Tribunal administratif N° 13634 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 juin 2001 Audience publique du 24 octobre 2001 Recours formé par Monsieur …, Luxembourg contre un arrêté grand-ducal de refus de nomination en matière de nomination
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 13634 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 juin 2001 par Maître Victor GILLEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …au Laboratoire national de Santé, demeurant à L-1159 Luxembourg, 4, rue d'Avalon, tendant à l'annulation d'un arrêté grand-ducal du 16 mars 2001 portant dans son chef refus de nomination à la fonction de médecin chef de division au Laboratoire national de Santé ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 8 août 2001 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 septembre 2001 par Maître Victor GILLEN au nom de Monsieur … ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 octobre 2001 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment l'arrêté critiqué ;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Victor GILLEN et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l'audience publique du 22 octobre 2001.
Considérant que Monsieur …, préqualifié, a été engagé avec effet au 1er juin 1998 en tant que … auprès du Laboratoire national de Santé, désigné ci-après par « LNS », et y a été affecté à la division … ;
Que par arrêté grand-ducal du 8 septembre 1998, Monsieur … a été nommé … au LNS, tout en restant affecté à la division … dudit laboratoire ;
Que par courrier adressé en date du 25 mars 1999 au ministre de la Santé, Monsieur … s'est exprimé comme suit :
« Monsieur le Ministre, Comme convenu lors de notre entrevue de ce jour, je vous soumets par la présente ma candidature pour le poste de médecin chef de division de la division d'Anatomie/Cytologie pathologiques, poste vacant depuis deux ans et demi.
En vous remerciant d'avance, je vous prie d'agréer, … » ;
Que cette candidature a été réitérée, sinon amplifiée par courrier de son mandataire adressé au ministre de la Santé en date du 21 avril 1999 dont réception a été accusée par courrier ministériel du 27 suivant ;
Que par courrier adressé en date du 22 avril 1999 au directeur du LNS, le ministre de la Santé s'est exprimé comme suit :
« Monsieur le Directeur, Me référant au courrier du Dr. … relatif à l'affaire sous rubrique, je voudrais vous informer qu'en vertu d'une décision de principe du Conseil de Gouvernement du 22.7.1977 le fonctionnaire de l'Etat ne peut obtenir une promotion dans sa carrière qu'après un délai d'attente d'une année à partir de sa première nomination. Le Dr. … ayant été nommé … de service avec effet au 1.9.1998, aucune promotion ne peut donc avoir lieu avant le 1.9.1999.
Par ailleurs, je voudrais relever qu'actuellement le service d'anatomie pathologique du Laboratoire national de Santé est dirigé par un médecin chef de division fonctionnaire de l'Etat tandis que la division de cytologie clinique est gérée par un médecin chef de division faisant fonction ayant la qualité d'employé de l'Etat.
La désignation d'un nouveau chef de division au niveau du service de la cytologie clinique se fera au moment du départ définitif du titulaire actuel et sur proposition de la Direction du Laboratoire national de Santé.
Veuillez agréer, … » ;
Que Monsieur … s'est adressé au nouveau ministre de la Santé pour lui rappeler sa demande pendante par courrier de son mandataire du 8 septembre 1999, dont réception a été accusée par courrier ministériel du 17 suivant ;
Que le ministre de la Santé a adressé au mandataire de Monsieur … la prise de position suivante, étant entendu que par lettre sous-relatée du 5 mai 2000, le ministre admet que la date doit se lire comme étant le ler octobre 1999 :« Maître, Je reviens sur le dossier sous rubrique pour vous communiquer ma prise de position.
L'article 3 de la loi du 21 novembre 1980 portant réorganisation de l'Institut d'hygiène et de santé publique et changeant sa dénomination en Laboratoire national de santé dispose que le Laboratoire national est subdivisé en huit divisio ns. Cinq divisions à savoir La division d'anatomie pathologique ;
La division de bactériologie et de parasitologie ;
La division de cytologie clinique ;
La division d'hématologie et La division de virologie, immunologie et cytogénétique sont dirigées par un médecin-chef de division tandis que les trois unités restantes relèvent de la compétence d'un ingénieur-chef de division. Cette organisation se trouve d'ailleurs confirmée par les fonctions qui sont reprises à l'article 5 de cette même loi qui prévoit cinq médecins-chef de division et trois ingénieurs-chef de division.
Le poste vacant brigué par votre partie existe au niveau de la division de cytologie clinique. Or, il ressort de la correspondance que je vous adresse en annexe que le Dr. … fut engagé pour renforcer l'effectif de la division … et qu'il fait donc partie de cette division qui est dirigée par un médecin-chef de division qui est toujours en fonction.
L'organisation et la structure des services du Laboratoire national de santé se trouvent donc réglées par la loi précitée et je ne suis pas autorisé à y déroger en attribuant à votre partie une fonction dans une division dont il ne fait pas partie.
Un recours contre la présente décision peut être exercé dans un délai de trois mois à partir de la réception de la présente auprès du tribunal administratif La requête doit être présentée par un avocat inscrit sur la liste visée sous 1. de l'article 8 paragraphe (3) de la loi sur la profession d'avocat.
Veuillez agréer, … » ;
Que sur recours gracieux de Monsieur … introduit par courrier de son mandataire du 23 décembre 1999, une entrevue avec le ministre a eu lieu en date du 7 février 2000 au cours de laquelle ce dernier a confirmé ses prises de position antérieures ;
Que par décision du 5 mai 2000, adressée au mandataire de Monsieur …, le ministre a statué sur le recours gracieux lui soumis comme suit :
« Maître, Par votre courrier du 21 mars 2000, vous m'avez fait parvenir différents certificats attestant les compétences et le zèle au travail du Dr. … au cours de sa formation de médecin-
spécialiste en … au Luxembourg.
3 Dans ma lettre datée au 1 er septembre 1999, mais expédiée le 1.10.1999 et lors de notre entrevue du 7 février 2000, j'avais invoqué que ce sont des problèmes d'organisation interne du Laboratoire national de Santé qui m'empêchent de nommer votre client à la fonction de médecin chef de division de la cytologie clinique. La qualification professionnelle du Dr. … n'a donc été mise en doute à aucun moment.
Concernant l'organisation future du Laboratoire national de Santé, les services de mon département viennent d'entamer les travaux préparatoires en vue d'une modification de la loi-cadre existante qui date depuis novembre 1980. Le nouveau projet tiendra notamment compte des recommandations et propositions qui se dégageront d'un audit administratif que j'envisage de réaliser au niveau des différentes structures existantes.
En attendant, je maintiendrai la décision de refus avec les motifs énoncés dans ma correspondance du 1.9.1999 et confirmés lors de l'entrevue du 7.2.2000.
Un recours contre la présente décision peut être exercé dans un délai de trois mois à partir de la réception de la présente au tribunal administratif La requête doit être présentée par un avocat inscrit sur la liste visée sous 1. de l'article 8 paragraphe (3) de la loi sur la profession d'avocat.
Veuillez agréer, .. » ;
Considérant que par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 août 2000, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l'annulation des deux décisions ministérielles prérelatées datées des l' septembre 1999 et 5 mai 2000 ;
Considérant que suite à un premier jugement du 6 décembre 2000 (n° 12215 du rôle) ayant ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de prendre position sur la question de la compétence de l'autorité administrative ayant pris les décisions déférées, le tribunal, par jugement du 17 janvier 2001 (n° 12215a du rôle) a annulé les décisions ministérielles déférées pour incompétence, le refus de nomination devant émaner en l'espèce directement du Grand-Duc, autorité de nomination compétente aux termes de l'article 35 de la Constitution ;
Considérant qu'à la suite de ce jugement, non appelé, est intervenu un arrêté grand-
ducal du 16 mars 2001, contresigné par le ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, pris dans les termes suivants :
« Nous Henri, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau, Vu la demande du 25 mars 1999 de Monsieur le Dr …, … au Laboratoire national de Santé, tendant à obtenir une nomination au poste de médecin-chef de la division d'anatomie/cytologie pathologiques au prédit laboratoire Vu la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat ;
Vu la loi du 21 novembre 1980 portant réorganisation de l'Institut d'hygiène et de santé publique et changeant sa dénomination en Laboratoire national de Santé ;
4 Vu le dossier constitué à la suite de la demande du Dr …, comprenant notamment un jugement du 17 janvier 2001 annulant pour incompétence une décision du ministre de la Santé refusant de faire droit à la demande de l'intéressé ;
Considérant que le Laboratoire national de Santé ne comprend aucune division portant la dénomination de « division d'anatomie/cytologie pathologiques » à la tête de laquelle le Dr … revendique le poste de médecin-chef de division ; qu'il ne saurait dès lors être fait droit à sa demande ;
Considérant subsidiairement que pour le cas où le Dr … sollicite une nomination en tant que médecin-chef de la division …, il ne saurait pas non plus être fait droit à sa demande, alors que cette division est pourvue d'un titulaire ;
Considérant plus subsidiairement que pour le cas où le Dr … sollicite une nomination en tant que médecin-chef de la division de cytologie clinique, il échet de relever que l'intéressé est actuellement affecté à la division de … ; qu'un transfert d'une division dans l'autre n'est pas dans l'intérêt du service ;
Sur le rapport de Notre Ministre de la Santé et de la Sécurité Sociale et après délibération du Gouvernement en Conseil ;
Arrêtons :
Art. ler.- La nomination à la fonction de médecin-chef de division au Laboratoire national de Santé est refusée au Dr ….
Art. 2.- Notre Ministre de la Santé et de la Sécurité Sociale est chargé de l'exécution du présent arrêté » ;
Considérant que par requête déposée en date du 22 juin 2001, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation dirigé contre l'arrêté grand-ducal prérelaté du 16 mars 2001 pour absence de motivation, excès, sinon détournement de pouvoir, incompétence et violation de la loi ;
Considérant que la loi ne prévoyant aucun recours de pleine juridiction en la matière, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi ;
Considérant que la partie demanderesse reproche à l'arrêté grand-ducal déféré de ne pas respecter l'autorité de la chose jugée se dégageant du jugement précité du 6 décembre 2000 ayant retenu que l'article 8, alinéa l' de la loi modifiée du 21 novembre 1980 précitée ne pose aucun critère inhérent à l'appartenance d'un candidat, par définition médecin chef de service, à la division pour laquelle il brigue le poste de médecin-chef de division ;
Considérant que l'autorité de la chose jugée, présupposant la triple identité de cause d'objet et des parties vérifiée, ne s'attache qu'au dispositif d'une décision judiciaire, ensemble les motifs le sous-tendant directement ;Considérant qu'au-delà de la question de savoir si la triple identité à la base de l'autorité de la chose jugée est vérifiée en l'espèce, il est patent que le jugement précité du 6 décembre 2000 n'a pas statué au fond et que celui l'ayant vidé du 17 janvie r 2001, non appelé, également précité, a annulé les décisions déférées uniquement en raison de l'incompétence de l'autorité ministérielle ayant statué ;
Que force est encore de constater que le motif actuellement invoqué par la partie demanderesse ayant trait à la portée de l'article 8, alinéa 1'de la loi modifiée du 21 novembre 1980 précitée ne sous-tend pas directement la décision d'annulation pour incompétence de l'autorité ministérielle ayant statué, de sorte que l'autorité de la chose jugée invoquée ne saurait être utilement retenue pour l'élément de motivation en question dans le chef des jugements prévisés ;
Que le moyen est dès lors à écarter ;
Considérant que la partie demanderesse reproche encore à l'arrêté grand -ducal déféré d'avoir procédé de manière péremptoire en retenant dans son dispositif de façon non autrement nuancée que « la nomination à la fonction de médecin-chef de division au Laboratoire national (lui) est refusée » ;
Considérant que toute décision administrative individuelle est prise dans le chef d'un ou de plusieurs administrés déterminés, au voeu de la situation concrète du dossier tel qu'il s'articule le jour où l'autorité administrative est appelée à statuer ;
Qu'une décision administrative individuelle se cristallise dès lors à la fois dans le temps et par rapport aux éléments constants du dossier au moment où elle est posée, de sorte à n'avoir aucun effet ni général, ni intemporel ;
Considérant que l'apparence générale de l'article ler de l'arrêté grand-ducal déféré se dégage en l'espèce à partir de ses considérants ;
Considérant que bien qu'il ait pu apparaître des éléments du dossier que Monsieur … a brigué le poste de médecin chef de la division de cytologie clinique au Laboratoire national de Santé, le fait pour l'autorité de nomination de considérer à la lettre les termes de sa demande de nomination initiale du 25 mars 1999, telle que confirmée par la suite, ne saurait entraîner l'annulation de l'arrêté déféré ;
Que c'est dès lors dans la logique de la lecture ainsi menée que l'arrêté grand -ducal déféré a pu considérer en ordre principal qu'il n'existe aucune division portant la dénomination de « division d'anatomie/cytologie pathologiques », de sorte qu'aucune nomination à la fonction de médecin chef de pareille division n'a pu avoir lieu ;
Que sous la même lecture l'arrêté grand-ducal déféré n'est pas critiquable en ce qu'il a retenu que la division d'anatomie pathologique étant pourvue d'un titulaire, une nomination en tant que médecin chef de cette division n'a pas pu intervenir le 16 mars 2001, pour le cas où la demande de Monsieur … aurait dû être interprétée dans ce sens que le poste en question était également brigué ;
Considérant qu'il s'ensuit que c'est à tort que la partie demanderesse a analysé l'arrêté déféré comme lui refusant à jamais l'accès à la fonction de médecin-chef de division, de sorteque ces conclusions tendant à voir établir un excès sinon un détournement de pouvoir voire une violation de la loi à ce niveau sont dénuées de fondement ;
Considérant que dans la mesure où il a pu être effectivement confirmé par le demandeur à travers la procédure contentieuse actuellement menée qu'il n'a brigué que le seul poste de médecin-chef de la division de cytologie clinique, il convient d'analyser plus particulièrement l'arrêté grand-ducal déféré au regard de son ordre plus subsidiaire ayant trait au refus de nomination de Monsieur … à ce poste ;
Considérant que dans le cadre du recours en annulation reçu, le tribunal est également appelé à porter son analyse à la seule date de la prise de l'arrêté déféré, compte tenu des éléments du dossier cristallisés à ce moment, à savoir le 16 mars 2001 ;
Considérant qu'il s'ensuit que toute référence faite par le demandeur à la nomination intervenue à la date du 27 avril 2001 dans le chef du docteur … aux fonctions de … du Laboratoire national de Santé est sans caractère pertinent dans le cadre de la présente instance en raison de la postériorité dans le temps des faits ainsi invoqués par rapport à l'arrêté déféré ;
Considérant qu'il est constant en cause que pareillement à la situation ayant prévalu au moment où les décisions ministérielles précitées des ler septembre 1999 et 5 mai 2000 ont été prises, le poste de médecin-chef de la division de cytologie clinique a été vacant à la date où l'arrêté déféré a été posé ;
Considérant que la partie demanderesse de critiquer l'arrêté déféré plus particulièrement pour défaut de motivation suffisante, en ce que pareillement aux décisions ministérielles entre -
temps annulées, il se bornerait à avoir recours à des formules générales et abstrait es sans tenter de préciser concrètement dans le cas d'espèce les raisons de fait permettant de justifier la décision prise ;
Que toujours pareillement aux décisions ministérielles en question, l'arrêté déféré retiendrait que le changement de service aurait été impossible dans l'intérêt du service, ceci contrairement aux considérants du jugement précité du 6 décembre 2000 ;
Que l'administration aurait repris en fait la même argumentation sauf à la maquiller maintenant en intérêt de service ;
Qu'il faudrait constater par ailleurs qu'un médecin-chef de division serait sinon indispensable, du moins nécessaire, étant donné que la loi en prévoit un ;
Qu'il serait dès lors indiqué dans l'intérêt du service que le poste prévu par la loi soit occupé et tende à renforcer le personnel de la division concernée, sans devoir, comme tel est le cas actuellement, avoir recours à des spécialistes d'autres divisions pour assumer le travail à y prester ;
Considérant que le délégué du Gouvernement de relever que l'argument de l'intérêt du service n'est pas nouveau, en ce qu'il résulte déjà de la correspondance échangée antérieurement entre le mandataire du docteur … et le ministre de la Santé, notamment de sa lettre du ler septembre 1999, de même qu'il a constitué l'argument principal sinon exclusif sur lequel reposait la première décision de refus ;Que le représentant étatique de renvoyer à son mémoire en réponse du 8 septembre 2000 déposé dans le cadre du recours ayant porté le numéro 12215 du rôle où il avait déjà conclu en ce sens que « le requérant estime qu'il a droit à la nomination sollicitée et que le refus ministériel viole la loi du 21 novembre 1980 sur le laboratoire national de santé.
Le problème qui se pose en l'occurrence est celui de savoir si un fonctionnaire, abstraction faite du cas où ses promotions/avancements font l'objet d'une réglementation spécifique, peut faire valoir un droit à une nomination à un poste qui représente pour lui une promotion.
La réponse à cette question est négative alors que les avancements à un poste à responsabilité particulière comportent pour l'autorité investie du pouvoir de nomination une possibilité d'appréciation et une évaluation des intérêts du service en cause.
Dans le cas d'espèce, le requérant a été nommé six mois avant l'introduction de sa demande à un poste nouvellement créé dans la division anatomie pathologique. Sa nomination dans un autre service ne manquerait pas de susciter des perturbations sérieuses au sein de l'organisation du laboratoire national de santé. (voir courrier annexé du directeur). Le changement de service peut ainsi être refusé par le chef d'administration si les intérêts du service s'y opposent (art. 6 L. modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de 1 'Etat).
Or il est évident que l'intérêt du service est, sauf circonstance exceptionnelle, de maintenir le fonctionnaire dans la division dans laquelle il a débuté et développé ses connaissances et son savoir-faire. En décider autrement revient à forcer l'administration à assister, impuissante, au slalom de ses médecins, engagés pour une division A, passer à une division B pour y devenir chef de service, puis à une division C pour y occuper le poste de chef de division.
C'est pour éviter ces situations que le législateur n'a pas prévu de droit au changement de service mais seulement une faculté, un pouvoir d'appréciation devant être réservé au chef d'administration chargé de veiller aux intérêts du service.
Dans ces conditions et vu la motivation du refus, le recours laisse d'être fondé » ;
Que le délégué du Gouvernement de renvoyer encore à la communication du médecin-
directeur du LNS du 22 septembre 1999 adressée au ministre de la Santé en ce que le docteur … n'exerçait à l'époque aucune fonction, ni responsabilité dans la division de cytologie clinique ainsi qu'il ressortirait sans équivoque de l'organigramme joint ;
Que le médecin directeur d'énoncer dans le même avis, auquel le délégué du Gouvernement renvoie actuellement, que le poste actuellement brigué par Monsieur … revient de plein droit à un médecin qui prend des responsabilités médicales et civiles dans la division dont s'agit, ce qui ne serait pas le cas de l'intéressé attaché à la division d'anatomie pathologique ;
Considérant que la loi modifiée du 21 novembre 1980 précitée dispose en son article 8, alinéa ler que « afin d'obtenir une promotion aux fonctions de médecin-chef de division, dedirecteur adjoint et de directeur, le médecin-chef de service doit justifier d'une spécialisation dans une des branches de la biologie médicale » ;
Considérant qu'il importe de répéter à la suite du jugement précité du 6 décembre 2000 qu'il est patent que le texte en question ne pose aucun critère inhérent à l'appartenance d'un candidat, par définition médecin chef de service, à la division pour laquelle il brigue le poste de médecin chef de division, tout comme pareille exigence ne rimerait à rien concernant les postes de directeur et de directeur-adjoint du LNS, l'établissement comportant huit divisions y prévues d'après l'article 3 de ladite loi du 21 novembre 1980 ;
Considérant qu'il s'ensuit que l'invocation abstraite de l'appartenance du médecin-chef de service candidat à un poste de médecin-chef de division à la division dont il brigue la fonction de direction ne saurait valoir à elle seule comme motif de refus de promotion sous le couvert de l'intérêt du service invoqué ;
Considérant que l'intérêt du service dicte par ailleurs qu'un poste de médecin-chef de division, prévu expressément par la loi, mais devenu vacant, soit revêtu dans les meilleurs délais par un fonctionnaire répondant aux critères fixés par la loi ;
Considérant qu'analysé suivant son seul contenu exprimé, l'arrêté grand-ducal déféré, tout en renvoyant de façon globale au dossier constitué à la suite de la demande du docteur …, énonce comme motif à la base de son ordre plus subsidiaire sous analyse portant sur la demande de l'intéressé pour le poste effectivement brigué de médecin-directeur de la division de cytologie clinique qu'« il échet de relever que l'intéressé est actuellement affecté à la division d'anatomie pathologique ; qu'un transfert d'une division dans l'autre n'est pas dans l'intérêt du service » ;
Considérant qu'à ce stade force est de constater que l'argumentaire ainsi déployé n'est point concret mais se limite à avancer la formulation abstraite qu'un changement de division ne serait pas dans l'intérêt du service, motivation insuffisante pour justifier un refus de nomination, d'après les développements qui précèdent ;
Considérant qu'il est admis qu'en cours de procédure contentieuse des motifs complémentaires peuvent être invoqués à l'appui d'un arrêté déféré, sous la condition que ces éléments de motivation aient existé au moment où la décision critiquée a été prise ;
Considérant que force est au tribunal de constater que le représentant étatique, en renvoyant aux éléments du dossier déjà invoqués à la base des décisions minis térielles, du ler décembre 1999 et du 5 mai 2000, entre-temps annulées, se place ratione temporis aux époques respectives en question, en deçà du moment où l'arrêté actuellement critiqué a été pris ;
Considérant que plus particulièrement l'argumentaire étatique manque ainsi en fait dans la mesure où à la date de la prise de l'arrêté déféré l'engagement initial de Monsieur … remontait à deux ans et demi dépassés, de sorte que l'argument tiré d'un changement rapproché dans le temps à partir du service auquel il a été initialement affecté ne saurait plus valoir ;
Considérant que de même l'argumentation, par renvoi à l'avis du médecin-directeur du LNS du 22 décembre 1999 en ce que le docteur … ne prendrait pas de responsabilitémédicale et civile dans la division de cytologie clinique, n'est pas pertinente dans la mesure où elle ne fait que rejoindre la position de principe ci -avant écartée au regard des dispositions de l'article 8, alinéa 1' de la loi modifiée du 21 novembre 1980, qu'un médecin-chef de service ne saurait accéder à la fonction de médecin-chef de division que dans la division à laquelle il a été jusque lors affecté ;
Que pour le surplus, dans la mesure où la prise de position précitée du directeur du LNS devait s'analyser sur un plan qualitatif, celle-ci se trouve être tenue en échec par les énonciations non équivoques faites à sa suite par le ministre de la Santé qui, dans sa décision postérieure en date du 5 mai 2000, à laquelle le représentant étatique a pour le moins implicitement renvoyé, a retenu sans équivoque que la qualification professionnelle du docteur … n'a été mise en doute à aucun moment, de sorte que celle-ci doit être retenue comme étant acquise en cause ;
Considérant que dans la mesure où l'Etat a pour le moins implicitement maintenu la position ministérielle prévisée consistant dans le fait de ne pas mettre en doute la qualification professionnelle de l'intéressé, les reproches par ailleurs formulés en ce qu'il n'aurait pas dans un passé récent, presté de service dans l'intérêt de la division de la cytologie clinique dont il brigue le poste de chef de division, contrairement à d'autres collègues, n'ont pu valablement porter en droit ;
Considérant qu'il s'ensuit que les motifs complémentaires invoqués à l'appui de l'arrêté déféré par le délégué du Gouvernement dans le cadre de la procédure contentieuse, essentiellement par renvoi, ne permettent pas non plus de dégager des éléments concre ts ayant trait à l'intérêt du service pouvant utilement valoir au moment où l'arrêté déféré a été pris, au-delà de l'affirmation générale qu'un transfert de division serait par essence contraire à l'intérêt du service comme ne correspondant pas aux exigences légales en la matière et des explications tout aussi générales qu'abstraites du représentant étatique dans son premier mémoire prérelaté, cité par renvoi ;
Considérant qu'il se dégage de l'ensemble des développements qui précèdent que le défaut de précision ainsi constaté dans le chef de la motivation d'ordre général assise sur le seul critère de l'intérêt du service s'analyse en une absence de motivation suffisante à la date où l'arrêté déféré a été pris, partant en une carence de motifs légaux, précis et pertinents, devant engendrer l'annulation de l'arrêté déféré ;
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en la forme ;
au fond le dit justifié ;
partant annule l'arrêté grand-ducal déféré ;
condamne l'Etat aux frais.Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 24 octobre 2001 par :
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge Mme Thomé, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
s. Schmit s. Delaporte 11