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21/01/2002 | LUXEMBOURG | N°12873a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 janvier 2002, 12873a


Tribunal administratif N° 12873a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 février 2001 Audience publique du 21 janvier 2002 Recours formé par Monsieur …, … contre 1. une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines et 2. une décision du ministre des Finances en matière de changement d’affectation

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 12873 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif e

n date du 7 février 2001 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau...

Tribunal administratif N° 12873a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 février 2001 Audience publique du 21 janvier 2002 Recours formé par Monsieur …, … contre 1. une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines et 2. une décision du ministre des Finances en matière de changement d’affectation

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 12873 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 février 2001 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, conseiller de direction adjoint auprès de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, véhiculée par deux courriers datant respectivement du 3 octobre et du 15 décembre 2000, l’affectant dans l’intérêt du service et à partir du 1er janvier 2001 au « Service de Contrôle Extérieur de l’administration » à Luxembourg, 7, rue Plébiscite, ainsi que d’une décision implicite de refus du ministre des Finances se dégageant du silence de plus de trois mois par lui observé suite à la réclamation de Monsieur… du 5 octobre 2000 ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 21 novembre 2001 ayant prononcé, avant tout autre progrès en cause, la réouverture des débats afin de permettre aux parties de se prononcer dans un mémoire supplémentaire sur la question de l’existence de dispositions légales et/ou réglementaires régissant le « service de contrôle extérieur » auquel Monsieur… fut affecté à travers la décision déférée du directeur ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2001 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de Monsieur… ;

Vu la notification de ce mémoire par acte d’avocat à avocat intervenue en date du 13 décembre 2001 ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 31 décembre 2001 par Maître André LUTGEN pour compte de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 31 décembre 2001 portant signification de ce mémoire à Monsieur … ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maîtres Jean-Marie BAULER et Jeanne FELTGEN, en remplacement de Maître André LUTGEN, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 janvier 2002.

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Monsieur …, conseiller de direction adjoint auprès de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, ci-après désignée par « Enregistrement », est entré à la direction de l’Enregistrement en date du 1er janvier 1992. Par courrier datant du 3 octobre 2000, le directeur de l’Enregistrement, ci-après appelé « le directeur », s’adressa à Monsieur… dans les termes suivants:

« Monsieur…, Si vous étiez à la hauteur des tâches qui vous sont confiées, vous auriez pu répondre en moins de huit jours au questionnaire envoyé par l’IOTA. Les réponses que vous donnez sont la preuve irréfutable que vous vous moquez royalement de votre supérieur hiérarchique.

Permettez-moi de vous rappeler d’autres faits.

Vous aviez décliné ma demande de représenter notre Administration au niveau communautaire, tâche pour laquelle vous aviez été engagé.

Il y a dix mois que je vous ai demandé de faire une étude relative à l’immatriculation des assujettis et la base minimale d’imposition : Pas de réponse ! Mis à part vos lettres écrites « in propria causa », rares sont celles qui échappent de votre bureau – bunker et qui ne constituent d’ailleurs que des lettres-type relatives à l’EURO soit l’assemblage d’avis que d’autres fonctionnaires de cette Direction vous ont fournis.

La conclusion que j’en tire est celle que vous ne vous montrez pas capable d’assumer des tâches correspondant à un poste dirigeant de la carrière supérieure.

J’ai donc décidé de vous affecter, dans l’intérêt du service à partir du 1er janvier 2001 au « Service du Contrôle Extérieur » de l’Administration.

Je présume que les connaissances que vous avez acquises lors de l’élaboration du système ESKORT constituent une aide précieuse pour ce service, pour lequel un cadre sera créé prochainement.

Vos attributions resteront donc les mêmes à savoir :

- EURO – Groupe de coordination - Groupe de coordination informatique (Ministère des Finances) - Table ronde « Administrations publiques » - Comité-directeur ESKORT - Groupe de travail ESKORT - Groupe de travail EN95.

Veuillez me faire parvenir vos observations éventuelles par retour du courrier ».

Tout en se référant à deux courriers de Monsieur… des 29 novembre et 1er décembre 2000, le directeur informa ce dernier par lettre du 15 décembre 2000 qu’il avait décidé de l’« affecter dans l’intérêt du service et à partir du 1er janvier 2001 au Service du Contrôle Extérieur de l’administration à Luxembourg, 7, rue du Plébiscite », avec l’information qu’il y occuperait le bureau n° 503 au 5ième étage.

Entre-temps, par courrier datant du 5 octobre 2000, Monsieur… s’adressa au ministre des Finances pour lui soumettre, conformément aux dispositions de l’article 33 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désigné par « le statut général », une réclamation contre deux actes du directeur, en l’occurrence une correspondance envoyée par le directeur en date du 28 septembre 2000 au secrétaire général de l’organisation internationale IOTA (Intra-European Organisation of Tax-Administrations), libellée comme suit : « J’avais demandé à l’un de mes collaborateurs expert en la matière (Monsieur…) de répondre à ta lettre du 21 août 2000.

Le 19 septembre ce fonctionnaire a le culot de me répondre par une seule page, celle que je t’envoie en annexe. Je te prie de m’excuser pour cet incident pénible auquel je ne manquerai pas de donner les suites administratives qui s’imposent », ainsi que la communication précitée du directeur du 3 octobre 2000.

Faute de prise de position du ministre dans les trois mois par rapport à cette réclamation, Monsieur… a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1. de la décision du directeur véhiculée par les courriers précités des 3 octobre et 15 décembre 2000 l’affectant à partir du 1er janvier 2001 au Service du Contrôle Extérieur à Luxembourg, 7, rue du Plébiscite, ainsi que 2. de la décision implicite de refus du ministre se dégageant du silence de ce dernier pendant plus de trois mois à partir de la réclamation par lui introduite en date du 5 octobre 2000.

1) Concernant le recours dirigé contre la décision du directeur véhiculée par les courriers des 3 octobre et 15 décembre 2000 A l’appui de son recours le demandeur expose d’abord que la décision déférée ne pourrait pas être considérée comme étant un changement d’affectation, lequel, conformément aux dispositions de l’article 6, paragraphe 2 du statut général, devrait impérativement correspondre à une assignation au fonctionnaire d’un autre emploi correspondant à la fonction - en l’espèce conseiller de direction adjoint - dont il est investi au sein de l’administration. Il estime que cette condition ne serait pas remplie en l’espèce, étant donné que la mutation d’un conseiller de direction adjoint à un service d’exécution serait constitutive, de facto, d’un changement de fonction, lequel ne pourrait être effectué que par l’autorité investie du pouvoir de nomination. Le demandeur conclut partant principalement à l’annulation de la décision déférée, entrevue comme opérant un changement de fonction dans son chef, pour incompétence du directeur ayant statué.

Subsidiairement, au cas où la décision déférée serait considérée comme opérant un changement d’affectation dans son chef, le demandeur conclut encore à l’incompétence du directeur, cette fois-ci par référence aux dispositions de l’article 18 de la loi du 20 mars 1970 portant réorganisation de l’administration de l’enregistrement et des domaines, en vertu duquel la décision de changer d’affectation un agent bénéficiant au moins du grade 10 relèverait, selon lui, de la compétence du ministre des Finances et non pas du directeur.

Au-delà de ce moyen d’incompétence, le demandeur fait encore valoir qu’un changement d’affectation devrait correspondre implicitement à l’assignation au fonctionnaire d’un autre emploi correspondant à son grade et à sa carrière. Dans la mesure où la décision déférée, telle que présentée à travers le courrier du directeur du 3 octobre 2000, insisterait sur le fait qu’il ne serait pas à la hauteur des tâches qui lui sont confiées et qu’il ne se montrerait pas capable d’assumer des tâches correspondant à un poste dirigeant de la carrière supérieure, le demandeur estime que, dans le respect de la logique de la décision déférée, sa nouvelle affectation correspondrait impérativement à l’assignation d’un emploi d’une carrière inférieure à la carrière supérieure et que sa mutation de la direction vers un service d’exécution respecterait cette logique qui serait pourtant contraire à la loi. Le demandeur conclut partant subsidiairement à l’annulation de la décision déférée pour cause de violation des paragraphes 2 et 3 de l’article 6 du statut général.

Le demandeur reproche ensuite à la décision déférée une violation des articles 3 et 5 de la loi du 20 mars 1970 précitée en ce que, conformément aux dispositions de l’article 1er du règlement grand-ducal modifié du 15 décembre 1988 déterminant l’organisation de la direction de l’Enregistrement et les attributions de son personnel, les membres de la carrière supérieure feraient de droit partie de la direction et ne pourraient partant en aucun cas être affectés à un service d’exécution. Il soutient encore que parallèlement les dispositions légales et réglementaires relatives à l’organisation des services d’exécution de l’Enregistrement s’opposeraient à l’affectation d’un conseiller de direction adjoint - grade 14 - à un service d’exécution.

Le demandeur critique en outre la décision déférée en ce que le directeur, sous le couvert d’un changement d’affectation, aurait pris une sanction disciplinaire cachée à son encontre, en violation des dispositions des articles 51, 52 et 56 du statut général. Il soutient finalement que les arguments avancés par le directeur pour justifier la décision déférée seraient incohérents et contradictoires, et que « l’intérêt du service » mis en avant pour justifier cette décision ne serait nullement établi en cause.

A travers la décision déférée, le directeur a entendu changer d'affectation le demandeur en opérant sa mutation à partir de la direction de l’Enregistrement « au Service du Contrôle Extérieur de l’administration ».

Conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi du 20 mars 1970 précitée, l'Enregistrement « comprend la direction, le service d’inspection des bureaux d’enregistrement et de recette, le service d’imposition et de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, le service de la conservation des hypothèques, le magasin de timbres et l’administration des domaines. » Le règlement grand-ducal modifié du 25 novembre 1977 pris en exécution de cette disposition légale et fixant plus particulièrement l’organisation des services d’exécution de l’Enregistrement dispose actuellement au sujet du service d’imposition et de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances à travers son article 3 que « la section de l’assiette et de la surveillance de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances comprend 12 bureaux d’imposition dont 8 sont établis à Luxembourg (Luxembourg I, II, III, IV, V, X, XI et XII), 2 à Esch-sur-Alzette (Esch I et II) et 2 à Diekirch (Diekirch I et II) », ainsi qu’à travers son article 3bis, introduit par règlement grand-ducal du 23 décembre 1992, que « le service compétent pour assurer l’application de la loi du 23 décembre 1992 portant exécution du règlement (CEE) N° 218/92 du Conseil des Communautés Européennes du 27 janvier 1992 concernant la coopération administrative dans le domaine des impôts indirects (TVA) est le « service de coopération administrative en matière de taxe sur la valeur ajoutée ». Ce service est établi à Luxembourg ».

S’il est certes vrai que l’article 3 dudit règlement grand-ducal du 25 novembre 1977, avant sa modification intervenue par règlement grand-ducal du 11 octobre 1990, était composé de deux paragraphes distincts, en l’occurrence d’un paragraphe (1) relatif à la section de l’assiette et de la surveillance de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, lequel déterminait le nombre et la localisation des bureaux d’imposition afférents, ainsi que d’un paragraphe (2) ayant disposé que « la section du contrôle extérieur des assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée et des redevables de l’impôt sur les assurances est assurée par des fonctionnaire des grades 10 à 13 dont l’affectation aux circonscriptions de Luxembourg, d’Esch-sur-Alzette et de Diekirch se fera selon les besoins du service », force est de constater que c’est à juste titre qu’il a été signalé en cause que depuis sa modification intervenue en date du 11 octobre 1990, l’article 3 en question, antérieurement composé de deux paragraphes distincts, fut remplacé par un article 3 non subdivisé, lequel reprend uniquement une version modifiée des dispositions de l’ancien paragraphe (1) dudit article, sans pour autant reprendre les dispositions du paragraphe (2) prérelaté, ceci pour des raisons non vérifiables en l’état par le tribunal, la modification étant intervenue sur invocation de l’urgence et sans que le Conseil d’Etat ne fût entendu en son avis.

Avant de pouvoir utilement évaluer si la mutation du demandeur à partir de la direction de l’Enregistrement « au Service du Contrôle Extérieur de l’administration » constitue effectivement un changement d’affectation ou bien un changement de fonction, sinon encore une sanction disciplinaire cachée, ainsi que de pouvoir prendre position par rapport aux questions de compétence et de légalité s’en dégageant, débattues à travers les mémoires produits en cause, il y a lieu de situer préalablement avec la précision requise par les exigences du contrôle de légalité à effectuer par le tribunal, le service auquel le demandeur fut affecté au regard des dispositions organiques applicables dans le chef de l’administration concernée.

Dans la mesure où un service intitulé « Service du Contrôle Extérieur de l’administration » n’est directement prévu sous ce libellé ni en tant que service au niveau des dispositions de l’article 2, (2) de la loi du 20 mars 1970 précité, ni encore en tant que section du service d’imposition et de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, lequel, en vertu des dispositions de son article 9 comprend deux sections, à savoir « la section de l’assiette et la surveillance de l’impôt sur la taxe sur la valeur ajoutée, de l’impôt sur les assurances et de l’impôt sur les transports », ainsi que « la section du contrôle des redevables des mêmes impôts », sans mentionner pour autant l’existence d’une section, voire d’un service intitulé « Service du Contrôle Extérieur », le tribunal, avant tout autre progrès en cause et en réservant tous droits généralement quelconques des parties, a prononcé par jugement du 21 novembre 2001 la réouverture des débats afin de permettre aux parties de prendre plus amplement position par rapport à la question de l’existence des dispositions légales et/ou réglementaires régissant le service du contrôle extérieur auquel Monsieur… fut affecté à travers la décision déférée du directeur.

Tout en relevant que l’utilisation de l’expression « Service du contrôle extérieur » serait effectivement inappropriée d’un point de vue strictement juridique, car non prévue par les dispositions de la loi organique de 1970 telle que modifiée, le demandeur a insisté dans son mémoire supplémentaire sur le fait que cette expression serait couramment utilisée par les fonctionnaires des administrations fiscales et du ministère de tutelle en vue de désigner le « service d’imposition et de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, section du contrôle des redevables des mêmes impôts », de manière à constituer une terminologie consacrée au niveau de la pratique administrative courante. Il se réfère plus particulièrement à différents organigrammes élaborés et publiés au fil des années, notamment dans le contexte de la lutte contre la fraude fiscale (rapport technique Eskort en date du 16 août 1994 et rapport « Krecké » en date du 16 avril 1997) lesquels permettraient clairement d’identifier la position de la section du contrôle des redevables de la TVA et de l’impôt sur les assurances, communément appelée « contrôle extérieur », pour soutenir que contrairement au « service commun », ainsi désigné par les auteurs desdits rapports, et regroupant les membres de la carrière supérieure assistant le directeur dans ses tâches, le contrôle extérieur serait un service d’exécution ne faisant pas partie de la direction.

Le demandeur soutient en guise de conclusion que l’utilisation du terme « service de contrôle extérieur » n’aurait pu donner lieu à confusion ni dans son propre esprit, ni aux yeux du directeur et que la décision déférée des 3 octobre et 15 décembre 2000 aurait eu pour objet d’opérer sa mutation à partir de la direction à un service d’exécution, en l’occurrence le service d’imposition et de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, section du contrôle des redevables des mêmes impôts.

La partie défenderesse de confirmer dans son mémoire supplémentaire que la désignation « service de contrôle extérieur » utilisée tant dans la décision litigieuse que dans ses mémoires antérieurs viserait effectivement le « service d’imposition et de contrôle de l’impôt sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, section du contrôle des redevables des mêmes impôts » et que le recours à ces termes constituerait une pratique administrative courante visant à éviter l’utilisation d’une désignation jugée trop encombrante, tout en relevant que l’utilisation de cette désignation dans les courriers déférés n’aurait pu donner lieu à confusion dans l’esprit de Monsieur…, rejoignant ainsi la position exposée par ce dernier dans son mémoire supplémentaire du 13 décembre 2001.

Ces explications permettent de dégager, au-delà du caractère imprécis et approximatif des termes effectivement retenus pour opérer la mutation de Monsieur… à un autre service au sein de l’Enregistrement, que le directeur, en s’emparant d’une terminologie certes non consacrée en tant que telle au niveau des dispositions organiques de l’Enregistrement, mais communément admise au niveau de la pratique administrative en tant que désignation banalisée d’un des services d’exécution de l’enregistrement, a entendu muter Monsieur… au service d’imposition et de contrôle de l’impôt sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, et plus particulièrement à la section du contrôle des redevables des mêmes impôts visée au paragraphe (1) de l’article 9 de la loi modifiée du 20 mars 1970 précitée, cette section étant désignée ci-après par « le service de contrôle extérieur ».

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

La partie défenderesse s’empare des dispositions de l’article 9 (4) de la loi modifiée du 20 mars 1970 précitée en vertu desquelles « le contrôle des redevables de l’impôt sur le chiffre d’affaires est assumé par des inspecteurs principaux, des inspecteurs ou des contrôleurs » pour soutenir qu’aucune autre disposition légale, ni aucune disposition réglementaire ne régirait la composition de l’ensemble du personnel du service de contrôle extérieur, de sorte qu’aux termes des textes ayant trait audit service, l’affectation à celui-ci d’un fonctionnaire du grade 14 ne serait prohibée que pour autant que ledit fonctionnaire serait affecté à des tâches de « contrôle des redevables ».

Il est constant en cause que le demandeur, à travers les tâches lui dévolues par la décision déférée, n’est pas appelé à participer à la mission confiée à la section de contrôle des redevables de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les assurances, le mandataire de l’Etat de préciser à cet égard dans son mémoire supplémentaire du 9 octobre 2001 que Monsieur… « ne sera nullement chargé du contrôle des redevables », ainsi que, dans son mémoire déposé en date du 31 décembre 2001, que s’agissant des attributions de Monsieur…, la décision litigieuse du 3 octobre 2000 précise : « Vos attributions resteront donc les mêmes, à savoir : - EURO-Groupe de coordination, - groupe de coordination informatique (Ministère des Finances) ; - table ronde « Administrations publiques » ; - Comité directeur ESCORT ;

group de travail ESCORT ; - groupe de travail EN 95 ».

Force est dès lors de constater qu’en dépit des termes mêmes de la décision déférée, tels qu’explicités et complétés en cours d’instance, les tâches effectivement confiées au demandeur ne s’inscrivent pas dans les prévisions de l’article 9 (1) de la loi modifiée du 20 mars 1970 précitée, lequel circonscrit pourtant avec toute la précision requise la mission du service de contrôle extérieur auquel le directeur a entendu affecter Monsieur….

Cette conclusion ne saurait être énervée par les considérations avancées en cause suivant lesquelles des tâches nouvelles viendront s’ajouter aux attributions du demandeur après l’adoption d’un règlement grand-ducal en cours d’établissement portant organisation d’un service « anti-fraude », étant donné qu’il est constant que lors de la prise de la décision déférée aucun règlement grand-ducal visant à organiser ledit service n’a encore été adopté, de sorte que l’intérêt de ce service non encore créé ne saurait être utilement retenu pour justifier la mutation du demandeur au service de contrôle extérieur tel qu’actuellement défini à travers les missions lui confiées par les dispositions de l’article 9 de la loi modifiée du 20 mars 1970 précitée.

En effet, l’accomplissement des tâches actuelles du demandeur, ainsi que de tâches nouvelles liées à la mise en place et au bon fonctionnement du futur service anti-fraude, mises en avant par la partie défenderesse pour justifier la décision déférée, ne se conçoit pas, en l’état actuel de la législation applicable, dans le cadre de l’activité de contrôle proprement dite, pourtant seule confiée à la section à laquelle le demandeur s’est vu affecter.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision du directeur, concrétisée par ses courriers des 3 octobre et 15 décembre 2000 affectant Monsieur…, dans l’intérêt du service et à partir du 1er janvier 2001, au service de contrôle extérieur encourt l’annulation pour violation de la loi.

2) Concernant le recours dirigé contre la décision implicite de refus du ministre des Finances se dégageant du silence de ce dernier pendant plus de trois mois à partir de la réclamation introduite par Monsieur… en date du 5 octobre 2000.

Encore que Monsieur… se soit adressé au ministre des Finances en date du 5 octobre 2000 pour lui soumettre une réclamation contre deux actes posés par le directeur, en l’occurrence en correspondance envoyée par celui-ci en date du 28 septembre 2000 au secrétaire général de l’organisation internationale « IOTA » prérelatée, ainsi que la communication précitée du directeur du 3 octobre 2000 relative à son affectation au service de contrôle extérieur de l’Enregistrement à Luxembourg, force est de constater que dans le cadre des moyens présentés à l’appui du recours contentieux sous examen, le demandeur n’a présenté aucun moyen en rapport avec le premier acte du directeur visé à travers sa réclamation du 5 octobre 2000, l’ensemble des moyens présentés ayant trait exclusivement à la décision examinée sub 1) ci-avant.

Or, le tribunal ne pouvant statuer que dans le cadre des moyens invoqués à l’appui du recours, il n’a partant pas été mis en mesure de se prononcer utilement par rapport au volet de la décision ministérielle implicite déférée ayant trait au refus du ministre de faire droit à la réclamation de Monsieur… contre la correspondance prédésignée, envoyée par le directeur en date du 28 septembre 2000 au secrétaire général de l’organisation internationale « IOTA ». Le recours est partant irrecevable à cet égard.

Pour le surplus, concernant le deuxième volet de la décision ministérielle implicite déférée, le recours est fondé, étant donné que le courrier prédésigné du directeur du 3 octobre 2000 en ce qu’il est intervenu en violation de la loi eu égard aux développements sub 1), traduit pour le moins une lésion des droits statutaires du demandeur au sens de l’article 33, 1.

de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat. La décision implicite de rejet de la réclamation de Monsieur… formulée sur base dudit article 33,1 encourt partant l’annulation sur base des mêmes motifs ayant conduit à l’annulation de la décision sub 1).

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation dirigé contre la décision directoriale déférée en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision déférée du directeur concrétisée à travers ses courriers des 3 octobre et 15 décembre 2001 ;

reçoit le recours dirigé contre la décision ministérielle déférée portant rejet implicite de la réclamation de Monsieur… contre la décision directoriale ainsi annulée en la forme ;

au fond le dit justifié sous cet aspect ;

partant annule la décision ministérielle déférée dans cette mesure ;

déclare le recours contre la décision ministérielle déférée irrecevable pour le surplus ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 21 janvier 2002 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 9


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 12873a
Date de la décision : 21/01/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-01-21;12873a ?

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