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24/01/2001 | LUXEMBOURG | N°12201

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 janvier 2001, 12201


N° 12201 du rôle Inscrit le 4 août 2000 Audience publique du 24 janvier 2001

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Recours formé par Monsieur … ADROVIC et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12201 et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2000 par Maître Valérie-Anne RONDEAU, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de Monsieur … ADROVIC, et de son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel q...

N° 12201 du rôle Inscrit le 4 août 2000 Audience publique du 24 janvier 2001

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Recours formé par Monsieur … ADROVIC et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12201 et déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2000 par Maître Valérie-Anne RONDEAU, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … ADROVIC, et de son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel qu’en nom et pour compte de leur enfant mineur …, tous les trois de nationalité yougoslave, originaire du Monténégro, demeurant actuellement à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 8 mai 2000, notifiée le 6 juin 2000, par laquelle il n’a pas été fait droit à leur demande en reconnaissance du statut de réfugié politique et d’une décision confirmative sur recours gracieux prise par ledit ministre le 10 juillet 2000 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 août 2000 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Valérie-Anne RONDEAU, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Le 10 juin 1998, Monsieur … ADROVIC, né le 21 novembre 1977 à Bérane (Monténégro), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur ADROVIC fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la gendarmerie grand-ducale, sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 1er septembre 1998, Madame …, épouse de Monsieur … ADROVIC, née le 3 septembre 1978 à Bérane (Monténégro), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement ensemble avec son mari à L-…, introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève.

Elle fut entendue le même jour par un agent du service de police judiciaire sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 11 février 1999, Monsieur ADROVIC et Madame … furent entendus séparément par un agent du ministère de la Justice sur les motifs se trouvant à la base de leur demande d’asile.

Par décision du 8 mai 2000, notifiée le 6 juin 2000, le ministre de la Justice informa les époux ADROVIC-…, ainsi que leur enfant mineur …, né le 27 avril 1999 à Esch-sur-

Alzette, de ce que leur demande d’asile avait été rejetée. Ladite décision est motivée comme suit: « (…) Il résulte de vos déclarations que vous, Monsieur, vous avez quitté la Yougoslavie pour le Luxembourg en traversant la Hongrie, l’Autriche ainsi que l’Allemagne.

Madame, vous avez quitté la Yougoslavie le 29 août 1998 pour arriver au Luxembourg le 30 août 1998.

Monsieur, vous exposez que vous avez fait votre service militaire de mars 1997 jusqu’en mars 1998. Vous n’avez pas pu terminer votre 4ième année d’études secondaires techniques à cause de votre service militaire.

Vous avez été appelé à trois reprises pour faire la réserve, sans vous rappeler les dates exactes des convocations. La police militaire était à votre recherche, mais vous avez toujours réussi à lui échapper.

Vous expliquez que vous avez fait votre service militaire au Kosovo en dépit du fait que vous êtes musulman. Vous étiez le seul musulman dans votre unité qui comportait environ 50 soldats. Vous indiquez avoir été injurié et traité comme Albanais. Vous étiez obligé de faire tous les travaux sales, et les officiers ne vous traitaient pas de la même façon dont ils traitaient les autres soldats.

Vous déclarez que le motif de votre fuite a été le fait que vous ayez été appelé à faire la réserve.

Vous ne voulez plus jamais retourner en Yougoslavie, pas même si la situation s’améliore.

Vous relatez qu’il se pourrait que vous ayez déjà être (sic !) condamné pour avoir emmené votre livret militaire en-dehors de la Yougoslavie. En plus vous n’avez pas répondu à la convocation pour la réserve et vous avez peur d’être condamné comme traître. La population serbe de Berane vous considérerait comme déserteur, et on vous aurait déjà injurié parce que vous n’avez pas fait la réserve.

Vous indiquez en plus que vous avez en quelque sorte peur de tout le monde à Berane, surtout de la population serbe et de la police serbe. La population serbe aurait manifesté des sentiments d’hostilité à votre égard vu que vous avez refusé de faire la réserve.

2 Vous invoquez que vous ne vouliez pas aller faire la guerre au Kosovo, d’autant plus que votre père était complètement opposé à cela, alors que vous êtes son seul fils.

Vous dites que votre femme elle aussi aurait été injuriée à plusieurs reprises, sans savoir si elle a été menacée concrètement.

Madame, vous exposez que le motif pour votre fuite a été le fait que vous n’ayez plus pu vivre en liberté.

Vous expliquez que vous aimeriez bien retourner au cas où il n’y aurait plus de problèmes politiques en Yougoslavie.

Vous confirmez les déclarations de votre mari en ce qui concerne les problèmes qu’il a eus à cause des convocations pour la réserve et à cause de son refus de donner suite à ces convocations. Vous confirmez également les problèmes que votre mari a eus lors de son service militaire.

Vous alléguez que vous avez peur d’être maltraitée encore plus qu’auparavant lors d’un retour dans votre pays. Vous avez fait l’objet de contrôles en sortant de la maison. La police est venue perquisitionner votre maison afin de trouver votre mari.

A cette occasion votre beau-père a été menacé et bousculé. Les Serbes vous ont injuriée dans la rue. Vous n’avez plus osé sortir le soir dans la rue.

Vous indiquez avoir peur des Serbes et des Albanais. Ces derniers seraient très sauvages avec les gens et ne respecteraient pas ceux qui ne sont pas Albanais.

Votre peur vient de votre religion musulmane.

Vous relatez qu’un Serbe appelé « Vuk » vous a menacée de viol et vous a dit que vous n’avez pas le droit de vivre au Monténégro. Quelqu’un de votre famille vous a toujours raccompagnée du magasin à la maison, parce que vous n’avez pas osé y aller seule.

Vous invoquez en outre que votre oncle Sucurija LATIC a été emmené et frappé par la police, qui l’accusait de posséder des armes, alors que ce n’était pas le cas.

En ce qui concerne le refus de faire la réserve militaire, force est de constater que la crainte d’une sanction pénale pour insoumission ne saurait en elle-même constituer une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève.

En outre, le conflit armé au Kosovo s’est terminé en mai 1999 et les troupes fédérales yougoslaves se sont retirées de ce territoire, de sorte que la crainte d’être envoyé au Kosovo n’est plus justifiée.

En ce qui concerne les problèmes que vous avez eus avec la police serbe et les populations serbes et albanaises, ces faits ne sont pas d’une telle gravité – même à les supposer établis – qu’ils justifieraient une crainte de persécution justifiée au sens de la Convention de Genève.

3 Par conséquent vous n’alléguez tous les deux aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Ainsi une crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un groupe social n’est pas établie.

Votre demande en obtention du statut de réfugié est dès lors refusée comme non fondée au sens de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile; 2) d’un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève. (…) ».

Par lettre datée du 30 juin 2000, réceptionnée au ministère de la Justice le 4 juillet 2000, le mandataire de l’époque des époux ADROVIC-… introduisit un recours gracieux à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 8 mai 2000.

Par décision du 10 juillet 2000, le ministre de la Justice confirma sa décision négative antérieure.

Par requête déposée en date du 4 août 2000, Monsieur … ADROVIC et son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel qu’en nom et pour compte de leur enfant commun …, ont fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation des décisions ministérielles précitées des 8 mai et 10 juillet 2000.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile; 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles déférées. Le recours en réformation, formulé en ordre principal par les époux ADROVIC-…, ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. – Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation est à déclarer irrecevable. En effet, l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dispose qu’un recours en annulation n’est recevable qu’à l’égard des décisions non susceptibles d’un autre recours d’après les lois et règlements, de sorte que l’existence d’une possibilité d’un recours en réformation contre une décision rend irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

Alors même que le moyen tiré d’une violation de l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes n’a été soulevé qu’en dernier lieu par les demandeurs, il appartient toutefois au tribunal d’analyser ce moyen avant de procéder à l’analyse des autres moyens, en ce que ce moyen a trait à la procédure administrative non contentieuse à observer par l’autorité compétente dans le cadre de la rédaction des décisions litigieuses.

Les demandeurs concluent à la violation de ladite disposition réglementaire dans la mesure où le ministre de la Justice les aurait découragé à intenter un recours contentieux, en leur faisant croire que l’issue d’un tel recours ne pourrait leur être que défavorable, en ce qu’il a indiqué à l’avant dernier alinéa de la décision critiquée du 8 mai 2000, ce qui suit : « Dans le cas où vous exerceriez un recours devant les juridictions administratives, vous devrez quitter le territoire dans le mois suivant le jour où la décision confirmative des juridictions administratives aura requis (sic) le caractère de force de chose jugée ».

4 En vertu de l’article 14 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 « les décisions administratives refusant de faire droit, en tout ou en partie, aux requêtes des parties ou révoquant ou modifiant d’office une décision ayant créé ou reconnu des droits doivent indiquer les voies de recours ouvertes contre elles, le délai dans lequel le recours doit être introduit, l’autorité à laquelle il doit être adressé ainsi que la manière dans laquelle il doit être présenté ».

Il échet d’abord de relever que la décision ministérielle critiquée du 8 mai 2000 contient à la fin de la page 3 une information exacte sur la voie de recours susceptible d’être introduite par les demandeurs, de sorte que ladite décision ministérielle constitue une application correcte de l’article 14 précité. Cette conclusion ne saurait être énervée, comme l’a soulevé à bon droit le délégué du gouvernement, par le fait qu’à l’avant dernier alinéa de la même page de la décision ministérielle précitée figure la phrase critiquée par les demandeurs, étant donné que la phrase, telle qu’elle est libellée, n’exclut nullement la possibilité d’une décision juridictionnelle à rendre par les juridictions administratives portant annulation ou réformation de la décision ministérielle en question, la seule hypothèse que le ministre de la Justice entendait viser par cette phrase étant celle d’une décision juridictionnelle portant rejet d’un recours dirigé contre sa décision.

Il suit des considérations qui précèdent que ce moyen est partant à rejeter.

Les demandeurs font encore exposer être de confession musulmane et originaires du Monténégro, que Monsieur ADROVIC aurait quitté son pays, entre autres, en raison du fait qu’il a refusé d’être enrôlé dans les forces militaires yougoslaves et que du fait de sa non-

présentation à la suite de trois convocations reçues afin de rejoindre la réserve de ladite armée, il risquerait d’être condamné à une peine d’emprisonnement de 5 ans et qu’il aurait fait l’objet de mauvais traitement au cours de son service militaire régulier accompli de mars 1997 à mars 1998.

Ils relèvent encore qu’ils auraient fait l’objet, d’une part, de menaces et d’injures de la part de certains groupes de la population serbe, du fait de l’insoumission de Monsieur ADROVIC et de leur appartenance à la religion musulmane, et de certains groupes de la population albanaise, du fait que Monsieur ADROVIC aurait participé à la guerre au Kosovo au cours de son service militaire et, d’autre part, de menaces et intimidations de la part de la police yougoslave qui rechercherait Monsieur ADROVIC à la suite de son insoumission.

Le délégué du gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation des époux ADROVIC-… et que le recours laisserait d’être fondé.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève dispose que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du 5 demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Dans le cadre de l’évaluation de la situation personnelle des demandeurs, l’examen fait par le tribunal ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il apprécie également la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations des demandeurs.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par les époux ADROVIC-… lors de leurs auditions respectives du 11 février 1999, telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, ensemble les arguments apportés au cours des procédures contentieuse et gracieuse, amène le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, la décision ministérielle de refus est légalement justifiée par le fait que, d’une part, l’insoumission n’est pas, en elle-même, un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, étant donné qu’elle ne saurait, à elle seule, fonder dans le chef de Monsieur ADROVIC une crainte justifiée d’être persécuté dans son pays d’origine du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, paragraphe 2 de la section A, de la Convention de Genève et que, d’autre part, il n’est pas établi qu’actuellement, au vu notamment des élections ayant eu lieu en Serbie, Monsieur ADROVIC risque de devoir participer à des actions militaires contraires à des raisons de conscience valables, ni que des traitements discriminatoires, en raison de son appartenance à une minorité religieuse, risquent de lui être infligés, ni encore que la condamnation qu’il risque d’encourir en raison de son insoumission serait disproportionnée par rapport à la gravité d’une telle infraction ou que la peine - d’emprisonnement - éventuelle soit prononcée pour une des causes visées par la Convention de Genève. Concernant ce dernier point, il convient encore d’ajouter que si des condamnations à des peines d’emprisonnement de plusieurs années ont été prononcées dans un passé récent à l’égard de déserteurs et d’insoumis, Monsieur ADROVIC n’établit pas, au vu de l’évolution de la situation actuelle en Yougoslavie et plus particulièrement la réticence du gouvernement monténégrin de coopérer avec les autorités fédérales en ce qui concerne l’exécution des peines prononcées et de la loi d’amnistie votée par le Parlement du Monténégro visant les déserteurs et insoumis de l’armée fédérale serbe, que les jugements en question sont exécutés effectivement.

Concernant les déclarations faites par les demandeurs, notamment quant à leur peur à l’égard des autorités serbes, et plus particulièrement à l’égard de la police serbe, en raison de leur religion musulmane et surtout de l’insoumission de Monsieur ADROVIC, il échet de constater qu’elles constituent l’expression d’un sentiment général d’insécurité, sans que les demandeurs n’aient établi un état de persécution vécu ou une crainte qui serait telle que la vie leur serait, à raison, intolérable dans leur pays d’origine, étant relevé dans ce contexte que, lors de leurs auditions respectives, ils sont restés très vagues dans leurs allégations et explications, qu’ils ont notamment précisé qu’ils n’ont pas été accusés d’un crime ou d’un délit, ni incarcéré avec ou sans jugement, et qu’ils n’établissent aucun fait d’une gravité suffisante pour constituer un motif justifiant dans leur chef une crainte légitime d’être persécutés dans leur pays d’origine du fait de leur religion musulmane ou pour un des autres motifs visés par la Convention de Genève.

6 En ce qui concerne les prétendus mauvais traitements que Monsieur ADROVIC aurait subi au cours de l’accomplissement de son service militaire, de mars 1997 à mars 1998, il échet de constater que ces faits, à savoir des discriminations, des injures et d’autres humiliations de la part des autres membres de son régiment, non autrement spécifiées, ne sont pas suffisamment graves pour qu’on puisse en conclure que la vie au Monténégro lui serait à l’heure actuelle devenue insupportable. Il en est de même de la peur alléguée à l’égard des Albanais, en ce que les demandeurs n’ont pas fait état d’un état de persécution vécu ou d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève de la part de la population albanaise se trouvant le cas échéant au Monténégro et partant la peur ainsi alléguée ne constitue, en substance, que l’expression d’un sentiment général de peur.

Pour le surplus, le tribunal est amené à constater que les déclarations et récits des demandeurs restent vagues et notamment ceux fournis par la demanderesse quant aux menaces de viol de la part d’un ressortissant serbe et qu’ils n’ont pas apporté suffisamment de précisions quant aux persécutions qu’ils risqueraient personnellement de subir du fait de leur appartenance ethnique et de leurs convictions religieuses, de sorte qu’il convient de conclure qu’ils n’ont pas fait état de persécutions vécues ou de craintes qui seraient telles que la vie leur serait, à raison, intolérable dans leur pays d’origine.

Le recours en réformation est donc à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

se déclare compétent pour connaître du recours en réformation;

le déclare également recevable en la forme;

au fond le déclare non justifié et en déboute;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, Mme. Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 24 janvier 2001, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 7


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 12201
Date de la décision : 24/01/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-01-24;12201 ?

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