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16/05/2001 | LUXEMBOURG | N°12747

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 mai 2001, 12747


Tribunal administratif N° 12747 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2001 Audience publique du 16 mai 2001

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Recours formé par Madame … KOZICA, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 12747 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2001 par Maître Luc SCHANEN, avocat Ã

  la Cour, assisté de Maître Stéphanie JACQUET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre...

Tribunal administratif N° 12747 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 janvier 2001 Audience publique du 16 mai 2001

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Recours formé par Madame … KOZICA, … contre une décision du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 12747 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 janvier 2001 par Maître Luc SCHANEN, avocat à la Cour, assisté de Maître Stéphanie JACQUET, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … KOZICA, née le … à Prije Polje (Serbie/Yougoslavie), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L- … , tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 11 octobre 2000, notifiée le 17 octobre 2000, refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de séjour ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 février 2001 ;

Vu le mémoire en réplique déposé en date du 5 mars 2001 au nom de Madame KOZICA ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Stéphanie JACQUET et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 mai 2001.

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Madame … KOZICA, préqualifiée, est arrivée au Grand-Duché de Luxembourg le 25 mai 1999 pour y solliciter le statut de réfugié politique.

Sa demande en obtention du statut de réfugié politique fut refusée par décision du ministre de la Justice du 5 janvier 2000. Le recours contentieux introduit par Madame KOZICA contre ladite décision ministérielle ayant été rejeté par jugement du tribunal administratif du 19 juillet 2000, elle a présenté en date du 30 août 2000 une demande tendant à la délivrance d’une autorisation de séjour. Cette demande s’étant soldée par une décision négative du ministre de la Justice du 11 octobre 2000, notifiée en date du 17 octobre 2000, Madame KOZICA a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de ladite décision ministérielle du 11 octobre 2000 par requête déposée en date du 9 janvier 2001.

Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

La décision ministérielle déférée du 11 octobre 2000 adressée au mandataire de la demanderesse est motivée comme suit : « selon l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers, la délivrance d’une autorisation de séjour est subordonnée à la possession de moyens d’existence suffisants permettant à l’étranger d’assurer son séjour au Grand-Duché indépendamment de l’aide matérielle ou des secours financiers que de tierces personnes pourraient s’engager à lui faire parvenir.

En outre l’intéressée se trouve en séjour irrégulier au pays. Mademoiselle KOZICA est par conséquent invitée à quitter le pays sans délai ».

A l’appui de son recours, la demanderesse fait exposer que dès son arrivée au Luxembourg en mai 1999, elle s’est installée chez un cousin à Dudelange dans le but de garder de façon ininterrompue les deux enfants de ce dernier qui sont âgés de 3 et 5 ans, qu’elle aurait commencé à apprendre la langue allemande de manière à la maîtriser entre-

temps parfaitement bien, et que tout en s’étant vue refuser l’octroi du statut de réfugié politique au Luxembourg, elle estime néanmoins remplir les conditions pour l’obtention d’une autorisation de séjour. Elle fait valoir plus particulièrement à cet égard qu’elle pourrait très bien assurer son séjour au Luxembourg de façon indépendante puisque, d’une part, elle disposerait d’un logement adéquat, en échange de la garde des enfants de son cousin et, d’autre part, elle serait en mesure de déposer une garantie bancaire d’un montant de 400.000.- francs auprès du ministère de la Justice de manière à pouvoir subvenir seule à ses besoins, et, le cas échéant, supporter les frais de voyage si elle devait retourner dans son pays d’origine. Elle reproche dès lors à la décision ministérielle de ne pas s’exprimer sur sa situation concrète et relève par ailleurs qu’il y aurait lieu de ne pas négliger sa situation personnelle dans son pays d’origine, étant donné que la localité de Prije Polje dont elle est originaire se trouve à la frontière bosniaque du côté serbe et que pour une femme de confession musulmane la vie en Serbie serait toujours inquiétante malgré la venue au pouvoir d’un président élu démocratiquement.

Le délégué du Gouvernement rétorque que la demanderesse se trouverait en séjour irrégulier au pays et ne disposerait pas de moyens d’existence personnels lui permettant de subvenir à ses besoins pendant son séjour au Luxembourg, de sorte que ce serait à bon droit que le ministre a refusé de faire droit à sa demande.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse insiste sur le fait que son unique priorité aurait été de séjourner de façon durable, voire définitive au Luxembourg et qu’elle serait parvenue, de manière exemplaire, à une intégration rapide au pays, qu’elle n’aurait encore jamais compromis la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics et que la seule chose qui lui manquerait serait un emploi stable et rémunéré. Face à sa volonté affirmée de résider de façon effective et continue au pays, elle estime que la demande d’autorisation de séjour ne pourrait lui être refusée.

2 L’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-ci est requis, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Au vœu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut dès lors être refusée notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm.

1/2000, V° Etrangers 2. Autorisations de séjour – Expulsions, n° 81 et autres références y citées).

La légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise, de même qu’il appartient au juge de vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute, sans qu’il ne puisse se livrer, dans le cadre d’un recours en annulation, à une appréciation de l’opportunité de la décision attaquée.

En l’espèce, force est de constater qu’il se dégage des éléments du dossier et des renseignements qui ont été fournis au tribunal, que Madame KOZICA ne disposait pas de moyens personnels propres suffisants au moment où la décision attaquée a été prise.

En effet, la mise à disposition d’un logement par les soins du cousin de la demanderesse s’analyse non pas en moyens personnels, mais en moyens procurés par un tiers, de même que la possibilité alléguée de déposer une garantie bancaire d’un montant de 400.000.- francs ne saurait être reconnue comme justificative de moyens personnels suffisants au sens de l’article 2 prérelaté, étant donné qu’une garantie bancaire émise au profit du ministère de la Justice a pour objet de garantir le paiement du voyage de retour du demandeur dans son pays d’origine et n’a par conséquent pas pour finalité de servir comme moyens personnels permettant de financer son séjour au Luxembourg (cf. trib.

adm. 13 août 1997, n° 9928 du rôle, Pas. adm. 01/2000, V° Etrangers, n° 84). Par ailleurs, la somme de 400.000.- francs est insuffisante pour permettre raisonnablement à la demanderesse de subvenir, ne serait-ce qu’à moyen terme, à ses besoins.

A défaut par la demanderesse d’avoir rapporté la preuve de l’existence d’autres moyens personnels, le ministre a dès lors valablement pu refuser l’autorisation de séjour sollicitée sur base de ce seul motif.

Cette conclusion ne saurait être énervée par les considérations, étrangères à la légalité de la décision déférée, avancées par la demanderesse et tenant à son degré d’intégration au pays, ainsi qu’aux difficultés qu’elle peut rencontrer par ailleurs dans son pays d’origine, de sorte que le recours en annulation est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

3 reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 mai 2001 par :

M. Schockweiler, vice-président Mme. Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 12747
Date de la décision : 16/05/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-05-16;12747 ?

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