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14/03/2001 | LUXEMBOURG | N°11940

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 mars 2001, 11940


Tribunal administratif N° 11940 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 avril 2000 Audience publique du 14 mars 2001

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Recours formé par l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre de l’Environnement en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 11940 du rôle et déposée au gre

ffe du tribunal administratif en date du 19 avril 2000 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour,...

Tribunal administratif N° 11940 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 avril 2000 Audience publique du 14 mars 2001

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Recours formé par l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE et consorts, Luxembourg contre une décision du ministre de l’Environnement en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 11940 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 avril 2000 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de 1.

l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE, établie et ayant son siège social à L-2663 Luxembourg, 6, rue Vauban, 2.-19. et consorts tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Environnement du 23 décembre 1999, prise sous la signature du Secrétaire d’Etat du ministère de l’Environnement, accordant à l’administration des Bâtiments publics l’autorisation de procéder dans l’enceinte de l’aéroport de Luxembourg, situé à Findel, à l’extension de l’aérogare, consistant plus particulièrement en un terminal principal d’un volume bâti hors terre de 221.000 m3, un terminal “ petits porteurs ” d’un volume bâti hors terre de 16.000 m3, une passerelle de liaison entre les deux terminaux d’une longueur de 230 mètres, la modification et l’extension du tarmac dans les alentours proches des nouveaux bâtiments sur une surface concernée de 55.000 m2, ainsi qu’un chantier de démolition, de terrassement et de construction d’une durée de 198 semaines pour le terminal principal et de 66 semaines pour le terminal “ petits porteurs ” ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er septembre 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 octobre 2000 par Maître Marc ELVINGER au nom des demandeurs ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc ELVINGER et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 janvier 2001.

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Considérant que par loi du 5 juin 1981, le Gouvernement a été autorisé à faire procéder aux travaux d’extension de l’aéroport de Luxembourg visés par son article 1er , conformément au programme des travaux prévu à son article 3 portant essentiellement sur le prolongement de la piste principale et les éléments accessoires et connexes y précités ;

Que suivant l’article 2 de ladite loi, les travaux d’extension visés à son article 1er ont été déclarés d’utilité publique et dispensés de l’autorisation prévue par la loi du 16 avril 1979 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes ;

Que par décision du Gouvernement en Conseil du 14 mars 1986 le plan d’aménagement partiel concernant l’aéroport et ses environs a été arrêté conformément aux dispositions de la loi modifiée du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire, lequel plan a été déclaré obligatoire par règlement grand-ducal du 31 août 1986 ;

Que par loi du 11 juillet 1996 le Gouvernement a été autorisé à faire procéder à l’extension de l’aérogare de Luxembourg dans les limites y définies ;

Que lors du vote de cette loi en date du 13 juin 1996, la Chambre des Députés a adopté une motion par laquelle elle a invité le Gouvernement :

“ à veiller à ce que le développement futur de l’aéroport de Luxembourg tienne compte à la fois des nécessités économiques et de l’impact des activités aéroportuaires sur l’environnement humain et naturel ;

à lui soumettre une étude d’impact global sur les nuisances engendrées par les activités aéroportuaires avant l’éventuelle extension de l’aérogare ou du centre de fret et à répéter de telles études sur une base décennale ;

à soumettre à court terme toutes les installations de l’aéroport à une procédure commodo-incommodo telle que prévue par la législation de 1990 et la directive concernant les études d’impact en vue de réduire notamment les nuisances au niveau du bruit, de la qualité de l’air et de l’eau ;

à prendre toute mesure utile permettant de limiter l’impact des activités aéroportuaires sur l’environnement naturel et humain, dont notamment … ” ;

Que par règlement grand-ducal du 24 mai 1998 les conditions d’exploitation technique et opérationnelle de l’aéroport de Luxembourg ont été fixées, contenant notamment les horaires d’exploitation ;

Qu’en date du 12 mars 1999, l’administration des Bâtiments publics a sollicité l’autorisation de procéder dans l’enceinte de l’aéroport de Luxembourg situé à Findel à 2 l’extension de l’aérogare, portant plus particulièrement sur un terminal principal d’un volume bâti hors terre de 221.000 m3, un terminal “ petits porteurs ” d’un volume bâti hors terre de 16.000 m3, une passerelle de liaison entre les deux terminaux d’une longueur de 230 mètres, la modification et l’extension du tarmac dans les alentours proches des nouveaux bâtiments sur une surface concernée de 55.000 m2, ainsi qu’un chantier de démolition, de terrassement et de construction d’une durée de 198 semaines pour le terminal principal et de 66 semaines pour le terminal “ petits porteurs ” ;

Que suite à cette demande a été jointe au dossier une étude d’impact de l’aéroport sur l’homme et l’environnement, réalisée par le TÜV Rheinland et se composant des trois volets suivants :

“ -

évaluation de l’impact de l’aéroport sur respectivement les eaux de surface et les eaux souterraines, rapport daté d’octobre 1998 ;

- évaluation de l’impact des émissions gazeuses générées par les mouvements d’avions dans le voisinage proche de l’aéroport, rapport daté de juin 1998 ;

-

évaluation des nuisances sonores générées par les activités de l’aéroport dans les alentours immédiats de celui-ci, rapport daté de mai 1998 ” ;

Que suite aux enquêtes publiques menées en les communes de Niederanven et Sandweiler au mois de juin 1999, ensemble les publications du 9 juin 1999 dans quatre journaux quotidiens du pays, une réclamation conjointe émanant de l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE, du MOUVEMENT ECOLOGIQUE, section Contern-Sandweiler-Schuttrange, du syndicat d’intérêts locaux Hamm-Polvermillen, du syndicat d’intérêts locaux Cents-Fetschenhof, du syndicat d’initiative et d’intérêts locaux Sandweiler, ainsi que de l’Union des syndicats d’intérêts locaux de la Ville de Luxembourg asbl a été formée auprès du collège échevinal de Sandweiler en date du 21 juin 1999 ;

Que le collège échevinal de Niederanven a émis un avis favorable, tandis que le collège échevinal de Sandweiler a émis un avis défavorable à l’encontre de la demande susvisée ;

Que par décision du 23 décembre 1999 portant la référence n° 1/99/0110, le ministre de l’Environnement, sous la signature du Secrétaire d’Etat au ministère de l’Environnement, a accordé à l’administration des Bâtiments publics l’autorisation sollicitée portant sur les éléments suivants installés sur le territoire de la commune de Niederanven, section B de Senningen, dans l’enceinte de l’aéroport du Findel :

Désignation de l’activité Numéro de Classe Volume/Capacité de l’équipement/ l’installation nomenclature Un terminal principal d’un volume bâti hors terre de 221.000 m3 comprenant :

-

des bureaux occupant une surface brute de 1690 m2 ;

259.a 3 -

des magasins pour la vente en détail occupant une surface brute de 520 m2 ;

-

des locaux réservés pour bureaux ou commerces d’une surface brute de 1680 m2 ;

-

des restaurants pouvant recevoir 300 personnes 3 (surface de 670 m2) ;

342.b 1 -

une installation frigorifique de secours d’une puissance frigorifique de 210 kW, fonctionnant au réfrigérant R134A ;

172.2.b 1 -

trois transformateurs, refroidis à l’huile, d’une puissance unitaire de 800 kVA ;

4.1 1 -

trois batteries d’accumulateurs fermées au plomb d’une capacité unitaire de 310 Ah10 ;

42 3 -

des appareils de levage (ascenseurs, escaliers mécaniques, tapis de bagages) ;

-

un séparateur de graisse NG7 pour les eaux en provenance de la cuisine et des bars ;

Un terminal “ Petits Porteurs ” d’un volume bâti hors terre de 16.000 m3 comprenant :

-

des bureaux occupant une surface brute de 40 m2 ;

172.2.b 1 -

un transformateur, refroidi à l’huile, d’une puissance unitaire de 800 kVA ;

4.1 1 -

une unité de batterie d’accumulateurs d’une capacité de 76 Ah10 alimentant l’éclairage de 4.1 1 sécurité/secours ;

-

deux unités de batteries d’accumulateur fermées au plomb d’une capacité unitaire de 60 Ah10 connectées à 42 3 l’alimentation statique sous coupure ;

-

des appareils de levage (ascenseur panoramique, escaliers mécaniques) ;

Une passerelle de liaison entre les deux terminaux d’une longueur de A/C 230 m ;

La modification et l’extension du tarmac dans les alentours proches A/C des nouveaux bâtiments (surface concernée : 55.000 m2) ;

Un chantier de démolition, de terrassement et de construction d’une A/C durée de 198 semaines pour le terminal principal et de 66 semaines pour le terminal “ Petits Porteurs ” nécessitant :

-

la mise en place par vibrofonçage d’un rideau de palplanches d’une longueur d’environ 110 m entre le parking-voitures en face de l’aérogare et le tarmac ;

-

l’excavation de grès classe 6-7 par brise-roche et ripper sur bulldozer (20.000 m3 + 60.000 m3) ;

A/C = installations annexes et connexes ensemble les conditions et modalités d’exploitation y plus amplement spécifiées ;

Que suivant certificat de publication du 27 avril 2000 émanant du collège échevinal de la commune de Niederanven, la décision ministérielle en question a été publiée et affichée pendant quarante jours aux endroits habituels dans ladite commune à partir du 10 mars 2000 ;

4 Que par décision du 14 janvier 2000 le Conseil de Gouvernement a chargé le ministre de l’Intérieur d’élaborer dans le cadre de la loi du 21 mai 1999 concernant l’aménagement du territoire un plan d’occupation du sol “ aéroport et environs ” tendant à la révision complète du plan d’aménagement partiel concernant l’aéroport et ses environs arrêté par le règlement grand-ducal précité du 31 août 1986 et appelé à couvrir tout ou partie du territoire des communes de Luxembourg, Niederanven, Sandweiler et Schuttrange ;

Considérant que par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 avril 2000 un recours en réformation a été introduit contre la décision ministérielle susvisée du 23 décembre 1999 par :

1. l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE, établie et ayant son siège social à L-2663 Luxembourg, 6, rue Vauban, 2. – 19. consorts Quant à la recevabilité du recours Considérant que le délégué du Gouvernement oppose en premier lieu l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des parties demanderesses ;

Quant à la demande de l’association sans but lucratif Mouvement écologique Que primordialement il conclut à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE, en tant que dirigé contre une décision individuelle, tout en étant basé sur des considérations d’intérêt général ;

Que dans la mesure où à travers l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le législateur se serait borné à reconnaître aux associations d’importance nationale et légalement agréées le droit d’exercer un recours contre les actes administratifs à caractère réglementaire, les actions dirigées par les associations contre les décisions à caractère individuel seraient restées exclues de l’intervention législative ;

Que dès lors en l’absence de preuve d’une lésion d’un droit à caractère individuel ou corporatif dérivant directement de l’acte litigieux et distinct de l’intérêt général de la collectivité, de telles actions ne seraient pas admissibles au stade actuel de l’évolution législative et jurisprudentielle ;

Que le délégué du Gouvernement de se rapporter par ailleurs à prudence de justice en ce qui concerne la capacité d’ester en justice de l’association demanderesse ;

Considérant que la demanderesse en question d’estimer qu’en tant que bénéficiaire d’un agrément de la part du ministre de l’Environnement, ayant qualité pour se constituer partie civile en rapport avec des infractions pénales commises en violation de la législation sur les établissements classés, elle devrait, a fortiori, se voir admettre à agir à l’encontre des décisions administratives individuelles prises en exécution de cette législation ;

5 Que si le législateur avait pris une initiative de fixer par la voie législative le droit des associations écologiques agréées d’agir à l’encontre d’actes administratifs à caractère réglementaire, cela ne signifierait pas nécessairement que relativement aux décisions administratives individuelles pareil droit devrait être nécessairement écarté, étant donné plus particulièrement que le législateur, dans le cadre des travaux préparatoires à l’élaboration de l’article 7 précité se serait expressément remis à la libre évolution de la jurisprudence en la matière ;

Que d’après ladite demanderesse il n’existerait aucune raison valable pour que les juridictions administratives luxembourgeoises n’empiètent pas, en la matière, le pas aux jurisprudences belge et française consacrant le droit d’agir en matière administrative, y compris à l’encontre de décisions individuelles, des associations écologiques, du moins lorsqu’elles sont d’importance nationale et lorsqu’elles ont fait l’objet d’un agrément de la part du ministre de l’Environnement ;

Que l’article 2 de ladite loi modifiée du 7 novembre 1996 relatif aux décisions individuelles en question, ne ferait pas obstacle à la reconnaissance du droit d’agir y afférent des associations d’importance nationales agréées par le ministre compétent ;

Considérant que la décision déférée du ministre de l’Environnement a été rendue en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes ;

Considérant qu’il est acquis en cause que l’association sans but lucratif Mouvement écologique s’est vue agréer par le ministre de l’Environnement sur base de l’article 43 de ladite loi modifiée du 11 août 1982, lequel dispose comme suit :

“ Les associations d’importance nationale dont les statuts ont été publiés au Mémorial et qui exercent depuis au moins trois ans leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de l’environnement peuvent faire l’objet d’un agrément du Ministre.

Les associations ainsi agréées peuvent être appelées à participer à l’action des organismes publics ayant pour objet la protection de la nature et des ressources naturelles.

En outre, ces associations peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constituant une infraction au sens de la présente loi et portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre, même si elles ne justifient pas d’un intérêt matériel et même si l’intérêt collectif dans lequel ils agissent se couvre entièrement avec l’intérêt social dont la défense est assurée par le ministère public ” ;

Considérant que si à travers l’article 43 alinéa 3 prérelaté le législateur a prévu dans le chef des associations agréées y visées la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile en matière pénale relativement aux infractions au sens de la loi modifiée du 11 août 1982, il n’a cependant pas par là-même ouvert de plano la possibilité pour lesdites associations d’agir contre des décisions administratives individuelles prises par le ministre compétent sur base de la même loi, tant le libellé clair du texte sous revue que son caractère exorbitant par rapport au droit commun en la matière s’opposant à pareille lecture extensive ;

6 Considérant que la possibilité prévue par l’alinéa second dudit article 43 également prérelaté, suivant laquelle les associations sont appelées à participer à l’action des organismes publics ayant pour objet la protection de la nature et des ressources naturelles dans tous ses aspects, de quelque législation qu’ils relèvent par ailleurs et quel que soit le contenu précis de la potentialité ainsi ouverte, se situe nécessairement en amont des actes décisionnels résultant de ce processus, lesquels continuent en toute occurrence à relever de la seule compétence des organismes publics concernés ;

Considérant qu’il est encore patent que le législateur, dans le cadre de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, a uniquement réglementé le droit d’agir des associations d’importance nationale agréées pour autant que l’action est dirigée contre un acte administratif à caractère réglementaire tirant sa base légale de la loi spéciale dans le cadre de laquelle l’association requérante a été agréée, tel que ce droit d’agir a été défini par son article 7 (2) ;

Considérant que ni ledit article 7, ni l’article 2 de la même loi traitant des recours en matière administrative contre les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements ne se prononcent expressément sur le droit d’agir des associations, fussent-elles agréées ou non ;

Considérant que le silence observé par le législateur à ce sujet n’en signifie cependant pas moins que la question du droit d’agir des associations à l’encontre de décisions administratives individuelles ne fût pas posée au cours de l’élaboration de ladite loi du 7 novembre 1996 et plus précisément de ses articles 2 et 7 ;

Que notamment la commission des institutions et de la révision constitutionnelle de la Chambre des Députés, en sa majorité, s’est posée la question “ s’il n’est pas opportun d’élargir la possibilité de recours à ces associations. La commission en sa majorité est cependant fermement opposée à toute possibilité de recours basé sur l’intérêt général, lequel recours “ Populaire ” risquerait de mettre en péril le fonctionnement normal de l’appareil étatique ” (cf. doc. parl. 39402 – 3940A, p. 6 ; v. aussi doc. parl. 39404 – 3940A2, p.3)) ;

Considérant que c’est dès lors de façon délibérée que la Chambre des Députés, en 1996, lors du vote de la réforme des juridictions de l’ordre administratif, à défaut de consensus politique, n’a point admis le droit d’agir en justice des associations dans la mesure de la défense de l’intérêt collectif spécifique par elles défendu, au-delà de leur intérêt personnel parallèle à celui d’une personne physique, tel celui d’un propriétaire immobilier voisin, en attendant un accord majoritaire à trouver dans le cadre d’une législation spécifique à édicter en la matière ;

Considérant que cette situation n’a pas autrement évolué depuis, encore qu’il convienne de confirmer la partie demanderesse en ce qu’elle relève que dans son avis du 22 avril 1999 adopté à l’occasion de l’élaboration de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, la commission de l’environnement et de l’aménagement du territoire de la Chambre des Députés a constaté que la problématique concernant les recours dirigés contre les décisions administratives à caractère individuel reste exactement la même après l’entrée en vigueur de la loi précitée du 7 novembre 1996, les plaintes des associations de protection de l’environnement risquant de rester irrecevables à l’encontre de décisions administratives individuelles, “ à moins que la jurisprudence des nouvelles juridictions administratives ne s’écarte de celle de l’ancien Comité du Contentieux du Conseil d’Etat ” (cf. doc. parl. 3837A5, p. 12);

7 Considérant que cet avis ne fait que refléter l’autonomie et l’indépendance du pouvoir judiciaire comportant sa liberté d’appréciation, étant entendu que celle-ci ne saurait s’exercer que dans le cadre légal tracé ;

Considérant qu’il importe de retenir à partir du même avis, que le législateur, bien qu’il en ait eu la possibilité et l’ait envisagé, s’est délibérément refusé jusqu’à ce jour à consacrer par un texte de droit positif dans le chef des associations un quelconque droit d’agir contre les autorisations individuelles pour la défense de l’intérêt général, étant donné qu’un accord politique n’a pas été trouvé en la manière ;

Qu’il résulte des documents parlementaires précités que de toute manière, dans le moyen terme, le législateur envisage, dans l’hypothèse où il sera amené à accorder le droit d’action en question aux associations, de le réglementer ;

Considérant qu’il est encore constant que le Luxembourg a certes signé la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998 sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, qui prévoit en son article 9, paragraphe 2, alinéa 2 un droit d’accès à la justice aux organisations non gouvernementales pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, de tout acte et de toute omission touchant l’environnement, mais qu’à l’heure actuelle ladite Convention n’a pas encore été approuvée par une loi et n’est partant point applicable à ce stade ;

Considérant que dans la mesure où le législateur a spécialement prévu la possibilité d’agréer des associations en vue de participer, dans l’intérêt général, à l’action des pouvoirs publics, l’intérêt de ces associations est a priori appelé à se confondre avec l’intérêt général, à moins que ne soit établie de façon parallèle l’existence d’éléments justifiant dans le chef de ladite association un intérêt spécifique ne s’identifiant pas avec l’intérêt général, telle la qualité de propriétaire d’immeubles riverains, et pouvant dès lors fonder un intérêt suffisant à agir également à l’encontre de décisions individuelles prises dans le cadre de la protection de la nature et des ressources naturelles ;

Considérant qu’en ne s’appuyant que sur sa qualité d’association agréée pour justifier son intérêt à agir, la demanderesse reste en défaut d’alléguer, sinon a fortiori d’établir dans son chef un intérêt à agir distinct de l’intérêt général ;

Considérant que pour le surplus l’instauration d’une distinction entre les associations agréées, admises à agir en justice contre les décisions administratives individuelles, suivant la thèse défendue par la demanderesse, et les autres associations non admises à ces fins, ne se justifierait par aucune disposition de droit positif, étant donné qu’il est constant par ailleurs qu’au-delà de l’intérêt personnel strictement parallèle à celui d’une personne physique, le droit d’agir des associations contre des décisions administratives individuelles n’est point consacré, eu égard aux impératifs posés en droit luxembourgeois, notamment à partir des mêmes textes que ceux retenus par le législateur belge, tendant à éviter à la fois l’action populaire et le privilège de plaider par procureur, l’intérêt à agir d’un justiciable, fût-il personne physique ou morale, ne se concevant en toute occurrence que pour autant qu’il ne s’identifie pas avec l’intérêt général ;

8 Considérant qu’il s’ensuit que le recours laisse d’être recevable dans le chef de l’association sans but lucratif Mouvement écologique pour défaut d’intérêt à agir, abstraction faite de toute autre considération ayant trait à la capacité pour agir et au délai observé pour ce faire en l’espèce ;

Quant à la demande des personnes physiques requérantes Considérant qu’en second lieu le représentant étatique conclut à l’irrecevabilité du recours dans le chef des 18 parties demanderesses, personnes physiques, en ce qu’elles resteraient en défaut d’établir l’existence dans leur chef d’un intérêt individuel distinct de l’intérêt général de la collectivité conformément aux exigences de l’article 13 de la loi modifiée du 9 mai 1990 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes ;

Que plus particulièrement les demandeurs resteraient en défaut d’établir en quoi l’exploitation autorisée porterait atteinte à leurs droits ou leur porterait préjudice, de sorte que leur demande devrait être déclarée irrecevable conformément notamment à un arrêt du Comité du contentieux du Conseil d’Etat du 11 mars 1992 (Mackel, n°s 8546, 8548 et 8549 du rôle) ;

Que lesdits demandeurs de répliquer que dans la mesure où ils vivent à proximité immédiate de l’enceinte de l’aéroport globalement considéré, pour l’essentiel à Hamm et à Cents, ils subiraient journalièrement les inconvénients et nuisances en provenance dudit établissement, de sorte que leur intérêt à agir ne serait en l’occurrence pas sérieusement contestable ;

Considérant que les voisins qui habitent ou travaillent régulièrement à une distance plus ou moins rapprochée d’un établissement classé sont le cas échéant susceptibles de tirer de cette situation l’intérêt à agir suffisant à l’encontre des décisions ministérielles en portant autorisation, compte tenu de l’envergure de l’établissement autorisé et des inconvénients potentiels en découlant pour l’environnement humain et naturel au regard de ses caractères dangereux, insalubre ou incommode (cf. trib. adm. 9 décembre 1998, n° 9852 du rôle, Wilhelm, Pas. adm. 01/2000, V° Etablissements classés, n° 9, p. 92);

Que par voie de conséquence les contours de l’objet de la demande en autorisation aboutissant à la décision ministérielle par elles critiquée conditionnent immédiatement l’intérêt à agir des personnes se déclarant directement affectées par son installation et exploitation à proximité de leurs lieux d’habitation ou de travail régulier respectifs ;

Qu’il importe dès lors avant tout autre progrès en cause de dégager les contours de l’objet de la demande en autorisation du 12 mars 1999 à l’origine de la décision ministérielle déférée conditionnant notamment la nécessité et l’ampleur d’une enquête publique à mener, question reprise par ailleurs par les demandeurs dans un premier ordre d’idées en tant qu’argumentation au fond tendant à l’annulation de l’arrêté ministériel entrepris ;

Considérant que les parties demanderesses critiquent primordialement et essentiellement le fait que la procédure d’autorisation telle qu’initiée par la demande de l’administration des Bâtiments publics du 12 mars 1999 et telle que soumise au public appelé à se prononcer y relativement, s’est présentée comme ne portant que sur l’extension de l’exploitation de l’aérogare proprement dite plutôt que sur l’activité aéroportuaire que celle-ci a pour objet de rendre possible ;

9 Que les études prévisées réalisées par le TÜV Rheinland en 1998 et intitulées “ Untersuchungen der Umweltbelastung durch den Flughafen Luxemburg ” n’auraient initialement pas fait partie du dossier déposé, mais y auraient été jointes par la suite, ce qui amène les demandeurs à conclure que la demande en autorisation ignorerait complètement l’aspect de l’impact sur l’environnement humain et naturel des activités aéroportuaires engendrées par les constructions pour lesquelles l’autorisation a été sollicitée ;

Qu’ainsi la demande en autorisation se limiterait à faire état de la compatibilité desdites constructions avec les exigences de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée, les demandeurs citant à titre exemplatif les relatations de la demande, page 35, relatives aux “ nuisances sonores et vibrations ” de l’objet couvert par ladite demande en autorisation se rapportant exclusivement aux activités à l’intérieur des constructions autorisées sans prendre position par rapport au problème essentiel pour les riverains consistant dans le bruit provoqué par le trafic aérien dont l’aérogare a pour objet d’évacuer les passagers ;

Qu’ils concluent que la demande en autorisation en tant que telle ne pouvait permettre à qui que ce soit de se faire une idée sur les nuisances que générerait l’activité aéroportuaire en résultant, cette présentation des choses rentrant dans la logique de la demanderesse en autorisation suivant laquelle l’objet de la demande se limitait à l’extension de l’aérogare et aux constructions afférentes à autoriser en tant que telles, sans porter sur les activités que celles-ci allaient induire ;

Que si à travers sa décision critiquée, le ministre de l’Environnement avait ponctuellement englobé les activités aéroportuaires générées à travers les constructions autorisées, sa démarche serait restée imparfaite et ne correspondrait ni au contenu de la motion précitée adoptée par la Chambre des Députés le 13 juin 1999, ni surtout aux exigences de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée dont plus particulièrement ses articles 5, 6 alinéa 3, 7 et 9, abstraction faite des obligations posées par le droit communautaire en la matière et plus particulièrement par les dispositions de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l’évaluation des incidents de certains projets publics et privés sur l’environnement ;

Considérant que les parties demanderesses de relever plus particulièrement que le dossier ne serait pas complet au vœu des exigences de l’article 6 alinéa 3 de ladite loi modifiée du 9 mai 1990 en ce que le ministre compétent, en acceptant d’instruire une demande incomplète au regard des exigences légales, se serait mépris sur ce qui devait nécessairement être l’objet de la procédure d’autorisation et aurait ainsi d’emblée vicié sa décision ;

Qu’au regard de l’article 7 de ladite loi et compte tenu de l’objet de la demande acceptée par le ministre à travers la procédure menée, l’affichage de ladite demande, ensemble les opérations d’enquête publique y prévues, n’auraient pas seulement dû avoir lieu dans les deux communes de Niederanven et de Sandweiler, mais également dans celles de Schuttrange et Luxembourg directement touchées par les activités aéroportuaires engendrées à travers l’extension des constructions à autoriser ;

Qu’enfin, force serait de constater qu’en réalité l’autorisation critiquée ne définirait pas de conditions d’exploitation de l’aéroport susceptibles de protéger les riverains à l’encontre des nuisances résultant pour eux de l’extension, voire de la modification projetée au regard de 10 l’intensité du trafic aéroportuaire que les nouvelles infrastructures auraient pour objet de rendre possible ;

Considérant que le délégué du Gouvernement de préciser d’abord que la demande d’autorisation d’exploitation dressée par … S.A. le 26 février 1999 et transmise par l’administration des Bâtiments publics le 12 mars suivant à l’autorité compétente aux fins d’autorisation serait explicite en ce qu’elle viserait seulement la construction de deux nouveaux bâtiments et d’une passerelle de liaison ;

Qu’ainsi sous le point 1.1.4 intitulé “ Objet et activités ” il serait précisé que les seules activités visées sont le traitement des passagers, des commerces pour passagers et l’administration ;

Qu’il ressortirait dès lors clairement de la lecture à la fois de la demande et de l’autorisation ministérielle accordée que l’objet de la demande comporterait la seule extension de l’aérogare et ce pour des raisons de confort et de commodité pour les voyageurs ;

Qu’à titre subsidiaire le représentant étatique se place dans la lignée du raisonnement des parties demanderesses voulant que le projet d’extension de l’aéroport aurait dû faire l’objet de la demande pour conclure que dans ce cas il y aurait eu dispense de commodo-incommodo ;

Que le représentant étatique d’invoquer à l’appui de sa thèse les dispositions de la loi précitée du 3 juin 1981 ayant eu pour objet d’autoriser le Gouvernement à prolonger la piste d’atterrissage et de décollage en la portant de 2.830 à 4.000 mètres dont plus particulièrement l’article 2 portant dispense de l’application des dispositions de la loi du 16 avril 1979 applicable à l’époque en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes comportant dispense de la réalisation d’une procédure de commodo et incomodo ;

Qu’il résulterait tant du contexte de l’article 2 que des travaux préparatoires relatifs à ladite loi du 3 juin 1981 que la Chambre des Députés aurait dispensé le Gouvernement d’une procédure de commodo et incommodo non seulement en rapport avec les travaux de construction proprement dits de la nouvelle piste, mais également au regard des dangers et inconvénients éventuels générés par l’activité aéroportuaire rendue possible moyennant cette nouvelle infrastructure, et en particulier par l’augmentation du trafic que celle-ci avait pour objet de rendre possible ;

Que le délégué du Gouvernement de préciser encore que ce serait eu égard à l’objet de la demande - la construction de l’aérogare et de ses annexes - que le dossier a été transmis aux seules communes de Niederanven et Sandweiler aux fins d’affichage et d’enquête publique conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée, motif tiré de ce que la nouvelle aérogare a été projetée sur le territoire de la commune de Niederanven et se situe à moins de 200 mètres du territoire de la commune de Sandweiler, tandis que les territoires des communes de Luxembourg et de Schuttrange ne seraient pas touchés par le rayon de 200 mètres tracé autour dudit bâtiment à construire ;

Que même à supposer que le dossier devrait prendre en considération un accroissement des activités aéroportuaires, quod non suivant le représentant étatique, il n’en resterait pas moins que les formalités d’affichage ne seraient à observer que dans les communes devant 11 accueillir au moins un élément essentiel au fonctionnement d’un établissement soumis à autorisation ;

Que dans la mesure où l’essentiel de l’établissement serait destiné à être implanté sur le territoire de la commune de Niederanven, un affichage dans les communes de Schuttrange et de Luxembourg n’aurait point été requis ;

Qu’en toute occurrence les conditions d’exploitation fixées à travers l’arrêté ministériel déféré sur pratiquement quarante pages suffiraient aux exigences légales posées en la matière ;

Considérant que dans la mesure où la demande en autorisation du 12 mars 1999 a été déposée avant l’entrée en vigueur le 1er août 1999 de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés et que la décision déférée a été prise postérieurement, le 23 décembre 1999, il convient de dégager préliminairement quelle est la législation applicable en la matière ratione temporis ;

Considérant que suivant l’article 31 alinéa 3 de la loi du 10 juin 1999 précitée, toute demande introduite avant son entrée en vigueur et dont l’affichage a été effectué, est traitée suivant les modalités de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée ;

Considérant qu’étant donné que l’affichage relativement à la demande d’autorisation sous analyse a été effectué au mois de juin 1999, celle-ci rentre sous les prévisions de l’article 31 alinéa 3 prévisé, de sorte qu’en l’espèce les dispositions de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée doivent trouver application, ainsi que l’a retenu à juste titre la décision déférée ;

Considérant qu’il est patent que l’objet de l’autorisation ministérielle à intervenir ne saurait en principe dépasser celui de la demande à sa base, tel que résultant du dossier déclaré complet, ne fût-ce qu’en ordre de préserver les droits et intérêts du public admis à prendre connaissance dudit dossier et à formuler ses réclamations éventuelles dans le cadre de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée ;

Considérant que les parties convergent pour dire que l’objet de la demande, suivant le dossier déposé, se limite aux constructions y visées, dont principalement la nouvelle aérogare conditionnant ainsi l’objet de l’autorisation ministérielle accordée, abstraction faite des conditions d’ordre général relatives à l’activité aéroportuaire engendrée y arrêtées ;

Qu’ainsi les éléments autorisés relèvent, d’après la décision déférée, des classes 1 à 3 comme correspondant aux numéros de nomenclature découlant de l’annexe au règlement grand-ducal modifié du 18 mai 1990 déterminant la liste et le classement des établissements dangereux, insalubres ou incommodes, à savoir pour la classe 1 : un élément relevant du numéro de nomenclature 342.b, deux éléments relevant du numéro de nomenclature 172.2.b et trois éléments relevant du numéro de nomenclature 4.1 ; ainsi que pour la classe 3 : un élément relevant du numéro de nomenclature 259.a et deux éléments relevant du numéro de nomenclature 42, ensemble les installations annexes et connexes autorisées ;

Considérant que d’après le numéro 13 de la nomenclature comprise en ladite annexe, font partie de la classe 1 les “ aéroports (construction et exploitation d’aéroports dont la piste de décollage et d’atterrissage a une longueur de 2.100 mètres ou plus) ” ;

12 Considérant que d’après l’article 5 de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée, intitulé “ modification substantielle d’un établissement ”, “ tout transfert, toute extension ou toute transformation des établissements des classes 1 et 2 sont soumis à nouvelle autorisation. Une nouvelle procédure de commodo et incommodo telle que prévue aux articles 7 et 8 est nécessaire pour les transferts et les extensions des établissements et pour les transformations comportant une modification substantielle ayant pour conséquence de créer des dangers et inconvénients nouveaux ou d’accroître les dangers et inconvénients existants ” ;

Considérant qu’il est patent, à partir du dossier tel que présenté au public, versé au tribunal, que les éléments faisant l’objet de la demande d’autorisation du 12 mars 1999 représentent une extension de l’aéroport, établissement de la classe 1 existant, tout en en portant transformation à une large échelle, de sorte à être soumis à nouvelle autorisation au vœu de l’article 5 première phrase prérelaté ;

Considérant qu’il résulte encore du dossier que rien qu’à travers l’augmentation avouée du nombre des passagers destinés à être desservis à travers la nouvelle aérogare et ses éléments complémentaires pour lesquels l’autorisation déférée a été demandée ensemble les activités aéroportuaires nécessairement engendrées de ce fait, les extensions et transformations prévisées sont appelées à engendrer pour le moins un accroissement des inconvénients existants concernant la fréquence des atterrissages et décollages, y compris les bruits inévitables y afférents ;

Qu’à cet égard l’argument tiré par le délégué du Gouvernement à l’audience des statistiques récentes publiées (cf. doc. parl. 4106 projet de loi relatif à l’extension de l’aérogare de Luxembourg, exposé des motifs, p. 13) de ce que le nombre moyen de passagers transportés a tendance à diminuer (53,5 passagers/mouvement en 1970 et 33,88 en 1994) ne tend qu’à accentuer la fréquence des mouvements, ensemble les bruits en résultant engendrés à partir d’un nombre total des passagers en augmentation constante ;

Que dès lors l’exigence d’une nouvelle procédure de commodo et incommodo conformément aux articles 7 et 8 de ladite loi modifiée du 9 mai 1990 découle directement de l’article 5 seconde phrase prerelaté ;

Considérant que le principe de l’exigence d’une autorisation, comportant une nouvelle procédure de commodo et incommodo étant acquis pour l’extension de l’aérogare projetée, il convient d’en déterminer les contours sous le double aspect des éléments soumis à autorisation et de l’objet de l’enquête publique à instaurer ;

Considérant que de façon spécifique les aéroports repris en la classe 1 sous le numéro 13 de l’annexe au règlement grand-ducal modifié prévisé du 18 mai 1990 sont à comprendre non seulement sous les éléments de construction y plus particulièrement visés, mais encore sous l’aspect de l’exploitation de l’ensemble aéroportuaire dont ils relèvent, dans la mesure où, comme en l’espèce, la piste de décollage et d’atterrissage a une longueur de 2.100 mètres ou plus ;

Considérant que l’exigence d’une autorisation en cas de modification substantielle d’un établissement est posée par l’article 5 de ladite loi modifiée du 9 mai 1990 de façon indifférente quelle que soit la voie par laquelle l’établissement existant a été autorisé au regard de la législation concernant les établissements dangereux, insalubres ou incommodes ;

13 Considérant qu’au-delà de toute exigence éventuelle émanant du droit communautaire et abstraction faite des dispositions de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à l’existence d’un recours effectif, il est constant qu’à travers les dispositions de l’article 2 de la loi du 3 juin 1981 précitée les travaux d’extension visés à son article 1er ont été déclarés d’utilité publique et dispensés de l’autorisation prévue par la loi du 16 avril 1979 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes, ayant précédé celle également précitée du 9 mai 1990 ;

Considérant que dans la mesure où les dispositions de la loi spéciale – en l’espèce celle prévisée du 3 juin 1981 - font exception à des droits fondamentaux destinés à protéger les intérêts de l’homme expressément protégés par une loi générale - en l’occurrence celle du 16 avril 1979 relayée par celle du 9 mai 1990 précitées -, la délimitation des contours de l’assiette desdites dispositions spéciales doit intervenir de façon restrictive ;

Considérant qu’à travers l’article 1er de ladite loi du 3 juin 1981 le Gouvernement est autorisé à faire procéder aux travaux de l’aéroport de Luxembourg, conformément au programme des travaux prévu à l’article 3 ;

Considérant que l’article 3 de la même loi énonce que le programme des travaux d’extension visé à l’article 1er comprend :

“ - le prolongement de la piste principale et les travaux accessoires ;

-

l’extension des installations et équipement électriques et radio-

électriques, y compris un nouveau balisage lumineux d’approche ;

-

l’aménagement d’une zone technique avec plate-forme pour essais-

moteurs Ce programme comprend en outre les études ainsi que l’acquisition des terrains et immeubles nécessaires à la réalisation du projet ” ;

Considérant qu’il découle directement de l’énumération précitée du programme visé par l’article 3 prérelaté que celui-ci ne comprend ni les constructions – aérogare et autres – reprises sous l’objet de la demande en autorisation du 12 mars 1999 sous analyse, ni les activités aéroportuaires engendrées à travers elle ;

Considérant que par voie de conséquence l’établissement tel qu’étendu, voire transformé à travers les constructions ayant fait l’objet de la demande précitée du 12 mars 1999 ne se trouve pas couvert par la dispense de l’autorisation prévue par la législation relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes, telle que découlant de la loi du 3 juin 1981 ;

Considérant qu’il s’ensuit qu’au-delà des éléments de construction et d’exploitation couverts en tant que tels par la loi du 3 juin 1981, une autorisation au regard de la législation sur les établissements dangereux et insalubres ou incommodes est requise non seulement pour la construction des extensions et transformations envisagées, mais encore, eu égard à l’impact prévisible des dangers et inconvénients accrus en résultant, pour l’ensemble des éléments d’exploitation à travers elle globalement engendrés ;

14 Considérant que par essence l’hypothèse de dangers ou d’inconvénients accrus par rapport à ceux existants visée par l’article 5 in fine prérelaté se réfère nécessairement à l’établissement global, étendu ou transformé, dont l’exploitation est susceptible d’engendrer les dangers et inconvénients en question et ne saurait se limiter aux seules extensions ou transformations conditionnant ainsi notamment encore les contours de l’enquête publique à instaurer ;

Considérant que dès lors au niveau de l’intérêt à agir il convient de se référer non pas aux seuls éléments d’extension ou de transformation, dont l’installation fait l’objet de la demande en autorisation, mais à l’établissement étendu voire transformé dans sa globalité, ensemble ses éléments d’exploitation, également sujets à autorisation, compte tenu des exigences de l’article 5 de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée, conditionnant par ailleurs les contours de l’enquête publique à partir des dangers et inconvénients nouveaux ou accrus par rapport à ceux préexistants ainsi engendrés ;

Considérant que les affirmations des 18 parties demanderesses, personnes physiques, habitant toutes dans un rayon relativement rapproché de l’enceinte de l’aéroport du Findel globalement considéré, tenant à l’impact sonore des mouvements d’aéronefs engendrés par le surplus de mouvement entraîné à travers l’extension projeté par la transformation de l’établissement concerné autorisée à travers la décision déférée, n’ont pas été autrement contestées en fait par la partie défenderesse, tout comme elles ne se trouvent pas être contredites directement en leur principe par les données figurant au dossier ;

Considérant que par voie de conséquence les parties demanderesses jouissent d’un intérêt personnel et direct suffisant à agir à l’encontre de la décision ministérielle déférée et distinct de l’intérêt collectif ;

Considérant qu’il appert par ailleurs des éléments du dossier que le recours a été formulé par les 18 parties demanderesses, personnes physiques, conformément aux formes et délai prévus par la loi, de sorte à être recevable dans leurs chefs ;

Quant au fond Considérant qu’au fond il est constant que dans le cadre d’un recours de pleine juridiction reçu, il est possible pour les parties demanderesses de conclure utilement à l’annulation de la décision déférée, notamment pour violation de la loi ;

Considérant que bien qu’invoqué dans le cadre d’un recours en réformation où le tribunal est en règle générale appelé à statuer au regard de la situation de fait et de droit existant au moment où il rend son jugement, les moyens d’annulation soulevés sont de nature à replacer l’analyse à effectuer par le juge saisi au moment où l’autorité administrative, dont la décision est déférée, a statué, aux fins de vérifier notamment si les exigences d’ordre procédural portées par la loi ont été respectées ;

Considérant qu’il vient d’être dégagé ci-avant qu’au moment où la décision déférée a été prise, la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée a été d’application par rapport au dossier soumis ;

15 Considérant qu’il découle des développements qui précèdent qu’abstraction faite de la voie par laquelle l’établissement existant de l’aéroport du Findel a été autorisé au regard de la législation applicable en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes, le fait ci-avant vérifié que les éléments d’extension et de transformation pour lesquels l’autorisation est actuellement déférée comportent une modification substantielle ayant pour conséquence de créer des dangers et inconvénients nouveaux ou d’accroître les dangers et inconvénients existants engendre d’après les dispositions de l’article 5 de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée la nécessité d’une nouvelle procédure de commodo et incommodo portant non seulement sur les éléments d’extension et de transformation, mais sur l’établissement étendu voire transformé considéré dans son ensemble au vu de son impact global sur l’environnement humain et naturel ;

Considérant que dans la mesure où un aéroport constitue une entité en tant qu’établissement de la classe 1 repris comme tel sous le numéro 13 de l’annexe au règlement grand-ducal modifié du 18 février 1990 prédit, y considérée sous ses éléments à la fois de construction et d’exploitation, c’est l’établissement étendu voir transformé considéré sous l’aspect de cette entité qui donne la mesure des contours de l’objet de la nouvelle procédure de commodo et incommodo à mener ;

Considérant que c’est plus particulièrement cette entité qui conditionne les exigences relatives à la prévision des dangers et inconvénients nouveaux voire accrus par rapport à eux existants (article 5), leur évaluation (article 6 in fine), l’information et la prise de position y relatives du public (article 7) ainsi que le caractère circonstancié des autorisation, conditions et réserves d’aménagement et d’exploitation y relatives (article 9) ;

Considérant qu’il résulte des éléments du dossier ensemble les explications fournies par les parties que du moins de façon partielle la procédure de commodo et incommodo a été menée à partir, sinon par rapport aux seuls éléments d’extension voire de transformation dont l’autorisation d’installation a été demandée et non point par rapport à l’établissement global concernant son impact sur l’environnement humain et naturel ;

Considérant qu’au-delà du contenu incomplet à cet égard du dossier les procédures d’affichage et de publication ont seulement été effectuées dans les deux communes de Sandweiler et de Niederanven dont les territoires respectifs se trouvent dans un rayon de moins de 200 mètres mesuré, à partir de la seule aérogare nouvellement projetée, sans que les autres communes également voisines proches de l’entité aéroport n’aient été incluses dans lesdites procédures ;

Considérant qu’en tant qu’élément essentiel de la procédure de commodo et incommodo la phase d’enquête publique, dans le cadre de laquelle est appelée à se manifester toute personne intéressée, telle que prévue notamment aux articles 7 et 8 de la loi modifiée du 9 mai 1990, est basée sur des dispositions qui sont d’ordre public (trib. adm. 9 décembre 1998, Wilhelm, n° 9852 du rôle) ;

Considérant qu’en ne respectant point les dispositions d’ordre public contenues dans les articles 5 et suivants de la loi modifiée du 9 mai 1990 précitée, concernant le contenu du dossier et l’ampleur de l’enquête publique à mener, l’autorisation déférée y compris les éléments de procédure de commodo et incommodo menée, encourt l’annulation dans le cadre du recours en réformation reçu ;

16 Considérant que bien qu’appelé à statuer au fond dans le cadre du recours en réformation reçu, le tribunal ne saurait utilement suppléer à la carence constatée des éléments du dossier et de procédure publique ci-avant relevée, de sorte qu’il convient de renvoyer le dossier à l’autorité ayant pris la décision dont l’annulation est encourue, étant entendu que dans ces circonstances l’examen des autres moyens proposés devient surabondant ;

Quant à l’indemnité de procédure Considérant que les parties demanderesses requièrent encore la condamnation de l’Etat à une indemnité de procédure d’un montant de chaque fois 50.000.- francs à verser à chacune d’elles du chef de frais non répétibles qu’il serait injuste de laisser à leur charge ;

Qu’en termes de plaidoiries à l’audience, le mandataire des parties demanderesses a estimé que le montant à liquider pouvait être raisonnablement ramené à un seuil de 15.000.-, sinon de 10.000.- francs par partie, alors que l’import des devoirs a priori escompté se serait révélé être beaucoup moindre, notamment au niveau du mémoire en réplique, compte tenu de l’argumentation déployée par la partie défenderesse ;

Considérant qu’au vu du sort de la demande introduite au nom de l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE, sa requête en allocation d’une indemnité de procédure est à écarter ;

Considérant qu’au regard des tenants complexes du dossier résultant notamment de la dispense de procédure de commodo et incommodo prononcée par la loi du 3 juillet 1981 précitée et de son impact sur la présente affaire, ainsi que de la distinction spécifique entre l’objet limité des éléments de modification voire de transformation de l’établissement antérieur pour lesquels l’autorisation de l’installation est demandée et les contours d’une nouvelle procédure de commodo et incommodo à instaurer du fait de la modification substantielle dégagée, les demandeurs restent en défaut d’établir à suffisance l’iniquité à la base de la liquidation utile d’une indemnité de procédure en l’espèce, au-delà des incidences alléguées du fait de l’établissement concerné, ainsi que du silence affirmé de la part des autorités compétentes face à leur démarche précontentieuse ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable en tant que formé par l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond le dit justifié ;

partant annule, dans le cadre du recours en réformation reçu la décision ministérielle déférée ensemble les éléments de procédure de commodo et incommodo menés et renvoie l’affaire devant le ministre de l’Environnement ;

17 rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’Etat aux frais, sauf ceux relatifs aux actes de procédure fournis au nom de l’association sans but lucratif MOUVEMENT ECOLOGIQUE comme devant rester à charge de cette dernière.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 mars 2001 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 18


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11940
Date de la décision : 14/03/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-03-14;11940 ?

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