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25/04/2001 | LUXEMBOURG | N°12095

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 avril 2001, 12095


Tribunal administratif N° 12095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 juillet 2000 Audience publique du 25 avril 2001

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Recours formé par Monsieur … BABACIC, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12095 et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2000 par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Lux

embourg, au nom de Monsieur … BABACIC, ci-avant instituteur, actuellement ouvrier agricole, de nationa...

Tribunal administratif N° 12095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 juillet 2000 Audience publique du 25 avril 2001

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Recours formé par Monsieur … BABACIC, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de permis de travail

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12095 et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2000 par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BABACIC, ci-avant instituteur, actuellement ouvrier agricole, de nationalité yougoslave, originaire du Kosovo, demeurant à L-… , tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’un arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi du 19 juin 2000 lui refusant une autorisation d’occupation temporaire;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er septembre 2000;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’arrêté critiqué;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Monique CLEMENT, en remplacement de Maître Fernand ENTRINGER et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Par un arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi du 14 juillet 1999, Monsieur … BABACIC, préqualifié, fut autorisé à prendre un emploi temporaire auprès de Monsieur G.H.

en qualité d’ouvrier agricole. Ladite autorisation d’occupation temporaire précisait qu’elle était valable jusqu’au 15 décembre 1999. Une nouvelle autorisation d’occupation temporaire fut émise par le prédit ministre en faveur de Monsieur BABACIC, en date du 17 décembre 1999, l’autorisant à travailler en tant qu’ouvrier agricole auprès de Monsieur G.H. jusqu’au 15 juin 2000.

Par déclaration d’engagement datée au 23 mai 2000, introduite auprès de l’administration de l’Emploi, ci-après dénommée « l’ADEM », Monsieur G.H. introduisit une demande en obtention d’une autorisation d’occupation temporaire pour personnes en 1 provenance d’une région en guerre en faveur de Monsieur BABACIC, pour le poste d’ouvrier agricole, en indiquant que la date d’entrée en service était prévue pour le 16 juin 2000.

L’autorisation d’occupation temporaire fut refusée à Monsieur BABACIC, par arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé « le ministre », du 19 juin 2000 aux motifs suivants :

« -

absence de reconnaissance par le Conseil de Gouvernement que le Monténégro est une région en guerre ;

- poste de travail non déclaré vacant par l’employeur ;

- occupation irrégulière depuis le 16 juin 2000 ;

- des demandeurs d’emploi appropriés, bénéficiant de la priorité à l’emploi, sont disponibles sur place : 5710 demandeurs d’emploi inscrits aux bureaux de placement de l’Administration de l’emploi, dont 2073 ouvriers non qualifiés ».

Le 28 juin 2000, Monsieur BABACIC fit introduire un recours contentieux devant le tribunal administratif tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation du susdit arrêté ministériel du 19 juin 2000. - Ledit recours a fait l’objet d’un jugement du tribunal administratif, deuxième chambre, en date du 22 novembre 2000, par lequel le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation, a reçu le recours en annulation en la forme, mais, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté le demandeur.

Par requête séparée introduite le 3 juillet 2000, Monsieur BABACIC a encore fait déposer un « recours au fond supplémentaire » tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation du susdit arrêté ministériel du 19 juin 2000 et, plus particulièrement, « à faire valoir à titre complémentaire l’illégalité du règlement grand-ducal du 29 avril 1999, modifiant celui du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg ».

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en réformation, au motif qu’aucun texte légal ne prévoirait un tel recours en la présente matière.

Encore qu’un demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

En l’espèce, il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire attribuant compétence au tribunal administratif pour connaître au fond des recours introduits en matière de permis de travail. Il s’ensuit que le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire.

En vertu de l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, un recours en annulation n’est recevable qu’à l’égard des décisions non susceptibles d’un autre recours d’après les lois et règlements. Comme en la 2 présente matière, le tribunal est incompétent pour statuer sur le recours en réformation, seul un recours en annulation a pu être introduit contre l’acte incriminé.

C’est à tort que le délégué du gouvernement conclut à l’incompétence du tribunal pour connaître du présent recours en ce qu’il serait « dirigé contre le règlement grand-ducal du 29 avril 1999, ce dernier n’étant pas à comprendre parmi les actes administratifs à caractère réglementaire visés par l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 », étant donné que le recours sous analyse n’est pas dirigé directement contre ledit règlement grand-ducal, mais contre l’arrêté ministériel du 19 juin 2000, dans le cadre duquel le demandeur fait soulever l’exception d’illégalité - telle que prévue par l’article 95 de la Constitution - dudit règlement grand-ducal pour conclure à son inapplicabilité, partant à l’illégalité de la décision ministérielle qui se baserait sur ladite réglementation.

C’est encore à tort que le délégué du gouvernement « s’interroge sur l’intérêt à agir » pour soulever l’exception d’illégalité du règlement grand-ducal précité du 29 avril 1999, étant donné que la question relative à l’intérêt à soulever un moyen est une question de fond - qui sera analysée ci-après -, mais elle reste sans incidence quant à l’intérêt à agir, c’est-à-dire à la recevabilité de l’action intentée par le demandeur, pareil intérêt étant vérifié en l’espèce, étant donné que le demandeur a un intérêt personnel, direct, effectif, né, actuel et légitime à agir à l’encontre d’une décision ministérielle lui refusant l’octroi d’une autorisation d’occupation temporaire.

Il s’ensuit que le recours en annulation, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir un seul moyen - supplémentaire par rapport aux moyens qu’il a soulevés dans sa requête du 28 juin 2000 et dont le bien fondé a été analysé dans le jugement précité du 22 novembre 2000 - à savoir l’exception d’illégalité du règlement grand-ducal précité du 29 avril 1999 au motif que ledit règlement grand-ducal sortirait de son cadre légal, d’une part, en créant une autorisation d’occupation « temporaire », alors que le caractère temporaire ne serait pas prévu par la loi habilitante et, d’autre part, en conditionnant l’octroi par la « constatation par le gouvernement en conseil de la provenance d’une région de guerre », l’absence de cette constatation étant un motif valable et suffisant pour refuser l’autorisation d’occupation temporaire, alors que pareille condition ne serait pas prévue par le législateur.

C’est à bon droit que, dans ce contexte, le délégué du gouvernement soulève la question de l’intérêt du demandeur à invoquer le susdit moyen tiré de l’exception d’illégalité de la base réglementaire du régime des autorisations d’occupation temporaire, étant donné que si ledit moyen devait aboutir, ledit régime n’aurait plus d’existence légale et serait partant inapplicable. Or, comme la demande à la base de la décision litigieuse tend expressément et exclusivement à la délivrance d’une telle autorisation, elle serait nécessairement dénuée de fondement.

Le demandeur n’ayant aucun intérêt à invoquer un moyen qui n’est pas utile afin qu’il prospère dans sa prétention, le moyen - supplémentaire - soulevé par le demandeur est à écarter et son recours est à rejeter comme étant non fondé.

3 Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, Mme. Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 25 avril 2001, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 12095
Date de la décision : 25/04/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-04-25;12095 ?

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