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10/07/2002 | LUXEMBOURG | N°s13710,14275

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 juillet 2002, s13710,14275


Tribunal administratif N°s 13710 et 14275 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 6 juillet et 7 décembre 2001 Audience publique du 10 juillet 2002 Recours formés par M. …, …, contre deux décisions du ministre des Travaux publics en matière de voirie

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JUGEMENT

I.

Vu la requête déposée le 6 juillet 2001 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, gérant de sociÃ

©té, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de...

Tribunal administratif N°s 13710 et 14275 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 6 juillet et 7 décembre 2001 Audience publique du 10 juillet 2002 Recours formés par M. …, …, contre deux décisions du ministre des Travaux publics en matière de voirie

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JUGEMENT

I.

Vu la requête déposée le 6 juillet 2001 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, gérant de société, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Travaux publics du 23 mai 2001 portant refus d’une permission de voirie ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 31 octobre 2001;

Vu le mémoire en réplique déposé le 7 décembre 2001 au nom de M. G. …;

II.

Vu la requête déposée le 7 décembre 2001 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, préqualifié, au nom de M. …, préqualifié, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision implicite de refus du ministre des Travaux publics « concernant une demande de permission de voirie en vue de l’extension d’un hall commercial sis à …, datée du 29 mars 2000, réitérée le 7 juillet 2000 » ;

I. et II.

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge rapporteur en son rapport ainsi que Maître James JUNKER et M. le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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M. … est propriétaire d’un local commercial situé à L….

Les 29 mars et 7 juillet 2000, M. … sollicita, par l’intermédiaire de son architecte, une permission de voirie auprès de l’administration des Ponts et Chaussées pour un « projet d’extension d’un hall industriel » sis à l’adresse pré-indiquée.

La demande en question a été enregistrée sous le numéro 1414/00 suivant courrier du 18 avril 2000 de l’ingénieur conducteur principal, préposé du service régional Bettembourg de l’administration des Ponts et Chaussées, division des services régionaux de la voirie.

En date du 23 octobre 2000, M. … s’adressa au ministre des Travaux publics afin d’obtenir l’autorisation d’ériger un panneau indicatif en remplacement des enseignes qui avaient été autorisées le 29 juin 1994 par le prédit ministre.

Par lettre du 8 juin 2001, l’administration des Ponts et Chaussées informa M. … que par décision du 23 mai 2001, le ministre des Travaux publics avait réservé une suite négative à la demande de permission de voirie. Cette lettre est libellée comme suit : « Suite aux demandes des 29 mars 2000 et 7 juillet 2000 introduites en votre nom par l’architecte A. G. et à votre demande du 23 octobre 2000 sollicitant l’octroi des permissions de voirie relatives au remplacement d’enseignes publicitaires et à l’extension d’un hall industriel avec maintien d’une bande de stationnement construite illégalement le long de la N 13 à … aux abords de vos établissements, j’ai le regret de vous informer que Madame la ministre des Travaux publics, par sa décision du 23 mai 2001, n° 1414/00, vient de réserver une suite défavorable à l’installation d’une nouvelle enseigne publicitaire et au maintien de la bande de stationnement qui est à supprimer dans les plus bref délais ».

Le 6 juillet 2001, M. … a introduit un recours portant le numéro 13710 du rôle et tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 23 mai 2001, portée à sa connaissance par un courrier de l’administration des Ponts et Chaussées du 8 juin 2001.

Par requête déposée en date du 7 décembre 2001, il a introduit un recours portant le numéro 14275 du rôle et tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision implicite de refus du ministre des Travaux publics « concernant une demande de permission de voirie en vue de l’extension d’un hall commercial sis à …, datée du 29 mars 2000, réitérée le 7 juillet 2000 ». Il précise que ce recours n’est introduit qu’à titre subsidiaire par rapport au recours introduit le 6 juillet 2001, en ce que le tribunal ne devrait y statuer qu’au cas où il arriverait à la conclusion que les demandes en obtention d’une permission de voirie introduites en date des 29 mars et 7 juillet 2000 n’auraient pas fait l’objet d’une réponse de la part du ministre des Travaux publics.

Etant donné que les affaires portant les numéros 13710 et 14275 du rôle ont trait à des actes émis par le ministre des Travaux publics, dans le cadre d’une demande tendant à obtenir une permission de voirie au sujet d’un même projet immobilier, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de les joindre pour y statuer par un seul et même jugement.

A l’appui du recours introduit sous le numéro 13710 du rôle, le demandeur invoque une motivation insuffisante de la décision ministérielle de refus du 23 mai 2001, matérialisée par la lettre du 8 juin 2001. Il estime que le refus se fonderait sur l’existence d’une bande de stationnement illégale, alors que cette bande de stationnement aurait pourtant été expressément reconnue par un tableau des emprises dressé par l’administration des Ponts et Chaussées en date du 14 mars 1983. A cela s’ajouterait que la configuration des lieux rendrait indispensable cette bande de stationnement.

Le délégué du gouvernement fait valoir que M. … aurait obtenu le 31 mai 1994 une permission de voirie en vue d’installer une enseigne lumineuse sur la façade de son commerce situé à …. Le 22 décembre 1996, le ministre des Travaux publics aurait refusé d’accorder à M. … une permission de voirie pour aménager un accès direct vers son local de commerce et des emplacements de stationnement le long de la route N 13. Cette décision ministérielle a été confirmée par un jugement du tribunal administratif du 29 juin 1998 qui a retenu pour droit que l’accès vers l’entreprise « Installations Electriques … » par la seule zone artisanale serait bien signalé par un panneau spécial sur lequel il lui appartiendra de faire figurer son enseigne.

Le tribunal a encore retenu, après avoir effectué une visite des lieux, que « c’est à bon droit que la construction d’un chemin d’accès à partir de la rue des Trois Cantons et d’une aire de stationnement a été refusée à la demanderesse, de sorte que le recours laisse d’être fondé ».

Le délégué du gouvernement ajoute que l’octroi de l’autorisation d’implanter un panneau de signalisation devant son commerce risquerait d’inciter les clients de M. … de stationner devant l’immeuble, alors qu’ils devraient se stationner derrière celui-ci, de sorte que ce serait à bon droit que le ministre a refusé cette autorisation pour des motifs tenant à la sécurité des usagers de la route.

Dans son mémoire en réplique, M. … soutient que tous les éléments du dossier seraient concordants « pour retenir que la permission de voirie sollicitée pour l’extension du hall industriel ne concerne pas la zone industrielle « … », mais a trait au …, rue … ».

Il soutient encore que la décision de refus matérialisée par la lettre précitée du 8 juin 2001 concernerait bien la demande en obtention d’une permission de voirie pour l’extension du hall industriel, malgré l’affirmation contenue dans le courrier du ministre des Travaux publics du 25 juillet 2001, soutenant que son refus ne concernait pas la demande de permission de voirie pour l’extension du hall industriel. Il considère que dans la mesure où aucun motif, justifiant la décision litigieuse, ne serait avancé par le ministre des Travaux publics, son recours serait fondé.

Il précise enfin que son recours ne viserait pas la décision ministérielle dans la mesure où celle-ci a refusé la permission de voirie en vue d’implanter un panneau de signalisation devant le hall industriel.

Dans la mesure où le recours introduit sous le numéro 14275 du rôle n’est que subsidiaire par rapport au recours introduit sous le numéro 13710, il convient d’analyser en premier lieu la compétence du tribunal et la recevabilité du recours par rapport à la première requête introductive d’instance.

Conformément à l’article 4 alinéa 2 de la loi modifiée du 13 janvier 1843 sur les autorisations de faire des constructions ou des plantations le long des routes, qui prévoit un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision ministérielle litigieuse.

Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est partant irrecevable.

Il convient ensuite d’analyser la recevabilité du recours, dans la mesure où il ressort de deux lettres du ministre des Travaux publics, émises respectivement les 25 juillet et 3 octobre 2001, que le refus de permission de voirie portant la référence numéro 1414/00 « ne concerne pas l’agrandissement de la surface du hall industriel de M. … ».

Au cours de l’audience fixée pour plaidoiries, et sur demande afférente du tribunal, le mandataire de la partie demanderesse a précisé que la demande en obtention d’une permission de voirie ne porterait pas sur une bande de stationnement et il demande en outre acte, tel que précisé dans son mémoire en réplique, qu’il ne conteste pas la décision du ministre en ce qu’il refuse à son mandant l’installation d’un panneau de publicité. Il affirme que l’objet de la demande de M. … aurait été d’obtenir une permission de voirie pour son projet d’agrandissement du hall industriel. Ce projet nécessiterait, outre un permis de construire, une telle permission de voirie, dans la mesure où les travaux en question se feraient le long d’une route nationale. La permission de voirie serait dès lors « uniquement nécessaire pour les besoins du chantier et la circulation des engins de chantier ».

Il y a lieu de donner acte au demandeur de ce qu’il accepte la décision du ministre dans la mesure où il refuse l’installation d’une nouvelle enseigne publicitaire le long de la route N 13 ainsi que de la bande de stationnement, dans la mesure où sa demande n’aurait pas porté sur une telle bande, de sorte qu’il n’y a plus lieu d’examiner le bien fondé de la décision litigieuse en ce qui concerne l’enseigne et la bande de stationnement et le recours devient sans objet sous ce rapport.

S’il est encore vrai que les demandes introduites en date des 29 mars et 7 juillet 2000 par l’architecte de M. … portaient sur une permission de voirie pour le projet d’extension du hall industriel sis à …, il n’en demeure pas moins que le ministre n’y a pas pris position, alors qu’il estimait erronément que lesdites demandes, formulées de façon très vague, portaient sur l’aménagement d’une bande de stationnement le long de la route N 13 ainsi que sur un panneau publicitaire.

Force est donc de constater que la décision litigieuse n’entend pas répondre aux demandes introduites les 29 mars et 7 juillet 2000, tel que cela ressort également des courriers du ministre des 25 juillet et 3 octobre 2001, de sorte que le recours, en tant qu’il est dirigé contre la décision ministérielle du 23 mai 2001, est irrecevable faute de décision sur ce volet.

En effet, le ministre a seulement pris position par rapport au volet de la demande de M. … du 23 octobre 2000, demande à laquelle ce dernier a entre temps renoncé, tel que cela se dégage des développements qui précèdent.

Au vu de l’irrecevabilité du recours introduit sous le numéro 13710 du rôle, il incombe au tribunal d’analyser la requête introduite sous le numéro 14275 du rôle et tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision implicite de refus du ministre résultant du silence gardé par celui-ci pendant plus de 3 mois suite aux demandes de permission de voirie introduites les 29 mars et 7 juillet 2000.

L’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, quoi que valablement informé par une notification par la voie du greffe du dépôt de la requête introductive d’instance du demandeur, n’a pas fait déposer de mémoire en réponse. Nonobstant ce fait, ce volet de l’affaire sous examen est néanmoins réputé jugé contradictoirement en vertu de l’article 6 de la loi précitée du 21 juin 1999.

Comme la loi prévoit un recours au fond en la matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal. Le recours subsidiaire en annulation est partant irrecevable.

Le recours ayant par ailleurs été introduit dans les délai et formes de la loi, il est recevable.

S’il est vrai que la demande introduite par M. … mélangeait différents volets et qu’il était difficile d’en dégager le volet sous examen, il n’en reste pas moins que l’administration n’a, à aucun moment, sollicité des précisions additionnelles, comme elle aurait dû le faire, de sorte qu’eu égard aux éléments de fait soumis au cours d’instance au tribunal, il y a lieu de retenir que, confronté à deux demandes, qui sont restées sans réponse de la part du ministre des Travaux publics, et en l’absence d’une prise de position du délégué du gouvernement dans le délai légal, le tribunal n’est pas en mesure de vérifier le caractère légal et réel des motifs qui sous-tendraient le cas échéant la décision de refus implicite, résultant du silence gardé pendant plus de 3 mois par le ministre à la suite des deux demandes introduites respectivement les 29 mars et 7 juillet 2000.

Il suit des considérations qui précèdent qu’au vu de l’impossibilité pour la juridiction saisie d’exercer son contrôle sur le bien-fondé de la décision de refus d’accorder une permission de voirie pour un projet d’extension d’un hall industriel, dans la mesure où le refus résultant du silence est par nature dépourvu de toute motivation, la décision implicite de refus, même dans le cadre d’un recours en réformation, encourt l’annulation pour défaut de motivation.

Le demandeur réclame l’allocation d’une indemnité de procédure de 30.000.- francs sur base de l’article 240 du nouveau code de procédure civile.

Abstraction faite de ce que la base légale pour l’allocation d’une indemnité de procédure se trouve dans l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il n’y a pas lieu de faire à la demande en obtention d’une indemnité de procédure de 30.000.- francs, soit 744 euros, dans la mesure où les conditions légales en vue de son obtention ne sont pas remplies en l’espèce.

Dans la mesure où le recours introduit sous le numéro 13710 du rôle est devenu sans objet et que le recours introduit sous le numéro 14275 du rôle est fondé et aboutit à l’annulation de la décision litigieuse, il convient de faire masse des frais et de les imposer pour moitié au demandeur et pour l’autre moitié à l’Etat.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

joint les recours introduits sous les numéro 13710 et 14275 du rôle ;

se déclare compétent pour connaître du recours en réformation introduit sous le numéro du rôle 13710 ;

donne acte au demandeur qu’il accepte la décision ministérielle du 23 mai 2001 dans la mesure où le ministre refuse l’installation d’une nouvelle enseigne le long de la route N 13 et d’une bande de stationnement le long de la prédite route ;

dit que le recours est devenu sans objet dans cette mesure ;

pour le surplus, le déclare irrecevable ;

déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;

se déclare compétent pour connaître du recours en réformation introduit sous le numéro 14275 du rôle ;

le reçoit en la forme ;

au fond, le déclare justifié;

partant, dans le cadre du recours en réformation, annule la décision implicite de refus du ministre résultant du silence gardé par celui-ci pendant plus de 3 mois suite aux demandes de permission de voirie introduites les 29 mars et 7 juillet 2000 et renvoie le dossier au ministre des Travaux publics;

déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;

rejette la demande en obtention d’une indemnité de procédure d’un montant de 744.-

euros au profit du demandeur;

fait masse des frais et les impose pour moitié au demandeur et pour l’autre moitié à l’Etat .

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 10 juillet 2002, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : s13710,14275
Date de la décision : 10/07/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-07-10;s13710.14275 ?

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