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15/05/2002 | LUXEMBOURG | N°13777

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 mai 2002, 13777


Tribunal administratif N° 13777 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2001 Audience publique du 15 mai 2002 Recours formé par Monsieur …, Kehlen contre une décision du collège échevinal de la commune de Kehlen en présence de Monsieur … et de Madame …, … ainsi que de Madame …, … en matière de permis de construire, instance reprise, suite au décès de Monsieur …, par Monsieur …, Luxembourg, agissant dans sa qualité de gérant de la tutelle de Mademoiselle …, …

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Tribunal administratif N° 13777 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2001 Audience publique du 15 mai 2002 Recours formé par Monsieur …, Kehlen contre une décision du collège échevinal de la commune de Kehlen en présence de Monsieur … et de Madame …, … ainsi que de Madame …, … en matière de permis de construire, instance reprise, suite au décès de Monsieur …, par Monsieur …, Luxembourg, agissant dans sa qualité de gérant de la tutelle de Mademoiselle …, …

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13777 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 juillet 2001 par Maître Romain LUTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, ayant demeuré à L-

…, tendant à l’annulation de la décision du collège échevinal de la commune de Kehlen du 27 mars 2001, référencée sous le numéro 22/2001 portant autorisation dans le chef de Monsieur … et de Madame …, demeurant à L-…, de construire une maison unifamiliale sur un terrain sis à L-…Kehlen …, appartenant à Madame …, demeurant à L-…;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, demeurant à Luxembourg, du 27 juillet 2001, portant signification de ce recours à l’administration communale de Kehlen ainsi qu’aux consorts …, … et …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 décembre 2001 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Kehlen ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, préqualifié, du 13 décembre 2001, portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur …, ainsi qu’aux consorts …, … et … ;

Vu le courrier de Maître Romain LUTGEN du 13 décembre 2001 déposé au greffe du tribunal administratif le 17 suivant, portant information du décès de Monsieur …, survenu le 3 novembre 2001 ;

Vu l’acte de reprise d’instance de Monsieur …, ingénieur diplômé, demeurant à L-

2680 Luxembourg, 6, rue de Vianden, agissant en sa qualité de gérant de la tutelle de Mademoiselle …, née le 7 mai 1955 à Luxembourg, demeurant à Kehlen, héritière unique de feu Monsieur …, signifié suivant exploit KREMMER des 14 et 15 mars 2002 à l’administration communale de Kehlen ainsi qu’aux consorts …, … et … ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 avril 2002 par Maître Romain LUTGEN au nom de Monsieur …, agissant ès-qualités ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, préqualifié, du 18 avril 2002 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de Kehlen ainsi qu’aux consorts …, … et … ;

Oui le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Romain LUTGEN et Albert RODESCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 6 mai 2002.

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Considérant que par requête introductive d’instance du 26 juillet 2001, Monsieur …, préqualifié, a fait introduire un recours en annulation dirigé contre la décision du collège échevinal de la commune de Kehlen du 27 mars 2001 ayant conféré à Monsieur … et à Madame …, préqualifiés, l’autorisation de construire une maison unifamiliale sur un terrain appartenant à Madame … situé à L-8285 Kehlen, 4a, Domaine du Brameschhaf ;

Considérant que la commune de Kehlen soulève l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir en faisant valoir qu’actuellement la zone du Brameschhaf est intégralement comprise dans le plan d’aménagement général de la commune de Kehlen sous la zone de faible densité, de sorte que les soupçons invoqués par la partie demanderesse, qualifiée de concepteur et de promoteur du Domaine du Brameschhaf relativement au non-respect des normes strictes imposées à l’époque seraient dénués de tout fondement et ne sauraient revêtir d’intérêt pour le demandeur ;

Que la commune de contester encore toute vue directe à partir de la propriété … sur la construction projetée, tout en faisant valoir que contrairement aux affirmations du demandeur tendant à dire que la construction projetée impliquerait un empiètement sur son propre terrain privé, celle-ci longerait en fait à un chemin syndical et ne traverserait point la propriété … ;

Considérant que l’intérêt à agir s’analyse au moment de l’introduction du recours ;

Considérant qu’il est constant que la propriété …, située … Domaine du Brameschhaf, est la voisine directe du terrain … accueillant actuellement la maison de Madame … située … Domaine du Brameschhaf, et devant accueillir celle couverte par l’autorisation de construire déférée, projetée à ses côtés ;

Considérant que la partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier l’intérêt personnel distinct de l’intérêt général ;

Considérant que si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder étant donné qu’il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin (cf. trib. adm. 21 janvier 1997, n° 9443, Wertheim, confirmé par Cour adm. 24 juin 1997, n° 9843C, Pas adm. 2001, V° Procédure contentieuse, n° 10, p. 351 et autres décisions y citées) ;

Considérant qu’en l’espèce, au-delà des éléments d’ordre subjectif ayant existé dans le chef du demandeur, concepteur du Domaine Brameschhaf par lui habité, la proximité de situation par rapport au terrain devant accueillir la construction projetée sous autorisation déférée, ensemble la donnée spécifique de délimitations litigieuses - par ailleurs contestées au civil - entre terrains voisins a priori imbriqués apparaît comme étant suffisante pour justifier l’intérêt à agir dans le chef du demandeur, abstraction faite de la question de savoir si la vue à partir de sa construction existante vers celle projetée est directe de façon totale ou seulement liminairement partielle ;

Considérant que pour le surplus la commune de Kehlen se rapporte à prudence de justice quant au délai pour agir, l’autorisation de construire critiquée datant du 27 mars 2001 et le recours ayant été introduit 26 juillet suivant ;

Considérant que dans la mesure où il n’est pas établi en cause que l’autorisation de construire critiquée a été notifiée au demandeur, sinon rendue publique, notamment à travers l’apposition d’une information afférente sur le chantier, de sorte que connaissance en aurait pu être prise au vœu des dispositions de l’article 13 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le délai de recours est à considérer en l’espèce comme ayant été respecté ;

Considérant que le recours ayant pour le surplus été introduit suivant les formes prévues par la loi, il est recevable ;

Considérant que la reprise d’instance effectuée par Monsieur …, agissant en sa qualité de gérant de la tutelle de Mademoiselle … seule héritière de feu Monsieur …, n’a pas donné lieu à critique et est appelée à être admise comme étant conforme aux exigences posées par la loi ;

Considérant qu’au fond la partie demanderesse invoque en premier lieu l’incompétence de l’autorité ayant pris la décision déférée dans la mesure où le collège échevinal de la commune de Kehlen a statué, alors qu’il aurait appartenu au bourgmestre de ce faire ;

Considérant que la commune admet sans réserve qu’« actuellement la zone du Brameschhaf est intégralement comprise dans le projet d’aménagement général de la commune de Kehlen sous la zone de faible densité » de même qu’« il est exact que la décision a été prise par le collège échevinal, alors que le bourgmestre aurait normalement été compétent pour délivrer seul l’autorisation de construire », tout en faisant valoir que « cet éventuel vice de forme ne saurait toutefois poser un quelconque préjudice à la partie …, dans la mesure où le bourgmestre a également signé l’autorisation de construire et que la présence de deux signatures complémentaires émanant des deux échevins ne change strictement rien de la validité de la décision » ;

Considérant que la compétence du collège échevinal fondée sur l’article 20 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ne se vérifie qu’en présence de terrains compris dans des projets d’aménagement particulier y visés maintenus en vigueur ;

Considérant que devant le fait constant, admis par la commune, de la non-subsistance du plan d’aménagement particulier en tant que tel concernant le Domaine de Brameschhaf, intégré dans le plan d’aménagement général de la commune de Kehlen en tant que zone de faible densité, la compétence en matière de permis de construire est revenue à l’autorité de droit commun en la matière qu’est le bourgmestre de la commune concernée ;

Considérant que l’argument avancé par la commune suivant lequel de toute façon le bourgmestre, en tant que président du collège échevinal, a apposé sa signature sur l’autorisation de construire déférée, à côté de celles des deux échevins, ne saurait l’emporter étant donné que la compétence de l’autorité administrative ayant statué est d’ordre public ;

Considérant qu’une différence fondamentale existe à la base entre le bourgmestre, d’une part, et le collège échevinal, de l’autre, en tant qu’autorité compétente, ce d’autant plus que les résolutions au sein du collège échevinal sont prises à la majorité des suffrages conformément à l’article 50 alinéa 2 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 et que, sauf le cas de parité des voix et de non remise de l’affaire à une autre réunion par le bourgmestre, sa voix n’est pas pondérante, de sorte que dans l’hypothèse donnée d’un collège échevinal à trois membres, l’opinion de son président, le bourgmestre, n’est pas de nature à l’emporter, face à celle des deux échevins, dans l’hypothèse où ils sont unanimement contraires ;

Considérant que force est dès lors au tribunal de retenir que la décision déférée a été prise par une autorité incompétente de sorte à encourir l’annulation ;

Qu’il s’ensuit que l’analyse des autres moyens proposés devient surabondante ;

Considérant que bien que les consorts …, … et … se soient vu signifier la requête introductive d’instance, ils n’ont pas fait déposer de mémoire, de sorte qu’en application des dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, le tribunal est appelé à statuer néanmoins à l’égard de toutes les parties par une décision ayant les effets d’un jugement contradictoire ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision déférée et renvoie l’affaire devant le bourgmestre de la commune de Kehlen ;

condamne la commune de Kehlen aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 mai 2002 par :

M. Delaporte, premier vice-président, M. Schroeder, juge, M. Spielmann, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 13777
Date de la décision : 15/05/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-05-15;13777 ?

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