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14/11/2000 | LUXEMBOURG | N°12226C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 novembre 2000, 12226C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12226C Inscrit le 10 août 2000

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Audience publique du 14 novembre 2000 Recours formé par les consorts JASAROVIC-…, contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris n° du rôle 11892 du 12 juillet 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 10 août 2000 par ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12226C Inscrit le 10 août 2000

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Audience publique du 14 novembre 2000 Recours formé par les consorts JASAROVIC-…, contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris n° du rôle 11892 du 12 juillet 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 10 août 2000 par Maître Gérard A. Turpel, avocat à la Cour, assisté de Maître Murielle Nguyen, avocat, au nom de … Jasarovic-…, née le … à … (Monténégro), et sa fille … Jasarovic, née le … à … (Monténégro), toutes les deux de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 12 juillet 2000 à la requête de … Jasarovic-… et de sa fille … Jasarovic.

Vu l’avis du dépôt dudit acte d’appel par la voie du greffe de la Cour administrative daté du 10 août 2000.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 6 septembre 2000 par le délégué du Gouvernement.

Vu l’avis du dépôt dudit mémoire en réponse daté du 6 septembre 2000.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 12 juillet 2000.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport et Maître Katia Aidara, en remplacement de Maître Anne-Marie Schmit ainsi que le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 11892 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 22 mars 2000 par Maître Gérard A. Turpel, avocat à la Cour, assisté de Maître Murielle Nguyen, avocat, … Jasarovic-…, née le … à … (Monténégro), et sa fille … Jasarovic, née le … à … (Monténégro), toutes les deux de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, ont demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 5 janvier 2000, notifiée le 21 janvier 2000, refusant de faire droit à leur demande en reconnaissance du statut de réfugié politique, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 21 février suivant intervenue sur recours gracieux.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement en date du 12 juillet 2000, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Gérard A. Turpel, avocat à la Cour, assisté de Maître Murielle Nguyen, avocat, a interjeté appel contre ce jugement moyennant dépôt d’une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 10 août 2000 en développant l’argumentation suivante :

Ce serait à tort que le tribunal administratif a considéré que les appelantes ne remplissaient pas les conditions énoncées à l'article ler, section A, 2. de la Convention de Genève, alors que ce serait en raison de leur appartenance ethnique que les requérantes auraient été contraintes de quitter leur pays d'origine.

Que les appelantes qui sont de nationalité yougoslave et de confession musulmane craigneraient avec raison d'être persécutées du fait de leur appartenance à la communauté musulmane.

Que s'il est vrai que les requérantes ressentiraient un sentiment d'insécurité compte tenu de la situation générale au Monténégro, il n'en demeurerait pas moins que dans leur pays d'origine elles auraient été exposées à un danger sérieux pour leur personne, leur crainte étant justifiée compte tenu des menaces de persécution, de viol, et de mort qui auraient été proférées à leur égard par les réservistes serbes.

Que ces derniers n'auraient pas hésité à tirer des coups de fusil devant la porte des requérantes, et, vivant seules, sans aucun parent pour leur venir en aide, étaient terrorisées et craignaient pour leur vie.

Ne pouvant bénéficier d'aucune aide ni de protection dans leur pays elles auraient été contraintes de fuir le Monténégro où elles auraient eu toutes deux un travail, de sorte que les craintes de persécution des appelantes seraient sérieuses au regard de leur appartenance à la population musulmane.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 6 septembre 2000 dans lequel il demande la confirmation du premier jugement.

Par lettre du 13 septembre 2000, le délégué du bâtonnier à l’assistance judiciaire a désigné Maître Katia Aidara en remplacement de Maître Murielle Nguyen, les appelantes bénéficiant par ailleurs de l’assistance judiciaire.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, 2 de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs d’asile qui doivent établir, concrètement, que leur situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour leur personne.

Dans le cadre de l’évaluation de la situation personnelle du demandeur, l’examen fait par le juge administratif ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il apprécie également la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.

Les premiers juges ont procédé à un examen approfondi des déclarations faites par … Jasarovic-… et sa fille … Jasarovic lors de leurs auditions respectives du 15 juillet 1999, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, et les ont rapprochées des arguments et précisions apportés au cours de la procédure gracieuse et contentieuse.

C’est à bon droit et pour des motifs exhaustifs auxquels la Cour se rallie qu’ils sont parvenus à la conclusion que les demanderesses restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

A travers la motivation de leur recours, les demanderesses se prévalent en substance d’un risque de persécution de la part des réservistes serbes à leur encontre et d’un défaut de protection de la part des autorités de leur pays d’origine face à ces actes de persécution.

Le tribunal administratif a souligné à juste titre dans ce contexte que la notion de protection de la part du pays d’origine n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission de tout acte de violence, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain niveau de dissuasion. ( Jean-Yves Carlier : Qu’est-ce qu’un réfugié ?, p. 113, n° 73 et suivants).

C’est à bon droit et pour des motifs que la Cour adopte que les premiers juges ont dit que les demanderesses restent en défaut d’établir que les persécutions alléguées de la part des réservistes serbes seraient tolérées, voir encouragées par les autorités en place et qu’elles auraient essayé d’obtenir la protection de la part des autorités en place et que ces recherches concrètes se seraient heurtées à un défaut de protection caractérisé par l’absence de poursuites des actes de persécution commis de sorte que l’appel tendant à la réformation de la décision ministérielle est à abjuger.

Le jugement dont appel est partant à confirmer.

3 Par ces motifs La Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l’appel en la forme ;

donne acte à Maître Katia Aidara qu’elle assiste les appelantes dans le cadre d’une demande d’assistance judiciaire;

dit l’appel non fondé et en déboute ;

partant confirme le jugement du 12 juillet 2000 dans toute sa teneur ;

condamne les appelantes aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion LANNERS, vice-présidente, Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 12226C
Date de la décision : 14/11/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-11-14;12226c ?

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