration d’engagement que la société à responsabilité limitée … avait engagé Monsieur … avec effet rétroactif au 1er janvier 2001, la prédite déclaration n’ayant été introduite auprès de l’ADEM qu’en date du 27 juin 2001. Il est encore constant que l’employeur n’a pas préalablement déclaré le poste vacant qu’il a par la suite attribué à Monsieur … et que ce dernier a été occupé d’une manière irrégulière depuis le 1er janvier 2001.

Face au caractère clair et précis de la disposition réglementaire précitée et eu égard aux circonstances de l’espèce, le ministre a partant valablement pu refuser le permis de travail sollicité au seul motif que le poste de travail ne fut pas déclaré vacant par l’employeur, de sorte que l’examen des autres motifs à la base de l’arrêté ministériel déféré, de même que des moyens d’annulation y afférents invoqués par le demandeur, devient surabondant.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’argumentation avancée par le demandeur tenant à ce que « du fait [d’une] cession de parts sociales, le requérant est à considérer, non pas comme salarié de la société … s.à r.l., mais comme travailleur indépendant, pouvant subvenir à ses propres besoins », de sorte qu’en raison de cet « élément nouveau », il y aurait lieu de faire droit à la demande en obtention d’un permis de travail, étant donné que, comme l’a relevé à bon droit le délégué du gouvernement, à supposer que tel était le cas, le demandeur n’aurait pas besoin d’un permis de travail, mais d’une autorisation d’établissement et que le recours introduit deviendrait partant sans objet.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 24 octobre 2002, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 14737
Date de la décision : 24/10/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-10-24;14737 ?

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