Tribunal administratif N° 13625 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 21 juin 2001 Audience publique du 25 avril 2002 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 13625 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 juin 2001 par Maître Christiane HOFFMANN, avocat à la Cour, assistée par Maître Katia AÏDARA, avocat, toutes les deux inscrites au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Bérane (Monténégro/Yougoslavie), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…., tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 24 janvier 2001, notifiée le 14 février 2001, portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié politique comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision du même ministre du 21 mai 2001, intervenue sur recours gracieux introduit en date du 15 mars 2001 et déclarant ledit recours gracieux irrecevable ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2001;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Katia AÏDARA et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.
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En date du 28 juin 1999, Monsieur …, ensemble avec ses parents et d’autres enfants mineurs de ceux-ci, introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».
Monsieur … fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la gendarmerie grand-ducale, sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et sur son identité.
Il fut entendu en date du 1er juillet 1999 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.
Le ministre de la Justice l’informa, ensemble avec ses parents et les autres enfants mineurs de ceux-ci, par lettre du 24 janvier 2001, notifiée le 14 février 2001, que sa demande d’asile avait été rejetée comme étant non fondée.
Par courrier de son mandataire datant du 14 mars 2001, réceptionnée par le ministère de la Justice le lendemain, Monsieur … fit introduire, ensemble avec les autres membres de sa famille, un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 24 janvier 2001.
Par décision du 21 mai 2001, le ministre déclara ledit recours gracieux irrecevable pour cause de tardiveté en faisant valoir que bien que daté au 14 mars 2001, il aurait été réceptionné au ministère de la Justice seulement le 15 mars 2001, soit plus d’un mois après la notification de la décision ministérielle de refus du 24 janvier 2001.
A l’encontre des décisions ministérielles prévisées des 24 janvier et 21 mai 2001, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux en réformation par requête déposée en date du 21 juin 2001.
Le délégué du gouvernement conclut principalement à l’irrecevabilité dudit recours pour cause de tardiveté.
Le demandeur rencontre ledit moyen en faisant valoir que le recours gracieux daté au 14 mars 2001 aurait été introduit dans le délai légal d’un mois tel que prévu par l’article 12 de la loi précitée du 3 avril 1996, en estimant que l’argument tiré de la réception dudit recours gracieux en date du 15 mars 2001 serait inopérant et qu’il faudrait prendre en considération non pas la date de réception dudit recours, mais sa date d’envoi, soit le 14 mars 2001.
En l’espèce, il ressort des pièces et éléments du dossier que la décision litigieuse du 24 janvier 2001 a été notifiée au demandeur en date du 14 février 2001. Le délai du recours contentieux a donc expiré le mercredi 14 mars 2001, à savoir dans le délai d’un mois qui court à partir de la notification de la décision de non reconnaissance du statut de réfugié politique, conformément à l’article 12, paragraphe (1) de la loi précitée du 3 avril 1996.
S’il est certes vrai que la loi n’a pas fixé la forme de l’introduction d’un recours gracieux et qu’il suffit que l’acte renseignant ledit recours soit introduit dans le délai légal afin de l’interrompre utilement, il n’en reste pas moins que cette introduction ne se présume pas et qu’il incombe au demandeur de prouver qu’il a introduit son recours auprès de l’autorité compétente dans le délai légal.
Force est de constater à cet égard que la date du 14 mars 2001 figurant sur le recours gracieux du demandeur, et le simple fait de remettre la lettre comprenant le recours gracieux à la poste, ne prouvent pas que ledit recours a effectivement été introduit en date du 14 mars 2001 auprès du ministre de la Justice.
Faute par le demandeur d’apporter une preuve que son recours gracieux a été remis à l’administration à une date déterminée, notamment sous forme de récépissé délivré à la partie intéressée par l’autorité administrative compétente ou son préposé, ou autre, le tribunal ne peut partant que constater qu’il n’est pas établi que le délai du recours contentieux ouvert contre la décision déférée ait utilement été interrompu en cause.
Il s’ensuit que le recours sous examen est irrecevable pour cause de tardiveté.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours irrecevable ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par :
M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, Mme Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 25 avril 2002, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.
Legille Schockweiler 3