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08/01/2001 | LUXEMBOURG | N°11830

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 janvier 2001, 11830


N° 11830 du rôle Inscrit le 11 février 2000 Audience publique du 8 janvier 2001

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Recours formé par Monsieur … CURCI, … contre une décision du ministre des Classes moyennes et du Tourisme en matière d’autorisation d’établissement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11830 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 février 2000 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, assisté

de Maître Arthur SCHUSTER, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à ...

N° 11830 du rôle Inscrit le 11 février 2000 Audience publique du 8 janvier 2001

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Recours formé par Monsieur … CURCI, … contre une décision du ministre des Classes moyennes et du Tourisme en matière d’autorisation d’établissement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11830 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 février 2000 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, assisté de Maître Arthur SCHUSTER, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … CURCI, entrepreneur de constructions, demeurant à B-

…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Classes moyennes et du Tourisme du 12 novembre 1999 refusant de lui accorder l’autorisation d’exercer au Grand-Duché de Luxembourg les métiers de carreleur et de plafonneur-façadier ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 avril 2000 par Maître Edmond DAUPHIN, assisté de Maître Arthur SCHUSTER, au nom du demandeur ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 mai 2000 par le délégué du Gouvernement ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2000 par Maître Edmond DAUPHIN, assisté de Maître Arthur SCHUSTER, au nom du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Arthur SCHUSTER et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 4 décembre 2000.

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En date du 8 février 1999, la société à responsabilité limitée CURCI et Cie s. à r.l., établie à L-…, s’adressa au ministre des Classes moyennes et du Tourisme pour solliciter une autorisation d’établissement pour les métiers suivants : « - entreprise de construction ;

carreleur – plafonneur-façadier – commerce d’articles pour le bâtiment. – agence immobilière ».

Suite à cette demande, le ministre lui accorda l’autorisation d’établissement référencée sous le numéro 78015/A en qualité d’artisan-commerçant pour les activités suivantes :

« entrepreneur de construction. – commerce d’articles pour le bâtiment. – agence immobilière ». Cette décision fut portée à la connaissance de l’entreprise CURCI par courrier du ministre datant du 8 avril 1999 énonçant à la base du refus d’accorder l’autorisation sollicitée pour les métiers de carreleur et de plafonneur-façadier les motifs : « quant aux activités rentrant dans les métiers de carreleur et de plafonneur-façadier, n°s 418-00 et 419-

00 de la liste artisanale prévue au règlement grand-ducal du 19 février 1990, je vous informe que l’exercice en est soumis à la possession des brevets de maîtrise afférents ou de pièces justificatives équivalentes conformément aux dispositions de l’article 13, (2) de la loi d’établissement du 28 décembre 1988 et du règlement grand-ducal du 15 septembre 1989 déterminant les critères d’équivalence.

Etant donné que Monsieur … CURCI n’a pas produit ces preuves, je suis au regret de ne pouvoir réserver une suite à cette partie de votre requête dans l’état actuel du dossier.

A toutes fins utiles, je vous signale que les dispositions de la directive 64/427/CEE du 7 juillet 1964 (industrie et artisanat) ne sauraient s’appliquer à votre cas, étant donné que Monsieur CURCI n’est pas à considérer comme migrant au sens du droit communautaire du fait de sa résidence au Grand-Duché de Luxembourg ».

Par l’intermédiaire de son mandataire, Monsieur … CURCI, entrepreneur de constructions, demeurant à B-…, agissant en sa qualité de gérant de la société CURCI et Cie s.

à r.l., préqualifiée, fit introduire un recours gracieux par courrier datant du 14 avril 1999 à l’encontre de la décision ministérielle précitée. A travers ledit courrier il contesta le motif de refus consistant à lui dénier la qualité de « migrant au sens du droit communautaire » en faisant valoir que contrairement à l’allégation qui le soustend en ce sens qu’il aurait sa résidence au Grand-Duché de Luxembourg, il aurait habité sans interruption en Belgique et aurait d’ailleurs été « migrant CEE » depuis le début pratiquement de sa carrière professionnelle pour être né en Libye de parents italiens, ainsi que pour être venu s’installer au Grand-Duché de Luxembourg en 1979, après ses débuts professionnels en Italie, et s’être fixé ensuite pour quelques années en Belgique ou il aurait définitivement résidé depuis. Il relève en outre avoir effectivement exercé en Belgique à titre indépendant pendant plus de six années consécutives les activités professionnelles pour lesquelles il sollicite l’extension de son autorisation d’établissement.

A la suite d’un réexamen du dossier, le ministre, par courrier datant du 28 avril 1999, informa le mandataire de Monsieur CURCI de ce qu’une suite favorable ne pouvait être réservée en l’état actuel du dossier à sa demande. Le ministre releva plus particulièrement que s’agissant des dispositions de la directive 64/427/CEE du 7 juillet 1964 « leur application ne peut se faire qu’en faveur des migrants au sens du droit communautaire, ainsi qu’au moyen d’une attestation à délivrer par les autorités compétentes de l’Etat membre de provenance.

Or, Monsieur CURCI, dont la demande n’est par ailleurs pas accompagnée de l’attestation en question, ne peut être considéré comme un migrant.

En effet, l’instruction administrative a révélé que pendant la prétendue période d’activité du 1er février 1992 au 18 mars 1998 en Belgique, Monsieur CURCI était non 2 seulement domicilié au Grand-Duché de Luxembourg mais y était aussi affilié à la sécurité sociale au titre de l’exercice de diverses occupations (…) ».

Suite à cette décision confirmative sur recours gracieux du ministre, Monsieur CURCI s’adressa une nouvelle fois au ministre par courrier de son mandataire datant du 8 juillet 1999 pour lui soumettre de nouvelles pièces, en l’occurrence un certificat de résidence avec historique délivré par l’administration communale d’…le 31 mai 1999, documentant qu’il est domicilié en Belgique de manière ininterrompue depuis le 11 mai 1987 pour soutenir que la qualité de migrant au sens du droit communautaire lui serait acquise. Il versa en outre d’autres pièces au dossier pour parer au défaut de l’attestation à délivrer par les autorités de l’Etat de provenance, relevé par le ministre dans le cadre des décisions négatives précitées pour conclure encore à l’exercice effectif dans son chef des activités litigieuses pendant six années consécutives en Belgique.

Le ministre, après un itératif réexamen du dossier de Monsieur CURCI, lui fit parvenir, par courrier datant du 5 août 1999, une nouvelle décision confirmative sur recours gracieux en relevant d’abord que les pièces produites « ne sont pas probantes puisqu’elles ne sont pas prévues à la directive 64/427/CEE (industrie et artisanat) », et en précisant ensuite que « par ailleurs, même une « attestation CEE » - pièce prévue à la directive en question, et délivrée par le ministère des Classes moyennes belge – ne peut être prise en considération en vue d’établir la qualification professionnelle de Monsieur CURCI puisque celui-ci n’est pas un migrant au sens du droit communautaire.

Il s’avère en effet que durant cette période d’occupation professionnelle en Belgique, Monsieur CURCI était affilié auprès de la sécurité sociale luxembourgeoise au titre de l’exercice de diverses occupations, point fondamental sur lequel vous ne prenez pas position.

Les dispositions de la directive ne sauraient dès lors lui permettre de contourner à son avantage les dispositions légales en vigueur au Luxembourg en matière d’accès à une activité artisanale ».

Par lettre recommandée datée du 30 septembre 1999, Monsieur CURCI fit néanmoins parvenir au ministre une attestation relative aux activités exercées en Belgique délivrée par le ministère des Classes moyennes et de l’Agriculture du Royaume de Belgique.

Par courrier du 12 novembre 1999, le ministre informa Monsieur CURCI de ce qu’en l’absence de tout élément probant nouveau, il était au regret de maintenir ses décisions des 8 et 28 avril 1999, ainsi que du 5 août 1999, tout en lui signalant encore une fois et « à toutes fins utiles », que les dispositions de la directive 64/427/CEE du 7 juillet 1964 ne sauraient s’appliquer dans son cas.

Monsieur CURCI a alors fait introduire, par requête déposée en date du 11 février 2000, un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision précitée du ministre du 12 novembre 1999.

Le délégué du Gouvernement conclut principalement à l’irrecevabilité de ce recours pour avoir été introduit tardivement en faisant valoir que le délai du recours contentieux ne pourrait en principe être interrompu qu’une seule fois à la suite de l’introduction, dans le délai légal, d’un recours gracieux, à moins que l’autorité compétente ne consente à rouvrir l’instruction et à réexaminer la cause, à condition qu’elle se trouve en présence d’éléments 3 nouveaux, c’est-à-dire de faits s’étant produits à la suite de la première décision et qui seraient de nature à modifier la situation personnelle du demandeur. Dans la mesure où le demandeur aurait en l’espèce à plusieurs reprises introduit un recours gracieux sans présenter d’éléments nouveaux, il se trouverait à l’heure actuelle forclos à intenter un recours contentieux.

Il ressort des éléments du dossier que la décision initiale du 7 avril 1999, portée à la connaissance du demandeur par courrier du 8 avril 1999, fut confirmée trois fois sur recours gracieux par décisions ministérielles datant respectivement des 28 avril, 5 août et 12 septembre 1999.

Même à admettre que les deux premières décisions confirmatives des 28 avril et 5 août 1999 n’aient pas été purement et simplement confirmatives pour être basées, au moins partiellement, sur des éléments nouveaux et avoir fait l’objet à chaque fois d’un réexamen ministériel approfondi, force est cependant de constater que le courrier du demandeur du 30 septembre 1999, constitutif d’un itératif recours gracieux, n’a en tout état de cause plus donné lieu à une nouvelle instruction du dossier et n’était pas non plus basé sur des éléments nouveaux de nature à modifier la situation personnelle du demandeur à la suite de la décision ministérielle précédente du 5 août 1999.

En effet, il se dégage clairement de la décision du 5 août 1999 que le refus ministériel y confirmé ne saurait en tout état de cause être énervé par la production d’une « attestation CEE » en bonne et due forme, le ministre ayant pris soin de préciser de manière claire et non équivoque que pareille attestation, même à la supposer établie, « ne peut être prise en considération en vue d’établir la qualification professionnelle de Monsieur CURCI puisque celui-ci n’est pas un migrant au sens du droit communautaire ».

Cette conclusion ne saurait être énervée par les arguments avancés par le demandeur dans son mémoire en réplique tenant au caractère incomplet du dossier tant que n’y figurait pas l’attestation en question et au fait que le ministre l’aurait laissé dans l’ignorance jusqu’au 5 août 1999 quant à l’identité de l’autorité belge compétente pour l’établissement de pareille attestation, étant donné qu’abstraction même faite de ce que le ministre a déjà pris soin dès le 28 avril 1999 d’attirer, à toute fin utile, l’attention du demandeur sur la nécessité d’une attestation à délivrer par les autorités compétentes de l’Etat membre de provenance en cas d’applicabilité des dispositions de la directive, il a surtout et également précisé dès sa première décision de refus datant du 8 avril 1999 que le problème principal au niveau de l’applicabilité des dispositions de la directive 64/427/CEE se situe au niveau de la qualité de migrant au sens du droit communautaire dans le chef du demandeur.

Il se dégage par ailleurs clairement des courriers subséquents du ministre que ce motif de refus tenant à l’absence de qualité de migrant dans le chef de Monsieur CURCI constitue le motif décisif et principal de refus, les développements tenant à la présentation d’une attestation CEE n’ayant été présentés qu’à titre surabondant, sans que le demandeur n’ait raisonnablement pu se méprendre sur l’élément décisif du dossier, constant à travers les trois décisions ministérielles intervenues.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le courrier de Monsieur CURCI du 30 septembre 1999 ayant eu pour objet de transmettre au ministre une « attestation CEE » relative aux activités litigieuses, n’a pas pu valablement interrompre le délai du recours contentieux ayant couru à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 5 août 1999.

4 Il s’ensuit que la décision ministérielle déférée du 12 novembre 1999, confirmative de manière réitérée des décisions ministérielles antérieures précitées, en l’absence de tout élément nouveau produit à sa base susceptible d’énerver la motivation de la décision négative précédente du 5 août 1999, n’a plus pu ouvrir un nouveau délai de recours contentieux dans cette affaire.

Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours sous examen est irrecevable pour avoir été introduit après l’expiration du délai de recours légal de trois mois applicable en la matière ayant couru une dernière fois à partir de la décision du ministre du 5 août 1999, déjà confirmative sur recours gracieux de celles antérieures des 8 et 28 avril 1999.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 janvier 2001 par :

M. Ravarani, président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Ravarani 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11830
Date de la décision : 08/01/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2001-01-08;11830 ?

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