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14/11/2000 | LUXEMBOURG | N°11909

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 novembre 2000, 11909


N° 11909 du rôle Inscrit le 4 avril 2000 Audience publique du 14 novembre 2000

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Recours formé par les époux … PICCO et …, contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition de Capellen en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11909 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 avril 2000 par Maître Gérard TURPEL,

avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … PICCO, ...

N° 11909 du rôle Inscrit le 4 avril 2000 Audience publique du 14 novembre 2000

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Recours formé par les époux … PICCO et …, contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition de Capellen en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11909 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 avril 2000 par Maître Gérard TURPEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … PICCO, éducateur-

instructeur, et de son épouse Madame …, éducatrice-graduée, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation du bulletin de l’impôt sur le revenu relatif à l’année fiscale 1996 émis à leur encontre en date du 21 août 1997 par le bureau d’imposition de Capellen, suite au silence gardé par le directeur de l’administration des Contributions directes à l’égard de la réclamation introduite le 2 octobre 1997, telle que précisée et amplifiée par la suite ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 4 juillet 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 4 août 2000 par Maître Gérard TURPEL, au nom des époux … PICCO et … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin critiqué ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Vincent ISITMEZ, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 8 novembre 2000.

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Considérant que par ordonnance de placement provisoire du 30 septembre 1996 prise par le juge de la jeunesse près le tribunal d’arrondissement de et à Diekirch, l’enfant mineur …, né le …, placé au Foyer Ste Elisabeth à Esch/Alzette suivant jugement du 12 octobre 1994, a été provisoirement placé auprès des époux … PICCO, éducateur-instructeur, et …, educatrice-

graduée, demeurant ensemble à L-…, avec effet au 1er octobre 1996 ;

Que par jugement n° 73/96 du tribunal de la jeunesse de Diekirch du 25 octobre 1996, ledit enfant mineur a été placé dans la famille PICCO-…, un droit de visite étant accordé à ses parents biologiques selon les convenances et disponibilités de la famille d’accueil, parents dans le chef desquels le même jugement dit qu’il est prématuré d’accorder un droit d’hébergement ;

Que sur appel du père de l’enfant, concernant uniquement la question du droit d’hébergement, le jugement précité du 26 octobre 1996 a été confirmé par arrêt de la Chambre d’Appel de la Jeunesse de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg du 12 mai 1997, arrêt duquel il résulte que l’exercice du droit de visite précité est effectué chaque dimanche de 10.00 à 19.00 heures ;

Considérant que dans leur déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 1996, les époux PICCO-… ont indiqué l’enfant … comme faisant partie de leur ménage à partir du 1er octobre 1996 au titre de placement familial, en joignant un certificat afférent du juge de la jeunesse près le tribunal d’arrondissement de Diekirch du 20 novembre 1996 ;

Que suivant le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 1996, émis par le bureau d’imposition de Capellen en date du 21 août 1997, la “ classe d’impôt pour l’enfant recueilli ” n’est pas accordée au motif indiqué in fine au titre des points sur lesquels l’imposition diffère de la déclaration que les parents biologiques bénéficient toujours d’un droit de visite ;

Que par courrier du 2 octobre 1997, Madame PICCO-… s’est adressée au bureau d’imposition de Capellen pour contester le refus de “ nous ” accorder la classe d’impôt pour l’enfant recueilli ;

Que par courrier du 7 octobre 1997, le secrétaire du contentieux auprès de la direction des Contributions s’est adressé à Madame PICCO-… en lui signalant que sa réclamation du 2 octobre 1997 au bureau d’imposition Capellen a été transmise au directeur de l’administration des Contributions directes, désigné ci-après par “ le directeur ”, pour raison de compétence et y a été portée au rôle du contentieux sous le numéro C9666, tout en lui demandant d’indiquer précisément quelle décision du bureau d’imposition lui causerait tort et devrait être réformée suite à son dit recours dans la mesure où l’extrait joint était expurgé et méconnaissable ;

Que par courrier du 9 octobre 1997 adressé à la direction des Contributions, Madame PICCO-… a précisé qu’elle contestait la décision de ne pas accorder la classe d’impôt 2.1 pour l’année 1996 et la classe d’impôt 2.2 à partir de 1997, un “ propre enfant ” étant né le 14 mai 1997, en signalant que le motif indiqué suivant lequel les parents de l’enfant placé bénéficiaient toujours d’un droit de visite ne serait pas légal ;

Que par courrier du 31 mars 1998 adressé au directeur de l’administration des Contributions directes, le mandataire de Madame PICCO-… a précisé la réclamation du 2 octobre 1997 comme visant le bulletin de l’impôt sur le revenu relatif à l’année d’imposition 1996 critiqué pour fausse application des articles 122 et 123 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR) ;

Considérant que par requête inscrite sous le numéro 10363 du rôle déposée en date du 10 octobre 1997, Madame PICCO-… a une première fois porté devant ce tribunal ses contestations relatives au bulletin d’imposition prévisé du 21 août 1997 ;

Que ce recours a fait l’objet d’un jugement de radiation, sollicité par le mandataire de la demanderesse en date du 29 avril 1998 ;

2 Considérant que par requête déposée en date du 4 avril 2000, les époux … PICCO et … sollicitent la réformation, sinon l’annulation sur base de l’article 8 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif du bulletin de l’impôt sur le revenu précité du 21 août 1997, le directeur de l’administration des Contributions directes n’ayant encore pris aucune décision relativement à la réclamation prédite pendante depuis le 2 octobre 1997 ;

Considérant que le délégué du Gouvernement soulève l’irrecevabilité du recours en tant qu’introduit par Monsieur … PICCO à défaut de réclamation par lui formée devant le directeur, de même que l’irrecevabilité du recours en annulation formulé en ordre subsidiaire ;

Considérant qu’aux termes de l’article 8 (3) 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, le tribunal connaît comme juge du fond des recours dirigés contre un bulletin de l’impôt sur le revenu dans la mesure où une réclamation au sens du paragraphe 228 de la loi générale des impôts, dite Abgabenordnung, en abrégé “ AO ”, a été introduite et qu’aucune décision directoriale définitive n’est intervenue dans le délai de six mois à partir de ladite réclamation ;

Considérant qu’il est patent en l’espèce que la réclamation du 2 octobre 1997, telle que précisée le 9 octobre 1997 émane de Madame PICCO-… seule, de même que les ampliations apportées en cours d’instance par Maître Gérard TURPEL l’ont été pour compte uniquement de sa dite mandante, à l’exclusion de son mari ;

Que le pronom “ nous ” employé ponctuellement par Madame PICCO-… ne permet pas seul en l’espèce, à défaut d’autres éléments le corroborant, de conclure que Madame PICCO-… ait agi également pour compte de son mari ;

Que par voie de conséquence le recours en réformation est à déclarer irrecevable dans la mesure où il a été introduit omisso medio pour compte de Monsieur … PICCO, à défaut de réclamation valablement formée par lui ou en son nom ;

Considérant que le recours en réformation introduit au nom de Madame PICCO-… est recevable pour avoir été déposé suivant les formes et délai prévus par la loi ;

Considérant que par voie de conséquence le recours en annulation formé en ordre subsidiaire est irrecevable ;

Considérant qu’au fond la demanderesse estime que l’administration des Contributions directes aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de l’exactitude des faits matériels, devant être redressée dès ce stade ;

Que seul le bulletin d’imposition émis par le bureau d’imposition est déféré au tribunal, de sorte que ladite administration en tant que telle ne saurait être visée en l’espèce ;

Que Madame PICCO-… reconnaît en cours d’instance que la date de naissance par elle indiquée dans sa requête introductive d’instance dans le chef de l’enfant recueilli y non nommé et émargée par “ 12 octobre 1994 ” résulte d’une erreur matérielle, étant constant en cause que pour l’enfant en question il s’agit de … préqualifié ;

3 Que la demanderesse de se baser sur les dispositions de l’article 122 et 123 LIR pour conclure que ledit enfant a été recueilli par elle et son mari de façon durable, de sorte que la modération d’impôt prévue par lesdits textes aurait dû être appliquée en l’espèce pour l’année d’imposition concernée ;

Considérant que les conclusions du délégué du Gouvernement, telles qu’ajustées à l’audience, soulignent le changement de législation intervenu avec effet à partir de l’année d’imposition 1996 à travers le remplacement de l’article 123 LIR par la loi du 28 décembre 1995 portant modification de certaines dispositions en matière des impôts directs, ainsi que par l’abrogation du règlement grand-ducal du 28 décembre 1990 portant exécution de l’article 123 alinéa 6 LIR, tel que résultant de la modification y apportée par la loi du 6 décembre 1990, à travers les dispositions de l’article 2 du règlement grand-ducal du 3 juillet 1996 portant exécution de l’article 123, alinéa 7 LIR avec l’effet prédit ;

Considérant que l’article 123 LIR tel qu’applicable pour l’année d’imposition 1996 dispose en son paragraphe (1) que “ la modération d’impôt pour enfant visée à l’article 122 est accordée dans les hypothèses spécifiées aux alinéas 3 à 5 ci-dessous en raison des enfants énumérés ci-après : … les enfants recueillis d’une façon durable au foyer du contribuable ” ;

Que ce texte se distingue de celui antérieurement applicable à partir de la loi précitée du 6 décembre 1990 par l’omission in fine du bout de phrase “ et principalement à charge de ce dernier ” ;

Considérant que ledit article 123 LIR dispose en son paragraphe 3 alinéas 1er et second que “ le contribuable a droit à une modération d’impôt en raison des enfants ayant fait partie, au cours de l’année d’imposition, de son ménage et qui ont été âgés, au début de l’année d’imposition, de moins de vingt et un ans.

Un enfant est censé faire partie du ménage du contribuable lorsqu’il vit sous le même toit que ce dernier ou bien lorsqu’il séjourne passagèrement ailleurs pour une raison autre que celle d’une occupation essentiellement lucrative. Nul ne peut, pour une même année, faire partie de plus d’un ménage, sauf lorsqu’il passe définitivement, au cours de cette année, d’un ménage à un autre ” ;

Considérant que l’enfant … placé auprès des époux PICCO-… suivant ordonnance et jugement précités datant respectivement des 30 septembre et 25 octobre 1996, est à qualifier d’enfant recueilli d’une façon durable au foyer de la contribuable demanderesse actuelle au sens de l’article 123 (1) in fine prérelaté ;

Considérant que si d’après le même article considéré en son paragraphe 3 alinéa second in fine également prérelaté nul ne peut en principe, pour une même année, faire partie de plus d’un ménage, il n’en reste pas moins que la même disposition continue par énoncer une exception légale consistant dans le fait de passer définitivement, au cours de cette année, d’un ménage à un autre ;

Considérant que compte tenu du principe de l’annualité de l’impôt inscrit à l’article 100 de la Constitution, le placement familial de l’enfant mineur concerné effectué successivement par ordonnance et jugement des juridictions de la jeunesse, conformément à la loi modifiée du 4 10 août 1992 relative à la protection de la jeunesse est à qualifier de passage définitif d’un ménage à un autre durant l’année concernée au sens de l’article 123 (3) alinéa second in fine LIR prérelaté ;

Considérant que par réformation du bulletin d’impôt déféré il convient dès lors d’accorder à la demanderesse la modération d’impôt pour enfant visée à l’article 122 LIR sur base des dispositions combinées des paragraphes premier et troisième prérelatés de l’article 123 LIR pour l’année d’imposition 1996 concernée, ledit texte se référant uniquement au passage d’un ménage à l’autre durant l’année et n’opérant aucune ventilation par ailleurs suivant le nombre de mois passés au sein du ménage d’acceuil ;

Considérant que la partie demanderesse requiert encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 50.000.- francs pour frais non compris dans les dépens, alors qu’elle aurait dû avoir recours au ministère d’un avocat à la Cour pour faire valoir ses droits ;

Considérant que le délégué du Gouvernement d’estimer que la présentation incertaine des faits et l’introduction de procédures inutiles (recours inscrit sous le numéro 10363 du rôle) ne justifieraient de toute façon pas l’application de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Considérant que s’agissant d’un itératif recours introduit devant le tribunal administratif en matière fiscale par un avocat à la Cour, dont le ministère n’est pas obligatoirement requis en la matière, la partie demanderesse reste en défaut de rapporter la preuve du caractère d’iniquité à la base de l’allocation utile d’une quelconque indemnité de procédure en vertu du prédit article 33, de sorte que sa demande afférente est à déclarer non fondée ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en réformation irrecevable en tant qu’introduit au nom de Monsieur … PICCO ;

le dit recevable pour le surplus ;

au fond le déclare justifié ;

réformant, dit qu’il y a lieu de tenir compte de la modération d’impôt pour l’enfant …, durablement recueilli, visée à l’article 122 LIR pour l’année d’imposition 1996 dans le chef de la contribuable demanderesse et renvoie le dossier devant le directeur de l’administration des Contributions directes en prosécution ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’Etat aux frais.

5 Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 novembre 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de Monsieur Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11909
Date de la décision : 14/11/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-11-14;11909 ?

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