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13/12/2000 | LUXEMBOURG | N°12062

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 décembre 2000, 12062


N° 12062 du rôle Inscrit le 19 juin 2000 Audience publique du 13 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … BIEVER, … contre une décision de l’entreprise des Postes et Télécommunications en matière de stage

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Vu la requête inscrite sous le numéro 12062 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juin 2000 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre

des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BIEVER, expéditionnaire-stagiaire auprès de l’entrep...

N° 12062 du rôle Inscrit le 19 juin 2000 Audience publique du 13 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … BIEVER, … contre une décision de l’entreprise des Postes et Télécommunications en matière de stage

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Vu la requête inscrite sous le numéro 12062 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juin 2000 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BIEVER, expéditionnaire-stagiaire auprès de l’entreprise des Postes et Télécommunications, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du comité de direction de l’entreprise des Postes et Télécommunications du 9 mars 2000 refusant de prolonger son stage ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 20 juin 2000 portant signification de ce recours à l’entreprise des Postes et Télécommunications ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 18 août 2000 par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’entreprise des Postes et Télécommunications ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 18 août 2000, portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … BIEVER ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 13 octobre 2000 par Maître Jean-Marie BAULER au nom du demandeur ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, préqualifié, portant signification de ce mémoire en réplique à l’entreprise des Postes et Télécommunications ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Claudine ELCHEROTH et Georges KRIEGER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 27 novembre 2000.

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Monsieur … BIEVER, demeurant à L-…, fut admis au stage dans la carrière de l’expéditionnaire à l’entreprise des Postes et Télécommunications, ci-après appelée “ l’entreprise des P&T ” à Luxembourg.

Par décision datant du 11 mars 1999, le comité de direction de l’entreprise des P&T prolongea cette admission au stage pour une durée de 12 mois avec effet à partir du 1er avril 1999.

Le directeur général de l’entreprise des P&T informa Monsieur BIEVER par courrier datant du 17 mars 2000 de ce qui suit “ Le Comité de Direction a dans sa réunion du 9 mars 2000, après avoir minutieusement examiné le dossier en question, décidé de pas prolonger votre stage de sorte que celui-ci prend fin le 31 mars 2000.

En effet les reproches formulés à votre égard tels que retard dans l’exécution de certaines tâches, inobservation des délais et manque du suivi de certains dossiers, reproches qui vous ont été communiqués à plusieurs reprises par vos supérieurs hiérarchiques et qui ont fait l’objet de votre prise de position du 29 novembre 1999, sont sérieux.

Ce qui a aggravé la situation c’est le fait qu’au cours d’un entretien en date du 16-11-1999 avec votre préposé et un autre agent de votre service, vous avez avoué avoir menti à votre préposé pour éviter des problèmes avec votre supérieur.

Partant de ces considérations, le Comité est arrivé à la conclusion que la confiance réciproque entre vous et vos supérieurs hiérarchiques est durablement ébranlée et que par conséquent une prolongation de votre stage n’est pas justifiée.

La présente décision est susceptible d’un recours en annulation par - devant le Tribunal Administratif dans les trois mois de sa notification. ” A l’encontre de la décision du comité de direction de l’entreprise des P&T du 9 mars 2000 ainsi portée à sa connaissance, Monsieur BIEVER a fait introduire un recours contentieux en réformation, sinon en annulation par requête déposée en date du 19 juin 2000.

Aucun recours de pleine juridiction n’étant prévu en matière de prolongation de stage, le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

L’affirmation du demandeur que la décision déférée fut portée à sa connaissance en date du 21 mars 2000 n’étant pas contestée en cause, le recours en annulation formé à titre subsidiaire est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours le demandeur fait valoir que la décision déférée violerait l’article 2,2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat en ce que le comité de direction de l’entreprise des P&T ne serait pas compétent en la matière et que seul le membre du Gouvernement dont relève l’établissement public en cause serait habilité à prendre une décision de refus de prolongation de stage.

2 La partie défenderesse rétorque que compte tenu de l’autonomie de l’entreprise des P&T, ainsi qu’au regard des dispositions de la loi ayant porté création de cette entreprise, les décisions relatives à la suspension et à la prolongation du stage seraient, contrairement aux décisions d’admission au stage, du ressort du comité de direction de l'entreprise.

L’entreprise des P&T constitue, en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi modifiée du 10 août 1992 portant création de l'entreprise des P & T, un établissement public. L’article 24 (1) de cette loi précise au sujet du personnel de l’entreprise que “ le régime des agents de l’entreprise est un régime de droit public ” et que “ les dispositions actuelles et futures du statut général, du régime des traitements, indemnités et pensions, de la législation sur les fonctionnaires et employés de l'Etat ainsi que celles du contrat collectif des ouvriers de l'Etat s'appliquent en principal et accessoires, modalités, délais et recours aux agents respectifs de l’entreprise ”.

Le statut général, ainsi rendu expressément applicable aux agents de l’entreprise des P&T, contient de son côté un chapitre 2 intitulé “ Recrutement, entrée en fonctions ” consacrant les conditions que doit remplir une personne pour être admise aux services de l'Etat en qualité de fonctionnaire, de sorte qu’à défaut de dispositions particulières régissant le stage auprès de l'entreprise des P & T, les règles afférentes du statut général, ainsi que les règlements grand-ducaux d'exécution pris en la matière ont en principe vocation à s'appliquer aux stagiaires de ladite entreprise (cf. trib. adm. 14 décembre 1998, Jacoby, n°10603 du rôle, confirmé par Cour adm. 17.6.1999, n° 11603C du rôle, Pas.

adm. 1/00, V° Postes et Télécommunications, n° 5).

Il est encore constant qu'en vertu des dispositions de l'article 24 (2) de la loi modifiée du 10 août 1992 précitée, “ tous les actes d’administration concernant le personnel de l’entreprise sont de la compétence du comité qui est l’autorité de nomination aux termes du statut général des fonctionnaires de l’Etat et du contrat collectif des ouvriers de l’Etat ”, et que, par ailleurs, l’entreprise des P&T peut, afin de réaliser son autonomie administrative, fixer de sa propre autorité les effectifs du personnel dont elle estime avoir besoin pour accomplir sa mission, et appliquer elle-même les règles régissant le personnel en procédant aux nominations, affectations, promotions et autres mutations au sein de l’entreprise, assumant ainsi toutes les fonctions dévolues à l'autorité investie du pouvoir de nomination telles qu’énumérées au statut général.

Il est constant qu'au stade de l'admission au stage, l'autorité de nomination, en l'occurrence le comité de direction, n'est pas appelée à intervenir dans la procédure de recrutement, étant donné que l'article 2, 2. du statut général précise à cet égard que “ l'admission au stage a lieu par décision du gouvernement à la suite d’un concours sur épreuve, sans préjudice de l'application des dispositions du paragraphe 3, deuxième alinéa ci-après ” (cf. trib. adm. 14 décembre 1998, n°10603 du rôle, et Cour adm.

17.6.1999, n°11903C du rôle, Jacoby, précités).

Concernant plus particulièrement une décision en matière de prolongation de stage, l’article 2,2. du statut général dispose dans son dernier alinéa que “ les décisions relatives à la suspension et à la prolongation du stage sont prises par le ministre du ressort, sur avis du ministre de la Fonction publique ”, de sorte que le tribunal ne saurait suivre le raisonnement avancé par la partie défenderesse tendant à voir assimiler le comité de 3 direction de l’entreprise des P&T au ministre du ressort au sens de la disposition statutaire sous analyse.

Le statut général opère en effet une distinction entre, d’un côté, le ministre du ressort, et, d’un autre côté, l’autorité de nomination, étant entendu que c’est en principe le Grand-Duc qui est l’autorité investie en vertu de l’article 35 de la Constitution du pouvoir de nommer aux emplois civils et militaires, sauf les exceptions établies par la loi, et non le ministre du ressort.

Force est dès lors de retenir que la référence au niveau du statut général au ministre du ressort s’entend, en ce qui concerne l’entreprise des P&T, non pas comme référence au comité de direction qui est l’autorité investie du pouvoir de nomination, mais bien comme référence au membre du Gouvernement dont relève l’établissement public en cause. (cf.

trib. adm. 20 décembre 1999, n° 11158 du rôle, Hary, confirmé par Cour adm., 30 mai 2000, n° 11796C du rôle, Pas. adm. 1/2000, V° Postes et Télécommunications, n° 7) Il s’ensuit qu’en raison du caractère clair et non équivoque des dispositions précitées de l’article 2,2. du statut général, en ce qu’elles réservent au ministre du ressort certaines compétences limitativement énumérées, parmi lesquelles figure expressément la prolongation de stage, il y a lieu d’admettre qu’une décision de refus de prolongation de stage relève non pas de la compétence de l’autorité de nomination, que constitue pour l’entreprise des P&T le comité de direction, mais de la compétence du ministre du ressort, soit en l’espèce du membre du Gouvernement dont relève l’établissement public en cause.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision déférée du comité de direction est illégale en ce qu’elle émane d’une autorité incompétente en la matière et encourt partant l’annulation de ce chef.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision déférée ;

met les frais à charge de l’entreprise des P&T ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 13 décembre 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

4 s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 12062
Date de la décision : 13/12/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-12-13;12062 ?

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