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05/06/2002 | LUXEMBOURG | N°14168

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 juin 2002, 14168


Tribunal administratif N° 14168 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 novembre 2001 Audience publique du 5 juin 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière de remise gracieuse d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14168 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 novembre 20

01 par Monsieur …, demeurant à L-…, dirigée contre la décision du directeur de l’Administration des ...

Tribunal administratif N° 14168 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 novembre 2001 Audience publique du 5 juin 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière de remise gracieuse d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14168 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 novembre 2001 par Monsieur …, demeurant à L-…, dirigée contre la décision du directeur de l’Administration des Contributions directes datée du 5 septembre 2001 portant rejet de sa demande de remise gracieuse présentée le 20 août 2001 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 février 2002 ;

Vu les pièces versées au cause et notamment la décision critiquée, ainsi que le complément d’informations déposé par Monsieur … en date du 16 avril 2002 ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur … en ses explications, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries à l’audience publique du 29 mai 2002.

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Considérant qu’en date du 20 août 2001 Monsieur …, préqualifié, a fait introduire auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, désigné ci-après par « le directeur », une demande en remise gracieuse conformément aux dispositions du paragraphe 131 de la loi générale des impôts, dite « Abgabenordnung » (AO), relative à sa dette d’impôt sur le revenu ayant trait aux années fiscales 1993 à 2000 ;

Que suivant décision en matière gracieuse portant la référence GR 119.2001 datée du 5 septembre 2001, le directeur a rejeté la demande de Monsieur … après avoir conclu à l’absence de rigueur objective, tout en retenant « qu’une rigueur subjective ne saurait être admise, le requérant reste à défaut d’établir que sa faculté contributive soit affectée de façon dirimante » ;

Considérant qu’en date du 13 novembre 2001 Monsieur … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un courrier recommandé également adressé au directeur de l’administration des Contributions directes, par lequel il entreprend la décision précitée de ce dernier datant du 5 septembre 2001 ;

Considérant que le délégué du Gouvernement conclut en premier lieu à l’irrégularité en la forme du recours introduit, en faisant valoir que le tribunal administratif ne serait point saisi par simple d’acte d’appel, pas plus que par assignation, mais par le dépôt d’une requête lui demandant de contrôler, dans les limites des moyens et des conclusions qui lui sont soumises, la régularité et le bien-fondé de la décision dont recours ;

Que de la sorte ne saurait passer pour un acte introductif de recours la simple communication au tribunal administratif d’une lettre de réponse à l’auteur d’une décision, étant entendu que la forme très allégée du paragraphe 249 AO ne serait pas applicable devant les juridictions de l’ordre administratif ;

Que de plus, la loi exigerait expressément que la décision critiquée soit jointe à l’acte introductif de recours, non seulement parce que le tribunal ne peut contrôler et apprécier un document qui ne lui est pas soumis, mais aussi parce que la qualité et l’intérêt à agir du recours en dépendent ainsi que, le cas échant, le délai de recours ;

Considérant que dans la mesure où la décision directoriale critiquée a été versée au dossier avant le rapport, tant par la partie demanderesse que parmi les pièces du dossier fiscal déposé le 23 avril 2002, le moyen d’irrecevabilité afférent est devenu sans objet, étant entendu que si la régularité en la forme d’une requête introductive d’instance, ensemble ses annexes, s’apprécie au moment de son dépôt, le législateur, à travers l’article 2 alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, a prévu la possibilité d’un dépôt ultérieur de la décision critiquée à travers le recours déposé ;

Considérant qu’à travers l’article 109 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le législateur a admis les justiciables à agir par eux-mêmes devant le tribunal administratif, appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes, de sorte que par dérogation aux dispositions de l’article 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, la requête introductive d’instance n’a point besoin dans cette mesure d’être signée par un avocat de la liste I des tableaux dressés par les conseils des ordres des avocats et, dans un souci d’accès à la justice, les éléments que la requête doit contenir aux termes dudit article 1er peuvent être constitués par équivalent, étant entendu qu’aux termes de l’article 29 de la même loi l’inobservation des règles de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense ;

Considérant que dans la mesure où le délégué du Gouvernement n’a fait valoir aucun élément concret suivant lequel il aurait été porté atteinte aux droits de la défense de l’Etat en l’espèce, le moyen d’irrecevabilité par lui soulevé est en toute occurrence à écarter sur base de l’article 29 de la loi modifiée du 21 juin 1999 en question ;

Considérant que le courrier recommandé de Monsieur … du 13 novembre 2001, valant requête introductive d’instance par équivalent, a ainsi été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi en tant que recours en réformation, le demandeur, à travers sa demande de remise gracieuse formulée, s’étant placé dans le cadre des dispositions de l’article 131 AO ;

Considérant qu’au fond, le délégué du Gouvernement conclut que faute de connaître la décision du directeur, il serait malaisé d’apprécier les critiques dont elle fait l’objet, tout en faisant valoir à travers son mémoire en réponse que d’ores et déjà la requête de Monsieur … serait à écarter dans la mesure où elle contient des contestations formulées par rapport aux impositions sur le revenu effectuées relevant par excellence de la voie contentieuse ;

Qu’en termes de plaidoiries le représentant étatique de faire valoir que le bien-fondé de la demande en remise gracieuse serait à analyser avec effet au moment de sa formulation auprès du directeur et que faute de présentation d’une situation chiffrée permettant pour le moins de dégager une rigueur subjective relativement aux facultés contributives de Monsieur … à ce moment, le recours serait encore à écarter, tandis que la même conclusion s’imposerait par ailleurs pour une évaluation à l’heure actuelle, faute d’élément concret soumis par le demandeur concernant sa situation du moment présent ;

Considérant qu’une remise gracieuse n’est justifiée aux termes du paragraphe 131 AO que si ou bien la situation personnelle du contribuable est telle que le paiement de l’impôt compromet son existence économique et le prive des moyens de subsistance indispensables, ou bien, si, objectivement, l’application de la législation fiscale conduit à un résultat contraire à l’intention du législateur (trib. adm. 12 janvier 2000, Kenkel, n° 10661 du rôle, confirmé par Cour adm. 16 mai 2000, n° 11844C du rôle, Pas adm. 2001, V° Impôts, n° 176, p. 259) ;

Considérant que la décision directoriale déférée est à confirmer dans la mesure où elle a retenu l’absence de tout élément justifiant une rigueur objective dans le chef de Monsieur …, ce dernier n’apportant point d’informations complémentaires en ce sens à travers son recours introduit, ensemble les pièces versées en cause ;

Considérant que statuant dans le cadre d’un recours en réformation sur les demandes en remise gracieuse présentées pardevant le directeur sur base du paragraphe 131 AO, le tribunal est amené à apprécier l’existence d’une rigueur subjective au jour où il statue (trib.

adm. 12 janvier 2000, Kenkel, confirmé par Cour adm. 16 mai 2000, précités, loc.cit.) ;

Considérant que tant la demande en remise gracieuse, étendue sur 6 pages, que la requête introductive d’instance, comportent un mélange d’arguments et de faits s’analysant en grande partie en contestations relatives aux impositions sur le revenu effectuées en cause ;

Considérant qu’il est constant que la disposition du paragraphe 131 AO ne permet pas de remettre en question la détermination de l’impôt, cette dernière étant soumise à d’autres voies de recours (cf. trib. adm. 5 mars 1997, Mokluk, n° 9220 du rôle, Pas. adm. 2001, V° Impôts, n° 184, p. 260 et autres décisions y citées) ;

Qu’il s’ensuit que le recours est non fondé dans la mesure où il remet en question des bulletins d’impôt sur le revenu définitivement arrêtés, sinon attaquables par la voie contentieuse ;

Considérant qu’il n’en reste pas moins que Monsieur … énonce parmi son argumentaire des éléments laissant présager une rigueur subjective à l’heure actuelle dans la mesure où ses facultés contributives semblent a priori compromises quand il énonce qu’après avoir travaillé 36 ans au Luxembourg, il aurait tout perdu et qu’il vivrait, au-delà de loyers touchés relativement à des immeubles largement hypothéqués, notamment à partir des allocations familiales touchées, ayant un enfant en bas âge d’un peu plus d’un an, ainsi qu’une fille de 11 ans à sa charge, relativement à laquelle il serait actuellement assigné en abandon de famille pour ne pas avoir pu honorer ses obligations alimentaires ;

Considérant que force est cependant au tribunal de retenir qu’en l’état actuel des éléments du dossier présentés et à défaut notamment d’une situation actualisée chiffrée relatant les facultés contributives exactes du demandeur ainsi que l’état de sa fortune, notamment au regard des immeubles renseignés au dossier comportant plus particulièrement un état des inscriptions hypothécaires, il n’est pas possible de statuer utilement plus en avant ;

Considérant que s’il est vrai qu’aux termes de l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale incombe au contribuable, il n’en reste pas moins qu’en présence d’un faisceau certain d’indices militant en faveur d’un entérinement éventuel d’une rigueur subjective dans le chef du demandeur et conformément aux dispositions de l’article 7 alinéa 3 de la même loi, dans l’intérêt de l’instruction de l’affaire, le tribunal peut être amené à demander qu’à travers un mémoire écrit supplémentaire les parties instruisent plus en avant tel point précis figurant potentiellement au dossier lui soumis à travers les éléments de fait d’ores et déjà présentés ;

Qu’il convient dès lors de procéder à la réouverture des débats en invitant les parties, dont en premier lieu le demandeur, à relater par un écrit à déposer au greffe du tribunal sa situation de revenus et de fortune actuelle permettant de dégager ses facultés contributives, pièces à l’appui, et comportant notamment, relativement aux immeubles renseignés au dossier fiscal, les revenus effectifs retirés et l’état des inscriptions hypothécaires afférentes prises, le représentant étatique étant invité à prendre position par écrit à titre de réponse, chacun dans les délais lui impartis ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme au fond, avant tout autre progrès en cause, ordonne la réouverture des débats et invite Monsieur … à formuler par écrit, pièces à l’appui, une situation actualisée de ses revenus et de sa fortune permettant de mesurer ses facultés contributives actuelles, comprenant, notamment la situation de ses revenus et charges de toute nature, issues d’obligations alimentaires ou autres dettes, de même que, relativement aux immeubles lui appartenant, un état des revenus en retirés mensuellement et des inscriptions hypothécaires effectuées, le tout à déposer au greffe pour le jeudi 27 juin 2002 au plus tard ;

invite le délégué du Gouvernement à déposer ses observations écrites y relatives pour le lundi 8 juillet au plus tard ;

refixe l’affaire pour continuation des débats à l’audience publique du 10 juillet 2002 à 15.00 heures ;

réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juin 2002 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 14168
Date de la décision : 05/06/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-06-05;14168 ?

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