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29/11/2000 | LUXEMBOURG | N°11955

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 novembre 2000, 11955


N° 11955 du rôle Inscrit le 27 avril 2000 Audience publique du 29 novembre 2000

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Recours formé par Madame … TESSARO, Luxembourg contre une décision de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en matière d’homologation des titres et grades étrangers

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11955 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 27 avril 2000

par Maître Nicolas SCHAEFFER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Lu...

N° 11955 du rôle Inscrit le 27 avril 2000 Audience publique du 29 novembre 2000

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Recours formé par Madame … TESSARO, Luxembourg contre une décision de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en matière d’homologation des titres et grades étrangers

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11955 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 27 avril 2000 par Maître Nicolas SCHAEFFER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … TESSARO, enseignante, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’un arrêté de la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 25 janvier 2000 refusant de faire droit à sa demande en homologation de son diplôme final en lettres ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 juin 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 5 juillet 2000 par Maître Nicolas SCHAEFFER au nom de la demanderesse ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Gilles DORNSEIFFER et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 octobre 2000.

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Madame … TESSARO, demeurant à L-…, née le … à …, s’est vu décerner en date du 8 août 1994 le diplôme de “ Laurea di Dottore in Lingue e Letterature Straniere Moderne (Lingua et Letteratura Francese) ” par l’Université de Bologne. Par courrier datant du 20 septembre 1999, elle s’adressa à la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports pour solliciter l’homologation dudit diplôme.

Par arrêté ministériel datant du 25 janvier 2000, la ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, ci-après appelée “ la ministre ”, refusa de faire droit à cette demande au motif “ que conformément à l’article 4 du règlement grand-ducal du 18 décembre 1970 fixant les critères d’homologation des titres et grades étrangers en lettres en vue de l’admission au stage pour le professorat de l’enseignement secondaire “ les diplômes finals sanctionnant des études ayant porté principalement sur le français doivent être obtenus dans un pays ou une région d’un pays de langue française, après des études accomplies dans un tel pays pendant au moins trois années ” ” et que “ le diplôme présenté ne répond pas à cette disposition ”.

Cet arrêté ministériel ayant été notifié à Madame TESSARO par courrier datant du 28 janvier 2000, elle a fait introduire, par requête déposée en date du 27 avril 2000, un recours contentieux tendant à son annulation.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le recours en annulation, introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse expose avoir fait ses études primaires et secondaires au Luxembourg et y avoir obtenu son baccalauréat à l’Ecole européenne. Elle signale que son diplôme en lettres délivré par l’Université de Bologne lui permettrait d’enseigner dans les écoles publiques d’instruction supérieure de deuxième niveau des cours de langues et de civilisation étrangères en Italie. Elle indique par ailleurs avoir déjà enseigné et déclare enseigner actuellement en tant que chargée de cours dans un lycée technique luxembourgeois où elle donne des cours de français, d’allemand, de luxembourgeois et de dessin technique. Dans la mesure où son diplôme donnerait accès à l’enseignement supérieur en Italie son recours serait fondé, ce qui serait encore démontré par l’aptitude de travailler comme enseignante vérifiée dans son chef à travers son activité actuelle.

La partie demanderesse s’empare ensuite des dispositions de la directive du Conseil 89/48/CEE du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d’une durée minimale de trois ans, ci-après appelée “ la directive 89/48/CEE ”, et plus particulièrement de son article 3, pour soutenir que le diplôme final par elle présenté permettrait l’accès en Italie à la profession d’enseignant et que dès lors tous les autres Etats membres de l’Union Européenne seraient tenus d’admettre le détenteur d’un tel diplôme aux professions de l’enseignement dans leur pays.

Sur base des deux moyens ainsi exposés, la demanderesse conclut à l’annulation de l’arrêté ministériel déféré pour absence de motivation suffisante, sinon pour violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, sinon pour détournement de pouvoir, voire pour excès de pouvoir, en ce qu’il a refusé l’homologation de son diplôme final en lettres.

Le délégué du Gouvernement rétorque que la demanderesse n’a pas fait état de la directive 89/48/CEE dans sa demande à la base de l’arrêté ministériel déféré et n’aurait pas prouvé, pièces à l’appui, qu’elle remplirait toutes les conditions pour en invoquer les bénéfices, ceci tant au niveau du diplôme présenté qu’au niveau de la profession réglementée à laquelle ledit diplôme est censé conférer accès. Le représentant étatique relève plus particulièrement que le terme de “ diplôme ” tel que défini par l’article 1er de cette directive ne serait pas synonyme de grade ou titre universitaire, mais désignerait l’ensemble des titres de formation qui donnent accès à l’exercice d’une profession réglementée. Dans la mesure où en Italie, comme dans la plupart des autres Etats membres de l’Union Européenne, la profession d’enseignant de la “ scuola media superiore ” du secteur public constituerait une profession 2 réglementée au sens de la directive, il estime que la demanderesse devrait donc prouver que toutes les conditions prévues par la législation italienne pour l’accès à la profession réglementée de professeur de français dans l’enseignement public en Italie sont remplies dans son chef. Il rétorque que force serait de constater à cet égard, sur base des informations à sa disposition que l’accès à la profession réglementée susvisée serait subordonné en Italie à la détention d’un diplôme de niveau bac + 4, ainsi qu’à une réussite au concours de “ l’Abilitiazione all’insegnamento ” pour “ la scuola media superiore ”.

Le délégué du Gouvernement estime que dans la mesure où la demanderesse resterait en défaut de rapporter la preuve de sa réussite au concours en question, ce serait à bon droit que la ministre a refusé l’homologation sollicitée.

Dans son mémoire en réplique la demanderesse relève que même si elle n’avait pas indiqué la directive 89/48/CEE dans sa demande d’homologation, il aurait appartenu à la ministre, conformément aux dispositions de l’article 3 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, d’appliquer d’office le droit applicable à l’affaire dont elle était saisie. Elle relève par ailleurs que le diplôme litigieux répondrait aux conditions énoncées à l’article 1er de la directive précitée et permettrait l’accès en Italie à la profession d’enseignant dans les écoles publiques d’instruction supérieure, à savoir l’enseignement secondaire de deuxième niveau, les lycées techniques ainsi que les instituts professionnels, de sorte que la ministre aurait été tenue de lui accorder l’homologation sollicitée.

Il est constant en cause que l’arrêté ministériel déféré constitue une décision en matière d’homologation des titres et grades étrangers en lettres en vue de l’admission au stage pour le professorat de l’enseignement secondaire dont les critères sont régis plus particulièrement par le règlement grand-ducal modifié afférent du 18 décembre 1970.

Dans la mesure où la demande présentée par Madame TESSARO a non pas pour objet direct l’exercice d’une profession au Luxembourg, mais se situe à un stade préliminaire qui est celui de l’admission au stage pour le professorat de l’enseignement secondaire, cette demande n’est pas à considérer comme se situant dans le cadre de l’accès à une profession réglementée dans un Etat membre considéré comme Etat d’accueil au sens de la directive 89/48/CEE, mais comme une demande d’accès à une formation post-universitaire préparatoire pour l’exercice d’une profession, en l’occurrence celle du professorat de l’enseignement secondaire.

Il s’ensuit que le moyen de la demanderesse basé sur la directive 89/48/CEE est à écarter pour ne pas être pertinent en l’espèce.

Pour conclure à l’annulation de l’arrêté ministériel déféré, la demanderesse se prévaut encore du fait que le diplôme litigieux donnerait accès en Italie à la fonction de professeur de l’enseignement secondaire, ainsi que de la circonstance qu’à travers son activité professionnelle actuelle d’enseignante, son aptitude à exercer la fonction de professeur serait vérifiée en fait.

S’il est certes constant que conformément aux dispositions de l’article 3 du règlement grand-ducal modifié du 18 décembre 1970 précité “ les diplômes finals étrangers présentés à l’homologation doivent conférer un grade d’enseignement supérieur reconnu par le pays d’origine ou y donner accès soit à la fonction de professeur de l’enseignement secondaire, soit au stage de formation pratique ”, condition que la demanderesse, à travers les moyens 3 proposés, entend voir considérer comme vérifiée dans son chef, force est de constater que la ministre ne s’est pas fondée sur cette disposition réglementaire pour refuser l’homologation sollicitée, mais a invoqué les dispositions de l’article 4, dernier alinéa, dudit règlement pour motiver sa décision de refus, lequel alinéa dispose que “ le diplôme final sanctionnant des études ayant porté principalement sur le français, l’allemand ou l’anglais doit être obtenu dans un pays ou une région d’un pays de langues respectivement française, allemande, anglaise ”.

Dans la mesure où la partie demanderesse n’a présenté aucun autre moyen de nature à énerver la légalité du motif de refus effectivement retenu à la base de la décision déférée, ni encore, par voie d’exception, la légalité de la disposition réglementaire à sa base, et que le tribunal ne saurait par ailleurs, sous peine de statuer ultra petita, examiner la décision litigieuse et le motif à sa base que dans le cadre des moyens proposés par la partie demanderesse, le recours laisse d’être fondé, sans qu’il soit besoin d’analyser plus loin les autres motifs proposés par le délégué du Gouvernement en cours d’instance contentieuse.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 novembre 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11955
Date de la décision : 29/11/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-11-29;11955 ?

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