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18/12/2000 | LUXEMBOURG | N°12278

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 décembre 2000, 12278


N° 12278 du rôle Inscrit le 25 août 2000 Audience publique du 18 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … PILICI, Moesdorf contre deux décisions du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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Vu la requête déposée le 25 août 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Luc SCHANEN, avocat à la Cour, assisté de Maître Sandra CORTINOVIS, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … PILICI, né le … à …(Ma

cédonie), de nationalité macédonienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation de deux dé...

N° 12278 du rôle Inscrit le 25 août 2000 Audience publique du 18 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … PILICI, Moesdorf contre deux décisions du ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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Vu la requête déposée le 25 août 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Luc SCHANEN, avocat à la Cour, assisté de Maître Sandra CORTINOVIS, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … PILICI, né le … à …(Macédonie), de nationalité macédonienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation de deux décisions du ministre de la Justice des 14 juin et 26 juillet 2000 lui refusant l’octroi d’un permis de séjour au Luxembourg;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 septembre 2000;

Vu le mémoire en réplique, intitulé mémoire en duplique, déposé le 17 octobre 2000 au nom du demandeur;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Alban COLSON, en remplacement de Maître Luc SCHANEN, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Le 13 novembre 1998, Monsieur … PILICI, de nationalité macédonienne, né le … à …(Macédoine), demeurant actuellement à L-…, introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971.

Par la suite Monsieur PILICI fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la gendarmerie grand-ducale sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et son identité et par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande.

1 Un avis défavorable fut émis par la commission consultative pour les réfugiés le 12 janvier 2000 et le ministre de la Justice informa Monsieur PILICI, par lettre du 28 février 2000, que sa demande avait été rejetée.

Un recours gracieux à l’encontre de la décision précitée se solda par une décision confirmative datant du 4 avril 2000.

Un recours contentieux introduit par Monsieur PILICI fut rejeté par jugement du tribunal administratif en date du 31 mai 2000.

Le 30 mai 2000, le mandataire de Monsieur PILICI introduisit une demande en obtention d’un permis de séjour.

Cette demande fut rejetée par le ministre de la Justice le 14 juin 2000 au motif que “ selon l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers, la délivrance d’une autorisation de séjour est subordonnée à la possession de moyens d’existence personnels suffisants permettant à l’étranger d’assurer son séjour au Grand-Duché indépendamment de l’aide matérielle ou de secours financiers que de tierces personnes pourraient lui faire parvenir.

Or, votre mandant ne dispose pas d’un permis de travail, mais d’une autorisation d’occupation temporaire valable jusqu’au 15 juin 2000 et non prorogeable. Par conséquent, il n’est pas en possession de moyens d’existence personnels ”.

Un recours gracieux introduit par le mandataire de Monsieur PILICI en date du 14 juillet 2000 fut rejeté par le ministre de la Justice en date du 26 juillet 2000.

Par requête déposée le 25 août 2000, Monsieur PILICI a introduit un recours en annulation à l’encontre des deux décisions du ministre de la Justice précitées des 14 juin et 26 juillet 2000.

Le recours ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Lors des plaidoiries le tribunal a invité les parties et, plus particulièrement, la partie demanderesse, à prendre position quant à l’incidence des dispositions légales relatives aux délais pour la production des mémoires sur la question de la “ recevabilité ” du mémoire en réplique déposé au nom du demandeur le 17 octobre 2000.

Le mandataire du demandeur et le délégué du gouvernement ont déclaré se rapporter à la sagesse du tribunal quant à cette question.

La question de la communication des mémoires dans les délais prévus par la loi touche à l’organisation juridictionnelle, étant donné que le législateur a prévu les délais émargés sous peine de forclusion, tel que cela ressort de l’article 5 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Or, l’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 prévoit en ses paragraphes (5) et (6) que 2 “ (5) le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse, la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois.

(6) Les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus à peine de forclusion. Ils ne sont pas susceptibles d’augmentation en raison de la distance. Ils sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 septembre ”.

Dans ce contexte, il convient de relever qu’aucune prorogation de délai n’a été demandée au président du tribunal conformément à l’article 5 paragraphe (7) ni, par la force des choses, accordée par ce dernier.

Dans la mesure où le mémoire en réponse du gouvernement a été déposé par le délégué du gouvernement au greffe du tribunal en date du 13 septembre 2000, qu’il a été transmis au demandeur par courrier du même jour et que les délais de procédure ont été suspendus pendant la période du 16 juillet au 15 septembre, la production du mémoire en réplique a dû intervenir pour le 16 octobre 2000 au plus tard. Or, étant donné que la date de la remise à la poste dudit mémoire n’est pas relevante, mais que seule la date de son dépôt au greffe est déterminante, force est de constater que le mémoire en réplique n’a été réceptionné au greffe du tribunal qu’en date du 17 octobre 2000, de sorte que le délai d’un mois légalement prévu à peine de forclusion n’a pas été respecté et le tribunal est dans l’obligation d’écarter le mémoire en réplique.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir qu’il est en mesure d’assurer ses frais de séjour au Luxembourg de façon indépendante. Dans ce contexte, il soutient qu’il justifie de moyens d’existence propres et d’un logement adéquat, qu’il se dégagerait des pièces produites en cause qu’il disposerait d’un solde créditeur de 400.000.- francs sur son compte bancaire et qu’il serait disposé à consigner ce montant auprès du ministère de la Justice.

Le demandeur ajoute encore qu’il ne faudrait pas négliger sa situation personnelle qui serait telle qu’il se trouverait dans l’impossibilité de se réclamer de la protection de son pays d’origine, au motif qu’il serait un déserteur risquant d’être sanctionné pénalement à une forte peine de prison et qu’il craindrait la police de son pays.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour manquer de fondement.

L’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 dispose que: “l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger: (…) - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ”.

Au voeu de l’article 2 précité, une autorisation de séjour peut être refusée lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm. 1/2000, V° Etrangers, II Autorisation de séjour - Expulsion, n° 81, et autres références y citées).

La légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise. Il appartient au juge de vérifier, d’après les 3 pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute.

Il se dégage des éléments du dossier et des renseignements qui ont été fournis au tribunal, que Monsieur PILICI ne disposait pas de moyens personnels propres suffisants au moment où les décisions attaquées ont été prises.

En effet, s’il est vrai que le demandeur a bénéficié de deux autorisations d’occupation temporaire à durée limitée, à savoir une première pour la période allant du 27 septembre au 26 novembre 1999 et une deuxième pour la période allant du 14 février au 15 juin 2000, de sorte qu’il a valablement pu s’adonner à une occupation rémunérée pendant les périodes de couverture (il a travaillé les deux fois en qualité d’ouvrier auprès de la société coopérative CO-

LABOR), il n’en reste pas moins que depuis l’expiration de la deuxième autorisation d’occupation temporaire, c’est-à-dire depuis le 15 juin 2000, Monsieur PILICI n’est plus autorisé à occuper un emploi au Luxembourg et à toucher légalement des revenus provenant d’une telle occupation. Il s’ensuit qu’à partir de ladite date, il ne saurait faire valoir l’existence d’un revenu personnel et régulier du chef d’une occupation salariée.

Le demandeur ne prouve pas l’existence d’autres moyens personnels. A cet égard, il échet de relever qu’au moment où les décisions ministérielles incriminées ont été prises, le fait de disposer d’un solde bancaire créditeur de 400.000.- francs, fruit de son occupation temporaire, n’est pas suffisant pour justifier de l’existence de moyens personnels propres suffisants avec lesquels le demandeur peut subvenir à ses besoins dans le futur, ceci d’autant plus si sa proposition de consigner cette somme au profit de l’Etat pour garantir notamment le paiement de son voyage de retour dans son pays d’origine était acceptée, étant donné qu’il n’en disposerait plus pour financer son séjour au Luxembourg.

Par ailleurs, si l’impossibilité de pouvoir retourner dans son pays d’origine en raison d’un risque de persécution, à la supposer établie, est, en principe, pertinente en matière de reconnaissance du statut de réfugié politique, voire en matière de refoulement, les arguments afférents restent sans incidence dans le cadre d’une demande d’obtention d’un permis de séjour.

Il suit des considérations qui précèdent que c’est donc à juste titre que le ministre a refusé l’autorisation de séjour sollicitée et que le recours en annulation est à écarter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

écarte le mémoire en réplique tardivement fourni;

reçoit le recours en la forme;

au fond, déclare le recours non justifié et en déboute;

4 condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 18 décembre 2000 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 12278
Date de la décision : 18/12/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-12-18;12278 ?

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