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30/01/2002 | LUXEMBOURG | N°14095

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 janvier 2002, 14095


Tribunal administratif N° 14095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 octobre 2001 Audience publique du 30 janvier 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi et du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14095 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 26 oc

tobre 2001 par Maître Fränk ROLLINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à...

Tribunal administratif N° 14095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 octobre 2001 Audience publique du 30 janvier 2002

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi et du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 14095 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 26 octobre 2001 par Maître Fränk ROLLINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision rendue conjointement par le ministre du Travail et de l’Emploi et le ministre de la Justice en date du 28 septembre 2001, refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de séjour ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 31 octobre 2001 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 30 novembre 2001 par Maître Fränk ROLLINGER au nom de Monsieur… ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en ses plaidoiries à l’audience publique du 14 janvier 2002.

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Monsieur … a introduit en date du 13 juillet 2001 une demande en obtention d’une autorisation de séjour auprès du service commun des ministères du Travail et de l’Emploi, de la Justice et de la Famille, de la Solidarité sociale et de la Jeunesse.

Par courrier datant du 28 septembre 2001, le ministre du Travail et de l’Emploi et le ministre de la Justice ont informé Monsieur… de ce qui suit :

« Monsieur, Suite à l’examen de la demande en obtention d’une autorisation de séjour que vous avez déposée en date du 13 juillet 2001 auprès du service commun des ministères du Travail et de l’Emploi, de la Justice et de la Famille, de la Solidarité sociale et de la Jeunesse, nous sommes au regret de vous informer que nous ne sommes pas en mesure de faire droit à votre demande.

En effet, selon l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1.

l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, la délivrance d’une autorisation de séjour est subordonnée à la possession de moyens d’existence personnels suffisants légalement acquis permettant à l’étranger de supporter ses frais de séjour au Luxembourg, indépendamment de l’aide matérielle ou des secours financiers que de tierces personnes pourraient s’engager à lui faire parvenir.

Comme vous ne remplissez pas cette condition, une autorisation de séjour ne saurait vous être délivrée.

Par ailleurs, le dossier tel qu’il a été soumis au service commun ne permet pas au Gouvernement de vous accorder la faveur d’une autorisation de séjour.

En conséquence, vous êtes invité à quitter le Luxembourg endéans un délai d’un mois. A défaut de départ volontaire, la police sera chargée de vous éloigner du territoire luxembourgeois.

(…) ».

Par requête déposée le 26 octobre 2001, inscrite sous le numéro 14095 du rôle, Monsieur… a fait introduire un recours en annulation contre la prédite décision ministérielle.

A l’appui de son recours, il fait valoir que la décision litigieuse aurait été prise par un organe incompétent, à savoir le ministre du Travail et de la Justice agissant conjointement, alors qu’en matière d’autorisations de séjour, la compétence pour accorder ou refuser une autorisation appartiendrait au seul ministre de la Justice. En ordre subsidiaire, le demandeur considère que la décision litigieuse ne serait pas motivée, sinon motivée de façon insuffisante seulement.

Le délégué du Gouvernement rétorque qu’en vertu des dispositions de l’article 11 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, les décisions en matière d’autorisation de séjour relèveraient de la compétence du ministre de la Justice, de sorte que la décision déférée, en ce qu’elle a été prise par ledit ministre, serait intervenue en conformité avec ledit article. Le représentant étatique estime à cet égard que le fait que le ministre du Travail et de l’Emploi a également apposé sa signature sur la décision déférée ne serait pas pertinent pour le contrôle de la légalité de cette dernière, étant donné que cette « contresignature » n’aurait qu’une nature symbolique et ne devrait en aucun cas entraîner l’annulation de la décision du ministre de la Justice.

Quant au moyen basé sur une insuffisance, voire absence de motivation de la décision déférée, le délégué du Gouvernement estime que celle-ci indiquerait sans équivoque tant sa base légale que les considérations en fait qui la sous-tendent en ce qu’elle énonce que Monsieur… ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants légalement acquis et que par conséquent il ne remplit pas les conditions fixées à l’article 2 de la loi du 28 mars 1972 précitée.

A titre subsidiaire, il complète la motivation à la base de la décision déférée en rappelant qu’en date du 31 mai 2001, Monsieur… s’est déjà vu refuser l’entrée et le séjour au Grand-Duché et ce notamment parce qu’il constitue un danger pour l’ordre public, de sorte que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de sa situation et que le recours laisserait d’être fondé.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur insiste sur l’incompétence manifeste de l’organe ayant pris la décision attaquée, à savoir les ministres du Travail et de l’Emploi et de la Justice agissant conjointement, et signale que la demande en autorisation de séjour par lui introduite se situe dans le cadre de la procédure dite de régularisation des sans-papiers, chapeautée par le service commun des ministères de la Justice, du Travail et de l’Emploi et de la Famille, de même que la décision déférée est couchée sur un papier comportant une entête de ces trois ministères.

Quant au refus d’entrée de séjour invoqué par le délégué du Gouvernement dans son mémoire en réponse, le demandeur estime que ce supplément d’informations ne serait pas constitutif d’une analyse de sa situation actuelle et ne permettrait pas de dégager qu’il constituerait toujours un danger pour l’ordre public à l’heure actuelle.

La légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise, de même qu’il appartient au juge de vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute.

Force est de constater qu’en l’état actuel de la législation, une décision relative à l’entrée et au séjour d’un étranger au Grand-Duché au sens de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, relève de la seule compétence du ministre de la Justice, ceci conformément aux dispositions de l’article 11 de ladite loi et sous les restrictions y énoncées tenant notamment au fait que les décisions afférentes sont prises sur proposition du ministre de la Santé lorsqu’elles sont motivées par des raisons de santé publique.

Il s’ensuit qu’en dépit du fait que la demande en obtention d’une autorisation de séjour du demandeur a été introduite auprès d’un service commun regroupant des représentants des ministères du Travail et de l’Emploi, de la Justice, de la Famille et de la Solidarité sociale et de la Jeunesse, et que cette demande a par ailleurs été traitée dans le cadre de la régularisation des sans-papiers ainsi désignée, seul le ministre de la Justice est légalement investi de la compétence pour statuer en la matière.

Le premier moyen du demandeur, basé sur le fait qu’à côté de la signature du ministre de la Justice figure également celle du ministre du Travail et de l’Emploi sur la décision attaquée laisse d’être fondé, étant donné que la signature du ministre du Travail et de l’Emploi n’est pas de nature à mettre en échec, voire de relativiser la compétence en la matière du ministre de la Justice qui, à travers sa signature, a pleinement exercé son pouvoir de décision en la matière.

Concernant ensuite le moyen tiré d’une insuffisance, voire absence de motivation de la décision de refus déférée, il y a lieu de constater qu’il se dégage clairement de la décision attaquée que l’autorisation de séjour a été refusée à Monsieur… au motif que celui-ci ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants légalement acquis lui permettant de supporter ses frais de séjour au Luxembourg, indépendamment de l’aide matérielle et des secours financiers que de tierces personnes pourraient s’engager à lui faire parvenir, ceci sur base des dispositions de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée.

L’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-ci est requis, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm.

2001, V° Etrangers 2. Autorisations de séjour – Expulsions, n° 100 et autres références y citées, p.149).

En l’espèce, force est de constater qu’il ne se dégage ni des éléments du dossier, ni des renseignements qui ont été fournis au tribunal, que Monsieur… disposait de moyens personnels propres suffisants au moment où la décision attaquée fut prise.

A défaut pour le demandeur d’avoir rapporté la preuve de l’existence de moyens personnels ainsi définis, le ministre a dès lors valablement pu refuser l’autorisation de séjour sollicitée sur base de ce seul motif.

Il s’ensuit que le recours en annulation est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 30 janvier 2001 par :

Mme. Lenert, premier juge, M. Schroeder, juge, M. Spielmann, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 14095
Date de la décision : 30/01/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-01-30;14095 ?

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