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24/09/2001 | LUXEMBOURG | N°13143

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 septembre 2001, 13143


Tribunal administratif N° 13143 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 mars 2001 Audience publique du 24 septembre 2001

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Requête formée par Monsieur … SHEQERI et son épouse Madame … … en présence du ministre de la Justice en matière de relevé de déchéance

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13143 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 29 mars 2001 par Maître Benoît ARNAUNE-GUILLOT, avocat à la Co

ur, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … SHEQERI, né le … à Tiran...

Tribunal administratif N° 13143 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 mars 2001 Audience publique du 24 septembre 2001

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Requête formée par Monsieur … SHEQERI et son épouse Madame … … en présence du ministre de la Justice en matière de relevé de déchéance

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 13143 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 29 mars 2001 par Maître Benoît ARNAUNE-GUILLOT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … SHEQERI, né le … à Tirana (Albanie), et de son épouse, Madame … …, née le … à Tirana, tous les deux de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-…, agissant en leur nom personnel ainsi qu’en nom et pour compte de leur enfant mineur …, née le … à Tirana, tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision du ministre de la Justice du 12 décembre 2000, notifiée le 17 janvier 2001, portant refus du statut de réfugié politique ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 mai 2001 ;

Vu les pièces versées en cause ;

Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Benoît ARNAUNE-

GUILLOT, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Les consorts SHEQERI-…, préqualifiés, se virent notifier à personne en date du 17 janvier 2001, une décision du ministre de la Justice datant du 12 décembre 2000, portant refus dans leur chef du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, prononcé sur base de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire.

En date du 29 mars 2001, les consorts SHEQERI-… ont fait déposer une requête tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai d’un mois imparti pour l’introduction d’un recours contentieux contre la décision précitée du ministre de la Justice du 12 décembre 2000.

A l’appui de leur recours, les demandeurs font exposer qu’en date du 8 février 2001, ils ont reçu la confirmation du délégué du bâtonnier à l’assistance judiciaire de ce que l’assistance judiciaire leur aurait été accordée en leur indiquant le nom de leur avocat, que le même jour leur avocat aurait également reçu un courrier de la part du prédit délégué l’informant de ce qu’il est chargé d’assister les demandeurs dans la procédure pour intenter un recours en réformation à l’encontre d’une décision du ministre de la Justice notifiée en date du 17 janvier 2001.

Le mandataire des demandeurs souligne n’avoir reçu aucune pièce qui lui aurait permis de prendre position et « de répliquer utilement à l’argumentaire développé par le ministre de la Justice dans son courrier du 12 décembre 2000 », qu’il n’aurait pu consulter le dossier de ses mandants qu’en date du 20 mars 2001 et que ses mandants l’auraient informé qu’ils auraient sollicité des « documents indispensables et essentiels pour étayer leurs motivations et appuyer leur demande ». Il soutient que ce serait en raison « de cette combinaison malencontreuse d’impondérables » que les demandeurs se seraient trouvés dans l’impossibilité d’agir dans le délai de la loi et qu’un recours aurait été « malvenu et prématuré dans les circonstances de l’espèce ».

Le délégué du gouvernement fait valoir que les deux conditions posées par l’article 1er de la loi modifiée du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice ne seraient pas remplies en l’espèce.

La requête en relevé de déchéance, non autrement contestée sous ce rapport, ayant été présentée suivant les formes et délai prévus par la loi, elle est recevable.

La loi précitée du 22 décembre 1986 dispose en son article 1er que « si une personne n’a pas agi en justice dans le délai imparti, elle peut, en toutes matières, être relevée de la forclusion résultant de l’expiration du délai si, sans qu’il y ait eu faute de sa part, elle n’a pas eu, en temps utile, connaissance de l’acte qui a fait courir le délai ou si elle s’est trouvée dans l’impossibilité d’agir ».

Il est constant en cause qu’à partir de la notification en date du 17 janvier 2001, les demandeurs ont eu connaissance de l’acte qui a fait courir le délai, étant entendu que ladite décision comprend l’indication complète des voies de recours ensemble l’indication de sa communication aux demandeurs.

Les demandeurs ne rentrent dès lors pas sous les prévisions du premier cas d’ouverture d’un relevé de déchéance prévu par la loi.

L’article 1er de la loi précitée du 22 décembre 1986 prévoit néanmoins un autre cas d’ouverture pouvant donner lieu au relevé de déchéance, à savoir l’hypothèse dans laquelle, bien que les demandeurs ont eu connaissance de l’acte en question, ils étaient néanmoins dans l’impossibilité d’agir.

Le relevé de forclusion, intervenant par rapport à des délais de recours ayant un caractère d’ordre public ainsi qu’un effet en principe automatique, constitue un incident grave et exceptionnel de sorte qu’il y a lieu d’interpréter la notion d’impossibilité d’agir d’une manière restrictive ( cf. Cour d’appel, 20 décembre 1991, Pas. 28, p. 250).

2 Dans l’hypothèse où un mandataire a été chargé par une personne, même si, comme dans le cas d’espèce, le mandataire a été chargé par le délégué du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Luxembourg, qui agit en nom et pour compte des demandeurs, en vue de l’introduction d’un recours dans une matière dans laquelle le droit de postulation d’un professionnel est la règle, comme celle sous rubrique réservant aux avocats à la Cour le monopole des recours à intenter au fond contre des décisions administratives individuelles, l’impossibilité d’agir n’est en principe pas donnée, lorsque le mandat pour agir a été conféré en temps utile au professionnel par le justiciable concerné (cf. trib. adm.

2 octobre 2000, Mujkovic, n° 12175 du rôle).

Il est dès lors de principe que la négligence de l’intermédiaire chargé d’agir ne justifie pas un relevé de forclusion (cf. Encyclopédie Dalloz, Procédure Civile, V° Délais, n° 45).

En effet, admettre le raisonnement adverse impliquerait que la partie demanderesse, une fois son mandat conféré, devrait être relevée de la déchéance, quelle que soit la cause justificative de l’inaction du professionnel concerné, ce qui reviendrait à outrepasser sans cause légitime des délais par ailleurs fixés à titre obligatoire par le législateur, le relevé de déchéance étant à interpréter de façon restrictive, vu son caractère exceptionnel, suivant la loi précitée du 22 décembre 1986.

En l’espèce, aucune justification valable de l’inaction du professionnel chargé du dossier des demandeurs n’a été fournie. En effet, celui-ci a été désigné par le délégué du bâtonnier en date du 8 février 2001, soit 9 jours avant l’expiration du délai de recours. Par ailleurs, il ressort du courrier du 8 février 2001 qui lui a été adressé par le délégué du bâtonnier qu’il avait été informé de ce que le délai de recours pour intenter un recours en réformation devant le tribunal administratif expirerait le 17 février 2001, de sorte que ce dernier aurait dû effectuer les diligences nécessaires, même en l’absence de certaines pièces, pour préserver les droits de recours de ses mandants. Le mandataire n’a en outre avancé aucune justification pour quelles raisons il n’a pu consulter le dossier de ses mandants qu’en date du 20 mars 2001.

Il s’ensuit que le deuxième cas d’ouverture du relevé de déchéance n’est pas vérifié en l’espèce.

La requête en relevé de forclusion n’est par voie de conséquence pas fondée.

Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare la demande en relevé de forclusion recevable ;

au fond la dit non justifiée et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

3 Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 24 septembre 2001 par le vice président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 13143
Date de la décision : 24/09/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-09-24;13143 ?

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