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06/11/2000 | LUXEMBOURG | N°11870

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 06 novembre 2000, 11870


N° 11870 du rôle Inscrit le 9 mars 2000 Audience publique du 6 novembre 2000

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Recours formé par la société anonyme SUNCO, la société à responsabilité limitée X. et MM. Y. et Z.

contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11870 du rôle et déposée en date du 9 mars 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Claude WASSENICH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Lu

xembourg, au nom de 1) la société anonyme SUNCO, établie et ayant son siège social à L-…, représentée...

N° 11870 du rôle Inscrit le 9 mars 2000 Audience publique du 6 novembre 2000

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Recours formé par la société anonyme SUNCO, la société à responsabilité limitée X. et MM. Y. et Z.

contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11870 du rôle et déposée en date du 9 mars 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Claude WASSENICH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) la société anonyme SUNCO, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son administrateur délégué actuellement en fonctions, à savoir Monsieur Y., …, 2) la société à responsabilité limitée X., établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions, à savoir Monsieur Z., architecte diplômé, demeurant à L-…, 3) Monsieur Y., préqualifié, et 4) Monsieur Z., préqualifié, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision du bourgmestre de la commune de … prise le 8 décembre 1999, par laquelle ledit bourgmestre a refusé « d’aviser favorablement le projet de construction présenté le 5 novembre 1999 concernant la construction de deux immeubles à 6 appartements sur les terrains sis aux numéros 96 et 98 route de … à … »;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Marc GRASER, demeurant à Luxembourg, du 16 mars 2000 portant signification de ce recours à l’administration communale de …;

Vu la constitution d’avocat de Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour l’administration communale de …, laquelle constitution d’avocat a été notifiée par télécopie le 22 mars 2000 à l’avocat constitué des parties demanderesses et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2000;

1 Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 juin 2000 par Maître Jean MEDERNACH au nom de l’administration communale de …, lequel mémoire a été notifié par télécopie le 9 juin 2000 à l’avocat constitué des parties demanderesses;

Vu le mémoire en réplique déposé en date du 18 juin 2000 au greffe du tribunal administratif au nom des parties demanderesses;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 10 juillet 2000 portant signification de mémoire à l’avocat constitué de l’administration communale de …;

Vu le mémoire en duplique déposé en date du 12 septembre 2000 au greffe du tribunal administratif pour compte de l’administration communale de …, lequel mémoire a été notifié par télécopie le 6 septembre 2000 à l’avocat constitué des parties demanderesses;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Claude WASSENICH et Maître Gilles DAUPHIN, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, en leurs plaidoiries respectives.

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Le 15 juillet 1999, la société anonyme SUNCO, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son administrateur délégué actuellement en fonctions, à savoir Monsieur Y., ingénieur, demeurant à L-…, et la société à responsabilité limitée X., établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions, à savoir Monsieur Z., architecte diplômé, demeurant à L-…, acquirent, par adjudication publique, « 1) un terrain à bâtir sis à …, route de…, inscrit au cadastre comme suit : Commune de …, section A de … : - partie du numéro 2342/5394, lieu-dit “ route de …”, place, contenant 9,82 ares, plus amplement renseignée et délimitée comme lot 2 sur un plan de situation, levé et dressé par l’ingénieur-géomètre du cadastre, Monsieur…, en date du 18 juin 1998, certifié conforme par l’Administration du Cadastre en date du 5 juillet 1999, - partie du numéro 2342/5394, même lieu-dit, emprise-place, contenant 0,25 ares, plus amplement renseignée et délimitée comme lot 6 sur le prédit plan …du 18 juin 1998.

2) un terrain à bâtir sis à …, route de…, inscrit au cadastre comme suit :Commune de …, section A de… : - partie du numéro 2342/5394, lieu-dit “ Route de …”, place, contenant 10,66 ares, plus amplement renseignée et délimitée comme lot 3 sur le prédit plan …du 18 juin 1998, - partie du numéro 2342/5394, même lieu-dit, emprise-place, contenant 0,22 ares, plus amplement renseignée et délimitée comme lot 7 sur le prédit plan …du 18 juin 1998 ».

A la suite de ladite adjudication, les sociétés SUNCO et X. chargèrent l’architecte T.

N. de la réalisation des plans nécessaires pour la construction sur les prédits terrains de deux immeubles résidentiels comportant chacun 8 appartements.

2 Par courrier daté du 7 septembre 1999, l’architecte s’adressa au bourgmestre de la ville de …, ci-après dénommé le « bourgmestre », pour solliciter, en nom et pour compte de « Messieurs Y. et ROWHANI, représentant les sociétés SUNCO S.A. et X. SARL », une autorisation de principe pour la construction de deux immeubles comportant chacun 8 appartements à …, route de….

Par courrier du 7 octobre 1999, le bourgmestre demanda à l’architecte d’apporter certaines modifications au projet et de réduire notamment le nombre des logements à 4 par bâtiment.

Le 5 novembre 1999, Monsieur Y., se référant à une entrevue avec les techniciens de l’administration communale de la ville de …, s’adressa au bourgmestre pour présenter une demande modifiée pour une autorisation de principe portant sur 6 appartements par bâtiment.

Par lettre du 8 décembre 1999 à l’adresse de Monsieur Y., le bourgmestre refusa l’autorisation de construire sollicitée au motif que l’article 2.4.1 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la ville de …, tel qu’il avait été modifié par adoption provisoire par le conseil communal en date du 19 novembre 1999, n’autoriserait que la construction de maisons uni- et bifamiliales dans le secteur d’habitation d’implantation concerné.

Il est constant en cause que le service technique de l’administration communale informa Monsieur Y. que le susdit article 2.4.1 du plan d’aménagement général prévoyait la possibilité d’implanter dans le secteur d’habitation concerné des immeubles d’habitation collective, comportant au maximum 8 logements par bâtiment, à la condition toutefois qu’un plan d’aménagement particulier (PAP) soit préalablement établi, un tel PAP devant garantir le respect du concept urbanistique du quartier.

Sur ce, Monsieur Y. introduisit une nouvelle demande en date du 22 décembre 1999 auprès de la commune et le bourgmestre, par lettre du 24 février 2000, l’informa de ce que, en vue de poursuivre la procédure légalement prévue pour l’élaboration d’un PAP, l’administration communale avait besoin d’un dossier complet en cinq exemplaires. - Faute par les concernés de produire la documentation requise, la procédure en vue de la réalisation d’un PAP n’a pas connue de suites.

Suite à un courrier du mandataire des sociétés SUNCO et X. en date du 14 janvier 2000, par lequel il demanda, entre autres, au bourgmestre de statuer expressément à l’égard desdites sociétés, seules propriétaires des terrains et non pas à l’égard de MM. Y. ou Z. , le mandataire de l’administration communale, par courrier du 8 février 2000, confirma que, si le projet initial avait été introduit par l’architecte au nom des seuls MM. Y. et Z. et que la décision précitée prise par le bourgmestre le 8 décembre 1999 ne semblerait pas viser les sociétés SUNCO et X., elle aurait cependant vocation à s’appliquer à MM. Y. et Z., ainsi qu’aux sociétés SUNCO et X..

Par requête déposée le 9 mars 2000, la société anonyme SUNCO, la société à responsabilité limitée X. et MM. Y. et Z. ont introduit un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision du bourgmestre de la commune de … prise le 8 décembre 1999.

3 Le tribunal est en premier lieu appelé à examiner la recevabilité en la pure forme de la requête introductive d’instance, contestée par la partie défenderesse « eu égard (…) au fait que l’acte de signification GRASER du 16 mars 2000 ne porte pas en lui-même la preuve que la commune de … aurait été assignée en la personne de son bourgmestre comme le prescrit l’article 163 NCPC (…)[et que les demandeurs] omettent d’indiquer le ou les moyens qu’ils entendent invoquer pour demander l’annulation de la décision déférée », ainsi que, par la suite, à supposer que la recevabilité de ladite requête soit vérifiée, les moyens soulevés par respectivement les parties demanderesses et la partie défenderesse tendant à voir écarter le mémoire en réponse, au motif qu’au mépris des dispositions légales applicables, il aurait été notifié par voie de télécopie d’avocat à avocat au lieu de faire l’objet d’une signification par voie d’huissier, et du mémoire en réplique, au motif qu’il n’aurait pas été déposé et communiqué dans les délais légaux. - Dans ce contexte, il est indifférent qu’un ou plusieurs desdits moyens ont été soulevés dans un mémoire qui, le cas échéant, devra être écarté, étant donné que les trois moyens ont trait à l’ordre public et comme tels doivent être soulevés d’office par le tribunal.

QUANT A LA RECEVABILITE EN LA PURE FORME DE LA REQUETE INTRODUCTIVE D’INSTANCE En l’espèce, force est de constater que, abstraction faite de ce que le recours sous examen est dirigé contre une décision émanant du bourgmestre de la ville de …, qu’il renseigne clairement la commune représentée par son collège des bourgmestre et échevins comme destinataire de l’acte et que cette dernière n’a pas pu se méprendre sur la portée de la requête, à laquelle elle a répondu en connaissance de cause et en étant à même d’exposer et de produire tels arguments et pièces que la défense de ses droits et intérêts lui a fait considérer comme nécessaires ou utiles, l’acte de signification, qui fait corps avec l’acte introductif, précise, sous la rubrique « modalités de la remise de l’exploit », qu’en l’absence du bourgmestre et des deux premiers échevins de la commune, il a été signifié à domicile aux mains du troisième échevin, c’est-à-dire au représentant légal du bourgmestre, de sorte qu’il a été satisfait aux prescriptions légales et l’acte est valable.

Il s’ensuit que le recours n’est pas critiquable sous ce rapport.

Il en est de même au regard de la motivation du recours, étant donné qu’il se dégage de son examen que les demandeurs ont formulé leur moyen et leurs arguments à la base de leur recours avec une précision suffisante pour permettre non seulement au tribunal appelé à statuer d’être en mesure d’analyser in concreto la légalité de la décision déférée, mais également à la partie défenderesse de préparer utilement sa défense, de sorte qu’en ce qui la concerne, aucune violation de ses droits de la défense n’a pas pu être constatée. En effet, les demandeurs ont fourni des éléments concrets sur lesquels ils se basent aux fins de voir établir l’illégalité alléguée, à savoir un prétendu non-respect de leurs droits acquis, c’est-à-dire une violation de la loi (cf. trib. adm. 9 décembre 1997, n° 9683 du rôle, Pas. adm. 1/2000, V° Procédure contentieuse, n° 68).

QUANT AU MOYEN TENDANT A VOIR ECARTER LE MEMOIRE EN REPONSE DE L’ADMINISTRATION COMMUNALE DE … Le recours sous analyse a été introduit après l’entrée en vigueur, le 16 septembre 1999, de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions 4 administratives, ci-après dénommée le « règlement de procédure », dont l’article 10, sans préjudice quant aux articles 2 et 4 du règlement de procédure, qui organisent le dépôt au greffe des requêtes introductives d’instance et des mémoires, ainsi que la signification des requêtes introductives d’instance et des mémoires à la partie défenderesse et aux tiers intéressés, dispose que « les communications entre avocats constitués et entre le délégué du Gouvernement et les avocats constitués peuvent être faites moyennant signification par ministère d’huissier ou notification par voie postale ou par voie directe ou par voie de greffe en ce qui concerne les communications avec le délégué du Gouvernement.

La signification est constatée par l’apposition du cachet et de la signature de l’huissier de justice sur l’acte et sa copie avec l’indication de la date et du nom du délégué du Gouvernement ou de l’avocat destinataire.

La notification directe s’opère par la remise de l’acte en double exemplaire au délégué du Gouvernement ou à l’avocat destinataire, lequel restitue aussitôt l’un des exemplaires après l’avoir daté et visé ».

Le terme de « communication » constitue le terme générique qui englobe les notions de signification - qui s’opère par voie d’huissier - et de notification - qui est faite directement ou par l’intermédiaire de la poste. Les communications officielles (échanges de mémoires, communication de requêtes adressées au tribunal ou à son président) entre avocats, et avec les délégués du gouvernement, se font, au choix, soit par signification d’huissier ou par notification directe ou par voie postale (cf. doc. parl. n° 4326, relatif à la proposition de loi portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, commentaire des articles, ad. art. 12, devenu par la suite l’art. 10, p. 16).

Il convient en outre d’admettre que la notification par télécopieur doit être assimilée à la notification par voie postale.

En l’espèce, étant donné qu’il est établi par les pièces produites en cause que le mandataire des demandeurs a effectivement reçu communication du mémoire en réponse en date du 9 juin 2000, il se dégage des considérations qui précèdent que le fait que ladite communication a été faite par voie de télécopieur n’est pas de nature à affecter la validité de ladite communication et le mémoire en réponse n’est partant pas à écarter des débats et le moyen afférent est à rejeter.

QUANT AU MOYEN TENDANT A VOIR ECARTER LE MEMOIRE EN REPLIQUE DES DEMANDEURS POUR NON-RESPECT DU DELAI LEGAL Lors des plaidoiries, le mandataire des demandeurs a soutenu que le délai prévu par l’article 5 (5) de la loi précitée du 21 juin 1999 aurait été respecté, au motif que si son mémoire en réplique n’aurait été signifié qu’en date du 10 juillet 2000, il n’en resterait pas moins qu’il aurait préalablement, le 7 juillet 2000, été notifié par télécopieur à l’avocat adverse, de sorte que sa réplique aurait été communiquée dans le délai d’un mois suite à la communication du mémoire en réponse en date du 9 juin 2000.

L’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 prévoit en ses paragraphes (5) et (6) que 5 « (5) Le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse, la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois.

(6) Les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus à peine de forclusion. Ils ne sont pas susceptibles d’augmentation en raison de la distance. Ils sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 septembre ».

Il convient encore de relever qu’aucune prorogation de délai n’a été demandée au président du tribunal conformément à l’article 5 paragraphe (7) ni, par la force des choses, accordée par ce dernier.

Il se dégage de l’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 que la question de la communication des mémoires dans les délais prévus par la loi touche à l’organisation juridictionnelle, étant donné que le législateur a prévu les délais émargés sous peine de forclusion.

Par ailleurs, au voeu de l’article 5 précité, la fourniture du mémoire en réplique dans le délai d’un mois de la communication du mémoire en réponse inclut - implicitement, mais nécessairement - l’obligation de le déposer au greffe du tribunal et de le communiquer à la partie voire aux parties défenderesses dans ledit délai d’un mois.

Dans la mesure où le mémoire en réponse de la partie défenderesse a été communiqué au mandataire des demandeurs en date du 9 juin 2000, le dépôt et la communication du mémoire en réplique des demandeurs a dû intervenir pour le 9 juillet 2000 au plus tard. Or, si le mémoire en réplique a bien été communiqué dans ledit délai, il convient de constater que le dépôt du mémoire en réplique au greffe du tribunal n’est intervenu qu’en date du 18 juillet 2000, c’est-à-dire qu’il n’est pas intervenu dans le prédit délai. Par conséquent, à défaut d’avoir été communiqué et déposé dans le délai d’un mois légalement prévu à peine de forclusion, le tribunal est dans l’obligation d’écarter le mémoire en réplique des débats.

Le mémoire en réplique ayant été écarté, le même sort frappe le mémoire en duplique de la partie défenderesse, lequel ne constitue qu’une réponse à la réplique fournie.

QUANT AU RECOURS EN REFORMATION C’est à juste titre que l’administration communale de … conclut à l’incompétence du tribunal pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal, aucune disposition légale ne prévoyant de recours de pleine juridiction en la matière.

QUANT AU RECOURS EN ANNULATION QUANT A LA RECEVABILITE Eu égard au fait que l’administration communale a expressément confirmée (cf. lettre du mandataire de l’administration communale de … ci-avant relatée en date du 8 février 2000, confirmation réitérée dans le mémoire en réponse et lors des plaidoiries) que la décision 6 litigieuse du bourgmestre visait indifféremment les quatre demandeurs, le recours en annulation est recevable pour avoir été par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

QUANT AU FOND Au fond, les demandeurs concluent à l’annulation de la décision litigieuse au motif que le bourgmestre, en statuant en considération de la situation de fait et de droit telle qu’elle se présentait au jour de la prise de décision et, plus particulièrement en se fondant sur une modification du plan d’aménagement général de la ville de …, n’aurait pas respecté leurs droits individuellement acquis, au motif qu’ils impliqueraient que le bourgmestre devrait statuer sur base de la situation juridique acquise au moment de l’introduction de leur demande de construire en date du 7 septembre 1999.

Dans cet ordre d’idées, ils font état de ce qu’au moment de l’adjudication publique du 15 juillet 1999, un certificat daté du 29 juin 1999 émanant du bourgmestre a été entre les mains du notaire et a été annexé à l’acte notarié. Ledit certificat, libellé comme suit :

« Maître, Suite à votre demande du 18 juin 1999, j’ai l’honneur de vous informer que les terrains sis au lieu dit route de…, inscrits au cadastre de la Commune de …, section A de…, plus amplement décrits comme lots 2 et 3 sur le plan …du 16 juin 1998, sont à considérer comme place à bâtir.

Les conditions du règlement sur les bâtisses actuellement en vigueur sont à respecter lors de l’établissement d’une autorisation de bâtir y relative.

A noter que les lots 6, 7, 8 et 9 sont, en tant qu’emprises sur le trottoir public, à céder gratuitement à la Commune. (…) (signé) …, bourgmestre », se basant sur le règlement des bâtisses applicable au mois de juin 1999, aurait créé une « situation juridique bien précise », c’est-à-dire un « état de droit acquis » sur lequel le bourgmestre n’aurait pas pu revenir par la suite, mais qui l’aurait obligé d’examiner leur demande en vue de l’obtention d’un permis de construire sur base de cet état du droit et, par conséquent, d’accorder le permis sollicité.

Il est de principe que toute autorité administrative appelée à prendre une décision doit tenir compte de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle elle est amenée à se prononcer. Il n’est dérogé à cette règle que dans le cas où il faut respecter un droit individuellement acquis en conformité avec l’ancien état de droit (trib. adm. 16 juin 1999, n° 10781).

L’article 12 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, disposant qu’ « à partir du jour où le projet d’aménagement est déposé à la maison communale, tout morcellement des terrains, toute construction ou réparation comfortative, ainsi que tous travaux généralement quelconques, en tant que ces morcellements, constructions, réparations ou travaux seraient contraires aux dispositions du plan, sont interdits », il est constant que l’effet obligatoire et contraignant du nouvel article 2.4.1 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la ville de … (PAG), 7 approuvé provisoirement par le conseil communal le 19 novembre 1999, a produit ses effets à partir du jour de son dépôt à la maison communale, en l’occurrence le 22 novembre 1999, en interdisant notamment toute construction qui serait contraire aux dispositions dudit article.

Le nouvel article 2.4.1. du PAG, invoqué par le bourgmestre était dès lors applicable au moment où le bourgmestre a pris la décision de refus du 8 décembre 1999.

Les demandeurs ont tort de soutenir qu’ils bénéficiaient d’un droit acquis en vertu de l’ancien plan d’aménagement général. En effet, force est de constater que le certificat dont les demandeurs font état ne constitue ni ne documente l’existence d’un droit individuellement acquis par les demandeurs, mais il ne s’analyse qu’en une simple information quant à la situation juridique applicable au moment de son établissement, sans pour autant conférer un droit acquis à l’encontre d’une modification du PAG. Par ailleurs, force est de constater que l’existence d’un droit individuellement acquis ne ressort ni des autres pièces produites en cause ni encore des informations qui ont été soumises au tribunal.

Il convient d’ajouter que l’argumentation développée par les demandeurs, consistant à soutenir que la modification de la disposition litigieuse du PAG n’aurait été faite dans le seul but d’«enlever aux sociétés SUNCO et X. la possibilité qui était la leur à la date du 7 septembre 1999 » et qui tend, en substance, à invoquer un détournement de pouvoir, ne reste non seulement à l’état de simple allégation, mais elle est contredite par le fait que le nouvel article 2.4.1. du PAG ne prohibe pas toute construction résidentielle comprenant plus de deux unités d’habitation par bâtiment, mais il ne fait que conditionner la délivrance d’un permis de construire par l’autorité compétente à la réalisation préalable d’un PAP qui prévoit « un concept urbanistique en harmonie avec le quartier ».

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le bourgmestre a dès lors légalement pu se baser sur les dispositions de l’article 2.4.1. du PAG, lequel, - sans préjudice de la possibilité d’obtenir une autorisation pour des immeubles à plusieurs logements, avec un maximum de 8 logements par bâtiment, dans le cadre d’un plan d’aménagement particulier, procédure qui a été entamée, mais non poursuivie par les demandeurs -, ne permet pas au bourgmestre d’autoriser des constructions autres que des maisons uni- ou bifamiliales, pour refuser l’autorisation de bâtir sollicitée par les demandeurs.

Il suit des considérations qui précèdent que la décision du bourgmestre se trouve légalement justifiée par le motif analysé ci-dessus.

Le recours en annulation est partant à rejeter comme n’étant pas fondé.

Eu égard à la solution du litige, la demande formulée par les demandeurs en obtention d’une indemnité de procédure d’un import de 100.000.- francs est à rejeter comme n’étant pas fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

8 écarte les mémoires en réplique et en duplique tardivement fournis;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation;

reçoit le recours en annulation en la forme;

au fond le dit non justifié, partant le rejette;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par les demandeurs;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme. Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 6 novembre 2000, par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11870
Date de la décision : 06/11/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-11-06;11870 ?

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