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08/07/2002 | LUXEMBOURG | N°13600

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juillet 2002, 13600


Tribunal administratif N° 13600 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 juin 2001 Audience publique du 8 juillet 2002 Recours formé par l’association sans but lucratif …, Luxembourg et 31 consorts contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme …, … en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13600 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 juin 2001 par Ma

tre Pol URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom d...

Tribunal administratif N° 13600 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 juin 2001 Audience publique du 8 juillet 2002 Recours formé par l’association sans but lucratif …, Luxembourg et 31 consorts contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme …, … en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13600 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 juin 2001 par Maître Pol URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de 1) l’association sans but lucratif …, établie et ayant son siège social à L-…, Mesdames et Messieurs 2) 32), tendant à la réformation de l’arrêté du ministre de l’Environnement du 24 avril 2001, référencé sous le numéro 1/00/0151, portant autorisation dans le chef de la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L-4801 Rodange, Zone Industrielle, de procéder à la modification de son usine pour la fabrication d’étiquettes autocollantes située dans la zone industrielle du P.E.D. à Rodange sur un terrain inscrit au cadastre de la commune de Pétange, section B de Lamadeleine, au lieu-dit « Im grossen Brill » sous le numéro 1158/3915, comprenant notamment une unité de production supplémentaire avec aires de stockage et bâtiment administratif ;

Vu les exploits de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 27 juin 2001 portant signification de ce recours respectivement à l’administration communale de Pétange et à la société anonyme … S.A.;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 novembre 2001 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse à Maîtres Pol URBANY et Catherine DESSOY ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 novembre 2001 par Maître Victor ELVINGER, assisté de Maître Catherine DESSOY, avocats à la Cour, inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A. ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse à Maîtres Jean MEDERNACH et Pol URBANY ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 17 décembre 2001 par Maître Pol URBANY pour compte des demandeurs ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maîtres Jean MEDERNACH et Victor ELVINGER ;

Vu les exploits de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, préqualifié, du 7 janvier 2002 portant notification de ce mémoire en réplique respectivement à l’administration communale de Pétange et à la société anonyme … S.A. ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 janvier 2002 par Maître Jean MEDERNACH pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en duplique à Maîtres Victor ELVINGER et Pol URBANY ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le même 16 janvier 2002 par Maître Victor ELVINGER, assisté de Maître Catherine DESSOY, au nom de la société anonyme … S.A. ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en duplique à Maîtres Jean MEDERNACH et Pol URBANY ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision ministérielle entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Frank WIES, Catherine DESSOY et Gilles DAUPHIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 28 janvier 2002.

Vu l’avis de rupture du délibéré du 21 mars 2002 suivant lequel le tribunal a ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de conclure plus en avant au regard de la question de l’implantation précisée entre-temps du Lycée Technique Mathias Adam de Pétange dans les parages immédiats du site de l’établissement sous autorisation critiquée et a conféré l’autorisation aux parties de déposer un mémoire complémentaire dans les délais y impartis ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 avril 2002 par Maître Victor ELVINGER, assisté de Maître Catherine DESSOY, au nom de la société anonyme … S.A.

Vu les actes d’avocat à avocat du 22 avril 2002 portant notification de ce mémoire complémentaire à Maîtres Jean MEDERNACH et Pol URBANY ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 avril 2002 par Maître Jean MEDERNACH au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les actes d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire complémentaire à Maîtres Victor ELVINGER et Pol URBANY ;

Vu les pièces complémentaires versées au dossier ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maîtres Sophie DEVOCELLE, Catherine DESSOY et Gilles DAUPHIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 29 avril 2002.

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Considérant que par arrêté du ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement du 19 mars 1991, référencé sous le numéro C 62/90, la société FASSON LUXEMBOURG a été autorisée à exploiter une usine de fabrication d’étiquettes autocollantes installée sur un terrain situé dans la zone industrielle du Pôle Européen de Développement et inscrit au cadastre de la commune de Pétange, section B de Lamadeleine, au lieu-dit « Im grossen Brill », sous le numéro 1158/3915 ;

Que par arrêté du ministre de l’Environnement du 20 mai 1998 référencé sous le numéro 1/97/0318, la société … S.A., …, désignée ci-après par « la société … » a été autorisée à exploiter sur le même terrain une installation de traitement d’eaux usées industrielles ;

Considérant qu’en date du 13 avril 2000, la société … S.A. a présenté pour compte de la société … une demande en autorisation de procéder à une modification de son usine de fabrication d’étiquettes autocollantes sur le terrain prévisé consistant dans deux extensions projetées présentées comme suit :

- une extension I comprenant :

- une ligne de couchage d’une puissance électrique totale de 887 kW ;

- une machine de découpe d’une puissance électrique de 150 kVA ;

- une aire de stockage de matières premières comportant :

- 750 tonnes de papier frontal ;

- 610 tonnes de papier dorsal ;

- un dépôt d’adhésifs émulsions, stockés dans des cuves d’une contenance unitaire de 1.000 l, d’une capacité de stockage de 68.000 l ;

- un dépôt d’adhésifs UV Hotmelt, stockés dans des fûts d’une contenance unitaire de 220 l, d’une capacité de stockage de 2.640 l ;

- une aire de stockage de produits finis (papier adhésif) d’une capacité de stockage de 640 tonnes ;

- un laboratoire de contrôle qualité ;

- une installation de combustion fonctionnant au gaz naturel d’une puissance thermique de 408 kW ;

- un compresseur à air d’une puissance électrique de 75 kW ;

- cinq ponts roulants ;

- une extension II comprenant :

- une aire de stockage de produits finis d’une capacité de stockage de 520 tonnes ;

- un bâtiment administratif d’une surface totale de 2.600 m2 ;

Considérant que dans le cadre de l’enquête de commodo et incommodo menée, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Pétange a émis un avis défavorable en date du 24 novembre 2000, de même que des observations ont été présentées à l’égard du projet en question par un certain nombre d’intéressés ;

Qu’en date du 24 avril 2001, le ministre de l’Environnement a délivré à la société … l’autorisation par elle sollicitée sous la référence 1/00/0151 consistant dans la modification d’une usine pour la fabrication d’étiquettes autocollantes comprenant Désignation de l’activité Numéro de Classe Volume / Capacité de l’équipement / l’installation nomenclature  une extension comprenant :

 une ligne de couchage d’une puissance électrique A/C totale de 887 kW ;

 une machine de découpe d’une puissance A/C électrique de 150 kVA ;

 une aire de stockage de matières premières 262.2.b 1 comportant :

- 750 tonnes de papier frontal ;

- 610 tonnes de papier dorsal ;

 un dépôt d’adhésifs émulsions, stockés dans des 328.5 1 cuves d’une contenance unitaire de 1.000 l, d’une capacité de stockage 68.000 l ;

 un dépôt d’adhésifs UV Hotmelt, stockés dans des 328.5 1 fûts d’une contenance unitaire de 220 l, d’une capacité de stockage de 2.640 l ;

 262.2.b 1 une aire de stockage de produits finis (papier adhésif) d’une capacité de stockage de 640 tonnes ;

 A/C un laboratoire de contrôle qualité ;

 A/C une installation de combustion fonctionnant au gaz naturel d’une puissance thermique de 408 kW ;

 11.2 1 un compresseur à air d’une puissance électrique de 75 kW ;

 une extension II comprenant :

 une aire de stockage de produits finis d’une 262.2.b 1 capacité de stockage de 520 tonnes ;

 un bâtiment administratif d’une surface totale de 64.a.2 1 2.600 m2 ;

A/C = installations annexes et connexes tout en précisant que les cinq ponts roulants pour lesquels l’autorisation avait également été sollicitée n’étaient pas couverts par l’arrêté ministériel dont s’agit du fait que l’autorité compétente en la matière est le ministre du Travail et de l’Emploi ;

Que l’arrêté d’autorisation du 24 avril 2001 prévisé est assorti des clauses et conditions y plus amplement énoncées sous les points II à XII de son article 1er ;

Considérant que par requête introduite en date du 18 juin 2001, l’association sans but lucratif …, ainsi que Messieurs et Mesdames …, tous préqualifiés, ont fait introduire un recours en réformation dirigé contre l’autorisation du ministre de l’Environnement du 24 avril 2001 précitée ;

Considérant qu’il est constant qu’aucun recours contentieux n’a été introduit ni par les demandeurs ni par une quelconque autre partie intéressée contre l’arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi parallèlement délivré le 15 mai 2001 sur base de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés concernant l’extension de l’usine de fabrication d’étiquettes autocollantes de la société … dont s’agit ;

Considérant que bien que s’étant vu signifier le recours, l’administration communale de Pétange n’a pas fourni de mémoire, de sorte que conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le tribunal est appelé à statuer néanmoins à l’égard de toutes les parties par un jugement ayant les effets d’une décision contradictoire ;

Quant à l’admissibilité des mémoires fournis Considérant que dans leur mémoire en réplique les parties demanderesses déclarent se rapporter à prudence de justice quant à la recevabilité des mémoires en réponse déposés pour compte respectivement de l’Etat et de la société … successivement les 16 et 26 novembre 2001, eu égard notamment à leur dépôt au greffe du tribunal administratif dans le délai légal, ainsi qu’à leur signification aux parties demanderesses par ministère d’huissier dans le mois du dépôt ;

Considérant que la requête introductive d’instance a été déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 juin 2001 le dépôt au greffe valant signification à l’Etat suivant l’article 4 (3) de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée ;

Considérant que le mémoire en réponse pour compte de l’Etat a été déposé au greffe le 16 novembre 2001 et notifié par actes d’avocat à avocat aux mandataires respectifs des demandeurs ainsi que de la société … le même jour ;

Considérant que dans la mesure où la notification par acte d’avocat à avocat répond aux conditions posées par l’alinéa 1er de l’article 10 de ladite loi modifiée du 21 juin 1999, force est au tribunal de constater que le mémoire en réponse pour compte de l’Etat a été déposé et notifié dans le délai légal, compte tenu de la suspension des délais pour fournir un mémoire entre le 16 juillet et le 15 septembre prévue par l’article 5 (6) de ladite loi modifiée du 21 juin 1999 ;

Considérant que la même conclusion s’impose mutatis mutandis pour le mémoire en réponse déposé le 26 novembre 2001 pour compte de la société … et notifié par acte d’avocat à avocat le même jour aux mandataires respectifs des demandeurs et de l’Etat, étant donné que la signification du recours faite à la société … a eu lieu par exploit d’huissier du 27 juin 2001 ;

Que par voie de conséquence les deux mémoires en réponse en question n’encourent aucune critique quant à leurs délais de dépôt respectifs, ainsi que de communication aux parties adverses ;

Considérant que dans la mesure où les délais de fourniture des mémoires sont d’ordre public, le tribunal tient simplement à relever que le mémoire en réplique déposé le 17 décembre 2001 et signifié par acte d’huissier le 7 janvier 2002, soit plus d’un mois après l’expiration du dernier jour utile pour fournir un mémoire en réponse, n’encourt cependant pas non plus de critiques concernant son délai de fourniture et plus précisément de communication aux parties adverses dans la mesure où il a été notifié le même 17 décembre 2001 aux mandataires de l’Etat et de la société … suivant indications afférentes dans les mémoires en duplique respectifs ;

Quant à la recevabilité du recours Considérant que la société … fait plaider que le recours serait irrecevable alors que la requête introductive d’instance s’analyserait principalement en une demande en annulation et subsidiairement en une demande en réformation, étant donné que seul un recours de pleine juridiction serait possible en l’espèce et qu’il devrait être exercé en tant que tel à titre principal ;

Considérant qu’il est constant en cause qu’au vœu des dispositions de l’article 19 de la loi du 10 juin 1999 précitée, le tribunal est amené à statuer comme juge du fond en la matière ;

Considérant que contrairement aux affirmations la société … il résulte clairement du dispositif de la requête introductive d’instance qu’il est demandé au tribunal de « recevoir le présent recours en réformation en la forme, au fond le dire justifié » étant précisé par la suite qu’au fond, dans le cadre du recours en réformation introduit, les demandeurs concluent à titres principal, subsidiaire et très subsidiaire chaque fois à l’annulation de la procédure de commodo et incommodo ayant précédé la décision déférée et partant à celle de la décision elle-même pour violation respectivement de l’article 7, de l’article 6 alinéas 3 et 6 ainsi que de l’article 13.1 de ladite loi du 10 juin 1999 pour, en dernier ordre de subsidiarité et quant au fond, solliciter la réformation de l’arrêté ministériel dont s’agit ;

Considérant que dans la mesure où il est admis que dans le cadre du recours en réformation la juridiction administrative peut être amenée à procéder à l’annulation de la décision déférée alors qu’elle ne peut remédier à la situation et statuer plus loin au fond dans le cadre du recours en réformation introduit (cf. Cour adm. 13 mars 2001, Zurstrassen, n° 12956 C du rôle, non encore publié), le moyen soulevé manque en fait et en droit ;

Quant à l’intérêt à agir Considérant que tant l’Etat que la société … soulèvent l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir à la fois dans le chef de l’association sans but lucratif …, ainsi que dans celui des 31 autres parties demanderesses ;

Quant à l’intérêt à agir de l’a.s.b.l. … Considérant que relativement à l’intérêt à agir de l’association sans but lucratif … tant l’Etat que la société … font valoir que le recours resterait muet à ce sujet, ladite demanderesse ne justifiant pas d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général ;

Que dans la mesure où l’intérêt collectif en défense duquel l’association prétendrait agir, même conformément à son objet social, se confondrait avec intérêt général de la collectivité, le droit d’agir de l’association en question serait refusé, étant donné que de la sorte elle empiéterait sur les attributions des autorités étatiques, administratives ou répressives, auxquelles est réservée la défense de l’intérêt général ;

Qu’étant donné que le siège social de la personne morale … est déclaré être à Luxembourg, 6, rue Vauban, celle-ci ne pourrait pas non plus se prévaloir d’une proximité suffisante de son siège par rapport à l’établissement litigieux ;

Considérant que dans le cadre du mémoire en réplique, l’association sans but lucratif … déclare se rapporter à prudence de justice quant à la question de l’intérêt à agir dans son chef ;

Considérant que la décision déférée du ministre de l’Environnement a été rendue en matière d’établissements classés ;

Considérant qu’il est acquis en cause que l’association sans but lucratif Mouvement écologique s’est vue agréer par le ministre de l’Environnement sur base de l’article 43 de ladite loi modifiée du 11 août 1982, lequel dispose comme suit :

“ Les associations d’importance nationale dont les statuts ont été publiés au Mémorial et qui exercent depuis au moins trois ans leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de l’environnement peuvent faire l’objet d’un agrément du Ministre.

Les associations ainsi agréées peuvent être appelées à participer à l’action des organismes publics ayant pour objet la protection de la nature et des ressources naturelles.

En outre, ces associations peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constituant une infraction au sens de la présente loi et portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre, même si elles ne justifient pas d’un intérêt matériel et même si l’intérêt collectif dans lequel ils agissent se couvre entièrement avec l’intérêt social dont la défense est assurée par le ministère public ” ;

Considérant que si à travers l’article 43 alinéa 3 prérelaté le législateur a prévu dans le chef des associations agréées y visées la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile en matière pénale relativement aux infractions au sens de la loi modifiée du 11 août 1982, il n’a cependant pas par là-même ouvert de plano la possibilité pour lesdites associations d’agir contre des décisions administratives individuelles prises par le ministre compétent sur base de la même loi, tant le libellé clair du texte sous revue que son caractère exorbitant par rapport au droit commun en la matière s’opposant à pareille lecture extensive ;

Considérant que la possibilité prévue par l’alinéa second dudit article 43 également prérelaté, suivant laquelle les associations sont appelées à participer à l’action des organismes publics ayant pour objet la protection de la nature et des ressources naturelles dans tous ses aspects, de quelque législation qu’ils relèvent par ailleurs et quel que soit le contenu précis de la potentialité ainsi ouverte, se situe nécessairement en amont des actes décisionnels résultant de ce processus, lesquels continuent en toute occurrence à relever de la seule compétence des organismes publics concernés ;

Considérant qu’il est encore patent que le législateur, dans le cadre de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, a uniquement réglementé le droit d’agir des associations d’importance nationale agréées pour autant que l’action est dirigée contre un acte administratif à caractère réglementaire tirant sa base légale de la loi spéciale dans le cadre de laquelle l’association requérante a été agréée, tel que ce droit d’agir a été défini par son article 7 (2) ;

Considérant que ni ledit article 7, ni l’article 2 de la même loi traitant des recours en matière administrative contre les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements ne se prononcent expressément sur le droit d’agir des associations, fussent-elles agréées ou non ;

Considérant que le silence observé par le législateur à ce sujet n’en signifie cependant pas moins que la question du droit d’agir des associations à l’encontre de décisions administratives individuelles ne fût pas posée au cours de l’élaboration de ladite loi du 7 novembre 1996 et plus précisément de ses articles 2 et 7 ;

Que notamment la commission des institutions et de la révision constitutionnelle de la Chambre des Députés, en sa majorité, s’est posée la question “ s’il n’est pas opportun d’élargir la possibilité de recours à ces associations. La commission en sa majorité est cependant fermement opposée à toute possibilité de recours basé sur l’intérêt général, lequel recours “ Populaire ” risquerait de mettre en péril le fonctionnement normal de l’appareil étatique ” (cf. doc. parl. 39402 – 3940A, p. 6 ; v. aussi doc. parl. 39404 – 3940A2, p.3)) ;

Considérant que c’est dès lors de façon délibérée que la Chambre des Députés, en 1996, lors du vote de la réforme des juridictions de l’ordre administratif, à défaut de consensus politique, n’a point admis le droit d’agir en justice des associations dans la mesure de la défense de l’intérêt collectif spécifique par elles défendu, au-delà de leur intérêt personnel parallèle à celui d’une personne physique, tel celui d’un propriétaire immobilier voisin, en attendant un accord majoritaire à trouver dans le cadre d’une législation spécifique à édicter en la matière ;

Considérant que cette situation n’a pas autrement évolué depuis, encore qu’il convienne de confirmer la partie demanderesse en ce qu’elle relève que dans son avis du 22 avril 1999 adopté à l’occasion de l’élaboration de la loi du 10 juin 1999 précitée, formant le cadre légal essentiel de la décision ministérielle déférée, la commission de l’environnement et de l’aménagement du territoire de la Chambre des Députés a constaté que la problématique concernant les recours dirigés contre les décisions administratives à caractère individuel reste exactement la même après l’entrée en vigueur de la loi précitée du 7 novembre 1996, les plaintes des associations de protection de l’environnement risquant de rester irrecevables à l’encontre de décisions administratives individuelles, “ à moins que la jurisprudence des nouvelles juridictions administratives ne s’écarte de celle de l’ancien Comité du Contentieux du Conseil d’Etat ” (cf. doc. parl. 3837A5, p. 12);

Considérant que cet avis ne fait que refléter l’autonomie et l’indépendance du pouvoir judiciaire comportant sa liberté d’appréciation, étant entendu que celle-ci ne saurait s’exercer que dans le cadre légal tracé ;

Considérant qu’il importe de retenir à partir du même avis, que le législateur, bien qu’il en ait eu la possibilité et l’ait envisagé, s’est délibérément refusé jusqu’à ce jour à consacrer par un texte de droit positif dans le chef des associations un quelconque droit d’agir contre les autorisations individuelles pour la défense de l’intérêt général, étant donné qu’un accord politique n’a pas été trouvé en la manière ;

Qu’il résulte des documents parlementaires précités que de toute manière, dans le moyen terme, le législateur envisage, dans l’hypothèse où il sera amené à accorder le droit d’action en question aux associations, de le réglementer ;

Considérant qu’il est encore constant que le Luxembourg a certes signé la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998 sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, qui prévoit en son article 9, paragraphe 2, alinéa 2 un droit d’accès à la justice aux organisations non gouvernementales pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, de tout acte et de toute omission touchant l’environnement, mais qu’à l’heure actuelle ladite Convention n’a pas encore été approuvée par une loi et n’est partant point applicable à ce stade ;

Considérant que dans la mesure où le législateur a spécialement prévu la possibilité d’agréer des associations en vue de participer, dans l’intérêt général, à l’action des pouvoirs publics, l’intérêt de ces associations est a priori appelé à se confondre avec l’intérêt général, à moins que ne soit établie de façon parallèle l’existence d’éléments justifiant dans le chef de ladite association un intérêt spécifique ne s’identifiant pas avec l’intérêt général, telle la qualité de propriétaire d’immeubles riverains, et pouvant dès lors fonder un intérêt suffisant à agir également à l’encontre de décisions individuelles prises dans le cadre de la protection de la nature et des ressources naturelles (cf. trib. adm. 12 juillet 2000, n° 11322 du rôle, Greenpeace, Pas. adm. 2001, V° Procédure contentieuse, n° 29, p. 355, adde trois jugements trib. adm. 14 mars 2001, …, n°s 11940, 12152 et 12153 du rôle ; trib. adm. 27 juin 2001, Rausch, n° 12485 du rôle, confirmé par Cour adm. 17 janvier 2002, n°13800C du rôle) ;

Considérant qu’il est constant que le siège social de l’association sans but lucratif … se trouve à Luxembourg, 6, rue Vauban, tout comme cette dernière n’affirme pas en l’espèce justifier d’une situation de proximité par rapport à l’établissement concerné dont l’extension est autorisée à travers la décision déférée, de nature à fonder un intérêt personnel à agir dans son chef ;

Considérant qu’il reste que la demanderesse est en défaut d’alléguer, sinon a fortiori d’établir dans son chef un intérêt à agir distinct de l’intérêt général ;

Qu’il s’ensuit que le recours laisse d’être recevable dans le chef de l’association sans but lucratif … pour défaut d’intérêt à agir, abstraction faite de toute autre considération ayant trait à sa capacité pour agir ;

Quant à l’intérêt à agir des demandeurs, personnes physiques Considérant que tant l’Etat que la société … critiquent l’intérêt à agir des 31 autres demandeurs, personnes physiques, habitant à des distances variant entre 0,5 et 2,3 km de la ligne de production incriminée, en précisant qu’aucun des immeubles d’habitation des demandeurs ne longerait directement le terrain devant recueillir l’extension d’établissement autorisée à travers la décision déférée, tous étant des voisins plus éloignés ;

Qu’aucun des demandeurs ne présenterait, à travers l’argumentaire indifférencié proposé - malgré la distance variable et des localisations parfois diamétralement opposées par rapport à l’établissement dont s’agit - un lien suffisamment direct entre la décision administrative individuelle délivrée et sa situation personnelle ;

Que les demandeurs ne feraient état que de griefs d’ordre général restant sans incidence spéciale et certaine sur leur situation spécifique, à l’exception du bruit apparemment causé par l’usine existante ;

Que les mesurages effectués par le bureau d’études TÜV Rheinland démontreraient que le dépassement des normes fixées en période nocturne se concentre le long de la route de Luxembourg, endroit où aucun des demandeurs ne serait domicilié ;

Que la société … conteste formellement que l’exploitation de l’établissement en question, intégré dans une zone industrielle à caractère national, rattachée au Pôle Européen de Développement, puisse entraîner une aggravation concrète de la situation des demandeurs ;

Que l’Etat de souligner que l’usine en question serait séparée des zones d’habitation les plus rapprochées situées au sud par la Route Nationale 5 et par une voie de chemin de fer, étant constant que le site recueille d’ores et déjà de nombreuses autres industries ;

Qu’à titre subsidiaire, pour le cas où le recours serait déclaré recevable dans le chef des 31 demandeurs concernés, l’Etat estime qu’il y aurait lieu d’analyser encore l’intérêt par rapport aux moyens par eux présentés, renvoyant à l’analyse au fond pour celle de l’intérêt par rapport à chaque grief soulevé ;

Que les demandeurs de répliquer que du fait que le procédé de fabrication utilisé par la société … comporte le maniement et le stockage de nombreux produits chimiques d’un potentiel toxique certain, il y aurait un risque éventuel d’une pollution de l’air, que ce soit pendant le fonctionnement normal de l’usine ou, à plus forte raison, en cas de fuite ou d’autres accidents dans le système d’évacuation des airs ;

Que déjà sous ce seul aspect et en faisant même abstraction de la direction des vents dominants affirmée comme étant d’ouest en est dans la vallé de la Chiers, force serait de constater qu’une distance de 2.000 mètres, correspondant à la distance maximale séparant l’habitation d’un demandeur de l’extension projetée, serait absolument insuffisante pour conclure à l’absence de risque de pollution dans leur chef en provenance de la ligne de production projetée ;

Qu’ainsi, en France les autorités compétentes fixeraient systématiquement le rayon d’impact primaire d’un établissement classé à quelque trois kilomètres, afin de tenir compte de l’influence des vents sur le risque potentiel de pollution des airs ;

Que sous le seul aspect du risque de pollution des airs, sans préjudice quant aux nuisances sonores ou de pollution des sols, l’intérêt à agir des demandeurs, personnes physiques, serait vérifié en l’espèce, compte tenu de l’envergure de l’établissement dont s’agit pour lequel la surface des bâtiments du site serait doublée du fait de l’extension autorisée à travers la décision déférée ;

Que dans leur mémoire en duplique respectifs tant l’Etat que la société … de préciser que la production de l’installation projetée équivaudrait à 17% de celle de l’installation existante, une fois sa capacité maximale atteinte, tandis que la surface du bâtiment abritant la nouvelle ligne de production serait d’environ 4.800 m2 comparée à celle de l’installation existante se trouvant dans un hall d’une surface de 17.000 m2 ;

Que les affirmations des requérants seraient dénuées de tout caractère sérieux et même contredites par des documents scientifiques fournis dans le dossier de demande d’autorisation, l’Etat précisant que l’usage de produits chimiques en milieu industriel, tout à fait normal et parfaitement maîtrisé, rendrait l’éventualité d’un accident ou d’une fuite relativement hypothétique, compte tenu des prescriptions imposées par les administrations compétentes, étant donné encore que les substances utilisées par l’exploitant de l’établissement autorisé ne présenteraient pas de toxicité particulière ;

Que le simple renvoi à des notions de droit français, inconnues en droit luxembourgeois, ne saurait par ailleurs justifier que tous les habitants d’une certaine zone, en l’absence de tout autre élément pertinent, puissent se voir reconnaître un intérêt à agir ;

Considérant que les voisins qui habitent ou travaillent régulièrement à une distance plus ou moins rapprochée d’un établissement classé sont le cas échéant susceptibles de tirer de cette situation l’intérêt à agir suffisant à l’encontre des décisions ministérielles en portant autorisation, compte tenu de l’envergure de l’établissement autorisé et des inconvénients potentiels en découlant pour l’environnement humain et naturel au regard de ses caractères dangereux, insalubre ou incommode (cf. trib. adm. 9 décembre 1998, n° 9852 du rôle, Wilhelm, Pas. adm. 01/2000, V° Etablissements classés, n° 9, p. 92);

Que par voie de conséquence les contours de l’objet de la demande en autorisation aboutissant à la décision ministérielle par elles critiquée conditionnent immédiatement l’intérêt à agir des personnes se déclarant directement affectées par son installation et exploitation à proximité de leurs lieux d’habitation ou de travail régulier respectifs ;

Qu’il importe dès lors avant tout autre progrès en cause de dégager les contours de l’objet de la demande en autorisation du 13 avril 2000 à l’origine de la décision ministérielle déférée conditionnant notamment la nécessité et l’ampleur d’une enquête publique à mener, question reprise par ailleurs par les demandeurs dans leur second ordre de subsidiarité en tant qu’argumentation au fond tendant à l’annulation de l’arrêté ministériel entrepris ;

Considérant qu’en second lieu, au fond, les demandeurs soulèvent l’irrégularité de la procédure emportant selon eux l’annulation de l’autorisation ministérielle subséquente déférée en ce que uniquement les extensions projetées et non pas l’impact global de la nouvelle entité industrielle ainsi créée ont été prises en considération ;

Que tout en évoquant le changement de législation intervenu à travers l’article 7 de la loi du 10 juin 1999 précitée, les demandeurs d’estimer que les principes dégagés par la jurisprudence relative à l’application de la loi modifiée du 9 mai 1990 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes continueraient à s’imposer ;

Que les extensions projetées constitueraient en toute occurrence une modification substantielle de l’établissement au sens de l’article 6 de ladite loi du 10 juin 1999 ;

Que les demandeurs contestent l’affirmation de la société … suivant laquelle la ligne de production existante Lux01 et celle projetée ES4 seraient totalement séparées en faisant leur notamment l’avis défavorable du collège échevinal de la commune de Pétange du 24 novembre 2000 suivant lequel les trois portes pour le passage de personnes de l’ancien hall au hall projeté ainsi que le nombre faible d’embauche de quelque 35 personnes, soit une dizaine par équipe, ensemble les deux passages complémentaires pour gros engins feraient apparaître plutôt qu’en réalité, la nouvelle chaîne serait appelée à devenir la pièce maîtresse de l’exploitation ;

Que du fait que la société … n’arriverait déjà pas à respecter les valeurs limites imposées par l’autorisation d’exploitation du 9 mars 1999 concernant les émissions gazeuses au niveau de la ligne de production existante, l’extension projetée engendrerait une augmentation considérable de nuisances entraînant que cette dernière devrait être considérée comme partie de l’établissement susceptible d’être concernée par les modifications au sens de l’article 6 alinéa 6 de ladite loi du 10 juin 1999 ;

Que les mêmes considérations seraient à appliquer mutatis mutandis concernant l’impact des nuisances sonores engendrées par l’extension projetée ;

Qu’une nouvelle augmentation de la nuisance sonore serait d’autant plus accentuée que l’agencement des bâtiments projetés pour l’extension serait défavorable par rapport aux zones résidentielles situées à proximité d’après le rapport précité du TÜV Rheinland ;

Que du fait que les deux lignes de production se trouvent dans des bâtiments accolés, les nuisances sonores provoquées engendreraient un impact sonore global appréciable, à mesurer comme tel, justifiant soit un refus d’autorisation, soit des conditions d’exploitation autrement plus sévères ;

Qu’enfin le ministre de l’Environnement aurait pris en considération l’interdépendance étroite des deux lignes de production à travers le paragraphe VII de l’article 1er de l’autorisation déférée concernant la gestion des déchets en retenant que dans un délai de six mois suivant la mise en exploitation d’établissement, l’exploitant doit adapter son plan de prévention et de gestion des déchets spécifiques à son entreprise ;

Que les demandeurs de conclure que conformément aux dispositions de l’article 6 de ladite loi du 10 juin 1999, la procédure de commodo et incommodo aurait dû porter non seulement sur les éléments d’extension et de transformation, mais sur l’établissement étendu, voire transformé considéré dans son ensemble au vu de son impact global sur l’environnement humain et naturel tout en demandant au fond l’annulation de la procédure entraînant celle de la décision déférée ;

Considérant que la société anonyme … fait valoir que les dispositions de l’article 6 de la loi du 10 juin 1999 seraient différentes de celles de l’article 7 de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée ayant donné lieu aux éléments de jurisprudence cités par les demandeurs, de sorte qu’en l’espèce il n’y aurait pas lieu de suivre les solutions y dégagées ;

Que la prise en considération de la seule extension projetée correspondrait encore aux éléments de fait constants en la matière se dégageant d’une lecture attentive du dossier concernant les deux lignes de production LUX01 et ES4 qui seraient non seulement installées dans des bâtiments distincts, mais seraient encore effectivement séparées tant sur le plan de la technologie visée que sur celui des objectifs poursuivis, tandis que les affirmations proposées par les demandeurs n’auraient rien de juridique et ne seraient soutenues par aucun élément de preuve consistant ;

Que si par ailleurs la loi modifiée du 9 mai 1990, à travers son article 6 in fine avait prévu la possibilité par les autorités compétentes de requérir une évaluation des incidences de l’établissement sur l’homme, le lieu de travail et l’environnement, communément dénommée « étude d’impact », cet élément précis n’aurait pas été repris par la loi du 10 juin 1999, laquelle se bornerait à prévoir à travers son article 6 g la possibilité de la production d’une évaluation des incidences sur l’environnement pour les établissements arrêtés par règlement grand-ducal confirmant ainsi l’article 8 de la nouvelle loi ;

Que dans la mesure où un tel règlement grand-ducal n’existerait pas à ce jour et que l’ancien règlement grand-ducal applicable du 4 mars 1994 aurait été expressément abrogé par la loi du 10 juin 1999, l’évaluation de l’impact global de la nouvelle entité ne serait pas envisageable à l’heure actuelle sous cet aspect ;

Que l’Etat de rejoindre en substance les conclusions d’…, tout en analysant plus en détail l’impact des deux lignes de fabrication, ancienne et nouvelle, à partir notamment des processus de travail suivant les matières premières, différentes, employées ainsi que les plans d’affectation du personnel afférents, de même que l’existence, en l’état, de nombreuses conditions très strictes imposées en matière de bruit ainsi que l’interdépendance alléguée par les demandeurs quant à ces deux lignes de fabrication à partir des plans de gestion et de prévention des déchets ;

Considérant que d’après l’alinéa 3 de l’article 6 de la loi du 10 juin 1999 « lorsque la modification projetée de l’établissement constitue une modification substantielle, le requérant est invité à présenter une demande d’autorisation conformément à l’article 7 de la présente loi » ;

Que suivant l’alinéa 6 du même article 6 « la décision de l’autorité compétente doit porter sur les parties de l’établissement et les données énumérées à l’article 7 susceptibles d’être concernées par les modifications » ;

Considérant que le tribunal étant saisi au fond d’un recours de pleine juridiction, il est amené à apprécier la décision déférée quant à son bien-fondé et à son opportunité avec le pouvoir d’y substituer sa propre décision impliquant que cette analyse soit faite au moment où il est appelé à statuer (trib. adm. 1er octobre l997, Engel no 9699 du rôle, Pas. adm. 2001, V° recours en réformation n° 11 page 407 et autres décisions y citées) ;

Considérant qu’au jour où le tribunal est amené à statuer, l’impact de la modification de l’établissement sur les autorisations critiquées se dédouble d’une modification substantielle du dossier de la demande intervenue depuis que l’autorisation critiquée a été délivrée ;

Considérant que par son vote du 16 avril 2002, la Chambre des Députés a décidé l’implantation sur les terrains situés dans le secteur du pôle européen de développement, à plus ou moins 100 mètres du site de production …, du nouveau Lycée Technique Mathias Adam et a reclassé en conséquence le terrain domanial sélectionné en vue de le réaffecter à la réalisation du nouveau bâtiment pour la construction duquel le Gouvernement a été autorisé par la loi en question qui a été sanctionnée et promulguée par le Grand-Duc en date du 27 mai 2002, puis publiée au Mémorial le 11 juin 2002;

Considérant que si à un stade antérieur les parties avaient pu conclure que la question de l’implantation d’un nouveau Lycée ne se posait pas en l’espèce eu égard au fait que suivant la réglementation communale d’urbanisme applicable à l’époque pareille mise en place d’une structure scolaire n’était point possible, ces données ont radicalement changé depuis l’entrée en vigueur de la loi du 27 mai 2002 précitée 4 jours après sa publication au Mémorial;

Considérant que l’Etat de conclure que du seul fait dudit vote de la Chambre de Députés, la construction du lycée ne serait ni entamée, ni a fortiori terminée, de sorte que les craintes liées à la présence des établissements industriels seraient purement hypothétiques au stade actuel ;

Que de toute façon, au vœu de la loi du 10 juin 1999 précitée, le ministre de l’Environnement aurait la possibilité d’imposer à tout moment de nouvelles conditions d’exploitation au cas où cela s’avérerait nécessaire ;

Qu’il serait par ailleurs contraire au principe de l’égalité des administrés devant les charges publiques que de faire peser des contraintes supplémentaires dues à un changement de la situation à un seul exploitant au motif que l’autorisation de l’exploitation de ce dernier se trouve attaquée en justice ;

Que la société … d’insister que l’administration a dû prendre sa décision suivant les données de fait et de droit en sa possession au jour où elle a statué et qu’elle n’aurait pas à se perdre en conjectures sur l’avenir ;

Qu’elle soulève encore le fait que d’après l’article 3 de la loi du 27 mai 2002 précitée le reclassement du terrain devant accueillir le Lycée projeté se ferait suivant modification du plan d’aménagement partiel visé par l’article 28 de la loi modifiée du 21 mai 1999 sur l’aménagement du territoire, alors qu’en l’état actuel il n’existerait ni programmes directeurs ni plans directeurs régionaux ou sectoriels prévus par ladite loi, de sorte qu’avant d’entamer la procédure prévue pour le plan d’occupation des sols, il y aurait lieu à établissement des dits programmes et plans directeurs avant toute construction possible ;

Considérant que d’après l’alinéa 7 de l’article 6 de la loi du 10 juin 1999 précitée « toute modification substantielle d’un dossier de demande qui intervient au cours de l’enquête publique ou après celle-ci, et avant que l’autorité compétente n’ait statué sur la demande, est soumise à une nouvelle enquête publique » ;

Considérant que s’il est vrai que l’autorité administrative compétente, en délivrant l’autorisation conditionnelle actuellement critiquée, n’a pu statuer que sur les éléments de fait et de droit acquis au moment où elle a pris sa décision, il n’en reste pas moins qu’eu égard à la cristallisation dans le temps de l’analyse du tribunal, saisi d’un recours de pleine juridiction, force est à la juridiction administrative, dans le cadre du recours en réformation reçu, de statuer suivant les éléments de fait et de droit présentement acquis ;

Considérant que devant la décision arrêtée de construire le Lycée Technique Mathias Adam sur le terrain situé en diagonale par rapport au site d’exploitation d’… à une centaine de mètres, même en l’absence de construction entamée et au-delà des difficultés procédurales soulevées par les tiers intéressés, les impératifs de protection de la sécurité, de la salubrité et de la commodité par rapport au proche voisinage et plus particulièrement à l’environnement humain sur un site à proximité direct devant accueillir plus d’un millier de jeunes gens en pleine croissance, ensemble leur personnel d’encadrement, dictent une analyse des éléments de la cause révisée eu égard à la modification substantielle du dossier ainsi dégagée, abstraction faite et sans préjudice de la possibilité pour l’administration d’adapter les conditions d’exploitation compte tenu des modifications intervenues par rapport à l’établissement autorisé ;

Considérant que si fondamentalement la modification substantielle du dossier de la demande d’… à travers la décision prise par le législateur d’implanter le Lycée Technique Mathias Adam à proximité immédiate de son site d’exploitation est distincte, au delà de l’homonymie des termes employés, de la modification substantielle au sens de l’alinéa 3 de l’article 6 de ladite loi du 10 juin 1999 résultant de l’extension projetée, entre-temps réalisée, autorisée à travers la décision ministérielle déférée, il n’en reste pas moins que par dépassement de la différence entre ses éléments anciens et étendus, la nouvelle analyse à porter sur les incidences de l’établissement … sur l’environnement essentiellement humain, compte tenu plus spécifiquement des nuisances quant au bruit et à la pollution de l’air, doit nécessairement procéder d’une démarche s’accentuant sur la présence arrêtée d’un établissement scolaire d’une dimension considérable à proximité immédiate, se recouvrant avec les doléances présentées et vérifiées, dans une mesure le cas échéant moindre mais certaine, dans le chef des 31 demandeurs concernés suivant la proximité de leur lieu d’habitation ou de travail par rapport à l’exploitation concernée ;

Considérant qu’il s’ensuit qu’à partir de ce spectre d’analyse nouveau, compte tenu de l’élément substantiel du dossier cristallisé en cours de procédure contentieuse du fait de l’implantation arrêtée du Lycée à proximité dudit établissement, ce dernier est à entrevoir non seulement suivant sa partie adjointe mais au regard de son impact global sur l’environnement essentiellement humain, plus spécifiquement en raison des incidences quant au bruit et à la pollution de l’air particulièrement épinglées par les demandeurs;

Considérant que compte tenu de la prise en compte de l’impact global de l’établissement …, parties ancienne et adjointe combinées, les 31 demandeurs individuels à la base du présent recours justifient, à partir de leurs situations d’habitation et de travail respectives situées dans un rayon de proximité non autrement contesté quant à son étendue, allant de 500 à 2300 mètres dudit site d’exploitation, d’un intérêt à agir suffisant en vue de voir analyser la conformité de la décision ministérielle déférée par rapport à la loi dans le cadre du recours de pleine juridiction introduit ;

Considérant que le recours ayant été pour le surplus introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, il est recevable en tant qu’émanant des 31 demandeurs personnes physiques à son origine ;

Considérant qu’en ordre subsidiaire pour le cas où le recours serait déclaré recevable, l’Etat estime qu’il conviendrait d’analyser encore l’intérêt par rapport aux moyens présentés par les demandeurs tout en proposant de reporter l’analyse en question de façon détaillée par rapport à chaque grief évoqué ;

Considérant que l’aspect ainsi soulevé par l’Etat ne touchant point à la recevabilité du recours, il convient de le joindre au fond, ainsi que la partie publique le suggère par ailleurs à travers son argumentaire présenté ;

Quant au fond Considérant qu’au fond les demandeurs concluent en ordre principal à l’annulation de la procédure de commodo et incommodo ayant précédé la décision déférée du 24 avril 2001 entraînant l’annulation de cette dernière pour violation de la loi et plus particulièrement de l’article 7 de la loi du 10 juin 1999 précitée en raison du caractère non conforme du dossier à la base tiré de l’omission alléguée de la nature et de la liste exhaustive des produits chimiques utilisés dans le processus de fabrication, ainsi que de l’absence d’indications suffisantes relatives aux mesures projetées pour la prévention et l’atténuation des inconvénients et des risques auxquels l’établissement peut donner lieu pour la nature et pour l’homme ;

Qu’à titre subsidiaire, les demandeurs concluent encore à l’annulation de la procédure de commodo et incommodo entraînant celle de la décision déférée du 24 avril 2001 pour violation des alinéas 3 et 6 de l’article 6 de ladite loi du 10 juin 1999 en ce qu’il a été tenu compte à travers lesdites procédures et autorisations uniquement des extensions projetées et non pas de l’impact global de la nouvelle entité industrielle ainsi créée ;

Qu’à un titre plus subsidiaire, il est encore conclu à l’annulation de la procédure de commodo et incommodo entraînant celle de la décision déférée du 24 avril 2001 pour violation de la loi et plus particulièrement de l’article 13.1 de ladite loi du 10 juin 1999 en raison de conditions d’exploitation qualifiées de non spécifiques, trop vagues et non opérationnelles ;

Qu’en dernier ordre de subsidiarité et quant au fond, les demandeurs sollicitent la réformation de l’arrêté ministériel déféré dans le sens d’un refus de l’autorisation d’exploitation délivrée compte tenu de sa dangerosité inhérente et du caractère non opportun de son implantation sur le site prévu ;

Considérant qu’au fond il convient dès à présent de retenir à partir des développements qui précèdent que même si uniquement l’arrêté du ministre de l’Environnement, à l’exclusion de l’autorisation conférée par le ministre du Travail et de l’Emploi, est actuellement déféré, le tribunal n’en est pas moins amené à analyser la conformité à la loi notamment de l’enquête de commodo et incommodo menée à la base des deux décisions ministérielles d’autorisation intervenues à sa suite, étant donné que conformément à l’article 17.1 de la loi du 10 juin 1999 la construction d’établissements classés ne peut être entamée qu’après la délivrance des autorisations requises y visées, entraînant que l’absence de délivrance valable d’une d’elles entraîne l’interdiction de la réalisation de l’établissement à sa base, dans la mesure de l’assiette de l’autorisation requise ;

Considérant qu’il convient encore de rappeler à cet endroit que l’assiette de l’autorisation ministérielle actuellement déférée se limite à l’extension de l’établissement de la société … par modification de son usine de fabrication d’étiquettes autocollantes telle que ci-avant précisée et ne porte point sur l’établissement pris dans son entièreté, les éléments existants au moment de la prise de la décision déférée restant soumis, en l’état, à d’autres autorisations d’exploitation non actuellement déférées, dont les arrêtés ministériels des 19 mars 1991 et 20 mai 1998 précités ;

Que si dès lors au niveau de l’analyse du présent recours, la question de l’impact global de l’intégralité de l’entité d’exploitation créée à travers la modification de l’usine de fabrication d’étiquettes autocollantes autorisée par la décision actuellement critiquée est posée, il n’en reste pas moins que cette question d’impact global conditionne uniquement l’admissibilité des éléments de modification pour lesquels l’autorisation a été sollicitée, sans affecter directement l’autorisation délivrée antérieurement pour ces éléments qui se sont trouvés en place à travers l’assiette de la demande présentée, au moment où l’arrêté ministériel déféré a été posé ;

Considérant qu’à partir des développements qui précèdent, nécessaires pour toiser la recevabilité du recours au regard de l’intérêt à agir des 31 demandeurs, personnes physiques, le caractère fondé du recours reçu est d’ores et déjà acquis à un double niveau en ce que, d’une part, contrairement aux dispositions de l’article 7 de la loi du 10 juin 1999, ni le dossier soumis, ensemble les études effectuées, ni l’enquête de commodo et incommodo n’ont porté sur l’impact global de l’établissement, pris à la fois en ses éléments existants et extension projetée, notamment concernant l’environnement humain et naturel et que, d’autre part, par la force des choses, il n’a pu être tenu compte de la nouvelle donne entre-temps cristallisée se dégageant de la loi du 27 mai 2002, précitée, concernant l’implantation à proximité immédiate du nouveau Lycée technique Mathias Adam, analysée en modification substantielle du dossier d’après l’alinéa 7 de l’article 6 de la loi du 10 juin 1999 en question, susceptible notamment d’affecter le classement du site selon la nature du milieu d’habitat au sens du règlement grand-ducal du 13 février 1979 concernant le bruit dans les alentours immédiats des établissements et des chantiers, conditionnant de la sorte les niveaux de bruit dB (A) admissibles à l’endroit ;

Considérant qu’il s’ensuit que dans la mesure où le recours en réformation est fondé en ce que non seulement l’impact de l’extension projetée, notamment sur l’environnement humain et naturel, mais l’impact global de l’établissement, éléments existants et projetés confondus, est à prendre en considération et que d’un autre côté parmi les composantes de l’environnement humain et naturel est appelé à s’ajouter à proximité directe le nouveau Lycée Technique Mathias Adam, dont les contingences se recouvrent en grande partie avec celles de l’entourage humain jusque lors existant, dont les 31 demandeurs habitant sinon travaillant dans le voisinage direct, la sanction encourue agit ab initio dès la présentation du dossier, lequel est à revoir en conséquence avec adaptation notamment des éléments d’étude d’ores et déjà présentés par rapport à la nouvelle donnée présentement dégagée, afin de pouvoir utilement déboucher sur une nouvelle procédure de commodo et incommodo ;

Considérant que dans la mesure où l’impact global de l’établissement n’a pas été pris en compte notamment au niveau de la procédure de commodo et incommodo, phase d’enquête publique relevant d’exigences d’ordre public et au-delà même de la donne nouvelle se dégageant du Lycée projeté à proximité, la décision ministérielle déférée encourt la sanction prévue par la loi, ensemble sa procédure préliminaire dans la mesure des carences dénotées ;

Considérant que bien que statuant dans le cadre d’un recours en réformation, le tribunal, après avoir procédé à un réexamen en fait et en droit, aboutit à la conclusion que seule une annulation permet de rencontrer à leur juste mesure les déficiences affectant la décision déférée, étant donné qu’il importe de procéder à l’instruction du dossier, ensemble l’enquête publique, et d’arrêter la décision finale à y consacrer sous un spectre élargi comportant notamment l’analyse de l’impact global de l’établissement, éléments existants et projetés confondus, compte tenu encore de la donnée nouvelle de l’implantation du Lycée Technique Mathias Adam à proximité directe, étant entendu que le tribunal n’est pas assorti des pouvoirs pour remédier à pareille situation ;

Considérant que du fait de l’annulation ainsi encourue par la décision ministérielle déférée, l’analyse plus en avant des moyens proposés par les demandeurs devient surabondante ;

Quant aux frais Considérant que mis à part les frais engendrés par le recours en tant qu’introduit à la requête de l’association sans but lucratif …, déclaré irrecevable, il convient de faire masse des frais et de les imposer aux parties ayant succombé dans leurs moyens tout en tenant compte du fait de l’Etat ayant engendré la nouvelle donne résultant de l’implantation projetée à proximité du site du nouveau Lycée Technique Mathias Adam, de sorte à opérer un partage à concurrence de deux tiers incombant à la partie publique, le tiers restant étant à supporter par la société … ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare le recours irrecevable en tant que formé par l’association sans but lucratif … ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond le dit justifié ;

partant annule, dans le cadre du recours en réformation reçu, la décision ministérielle déférée, ensemble les éléments de procédure de commodo et incommodo menés et renvoie l’affaire devant le ministre de l’Environnement ;

dit que les frais relatifs aux actes de procédure fournis au nom de l’association sans but lucratif … restent à charge de cette dernière ;

pour le surplus fait masse des frais et les impose pour deux tiers à l’Etat et pour un tiers à la société anonyme … ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 juillet 2002 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 19


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 13600
Date de la décision : 08/07/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-07-08;13600 ?

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