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13/03/2001 | LUXEMBOURG | N°12720C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 mars 2001, 12720C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12720C Inscrit le 29 décembre 2000 Audience publique du 13 mars 2001 Recours formé par … Klapija, contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 27 novembre 2000, n° 12158 du rôle)

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Vu l'acte d'appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 décembre 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de … Klapi

ja, né le … à … (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12720C Inscrit le 29 décembre 2000 Audience publique du 13 mars 2001 Recours formé par … Klapija, contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 27 novembre 2000, n° 12158 du rôle)

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Vu l'acte d'appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 décembre 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de … Klapija, né le … à … (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 27 novembre 2000 à la requête de l’actuel appelant contre le ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 23 janvier 2001 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son ministre de la Justice.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh ainsi que le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro du rôle 12158 et déposée au greffe du tribunal administratif le 27 juillet 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, … Klapija, né le … à … (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 27 avril 2000, notifiée le 16 mai 2000, par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié politique, ainsi que d’une décision confirmative sur recours gracieux prise par le prédit ministre en date du 22 juin 2000, notifiée à son mandataire le 28 juin 2000.

Par décision du 27 novembre 2000, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement a reçu le recours en la forme, au fond l’a déclaré non justifié et l’en a débouté.

… Klapija a introduit une requête d’appel à l’encontre de ce jugement au greffe de la Cour administrative en date du 29 décembre 2000.

Ce serait à tort que les juges de première instance n'ont pas fait droit aux conclusions de l'appelant lesquelles auraient dû aboutir à voir constater que la décision ministérielle datée au 27 avril 2000 était et est à réformer pour violation de la loi sinon pour erreur manifeste d'appréciation des faits.

Les éléments d'espèce permettraient de considérer que la situation subjective et objective du demandeur serait telle qu'elle l'autoriserait à être regardé comme pouvant bénéficier des dispositions de l'article ler, section A2, de la Convention de Genève et partant à réclamer leur bénéfice.

L'attitude de l'appelant ayant consisté à refuser d'enrôler dans les forces serbes aurait été dictée dans son chef par des raisons politiques, ou tout le moins de conscience, alors qu’il ne pouvait légitimement et raisonnablement accepter d'être enrôlé dans les forces militaires serbes lesquelles seraient responsables des nombreuses et inadmissibles exactions commises à l'égard de la communauté musulmane établie au Kosovo.

Que pour des raisons de conscience, l'appelant ne pouvait raisonnablement accepter, en tant que musulman, originaire du Kosovo, de devenir l'outil répressif au service d'une autorité animée par des desseins réprouvés par la communauté internationale, à savoir l'épuration ethnique, reposant notamment sur des considérations xénophobes.

Qu'en cas de retour dans son pays d'origine, sa désertion risquerait d'être sévèrement sanctionnée par les autorités judiciaires yougoslaves, lesquelles resteraient compétentes pour connaître des faits commis dans la province du Kosovo, de sorte qu’on ne saurait valablement contester dans le chef de l'appelant l'existence d'une crainte de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays d'origine.

Que l'appréciation des juges de première instance reposerait par ailleurs notamment sur une fausse appréciation des éléments de la cause en ce sens que les juges auraient retenu à tort que «le demandeur reste en défaut d'établir qu'il a concrètement recherché la protection des autorités en place, ainsi que le défaut de ce dernier de leur accorder cette protection pour l'une des cinq causes prévues par l'article ler de la Convention de Genève ».

L’appelant renvoie à cet égard aux différents éléments de fait et plus particulièrement à ceux découlant des procès verbaux d'audition et repris par les juges de première instance.

Que malgré la gravité non contestable et non contestée de la situation particulière des minorités bosniaques au Kosovo telle que celle-ci aurait été relatée par le H.C.R. dans ses différents rapports et par d'autres organisations indépendantes, le statut de réfugié politique lui aurait été refusé pour la raison reposant sur le fait qu'il n'aurait pas sollicité l'aide des autorités en place.

Qu'en décidant de la sorte, les juges de première instance auraient fait une interprétation restrictive de la Convention de Genève, non justifiée par les dispositions expresses de cette même convention, lesquelles n'imposent aucunement que le demandeur d'asile politique ait recherché la protection des autorités étatiques.

Que l’impossibilité de la part des autorités en place d'assurer une quelconque protection serait encore établie à suffisance par le rapport récent de H.C.R. sur la situation des minorités au Kosovo et de nombreuses organisations internationales mettant par ailleurs en évidence le 2 danger particulier qui existerait à l'égard des susdites minorités, dont la sécurité sur place ne pourrait être assurée par des forces de KFOR dont la capacité de dissuasion serait manifestement largement déficiente.

Que dans ces conditions, ce serait à tort qu'il a été reproché à l'appelant de ne pas avoir recherché l'aide des autorités en place, laquelle aide aurait été totalement inopérante dans son cas particulier.

Que si par impossible la Cour estimerait qu'elle ne dispose pas des éléments nécessaires pour toiser la demande d'asile de l'appelant, ce dernier sollicite à titre subsidiaire quant au bien fondée de sa demande, l'institution d'une expertise par la nomination d'une organisation non gouvernementale ayant pour objet d'examiner et de dresser un rapport détaillé quant aux traitements réservés aux minorités bosniaques par les Albanais dans la province de Kosovo, et la possibilité ou l'impossibilité pour les forces de KFOR de protéger ces types de minorités.

Le délégué, dans un mémoire en réponse déposé en date du 23 janvier 2001 a demandé la confirmation du premier jugement.

En ce qui concerne l'insoumission de l'appelant, il a rappelé qu'une loi d'amnistie est à l'heure actuelle en cours de préparation en République Fédérale Yougoslave et quelle devrait être votée sous peu.

Par ailleurs, dans le cadre d'un recours en réformation, il ne saurait être passé outre la nouvelle situation politique qui règne en République Fédérale Yougoslave.

En effet, non seulement un nouveau Président aurait été démocratiquement élu et un nouveau Gouvernement formé, mais en outre, la République Fédérale Yougoslave ferait de nouveau partie de certaines organisations internationales à l'instar de l'ONU.

De même, en ce qui concerne la situation régnant au Kosovo, il rappelle que lors des récentes élections municipales, les partis modérés l'ont emporté au détriment des partis extrémistes.

Les premiers juges ont répondu exhaustivement à tous les moyens produits par l’appelant, développements auxquels la Cour renvoie, et ils ont décidé à bon droit que les décisions ministérielles de refus sont légalement justifiées par le fait que, d’une part, l’insoumission n’est pas, en elle-même, un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, étant donné qu’elle ne saurait, à elle seule, fonder dans le chef du demandeur d’asile, une crainte justifiée d’être persécuté dans son pays d’origine du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, paragraphe 2 de la section A, de la Convention de Genève et, d’autre part, qu’il ne ressort des éléments du dossier ni que le demandeur risquait ou risque de devoir participer à des actions militaires contraires à des raisons de conscience valables, ni que la condamnation qu’il risque d’encourir en raison de son insoumission serait disproportionnée par rapport à la gravité d’une telle infraction ou que la peine éventuelle soit prononcée pour une des causes visées par la Convention de Genève.

C’est encore à juste titre qu’ils ont retenu qu’une persécution émanant non pas de l’Etat, mais de groupes de la population, ne peut être reconnue comme motif d’octroi du statut de réfugié politique que si la personne en cause ne bénéficie pas de la protection des autorités de son pays d’origine pour l’une des cinq causes visées à l’article 1er de la Convention de Genève et que l’actuel appelant reste en défaut d’établir qu’il a concrètement recherché la protection des 3 autorités ainsi que le défaut de ces dernières de leur accorder cette protection pour l’une des cinq causes prévues à l’article 1er de la Convention de Genève.

Le jugement entrepris est en l’occurrence à confirmer.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel ;

le dit non fondé et en déboute ;

partant confirme le jugement du 27 novembre 2000 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelant aux frais d’instance.

Ainsi jugé par :

Marion LANNERS, vice-présidente, Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 12720C
Date de la décision : 13/03/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-03-13;12720c ?

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