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25/06/2002 | LUXEMBOURG | N°13930

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 juin 2002, 13930


Tribunal administratif N° 13930 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 août 2001 Audience publique du 25 juin 2002 Recours formé par Monsieur …, … contre des décisions du ministre de la Justice en présence de Messieurs …, … et …, … en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13930 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 août 2001 par Maître Alain GROSS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre

des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, adjudant au Centre pénitentiaire de Luxembourg...

Tribunal administratif N° 13930 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 août 2001 Audience publique du 25 juin 2002 Recours formé par Monsieur …, … contre des décisions du ministre de la Justice en présence de Messieurs …, … et …, … en matière de promotion

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13930 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 août 2001 par Maître Alain GROSS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, adjudant au Centre pénitentiaire de Luxembourg, demeurant à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réformation 1) des décisions du ministre de la Justice présentées comme ayant été prises respectivement les 15 juin et 15 juillet 2001, ayant nommé Messieurs …, demeurant à L-…, …, demeurant à L-…, …, demeurant à L-… et …, demeurant à L-…, à la fonction d’adjudant-chef à l’administration pénitentiaire, sans que pareille nomination ne lui soit conférée alors qu’étant en rang utile, 2) de même que du silence de l’administration pendant plus de trois mois valant décision implicite de refus à son égard concernant sa demande en promotion introduite au mois de mars 2001 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 27 novembre 2001 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 décembre 2001 par Maître Alain GROSS au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 janvier 2002 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 28 janvier 2002 portant signification du recours à Monsieur …, préqualifié ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 1er février 2002 portant signification du recours à Monsieur …, également préqualifié ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Maître Alain GROSS et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 mai 2002 ;

Vu l’avis de rupture du délibéré du 14 mai 2002 tendant au dépôt au greffe des décisions ministérielles directement attaquées à travers le recours sous rubrique ;

Vu les pièces déposées au greffe du tribunal administratif en date du 17 mai 2002 par le délégué du Gouvernement, dont les arrêtés de nomination attaqués ensemble les avis du directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg et du Procureur général d’Etat à leur base ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en ses plaidoiries à l’audience publique du 3 juin 2002 ;

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Considérant que par courrier du 18 février 2001, Monsieur …, préqualifié, a adressé au directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg, désigné ci-après par « CPL », sa candidature pour un des postes vacants comme chef de service des sections E, P1 et P3, en se déclarant prêt à assumer les responsabilités incombant aux postes en question ;

Que par courrier du 16 mars 2001, adressé au même directeur, Monsieur … a également présenté sa candidature pour un des postes vacants comme chef de service des sections C et D, tout en affirmant être prêt à assumer les responsabilités incombant à ces postes ;

Que le 30 mars 2001 le directeur du CPL a transmis au délégué du Procureur général d’Etat « les candidatures ci-jointes aux postes de chef des sections C, D, E, P1 et P3 avec les propositions d’affectation suivantes :

nom Actuellement Proposition - … chef de section au bloc C chef de section P1 - … adjudant au CPG chef de section P3 - … adjudant détaché au bureau chef de section C des contrôleurs au CPL - … adjudant au CPG chef de section D - … adjudant au CPL chef de section E En cas de nomination, MM … et … devront être remplacés au CPG.

Pour les motifs énoncés ailleurs, MM. … et …, futurs chefs des sections D respectivement C, seront détachés provisoirement au bureau des contrôleurs des services de garde, pour y remplacer les adjudants-chefs … et …, absents depuis un an. L’adjudant … y restera affecté également pour remplacer provisoirement l’adjudant-chef …, dont l’absence pour raisons de santé se prolongera malheureusement pendant des mois encore.

M. … continuera à gérer la section C, à laquelle il est actuellement préposé, jusqu’au déménagement vers le bâtiment P1 prévu pour la fin septembre 2001. M. … assumera la gérance de la section D jusqu’au déménagement vers le bâtiment P3 début octobre.

En annexe vous trouverez un tableau récapitulatif ainsi que les demandes assorties des avis individuels, dont copie a été remise aux intéressés respectifs ».

Que le 4 avril 2001 le délégué du Procureur général d’Etat a transmis au ministre de la Justice les propositions du directeur du CPL en déclarant se rallier à ces avis et propositions du 30 mars 2001 ;

Considérant qu’au titre des avis individuels a figuré celui daté du 29 mars 2001 concernant Monsieur …, rédigé en ces termes : « Brm.- Transmis à Monsieur le délégué du procureur général d’Etat la demande de l’adjudant … avec avis défavorable.

L’intéressé ne répond pas aux critères énoncés à l’article 69 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 11 février 1999 déterminant les conditions d’admission, de nomination et d’avancement du personnel des cadres de l’administration pénitentiaire. » ;

Que par courrier de son mandataire du 5 avril 2001 Monsieur … s’est adressé au ministre de la Justice dans les termes suivants : « Mon mandant a postulé pour un poste vacant comme adjudant-chef au C.P.L. et vient de recevoir l’avis de Monsieur le directeur du C.P.L. et de Monsieur le délégué du procureur général d’Etat quant à sa candidature datés respectivement des 29.03 et 04.04 dernier.

Il est surpris que l’avis du Directeur soit négatif et dépourvu de la moindre explication concrète.

Monsieur … tient à souligner qu’il n’a jamais été exposé à une critique a fortiori une mesure disciplinaire en presque 30 années de service. Ayant de surcroît passé l’examen de promotion avec succès et étant en ancienneté en rang pour pouvoir briguer un poste d’adjudant-chef, il est surpris par l’absence totale d’arguments justifiant le rejet de sa candidature.

Je vous saurais dès lors de revoir favorablement le dossier de candidature de mon mandant. » ;

Que sur renvoi, le directeur du CPL a pris position en date du 22 mai 2001 dans les termes suivants : « Brm.- Renvoyé à Monsieur le délégué du procureur général d’Etat en confirmant mon avis défavorable du 29 mars 2001 concernant la demande en nomination à la fonction d’adjudant-chef de l’adjudant ….

La disposition de l’article 69 al.2 du règlement grand-ducal du 11 février 1999 déterminant les conditions d’admission, de nomination et d’avancement du personnel des cadres de l’administration pénitentiaire demandent sic de juger des services rendus par les candidats et de leur capacité d’assumer les responsabilités particulières inhérentes au poste sollicité.

Même si le dossier de M. … ne renseigne pas de faute grave ou autre affaire disciplinaire, l’intéressé a manifesté une trop grande émotivité dans des moments de crises et par une instabilité en situation de stress prolongé (par exemple quand il devait occuper des postes à responsabilité).

Mon avis défavorable ne sera cependant pas forcément définitif. Le déménagement vers les nouveaux bâtiments notamment fournira à l’intéressé – qui est actuellement affecté à la section C – d’amples occasions de mettre en valeur ses qualités intrinsèques, que j’évaluerai volontiers lors d’une prochaine candidature à un poste d’adjudant-chef vacant. » ;

Que le 25 mai suivant le délégué du Procureur général d’Etat s’est adressé au ministre de la Justice en ces termes : « Monsieur le Ministre, J’ai l’honneur de vous transmettre en annexe la prise de position de Monsieur le directeur du CPL au sujet des recours gracieux de Messieurs … et … à laquelle je me rallie.

Vous me permettrez d’ajouter que la ratio legis de l’article 69 du règlement grand-

ducal du 11 février 1999 est de permettre à l’administration de nommer aux postes dirigeants des fonctionnaires jugés particulièrement qualifiés pour le poste vacant. Le directeur d’établissement est la personne la plus qualifiée pour procéder à une évaluation globale des qualités et capacités des candidats en présence, et ce en considération des exigences particulières du poste à pourvoir.

Ni l’ancienneté, ni l’absence de sanctions disciplinaires récentes ne sont, à mon avis, des critères déterminants à retenir au vu de la formulation non équivoque du susdit article 69.

Je maintiens en conséquence mes propositions du 04 avril 2001.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération. » ;

Que par arrêté du 15 juin 2001 le ministre de la Justice a procédé à la nomination, notamment de Messieurs …, …, et … aux fonctions d’adjudant-chef à l’administration pénitentiaire en les affectant aux postes de chefs de section respectivement aux blocs C, P3 et E au CPL ;

Que par courrier du 22 juin 2001 Monsieur … a soumis au directeur du CPL sa candidature pour le poste vacant du huitième contrôleur des services de garde, tout en déclarant être prêt à assumer les responsabilités incombant aux postes à pourvoir ;

Que suivant courrier du 29 juin 2001 adressé au délégué du procureur général d’Etat le directeur du CPL a avisé la demande de Monsieur … comme suit : « Brm.- Transmis à Monsieur le délégué du procureur général d’Etat la demande de l’adjudant … en maintenant mes avis défavorables des 29 mars et 22 mai 2001.

L’intéressé ne répond pas aux critères énoncés à l’article 69 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 11 février 1999 déterminant les conditions d’admission, de nomination et d’avancement du personnel des cadres de l’administration pénitentiaire.

Même si le dossier de M. … ne renseigne pas de faute grave ou autre affaire disciplinaire, l’intéressé a manifesté une trop grande émotivité dans des moments de crises et une instabilité relative en situation de stress prolongé (par exemple quand il devait occuper des postes à responsabilité).

Mon avis défavorable ne sera cependant pas forcément définitif. Le déménagement vers les nouveaux bâtiments notamment fournira à l’intéressé – qui est actuellement affecté à la section C – d’amples occasions de mettre en valeur ses qualités intrinsèques, que j’évaluerai volontiers lors d’une prochaine candidature à un poste d’adjudant-chef vacant. » ;

Considérant que relativement au poste du huitième contrôleur des services de garde au CPL déclaré vacant, la liste des candidats suivant leur ancienneté s’établit comme suit conformément à l’apostille transmise par le directeur du CPL au délégué du procureur général d’Etat en date du 29 juin 2001 en ces termes : « Brm.- Transmis à Monsieur le délégué du procureur général d’Etat les candidatures ci-jointes au poste du 8e contrôleur des services de garde au CPL, avec la proposition d’y faire nommer l’adjudant … ….

Liste des candidats, svt. rang d’ancienneté :

Nom grade affectation actuelle - … … adjudant-chef chef de section au bloc C - … … adjudant Visites - … … adjudant magasin industriel - … … adjudant bloc C - … … adjudant détaché au bureau des contrôleurs - … … adjudant bloc D - … … adjudant Greffe - … … adjudant CP Givenich Que le délégué du procureur général d’Etat de transmettre au ministre de la Justice la proposition du directeur du CPL en question en date du 5 juillet 2001 en déclarant s’y rallier ;

Que par arrêté du ministre de la Justice du 19 juillet 2001 Monsieur … … a été nommé adjudant-chef à l’administration pénitentiaire et affecté au huitième poste de contrôleur des services de garde du CPL avec effet au 1er août 2001 ;

Considérant que par requête déposée en date du 28 août 2001 Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation des arrêtés du ministre de la Justice portant les dates respectivement des 15 juin 2001 et 19 juillet 2001 ayant porté nomination de Messieurs …, …, … et … … aux fonctions d’adjudant-chef à l’administration pénitentiaire, tout en refusant ses candidatures afférentes de même que contre le « silence de l’administration valant refus à l’égard de (sa) demande de promotion introduite (…) en mars 2001 » ;

Considérant que dans son mémoire en réponse le délégué du Gouvernement conclut d’abord à la mise en intervention de Messieurs … et …, moins anciens en rang que le demandeur ;

Considérant que dans la mesure où suivant exploits d’huissier de justice respectifs des 29 janvier et 1er février 2002 les mises en intervention en question ont été effectués, l’observation afférente du représentant étatique est devenue actuellement sans objet ;

Considérant qu’encore que le demandeur n’exerce un recours de pleine juridiction qu’en ordre subsidiaire, il importe que soit analysée au préalable la possibilité d’exercer pareil recours en l’espèce, celle-ci conditionnant directement la compétence d’attribution du tribunal en la matière ;

Considérant qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire ;

Considérant qu’il résulte des pièces versées au dossier, notamment suite à la demande expresse du tribunal à travers son avis du 14 mai 2002, que Monsieur … a posé sa candidature de façon itérative pour un poste d’adjudant-chef déclaré vacant, à savoir, - en date du 18 février 2001 pour un des postes vacants comme chef de service des sections E, P1 et P3 ;

- le 16 mars 2001 pour un des postes vacants comme chef de service des sections C et D ;

- le 29 mai 2001 au poste du deuxième contrôleur des services de garde ;

- le 22 juin 2001 au poste du huitième contrôleur ;

- le 8 août 2001 au poste du quatrième contrôleur des mêmes service ainsi que - le 29 septembre 2001 au poste de chef de section du bloc C, toutes ces demandes ayant par ailleurs été avisées défavorablement au même motif par le directeur du CPL, le délégué du procureur général d’Etat s’y ralliant ;

Considérant que dans la mesure où la demande de promotion introduite par Monsieur … « en mars 2001 » par lui visée à la base de la décision de refus implicite également déférée, se rapporte, d’après l’échantillon des demandes de promotion ci-avant établi à partir des pièces versées au dossier, à la demande de promotion du 16 mars 2001 portant sur les postes de chef de service des sections C et D, aucune autre demande en question pour le mois de mars 2001 n’étant renseignée au dossier ;

Considérant que par arrêté de nomination du 15 juin 2001 Messieurs …, préqualifié, ainsi que Monsieur …, adjoint de l’administration pénitentiaire, ont été nommés adjudant-

chefs et affectés aux postes de chef de section respectivement des blocs C et D du CPL ;

Considérant que s’il est vrai qu’à travers le recours sous analyse seul l’arrêté de nomination de Monsieur … a été déféré, le demandeur ne critiquant point la décision de nomination de Monsieur …, il n’en reste pas moins que le propre de chaque arrêté de nomination est de porter au poste déclaré vacant un des candidats, élus à travers la nomination conférée, tout en écartant tous les autres ;

Qu’à l’égard des candidats écartés la décision ministérielle de nomination vaut certes comme refus implicite, mais ne résulte point du silence gardé par l’administration tel qu’allégué par le demandeur concernant sa demande de promotion du 16 mars 2001 ;

Qu’il s’ensuit que le recours est en toute occurrence irrecevable dans son second volet concernant le silence allégué de l’administration, aucune décision implicite de refus n’en étant issue conformément aux dispositions de l’article 4 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif ;

Considérant que l’intérêt à agir doit non seulement être personnel et direct, mais encore effectif, né et actuel, au-delà de la condition de légitimité également requise ;

Considérant qu’au vu des candidatures subséquentes posées par Monsieur … à des postes vacants correspondant au grade d’adjudant-chef, chaque nomination d’un concurrent intervenue a successivement constitué une décision négative dans son chef dans la mesure où il n’a pas été retenu ;

Considérant qu’eu égard aux exigences légales tenant à ce que l’intérêt à agir doit être né et actuel, celui de Monsieur … ne se vérifie que par étapes successives, de refus en refus critiqués, suivant l’ordre de préférence donné par le demandeur relativement aux décisions de nomination par lui critiquées, étant constant qu’il ne saurait être appelé à pourvoir tous les postes par lui sollicités à la fois ;

Qu’il s’ensuit que son intérêt à agir ne saurait dans un premier stade porter que sur une seule des décisions de refus de nomination critiquées, à savoir celle qu’il a par préférence déférée, compte tenu des séquences chronologiques et autrement logiques s’imposant en la matière ;

Considérant que seules les parties tierces intéressées … et … ayant été mises en intervention, en raison notamment de leur rang indiqué par le délégué du Gouvernement comme ayant été inférieur à celui de Monsieur … à l’époque de la date de prise des décisions déférées, seules peuvent être utilement toisées à ce stade les éléments du recours ayant trait à leurs deux arrêtés de nomination, à l’exclusion de tous autres ;

Considérant que par ailleurs l’arrêté de nomination de Monsieur … correspond à ceux spécialement visés par le demandeur concernant sa candidature prévisée posée le 16 mars 2001, restée selon lui sans réponse, l’autre poste concerné, celui de chef de service de la section D, ayant été attribué à Monsieur …, dont l’arrêté de nomination du même 15 juin 2001 n’est point déféré ;

Considérant qu’il résulte encore des pièces versées au dossier et notamment des tableaux d’ancienneté soumis par le délégué du Gouvernement que Monsieur … devance en ancienneté tant Monsieur … que Monsieur …, de sorte à avoir été le premier, du moins parmi ce trio, à avoir dépassé le demandeur à travers les arrêtés de nomination déférés ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent qu’au stade actuel de l’analyse de l’affaire un intérêt suffisant à agir se vérifie dans le chef de Monsieur … uniquement en relation avec l’arrêté de nomination au poste de chef de la section C déféré de Monsieur … intervenu le 15 juin 2001 ;

Qu’il s’ensuit qu’à ce stade le recours est recevable en tant qu’intenté à l’encontre dudit arrêté de nomination de Monsieur … pour suffire pareillement aux autres conditions de forme et de délai prévues par la loi, étant entendu que le recours étant, en l’état, irrecevable pour le surplus, une analyse plus en avant des autres arrêtés de nomination critiqués s’imposera le cas échéant dans l’hypothèse où le recours serait jugé non fondé concernant l’arrêté de nomination de Monsieur … utilement déféré ;

Considérant qu’au fond le demandeur conclut en substance au caractère vicié à la fois des arrêtés de nomination déférés et des avis à leur base, s’agissant tant de ceux du délégué du procureur général d’Etat que de ceux du directeur du CPL repris quant au fond sans ajout ni retranchement ;

Que dans ce contexte le demandeur de procéder à une évaluation respective de ses antécédents professionnels entrevus par rapport à ceux des 4 nominés à travers les arrêtés déférés, tout en contestant les griefs portés à son encontre, en relativisant certains éléments de fait relatés à travers le dossier concernant son cursus professionnel et en prenant position par rapport à des éléments contenus, selon lui à tort, dans son dossier administratif ;

Considérant que le délégué du Gouvernement prend position de façon circonstanciée tout en insistant sur le caractère spécifique des dispositions de l’article 69 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 11 février 1999 déterminant les conditions d’admission, de nomination et d’avancement du personnel des cadres de l’administration pénitentiaire réservant au pouvoir de nomination une large marge d’appréciation compte tenu du service rendu par les candidats et de leur capacité d’assumer les responsabilités particulières inhérentes au poste sollicité, base réglementaire justifiant amplement les arrêtés de nomination intervenus sur base des éléments de fait justement retenus à travers les avis respectifs du procureur général d’Etat, sur base des évaluations directoriales respectivement circonscrites ;

Considérant que suite à la promulgation de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de l’administration pénitentiaire et en application de son article 13 a été pris le règlement grand-ducal du 11 février 1999 précité ;

Que cités sans autre précision et par leur seul numéro les articles ci-après relatés se rapportent à chaque fois audit règlement grand-ducal du 11 février 1999 ;

Que ce règlement grand-ducal prévoit en son chapitre XVI intitulé « carrière du sous-

officier des établissements pénitentiaires (carrière du gardien) » sous les articles 63 à 69 les dispositions particulières afférentes ;

Qu’aux termes de son article 68, intitulé « examen de promotion », « nul ne peut être promu aux fonctions supérieures à celles de brigadier, s’il n’a subi avec succès un examen de promotion qui comporte des interrogations » sur une série de 6 matières y plus amplement renseignées ;

Que l’article 69 intitulé « promotion au grade d’adjudant-chef » porte que « nul ne peut être promu aux fonctions d’adjudant-chef s’il n’assume pas les responsabilités d’un des 30 postes d’adjudant-chef y énumérés » ;

Que suivant l’alinéa second de l’article 69 en question « la nomination aux postes énumérés ci-dessus se fait sur avis conforme du procureur général d’Etat qui tient compte des services rendus par les candidats et de leurs capacités d’assumer les responsabilités particulières inhérentes au poste sollicité » ;

Que le chapitre suivant, portant le numéro XVII intitulé « dispositions générales » comporte à l’article 71, intitulé « classement aux examens » un alinéa 6, libellé comme suit :

« après chaque examen de promotion, la commission d’examen procède, outre le classement normal des candidats, à l’établissement du tableau de classement de la carrière afférente en groupant les candidats par promotion dans l’ordre chronologique et en classant les candidats à l’intérieur de chaque promotion en tenant compte de leur ancienneté, des résultats de leur examen de fin de stage ainsi que des résultats obtenus à l’examen de promotion.

Le rang utile pour obtenir les promotions qui exigent la réussite à un examen de promotion est déterminé par référence au tableau de classement ainsi établi » ;

Considérant que figurant au titre des dispositions générales, l’alinéa 6 de l’article 71 prérelaté disposant que « le rang utile pour obtenir des promotions qui exigent la réussite d’un examen de promotion » s’applique à toutes promotions pour lesquelles pareil examen est exigé à sa base ;

Considérant que dans la mesure où d’après l’article 68 prélaté, nul ne peut être promu aux fonctions supérieures à celles de brigadier s’il n’a subi avec succès l’examen de promotion y visé, force est de retenir qu’également pour la promotion au grade d’adjudant-

chef désignée par l’article 69, les dispositions de l’alinéa 6 de l’article 71 s’appliquent en principe, de sorte que pour les candidatures présentées concernant les promotions sollicitées aux postes déclarés vacants et revêtus par les titulaires nommés à travers les arrêtés ministériels déférés, le rang utile pour obtenir ces promotions était à déterminer d’abord par référence au tableau de classement établi conformément aux dispositions de l’alinéa second du point 6 dudit article 71 ;

Considérant qu’il s’ensuit que si la nomination aux postes énumérés à l’alinéa 1er de l’article 69 se fait encore en suivant son alinéa second « sur avis conforme du procureur général d’Etat qui tient compte des services rendus par les candidats et de la capacité d’assumer les responsabilités particulières inhérentes du poste sollicité », il n’en reste pas moins que cette disposition complémentaire et non exclusive ne met pas hors application les critères légalement posés par ailleurs, dont les dispositions générales issues de l’exigence d’un examen de promotion et le classement y relatif à analyser comme toile de fond concernant le rang utile pour les promotions conditionnées par un examen suivant l’alinéa second du point 6 de l’article 71 prérelaté ;

Considérant que d’après les dispositions de l’article 4, alinéa 1er du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, applicable en la matière, « les avis des organismes consultatifs pris préalablement à une décision doivent être motivés et énoncer les éléments de fait et de droit sur lesquels il se basent » ;

Considérant que dans la situation particulière des promotions aux grades d’adjudant-

chef par la nomination à l’un des postes énumérés à l’article 69 alinéa 1er, la nomination se fait sur la toile de fond du rang utile du candidat concerné à partir de son examen de promotion, tel que résultant de l’alinéa second du point 6 de l’article 71, sous peine de rendre désuet ledit examen pour la promotion audit grade, ce que la formulation claire et d’ordre générale des dispositions réglementaires en question ne permettrait point ;

Considérant que la seule combinaison possible des textes susvisés laissant subsister l’un et l’autre dans sa formulation posée par le pouvoir réglementaire consiste à retenir que l’alinéa second de l’article 69, en ce qu’il prévoit des critères tenant compte des services rendus par les candidats et de leurs capacités d’assumer les responsabilités particulières inhérentes au poste sollicité, permet au pouvoir de nomination de ne pas suivre le rang déterminé par l’examen de promotion visé par l’alinéa second du point 6 de l’article 71, étant entendu que pareille décision comporte une exigence de motivation particulièrement circonstanciée au regard des textes réglementaires sous revue ensemble l’article 4 alinéa 1er du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité ;

Considérant que la décision ministérielle de nomination au grade d’adjudant-chef doit se faire, d’après les dispositions de l’article 69 alinéa 2 « sur avis conforme du procureur général d’Etat » ;

Que dès lors l’exigence de motivation particulièrement circonstanciée prévisée se répercute encore sur ledit avis ;

Considérant que de fait, ainsi que l’avoue sans détour le délégué du Gouvernement à travers ses mémoires, l’avis du procureur général d’Etat reprend en règle générale les propositions formulées par le directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg, lequel, d’après le représentant étatique, est à considérer comme le mieux placé pour évaluer les capacités du personnel en place en vue d’assumer la responsabilité particulière inhérente au poste sollicité, compte tenu des services rendus par les candidats ;

Considérant que dans la mesure où l’avis du procureur général d’Etat, conformément auquel le ministre est appelé à statuer, fait siennes les propositions du directeur du Centre pénitentiaire de Luxembourg, sans porter d’amendement au fond y relativement, ne fût-ce qu’au niveau de l’agencement de l’argumentaire à sa base et plus particulièrement de la pondération des services rendus par le candidat et de ses capacités d’assumer les responsabilités particulières inhérentes au poste sollicité, l’exigence de motivation prévisée se répercute encore sur l’avis du directeur en question se trouvant en définitive à la base de la décision de nomination conforme à rendre par le ministre compétent ;

Considérant qu’il est patent que l’avis exprimé par ledit directeur, sur recours gracieux concernant les trois premiers arrêtés de nomination en date déférés et dès l’ingrès relativement à l’arrêté de nomination de Monsieur …, est strictement identique d’un cas à l’autre ;

Considérant que si la constance dans l’avis peut être une qualité, telle ne saurait être le cas dans l’hypothèse de l’espèce où le directeur lui-même agence sa prise de position sur deux niveaux en retenant au moment où il dénote les services rendus et capacités particulières du candidat … que ce dernier, en l’état, ne serait pas apte à occuper un poste à responsabilité en raison de sa trop grande émotivité dans des moments de crise et de son instabilité relative en situations de stress prolongé, tout en déclarant cette analyse comme n’étant point définitive ;

Considérant que si le fait même de maintenir expressément la possibilité d’adapter son avis en raison de considérations futures procède d’une bonne administration, encore ne faut-il point que pareille aspiration s’apparente à un faux fuyant, sinon à une coquille vide à partir de laquelle les conséquences pratiques qui s’imposent ne sont jamais tirées ;

Considérant qu’il s’ajoute à cela que les avant-dernier et dernier alinéas des avis respectifs du directeur du CPL se trouvent dans des liens de contradiction multiples entre eux ;

Considérant que si suivant le dernier alinéa de son avis le directeur promet d’évaluer « lors d’une prochaine candidature à un poste d’adjudant-chef vacant » « les qualités intrinsèques » de Monsieur …, force est de constater qu’eu égard au nombre de candidatures subséquentes posées pour des postes d’adjudant-chef et compte tenu de la multiplicité des vacances – par ailleurs prévisible – durant la même année 2001 documentée à travers le dossier, le directeur s’est borné – de façon stéréotype – à reprendre le même avis, de sorte qu’il ne saurait être sérieusement soutenu que la réévaluation par lui mise en en exergue ait correspondu à une intention réelle et sérieuse de sa part ;

Qu’il s’y ajoute que le nombre de vacances de postes d’adjudant-chef prévisibles pour l’année 2001 appelé à conditionner une réévaluation des qualités intrinsèques de l’intéressé, mis en combinaison avec le déménagement vers les nouveaux bâtiments – par expérience vouée à être postposée à de multiples reprises depuis des calendes – referme en lui-même une contradiction n’ayant pu échapper à son auteur ;

Que ces considérations s’imposent d’autant plus que le poste de chef de la section C est à nouveau devenu vacant au mois de septembre 2001 et que Monsieur … a derechef postulé suivant candidature prévisée formulée le 29 de ce même mois ;

Que dès lors la réévaluation telle que mise en avant, si elle était destinée à se faire à courte échéance au gré des vacances de postes prévisibles, se trouve en contradiction flagrante avec l’évaluation résultant de l’avant-dernier alinéa des avis directoriaux prévisés, sinon, ne dût-elle se faire qu’une fois le déménagement effectué et après un laps de temps suffisant écoulé pour permettre à Monsieur … « de mettre en valeur ses qualités intrinsèques », il devient évident qu’elle n’aura point lieu pour les « prochaines » candidatures de l’intéressé à un poste d’adjudant-chef vacant, ni surtout pour le même poste que celui à la base de l’arrêté de nomination sous revue ;

Considérant que sur la toile de fond du rang utile de Monsieur … à partir de ses examens de promotion favorables à ce dernier par rapport à ses concurrents, d’après les éléments par lui mis en avant non autrement contredits en cause, l’avis directorial, en se résolvant dans les contradictions dénotées sur des points personnels sensibles tels ceux visés par l’alinéa second de l’article 69 du règlement grand-ducal du 11 février 1999 prévisé, ne suffit pas aux exigences de motivation particulièrement circonstanciée dégagées à partir des développements qui précèdent et, à partir des éléments contraires l’affectant, impose la conclusion d’une motivation insuffisante, non conforme à la loi, entachant l’avis directorial de nullité ;

Considérant que plus particulièrement encore l’avis directorial est muet concernant la mise en balance des qualités respectives de Messieurs … et …, ce dernier plus particulièrement concerné à travers le recours, en ce que des reproches apparaissent comme étant formulées à l’égard du premier relativement à son approche concernant le maniement concret de situations impliquant directement des détenus, tandis qu’il est allégué par le même demandeur que la plage utile d’observation de son concurrent en question serait faussée du fait que durant une dizaine d’années, en raison de son affectation à un poste de contrôle central, il n’aurait point été en contact direct avec des détenus, de sorte que toute évaluation afférente devrait rester abstraite dans cette mesure le concernant ;

Considérant que par voie de conséquence, l’avis du délégué du procureur général d’Etat reprenant, sans l’amender dans sa substance, l’avis directorial en question, se trouve à chaque fois, pour les arrêtés de nomination déférés auxquels il se rapporte, dont plus particulièrement celui de Monsieur … du 15 juin 2001, entaché de la même nullité ;

Considérant que dans la mesure où concernant l’arrêté de nomination de Monsieur …, déféré, la nullité affectant l’avis afférent du procureur général d’Etat, conformément auquel le ministre de la Justice a été appelé à statuer, se répand à l’arrêté de nomination en question, le tribunal est appelé à en prononcer l’annulation ;

Considérant qu’au vu de l’aboutissement du recours concernant l’arrêté de nomination déféré de Monsieur …, il devient surabondant de toiser les autres aspects des moyens d’annulation proposés à son encontre, tout comme le recours encourt pour le surplus l’irrecevabilité pour défaut d’intérêt à agir effectif, né et actuel ;

Considérant que le demandeur sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 50.000.- francs sur base des dispositions de l’article 240 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que si l’invocation d’une base légale erronée n’entraîne point l’irrecevabilité de la demande en allocation d’une indemnité de procédure à formuler sur pied de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il n’en reste pas moins que malgré l’issue favorable du recours pour le demandeur, celui-ci ne remplit pas les conditions légales afférentes, la situation complexe en fait et en droit ne fondant point en l’espèce le caractère d’iniquité requis par la loi ;

Considérant que bien que mis en intervention suivant exploits d’huissier respectifs, Messieurs … et … préqualifiés n’ont pas fait déposer de mémoire, de sorte que conformément aux dispositions de l’article 6 de ladite loi modifiée du 21 juin 1999, précitée, le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties au litige ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties au litige ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation recevable à l’encontre de l’arrêté de nomination déféré de Monsieur … ;

le déclare irrecevable pour le surplus ;

dit le recours ainsi reçu justifié au fond ;

partant annule l’arrêté de nomination déféré de Monsieur … et renvoie le dossier devant le ministre de la Justice ;

écarte la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 25 juin 2002 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 13


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 13930
Date de la décision : 25/06/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-06-25;13930 ?

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