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25/09/2002 | LUXEMBOURG | N°15258

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 septembre 2002, 15258


Numéro 15258 du rôle No 15358 du rôle Tribunal administratif du Grand- Ins Du c c rit l hé e 18 se de L ptembr uxe e 2002 mbourg Inscrit le 18 septembre 2002 Audience publique du 25 septembre 2002 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15358 du rôle et déposée le 18 septembre 2002 au greffe du tribunal administr

atif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Or...

Numéro 15258 du rôle No 15358 du rôle Tribunal administratif du Grand- Ins Du c c rit l hé e 18 se de L ptembr uxe e 2002 mbourg Inscrit le 18 septembre 2002 Audience publique du 25 septembre 2002 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 15358 du rôle et déposée le 18 septembre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur , né le 1er décembre 1980 à Ait Yadine (Maroc), de nationalité marocaine, ayant été placé au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 28 août 2002 ordonnant une mesure de placement à son égard ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 20 septembre 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 septembre 2002.

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Il ressort d’un procès-verbal n° 6/1256/02/JA du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale que le dénommé fut emprisonné au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig en date du 30 mai 2002 suite à un vol qualifié, pour lequel il fut d’ailleurs condamné en date du 19 juillet 2002 par le tribunal correctionnel du Luxembourg à une peine d’emprisonnement de 6 mois, dont 3 mois assortis du sursis. Au terme de sa peine d’emprisonnement, Monsieur … fut placé par arrêté ministériel du 28 août 2002, notifié le même jour, au Centre Pénitentiaire de Luxembourg pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de la décision en question dans l’attente de son éloignement du territoire luxembourgeois.

La décision de placement est fondée sur les considérations et motifs suivants :

« Considérant que l’intéressé a été condamné le 19 juillet 2002 par le Tribunal Correctionnel de Luxembourg pour vol qualifié et qu’il sera remis en liberté en date d’aujourd’hui ;

Considérant que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant qu’une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités belges ;

Considérant qu’en attendant une réponse des autorités belges, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ;

Considérant que l’intéressé est susceptible de constituer un danger pour l’ordre et la sécurité publics et que pour cette raison un placement au Centre Pénitentiaire de Luxembourg s’impose. » Par requête déposée le 18 septembre 2002, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de la prédite décision ministérielle de placement.

L’article 15 paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1.

l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, instituant un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation lui déféré.

Ce même recours ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur argumente en premier lieu que la décision entreprise devrait être annulée pour « absence des conditions pour prononcer une mesure de placement » et qu’une expulsion ou un refoulement n’étaient nullement impossibles, étant donné que l’autorité administrative savait pertinemment qu’il était arrivé sur le territoire luxembourgeois en provenance de la Belgique et que l’autorité administrative aurait tout simplement pu le refouler vers ce pays.

Force est cependant de constater que les autorités compétentes sont uniquement obligées de prendre des mesures appropriées afin d’assurer que l’intéressé puisse être éloigné du pays dans les meilleurs délais et non pas de rapporter la preuve qu’elle peuvent obtenir effectivement l’admission du demandeur dans son pays d’origine.

En l’espèce il échet de constater que les autorités ont contacté les autorités belges en vue de la reprise du demandeur dès la mise en liberté de celui-ci en date du 28 août 2002. Dans la mesure où le demandeur reste en défaut d’établir, voire d’alléguer concrètement que le ministre aurait été en mesure d’entreprendre les démarches nécessaires en vu de sa reprise antérieurement à sa mise en liberté anticipée, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

Concernant la justification, au fond, de la mesure de placement, il se dégage de l’article 15, paragraphe 1er de la loi précitée du 28 mars 1972 que lorsque l’exécution d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 ou 12 de la même loi est impossible en raison des circonstances de fait, l’étranger peut, sur décision du ministre de la Justice, être placé dans un établissement approprié à cet effet pour une durée d’un mois. Il convient partant, en l’espèce et dans un premier temps de vérifier l’existence d’une mesure d’expulsion ou de refoulement légalement prise ainsi que l’impossibilité d’exécuter cette mesure, étant donné qu’il s’agit des conditions préalables à la légalité de toute décision de placement, au sens de l’article 15, alinéa 1er de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée.

Il est constant en cause que la mesure de placement n’est pas basée sur une décision d’expulsion. Il convient partant d’examiner si la mesure en question est basée sur une mesure de refoulement qui, en vertu de l’article 12 de la loi précitée du 28 mars 1972 peut être prise « sans autre forme de procédure que la simple constatation du fait par un procès-verbal » à l’égard d’étrangers non autorisés à résidence,« … 1. qui sont trouvés en état de vagabondage ou de mendicité ou en contravention à la loi sur le colportage, 2. qui ne disposent pas de moyens suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, 3. auxquels l’entrée dans le pays a été refusée en conformité de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 .

4. qui ne sont pas en possession des papiers de légitimation prescrits et de visa si celui-ci est requis;

5. qui, dans les hypothèses prévues à l’article 2, paragraphe 2 de la Convention d’application de l’Accord de Schengen, sont trouvés en contravention à la loi modifiée du 15 mars 1983 sur les armes et munitions ou sont susceptibles de compromettre la sécurité, la tranquillité ou l’ordre publics ».

En l’espèce, il ressort des éléments du dossier administratif, et plus particulièrement de ses antécédents judiciaires, que le demandeur est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité ou l’ordre publics, de sorte que les conditions justifiant un refoulement se trouvèrent réunies au moment de la décision de placement du 28 août 2002.

D’autre part, il est encore constant qu’en date du 28 août 2002, l’administration était en droit de procéder à des mesures de vérification ainsi qu’à l’organisation des modalités juridiques et pratiques nécessaires en vue du rapatriement de l’intéressé.

L’ensemble de ces démarches nécessitant un certain délai, il a dès lors valablement pu être estimé que sur base de toutes les circonstances de fait exposées ci-avant, l’exécution immédiate de la mesure d’éloignement était impossible.

Le demandeur conteste encore l’existence dans son chef d’un danger réel de soustraction à la mesure d’éloignement ultérieure en faisant valoir que pareil danger ne résulterait pas du dossier administratif.

Il ressort cependant des éléments du dossier soumis au tribunal que le demandeur a déclaré résider en France à F-81300 Graulhet, 1, Passage Gustave Charpentier, mais qu’un refus de séjour pour la France lui avait été notifié par les autorités françaises en date du 24 janvier 2002. Pour le surplus, il ressort encore d’une attestation de détention que le demandeur fut emprisonné à la prison de Lantin en Belgique du 19 février 2002 au 16 mai 2002 avant de venir au Luxembourg.

Ces éléments démontrent dès lors que le demandeur se déplace régulièrement d’un pays à l’autre tout en se trouvant en situation irrégulière et en y commettant des faits répréhensibles, de sorte que la réalité d’un danger de soustraction à la mesure de refoulement prise à son égard existe.

Le demandeur ne saurait non plus soutenir que les autorités compétentes n’auraient pas fait tous les efforts et effectué toutes les démarches nécessaires en vue d’assurer que la mesure d’éloignement du demandeur puisse être exécutée sans retard, dans les délais les plus brefs, étant donné qu’il ressort du dossier administratif que la demande reprise a été envoyée aux autorités belges le jour même de la libération du demandeur, soit le 28 août 2002 et qu’un rappel a été adressé aux autorité belges de nouveau en date 17 septembre 2002. Ayant obtenu une réponse des autorités belges suivant courrier erronément daté au 30 août 2002, mais envoyé par téléfax en date du 17 septembre 2002, le ministère de la Justice luxembourgeois a demandé au service de police judiciaire, service des étrangers, l’organisation d’urgence de l’éloignement de l’intéressé vers la Belgique en date du même 17 septembre 2002, mesure exécutée le 20 septembre 2002. Ce délai ne saurait en aucun cas être qualifié d’excessif et il n’est pas non plus justifié de reprocher aux autorités luxembourgeoises de ne pas avoir organisé le refoulement de l’intéressé vers la Belgique déjà à partir du mois de mai 2002, étant donné que ce dernier ne fut condamné qu’en date du 19 juillet 2002 à une peine de d’emprisonnement de 6 mois dont 3 mois assortis avec sursis et que le service de l’exécution des peines n’avait pris la décision de libérer Monsieur … qu’en date du 28 août 2002.

Finalement le demandeur critique encore le caractère disproportionné de son placement au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, en ce que ce dernier ne constituerait pas un établissement approprié au sens de l’article 15 de la loi prévisée du 28 mars 1972 et qu’il se trouverait dans un tel état de détresse psychologique qu’il n’aurait pas la force de faire face à un milieu aussi inhumain que la prison.

L’incarcération dans un centre pénitentiaire d’une personne sous le coup d’une mesure de placement, non poursuivie ou condamnée pour une infraction pénale, ne se justifie qu’au cas où cette personne constitue en outre un danger pour la sécurité, la tranquillité ou l’ordre publics. Une telle mesure est en effet inappropriée dans tous les cas où la personne visée par elle ne remplit pas les conditions précitées et qu’elle peut être retenue et surveillée par le gouvernement d’une autre manière afin d’éviter qu’elle se soustraie à son éloignement ultérieur.

Dans la mesure où il se dégage des éléments ci-avant relevés que le demandeur n’a pas hésité par le passé à se déplacer aisément en situation irrégulière d’un pays à l’autre, et que lors de ces déplacements il a par ailleurs commis des faits sanctionnés pénalement, à la fois en Belgique et au Luxembourg, c’est à juste titre que le ministre a pu considérer son comportement comme étant celui d’un étranger susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité ou l’ordre publics, de manière à justifier son placement au Centre Pénitentiaire de Luxembourg afin d’éviter qu’il porte atteinte à la sécurité et à l’ordre public et pour garantir qu’il soit à la disposition des autorités en vue de son éloignement ultérieur. Le placement du demandeur au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig n’est dès lors pas à considérer comme une mesure disproportionnée tel que soutenu par le demandeur.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé et que le demandeur est à en débouter.

PAR CES MOTIFS, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais ;

Ainsi jugé par et prononcé à l’audience publique du 25 septembre 2002 par:

Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge M. Spielmann, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 15258
Date de la décision : 25/09/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-09-25;15258 ?

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