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10/12/2001 | LUXEMBOURG | N°13410

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 décembre 2001, 13410


Tribunal administratif N° 13410 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 mai 2001 Audience publique du 10 décembre 2001

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Recours formé par Monsieur … MIRASHI, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13410 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 7 mai 2001 par Maître Anne MOREL, avocat à la Cour, assistée de Maître Lionel

BERTHELET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Mo...

Tribunal administratif N° 13410 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 mai 2001 Audience publique du 10 décembre 2001

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Recours formé par Monsieur … MIRASHI, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13410 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 7 mai 2001 par Maître Anne MOREL, avocat à la Cour, assistée de Maître Lionel BERTHELET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MIRASHI, né le … à Maliq (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 3 avril 2001, notifiée le 6 avril 2001, confirmant dans son intégralité et sur recours gracieux une première décision du même ministre du 4 décembre 2000 par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 août 2001 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Lionel BERTHELET et Madame le délégué du Gouvernement Malou HAMMELMANN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 novembre 2001.

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Monsieur … MIRASHI introduisit en date du 27 avril 1999 auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur MIRASHI fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la gendarmerie grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Monsieur MIRASHI fut en outre entendu en date du 27 janvier 2000 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

1 Par décision du 4 décembre 2000, notifiée en date du 6 février 2001, le ministre de la Justice informa Monsieur MIRASHI de ce que sa demande avait été rejetée aux motifs que la vie politique se serait stabilisée dans toute l’Albanie, qu’une persécution systématique de membres de l’opposition de la part du régime actuellement en place serait à exclure et qu’il aurait indiqué lui-même ne plus avoir été personnellement menacé après le 2 juillet 1998.

Par courrier de son mandataire datant du 5 mars 2001, Monsieur MIRASHI fit introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle prévisée du 4 décembre 2000. Celui-ci s’étant soldé par une décision confirmative du ministre datant du 3 avril 2001, il a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation de la décision ministérielle du 3 avril 2001 par requête déposée en date du 7 mai 2001.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises.

Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Au fond, le demandeur fait exposer qu’à l’appui de la décision déférée le ministre se limiterait à constater qu’il y aurait eu un rapprochement entre le gouvernement albanais et l’opposition en 1999 pour en déduire que des persécutions contre les membres de l’opposition seraient aujourd’hui à exclure. Il relève toutefois qu’un article du « Luxemburger Wort » ferait état de plusieurs morts et d’arrestations lors d’une manifestation d’opposition au pouvoir en novembre 2000, et qu’en outre un rapport du département d’Etat américain soulignerait que la persécution des membres des opposants au régime aurait toujours cours en Albanie, pour soutenir que ces éléments seraient de nature à mettre sérieusement en cause les raisons ayant conduit le ministre de la Justice à estimer qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays d’origine. Il relève qu’au contraire, les éléments par lui produits en cause conduiraient à penser qu’une personne occupant des fonctions aussi élevées que celles de trésorier d’un parti politique et qui aurait été activement impliquée dans l’activité partisane en qualité de secrétaire organisationnel du « forum de jeunesse » du « parti du Front National Démocrate » pourrait craindre avec raison d’être persécutée au sens de la Convention de Genève dans son pays d’origine.

Le représentant étatique soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation de Monsieur MIRASHI et que son recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

2 La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue (cf. trib. adm. 1er octobre 1997, n° 9699, Pas. adm.

2001, V° Recours en réformation, n° 11, p. 407).

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par Monsieur MIRASHI lors de son audition en date du 27 janvier 2000, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments développés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, force est de constater que la plupart des faits invoqués par le demandeur, -

même à les supposer établis – ne se sont pas déroulés dans un passé récent, de sorte que le tribunal, à la lumière de la situation telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance du demandeur, ne saurait en tirer une conclusion utile en l’espèce. Outre de se référer à la situation générale dans son pays d’origine, non susceptible en tant que telle et à elle seule à justifier la reconnaissance du statut de réfugié, le demandeur n’a en effet pas fourni d’éléments concrets susceptibles de justifier dans son chef l’existence d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève à l’heure actuelle.

Il s’ensuit que le recours est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 10 décembre 2001 par :

Mme Lenert, premier juge, 3 M. Spielmann, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 13410
Date de la décision : 10/12/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-12-10;13410 ?

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