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08/07/2002 | LUXEMBOURG | N°14086

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juillet 2002, 14086


Tribunal administratif N° 14086 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 octobre 2001 Audience publique du 8 juillet 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre un arrêté grand-ducal, et des décisions du Gouvernement en conseil et du ministre de la Défense en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14086 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 octobre 2001 par Maître Monique WATGEN,

avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, maj...

Tribunal administratif N° 14086 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 octobre 2001 Audience publique du 8 juillet 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre un arrêté grand-ducal, et des décisions du Gouvernement en conseil et du ministre de la Défense en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14086 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 octobre 2001 par Maître Monique WATGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, major de l’armée luxembourgeoise (grade A11), demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision de rejet prise par le Conseil de Gouvernement portant refus de faire droit à sa réclamation du 25 janvier 2000, suite au refus implicite du ministre de la Défense de réformer une décision du chef d’état major de l’armée du 8 octobre 1999 portant refus dans le chef du demandeur de le nommer au grade de lieutenant-colonel, d’une décision de rejet implicite résultant du silence gardé par le ministre de la Défense suite à une réclamation adressée le 22 octobre 1999 à l’encontre de la prédite décision de refus du chef d’état major du 8 octobre 1999, d’une décision implicite de rejet du Conseil de Gouvernement suite à une nouvelle réclamation introduite en date du 8 juin 2000 et à l’encontre de l’arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998 portant nomination avec effet au 31 décembre 1998 au grade de lieutenant-colonel du major … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 29 octobre 2001, portant signification de ce recours au sieur …, lieutenant-colonel de l’armée, demeurant à L-…;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2002 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2002 par Maître Monique WATGEN au nom de Monsieur … ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en ses plaidoiries à l’audience publique du 11 mars 2002.

Vu la rupture du délibéré prononcée le 12 avril 2002 par le tribunal portant invitation des parties à prendre position sur la question de la recevabilité du recours, le cas échéant par un mémoire écrit à déposer au plus tard le 2 mai 2002 et pour permettre aux parties de verser des pièces supplémentaires ;

Vu le mémoire ampliatif déposé le 2 avril 2002 par Maître Monique WATGEN au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé par le délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 avril 2002 ;

Ouï Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en ses plaidoiries à l’audience du 6 mai 2002 ;

Vu la rupture du délibéré prononcée le 14 juin 2002 par le tribunal portant invitation des parties à prendre position sur la question d’ordre public de la compétence de l’autorité de nomination, le cas échéant par un mémoire écrit à déposer au plus tard le 27 juin 2002 ;

Vu le mémoire ampliatif déposé le 24 juin 2002 par Maître Monique WATGEN au nom de Monsieur … ;

Ouï Maître Monique WATGEN et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience du 1er juillet 2002 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Suivant arrêté grand-ducal du 25 octobre 1998, Monsieur … obtint sa nomination au grade de major de l’armée luxembourgeoise.

Suivant arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998, Monsieur …, major de l’armée luxembourgeoise, obtint sa nomination avec effet au 31 décembre 1998 au grade de lieutenant-colonel.

Par demande adressée en date du 9 septembre 1998 par la voie hiérarchique à l’adresse de Monsieur le colonel, chef d’état major de l’armée, le demandeur a sollicité de son supérieur hiérarchique de bien vouloir intervenir auprès des autorités compétentes afin de pouvoir bénéficier de la promotion au grade de lieutenant-colonel en date du 25 octobre 1999 et d’obtenir une reconstitution de carrière comprenant un rappel d’ancienneté dans le grade de lieutenant-colonel et un recalcul de son traitement et de son indemnité d’habillement annuelle pour la période du 31 décembre 1995 au 25 octobre 1998.

Il ressort d’un courrier du 8 octobre 1999 du chef d’état major de l’armée que ce dernier estima que le demandeur ne serait pas apte d’avancer au grade de lieutenant-colonel et qu’il fut uniquement disposé à « accorder une faveur de plus en faisant suivre avec avis favorable la demande de reconstitution de carrière comprenant un recalcul de votre traitement sur la base du grade de major (A11) ainsi qu’un recalcul de votre indemnité d’habillement pour la période du 31 décembre 1995 à aujourd’hui ». Par ce même courrier le chef d’état major informa encore Monsieur … que « si jamais vous arriviez à être en rang utile pour pouvoir être promu au grade de lieutenant-colonel, et si vos qualités professionnelles étaient celles d’aujourd’hui, une demande de suspension à l’avancement sera formulée à votre égard ».

Suivant courrier du 22 octobre 1999 à l’adresse de Monsieur le ministre de la Défense, Monsieur … fit usage de son droit de réclamation conformément au paragraphe 2 de l’article 33 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat et sollicita de nouveau sa promotion au grade de lieutenant-colonel ainsi que la reconstitution de sa carrière.

Suite au silence gardé par le ministre de la Défense, le demandeur, suivant courrier du 25 janvier 2000, fit usage de son droit de réclamation conformément au paragraphe 5 de l’article 33 précité auprès du « Conseil de Gouvernement co/Monsieur le Premier ministre ».

Il ressort d’un avis du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 3 mai 2000 que la revendication du demandeur tendant à sa promotion au grade de lieutenant-colonel, seul point actuellement soumis au tribunal, ne serait pas fondée. Le passage afférent de cet avis se lit comme suit : « En ce qui concerne tout d’abord la promotion au grade de lieutenant-colonel, il y a lieu de se reporter à l’article 15 du règlement grand-ducal modifié du 12 décembre 1974 fixant les conditions de recrutement, de formation et d’avancement des officiers de carrière de l’armée proprement dite qui dispose que « l’avancement au grade de lieutenant-colonel se fait au choix parmi les majors les plus anciens et les plus qualifiés ». Il ressort de cet article que la promotion au grade de lieutenant-colonel ne se fait pas, comme le sous-entend le requérant, à l’ancienneté, mais appartient au choix discrétionnaire de l’autorité de nomination sous la seule condition que ce choix s’opère parmi les officiers les plus anciens et les plus qualifiés. Par conséquent, les contestations du requérant relatives au dépassement en garde dont il aurait fait l’objet ne sont pas fondées dès lors que l’autorité de nomination n’est à aucun moment tenue de faire porter son choix sur l’officier le plus ancien pour la nomination au grade de lieutenant-

colonel et qu’elle dispose par ailleurs, sous réserve de respecter les conditions de l’article 15 précité, d’un pouvoir discrétionnaire de nommer aux fonctions de lieutenant-colonel. » Suivant courrier daté au 8 juin 2000 le demandeur, par l’intermédiaire de son mandataire, s’adressa une nouvelle fois au Premier ministre, suite à l’avis du ministre de la Fonction publique du 3 mai 2000 précité, en lui soumettant de nouvelles considérations à proposer au Gouvernement en Conseil en relation avec la réclamation présentée le 25 janvier 2000.

Monsieur … fut informé suivant courrier du 16 juin 2000 par le ministre de la Défense de ce qu’il a été décidé de ne pas faire droit à ses revendications de carrière pour n’être pas fondées et ce pour les raisons exposées dans l’avis précité du 3 mai 2000, tout en l’informant que le ministère d’Etat venait de transmettre copie du courrier précité de son mandataire du 8 juin 2000 (et non comme erronément indiqué du 9 juin 2000) et en concluant que « votre situation sera réexaminée notamment sur base des nouveaux arguments avancés ».

Suivant courrier du 8 juin 2001 à l’adresse de Monsieur le Premier ministre, le secrétaire d’Etat pour le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative confirme l’avis émis par ses services en date du 3 mai 2000, tout en estimant qu’il serait indispensable que la prise de position officielle du ministre de la Coopération et de la Défense, auquel appartiendrait le pouvoir de nomination du personnel de l’armée figure également au dossier.

En sa séance du 14 septembre 2001, le Conseil de Gouvernement a décidé de se rallier aux avis du ministre de la Fonction publique et du ministre de la Défense et de ne pas faire droit aux revendications de carrière formulées par Monsieur …. Il ne ressort cependant pas du dossier que cette nouvelle décision fut communiquée d’une façon ou d’une autre au demandeur.

Par requête déposée le 26 octobre 2001, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation contre l’arrêté grand-ducal précité du 21 décembre 1998, ainsi que contre la décision de rejet prise par le Conseil de Gouvernement suite à la réclamation lui adressée le 25 janvier 2000 à l’encontre du refus implicite du ministre de la Défense de réformer la décision du chef d’état major du 8 octobre 1999 pour autant que le volet relativement à la nomination au grade de lieutenant-colonel est concerné, contre une décision de rejet implicite résultant du silence gardé par le ministre de la Défense pendant plus de trois mois à la suite de la réclamation lui adressée le 22 octobre 1999 à l’encontre de la même décision de refus du chef d’état major du 8 octobre 1999, ainsi que contre la décision de rejet implicite résultant du silence gardé pendant plus de trois mois par le Conseil de Gouvernement suite à la nouvelle réclamation introduite en date du 8 juin 2000 par son mandataire.

Quant au recours en réformation :

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (cf. trib. adm. 28 mai 1997, n° 9667 du rôle, confirmé par arrêt du 10 octobre 1997, n° 10082C du rôle et autres références y citées, Pas. adm. 2001, V° Recours en réformation, n° 6).

Aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction en matière de promotion, le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.

Quant au recours en annulation :

Il échet tout d’abord de relever que la preuve d’une publication officielle au Mémorial B de l’arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998 portant nomination au grade de lieutenant-

colonel du major … n’a pas été rapportée, de même que n’a pas été rapportée la preuve d’une notification individuelle de cet arrêté grand-ducal au demandeur.

Comme l’administration n’a pas rapporté la preuve de la date à laquelle le demandeur a eu une connaissance adéquate de l’arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998, aucun délai n’a pu commencer à courir, de sorte que le recours en annulation à l’encontre du prédit arrêté grand-ducal est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Pour le surplus, il convient de constater que les autres décisions de rejet attaquées font parties d’un seul processus décisionnel tel que réglementé par l’article 33 de la loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, article de la teneur suivante :

« 1. Tout fonctionnaire a le droit de réclamer individuellement contre tout acte de ses supérieurs ou de ses égaux qui lèsent ses droits statutaires ou qui le blessent dans sa dignité.

Ce droit existe également si une demande écrite du fonctionnaire, introduite par la voie hiérarchique est restée sans suite dans le délai d’un mois.

2. La réclamation est adressée par écrit au supérieur hiérarchique. Si elle met en cause le supérieur direct du fonctionnaire, elle est adressée au chef d’administration. Si ce dernier est visé, la réclamation est envoyée au ministre du ressort.

3. Sous peine de forclusion, la réclamation doit être introduite dans les 15 jours à partir de la date de l’acte qu’elle concerne ou de l’expiration du délai visé à l’alinéa 2 du paragraphe 1er.

4. Le destinataire de la réclamation instruit l’affaire et transmet sa réponse motivée au réclamant. Le cas échéant, il prend ou provoque les mesures qui s’imposent pour remédier à la situation incriminée.

5. Si la réponse ne parvient pas au réclamant dans les trois mois de la réclamation ou si elle ne lui donne pas satisfaction, il peut saisir directement le ministre du ressort. Au cas où la réclamation a été adressée à celui-ci, le réclamant peut s’adresser au Gouvernement en conseil. » En l’espèce, il échet de constater que Monsieur … a adressé en date du 9 septembre 1999 une demande écrite à son chef d’administration, à savoir le chef d’état major. N’ayant obtenu satisfaction, le demandeur s’est adressé endéans le délai de 15 jours au ministre du ressort, à savoir le ministre de la Défense, par lettre du 22 octobre 1999. Comme le demandeur n’a enregistré aucune réponse de la part du ministre de la Défense endéans le délai de trois mois, il a saisi le Conseil de Gouvernement de sa réclamation suivant courrier du 25 janvier 2000.

Suivant courrier du 16 juin 2000 du ministre de la Défense, le demandeur fut informé par la voie hiérarchique qu’il a été décidé de ne pas faire droit à ses revendications de carrière, tout en laissant entendre que sa situation sera réexaminée notamment sur base de nouveaux arguments avancés. Il ressort encore de l’extrait du procès-verbal n° 32/01, approuvé dans la séance du 20 septembre 2001, que le Conseil de Gouvernement, après réexamen du dossier, a décidé en sa séance du 14 septembre 2001 de ne pas faire droit aux revendications de carrière formulées par Monsieur ….

Une demande d’annulation introduite par un fonctionnaire contre une décision le concernant ne peut être introduite qu’après épuisement du recours spécial institué par l’article 33 du statut général des fonctionnaires de l’Etat (cf. trib. adm. 19 février 1992, n° 9257 du rôle, et autre jurisprudence y citée, Pas adm. 2001, V° Fonction publique, n° 199).

Une demande d’annulation ne peut être dirigée que contre les décisions rendues en dernier ressort ou devenues définitives par l’épuisement des instances hiérarchiques ou tutélaires formellement prévues par les lois et règlements (cf. trib. adm. 19 février 1992, précité, Pas. adm. 2001, V° Actes administratifs, n° 20).

Etant donné que la décision du Conseil de Gouvernement du 26 mai 2000, rendue après épuisement des recours hiérarchiques et portée à la connaissance du demandeur suivant courrier du ministre de la Défense du 16 juin 2000, ne contient aucune indication quant aux voies de recours ouvertes contre elle et comme pour le surplus elle laisse entendre que de toute façon la situation du demandeur serait réexaminée sur base des nouveaux arguments avancés, aucun délai pour exercer un recours contentieux contre elle n’a pu commencer à courir.

Il en est a fortiori de même concernant la décision de rejet implicite subséquente du Conseil de Gouvernement, étant donné que la « nouvelle » décision du 14 septembre 2001, transcrite dans un procès-verbal n° 32/01 et approuvée dans la séance du Conseil de Gouvernement du 20 septembre 2001, assortie de la mention « à usage administratif interne », apparemment transmise au ministre de la Défense pour information, n’a, d’après le dossier, jamais été portée à la connaissance du demandeur.

Il convient encore de relever à ce stade, contrairement à l’affirmation du délégué du Gouvernement dans son mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 avril 2002, suite à la rupture du délibéré du 12 avril 2002, que la réclamation du demandeur du 22 mars 2001 ne saurait être qualifiée de recours gracieux à l’encontre de la prédite décision du Conseil de Gouvernement du 26 mai 2000, alors que ce courrier ne visait nullement cette décision et ne pouvait d’ailleurs pas la viser, étant donné que le Conseil de Gouvernement n’avait pas encore procédé au réexamen de la situation de Monsieur … tel que annoncé dans le prédit courrier du ministre de la Défense du 16 juin 2000.

Il s’ensuit que le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi à l’encontre de la décision du Conseil de Gouvernement du 26 mai 2000, tel que ressortant du courrier du ministre de la Défense du 16 juin 2000. Le recours en annulation n’est cependant pas recevable pour autant qu’il a été dirigé contre la décision de rejet implicite du ministre de la Défense, étant donné qu’en la présente matière, une demande en annulation n’est recevable que contre la décision rendue en dernier ressort, suite à l’épuisement des instances hiérarchiques.

Le recours en annulation est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi à l’encontre de la décision de rejet implicite résultant du silence gardé pendant plus de trois mois par le Conseil de Gouvernement à la suite de la réclamation introduite en date du 8 juin 2000 par le mandataire du demandeur.

Quant à l’intérêt à agir du demandeur pour autant que son recours est dirigé contre l’arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998 portant nomination au grade de lieutenant-colonel du major…, le tribunal tient d’abord à relever qu’un recours contentieux est ouvert à toute personne qui peut être affectée indirectement par une décision administrative adressée à une autre personne, dès lors que cette décision est susceptible de lui causer préjudice. A ce titre, il est nécessaire que le demandeur puisse se prévaloir d’une lésion à caractère individualisé et retirer de l’annulation une satisfaction certaine et personnelle. L’intérêt à agir implique un lien personnel avec l’acte et une lésion individuelle par le fait de l’acte. (cf. trib. adm. 16 juillet 1997, n° 9626 du rôle et autres références y citées, Pas. adm. 2001, V° Procédure contentieuse, n° 24).

Or, en l’espèce, force est de constater que le demandeur n’entend pas tirer de l’annulation du prédit arrêté grand-ducal une satisfaction certaine et personnelle. En effet, le demandeur est lui-même en aveu qu’au moment de la nomination du lieutenant-colonel … en date du 21 décembre 1998 il ne remplissait pas la condition relative au délai d’attente entre deux promotions, étant donné qu’il n’avait été nommé au grade de major que suivant arrêté grand-ducal du 25 octobre 1998. Pour le surplus, dans le cadre de ses différentes réclamations, le demandeur n’a jamais sollicité que le lieutenant-colonel … soit « dégradé » et sorti du grade de lieutenant-colonel, mais au contraire il a sollicité la reconstitution de sa carrière soit par la mise hors cadre d’un autre lieutenant-colonel du cadre de l’armée proprement dite, soit par sa propre mise hors cadre. Finalement, aucun moyen d’annulation n’a été développé en cours de procédure contentieuse à l’encontre de l’arrêté grand-ducal de nomination du 21 décembre 1998 du major … au grade de lieutenant-colonel, de sorte que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt pour autant qu’il est dirigé contre le prédit arrêté grand-ducal.

Concernant la question d’ordre public soulevée par le tribunal dans sa rupture de délibéré du 14 juin 2002 sur la compétence de l’autorité de nomination, il est établi en cause que la demande de promotion du demandeur au grade de lieutenant-colonel n’a pas été continuée au chef de l’Etat.

Or, aux termes l’alinéa 1er de l’article 35 de la Constitution, « le Grand-Duc nomme aux emplois civils et militaires, conformément à la loi, et sauf les exceptions établies par elle ».

De même la loi modifiée du 23 juillet 1952 concernant l’organisation militaire énonce en son article 11 (1) que « les officiers et l’infirmier gradué sont nommés et promus par le Grand-Duc », et encore à travers l’alinéa second de son article 12 que « l’affectation ou le changement d’affectation des officiers est faite par le Grand-Duc », tandis que la même loi prévoit que les sous-officiers de carrière, les infirmiers diplômés et les caporaux sont nommés et promus par le ministre (alinéa second de l’article 11 (1)) de même que ce dernier est compétent pour ce qui est de l’affectation ou du changement d’affectation des sous-officiers et des caporaux (article 12 alinéa second, deuxième phrase).

Dès lors conformément aux dispositions légales précitées, la demande de promotion de Monsieur … formulée à travers ses différents courriers et réclamations tendant à l’accès au garde de lieutenant-colonel dans la carrière de l’officier relève de la compétence exclusive du Grand-Duc.

Il s’ensuit que la décision du Conseil de Gouvernement du 16 mai 2000, de même que la décision de rejet implicite ultérieure du Conseil de Gouvernement encourent l’annulation pour ne pas émaner du chef de l’Etat, seul compétent concernant la demande de promotion de Monsieur ….

Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation irrecevable pour autant qu’il est dirigé contre l’arrêté grand-ducal du 21 décembre 1998 portant nomination avec effet au 31 décembre 1998 au grade de lieutenant-colonel du major … ;

reçoit le recours en annulation pour le surplus en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision de rejet du Conseil de Gouvernement du 26 mai 2000 communiquée suivant courrier du ministre de la Défense du 16 juin 2000 ainsi que la décision implicite de rejet subséquente du Conseil de Gouvernement ;

renvoie l’affaire devant le ministre de la Défense en vue de sa transmission au Grand-

Duc ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 juillet 2002 par :

Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge M. Spielmann, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Lenert 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 14086
Date de la décision : 08/07/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-07-08;14086 ?

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