La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2000 | LUXEMBOURG | N°11395

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 octobre 2000, 11395


N° 11395 du rôle Inscrit le 22 juillet 1999 Audience publique du 18 octobre 2000

==============================

Recours formé par Monsieur … RYMER contre plusieurs bulletins de l’impôt sur le revenu et une prétendue décision implicite de rejet d’une réclamation par le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

-------------------------------------------------------------------------------------

-

Vu la requête, inscrite sous le numéro 11395 du rôle et déposée au greffe du tribunal admini

stratif en date du 22 juillet 1999 par Monsieur …, réviseur d’entreprises, inscrit au tableau des rév...

N° 11395 du rôle Inscrit le 22 juillet 1999 Audience publique du 18 octobre 2000

==============================

Recours formé par Monsieur … RYMER contre plusieurs bulletins de l’impôt sur le revenu et une prétendue décision implicite de rejet d’une réclamation par le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

-------------------------------------------------------------------------------------

-

Vu la requête, inscrite sous le numéro 11395 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 juillet 1999 par Monsieur …, réviseur d’entreprises, inscrit au tableau des réviseurs d’entreprises tenu par l’Institut des réviseurs d’entreprises, au nom de Monsieur … RYMER, de nationalité américaine, demeurant à B-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation, d’une part, de quatre bulletins de l’impôt sur le revenu émis en date du 18 juin 1998 par le bureau d’imposition Luxembourg IX, section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes, au sujet des années d’imposition 1994 à 1997, et, d’autre part, de la prétendue décision implicite de rejet du directeur de l’administration des Contributions directes qui aurait été rendue à la suite de sa réclamation du 17 septembre 1998 ;

Vu l’ordonnance de la deuxième chambre du tribunal administratif du 27 septembre 1999, rendue en exécution de l’article 70, alinéa 3 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, par laquelle le demandeur a été invité à indiquer au tribunal s’il entendait maintenir son recours ;

Vu la déclaration de Monsieur RYMER faite à la suite de l’ordonnance précitée du 27 septembre 1999, déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 octobre 1999, par laquelle il a déclaré qu’il entendait poursuivre le présent recours ;

Vu le jugement de la deuxième chambre du tribunal administratif du 15 novembre 1999, rendu en exécution de l’article 70, alinéa 3 de la loi précitée du 21 juin 1999, constatant que la présente affaire est à instruire conformément à la nouvelle loi de procédure ;

Vu le mémoire en réponse, intitulé “ observations sur le recours formé par le sieur … RYMER concernant l’impôt sur le revenu 1994 à 1997, n° 11395 du rôle ”, déposé en date du 28 janvier 2000 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Monsieur Karl HORSBURGH en ses explications et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Le 18 juin 1998, le bureau d’imposition Luxembourg IX de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé “ le bureau d’imposition ”, émit à charge de Monsieur … RYMER, ayant à l’époque demeuré à L-…, quatre bulletins de l’impôt sur le revenu pour respectivement les années 1994 à 1997.

Par lettre datée du 17 septembre 1998, Monsieur RYMER, par le biais de son mandataire, dirigea contre lesdits bulletins une réclamation adressée au bureau d’imposition Luxembourg IX, dont la motivation fut transmise au prédit bureau par courrier du prédit mandataire du 16 octobre 1998.

Il ressort d’une attestation émise en date du 16 novembre 1998 par un inspecteur du “ directe belastingen controle …” que Monsieur RYMER a été un contribuable résident en Belgique au courant des années 1995, 1996 et 1997, où il a été imposé, ensemble avec son épouse, au titre de l’impôt sur son revenu mondial et que notamment les revenus luxembourgeois de Monsieur RYMER ont été ajoutés au revenu belge de son épouse en vue de leur imposition par l’administration fiscale belge.

Le 22 juillet 1999, en l’absence de décision du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé “ le directeur ”, Monsieur RYMER fit introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation des quatre bulletins de l’impôt sur le revenu précités, émis en date du 18 juin 1998 au sujet des années d’imposition 1994 à 1997, ainsi que de la prétendue décision implicite de rejet du directeur, qui aurait été rendue à la suite de la réclamation de Monsieur RYMER du 17 septembre 1998.

Quant à la compétence et à la recevabilité C’est à bon droit que le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours dans la mesure où il est dirigé contre une prétendue décision implicite de rejet du directeur. En effet, d’après l’article 8 (3) 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, l’introduction d’un recours devant le tribunal administratif n’est admis, en cas de silence du directeur suite à une réclamation, que contre “ la décision qui fait l’objet de la réclamation ”, en l’espèce les bulletins d’impôt précités du 18 juin 1998, relatifs aux années d’imposition 1994 à 1997, et non pas contre une décision implicite de rejet du directeur (cf. trib. adm. 25 novembre 1998, n°s 10308 à 10311 du rôle, Pas. adm. 1/2000, V° Impôts, VII, Procédure contentieuse, n° 196, p. 219 et autre référence y citée). Il s’ensuit que le recours sous discussion, dirigé par ailleurs contre les bulletins d’impôt précités, est à déclarer irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre une prétendue décision implicite de rejet du directeur, qui aurait été rendue à la suite de la réclamation précitée du 17 septembre 1998.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée “ Abgabenordnung ”, en abrégée “ AO ”, et de l’article 8 (3) 3 de la loi précitée du 7 novembre 1996, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre un bulletin de l’impôt sur le revenu en cas de défaut de décision du directeur suite à une réclamation contre ce bulletin de la part du contribuable. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en réformation dans la mesure où il 2 est dirigé contre les quatre bulletins de l’impôt sur le revenu, émis en date du 18 juin 1998, au sujet des années d’imposition 1994 à 1997, qui est recevable pour avoir été par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond Le demandeur reproche au bureau d’imposition de l’avoir imposé en tant que résident du Grand-Duché de Luxembourg, alors qu’il aurait résidé en Belgique pendant les années litigieuses, et de ne pas l’avoir classé dans la classe d’imposition 2.2 pour les années d’imposition 1994 à 1996 et dans la classe 2.1 pour l’année d’imposition 1997.

A l’appui de son recours, il fait valoir qu’au cours des années 1994 à 1997, il aurait été considéré comme résident fiscal en Belgique, en vertu des dispositions internes belges et qu’il y aurait été imposé sur son revenu mondial. Par ailleurs, au cours de la période en question, il aurait occupé un appartement à Luxembourg en vue de remplir sa fonction d’informaticien auprès de son employeur et il serait retourné en Belgique le week-end trois semaines sur quatre et que son épouse serait venue au Luxembourg, le week-end de la quatrième semaine. Par ailleurs, il aurait passé ses périodes de congé ensemble avec son épouse en Belgique où se seraient déroulées également les fêtes de famille et il y aurait partant lieu de conclure que son centre d’intérêts vitaux se serait situé en Belgique au cours des années litigieuses.

Il se base encore sur l’article 157bis (3) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé “ LIR ”, pour revendiquer son classement dans la classe d’impôt 2, en se référant au fait qu’au cours des années litigieuses, il serait à considérer comme contribuable non – résident marié et ne vivant pas en fait séparé, gagnant plus de 50% des revenus professionnels de son ménage au Luxembourg. Il soutient encore qu’au cours des années d’imposition 1995 et 1996, les enfants An Van de Velde et Lis Van de Velde et qu’au cours de l’année 1997, seule An Van de Velde auraient fait partie de son ménage en Belgique.

Le délégué du gouvernement soutient que “ de l’aveu du recourant le centre de ses intérêts économiques se trouve au Luxembourg ” et il estime que le seul fait que pour les années 1995 à 1997, le demandeur a été reconnu comme contribuable résident en Belgique, ne devrait avoir aucune influence sur l’application des critères résultant à la fois de la convention belgo-luxembourgeoise contre la double imposition et de la législation nationale, “ quitte à ce qu’une éventuelle double imposition fasse ensuite l’objet d’une procédure amiable ”.

Le représentant étatique fait encore valoir que ce serait à bon droit que le bureau d’imposition n’a pas classé le demandeur dans la classe d’imposition 2, dans la mesure où son épouse n’aurait pas constitué un contribuable luxembourgeois au cours des années litigieuses et qu’il ne se trouvait par ailleurs pas dans l’un des cas particuliers tels que prévus par la loi.

Enfin, dans la mesure où les enfants dont fait état le demandeur n’auraient pas fait partie de son ménage au Luxembourg, il ne saurait prétendre à une modération d’impôt pour les enfants en question au cours des années litigieuses.

L’article 2 LIR soumet la qualité de contribuable résident à la condition d’avoir son domicile fiscal ou son séjour habituel au Grand-Duché de Luxembourg. Ces deux notions sont précisées respectivement par les paragraphes 13 et 14 de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, appelée “ Steueranpassungsgesetz ”, en abrégée “ StAnpG ”.

3 Le paragraphe 13 StAnpG définit le domicile fiscal comme étant la possession d’une habitation dans des conditions permettant de conclure que le contribuable visé la conservera et en fera usage. Cette notion suppose ainsi la possession matérielle d’une habitation, ainsi que “ des circonstances de fait [dont] résulte l’intention de conserver et d’occuper une habitation dans le pays ” (projet de loi 5714, commentaire des articles, ad. art. 3).

En l’espèce, il n’est pas contesté que le demandeur a eu à sa disposition, au cours des années d’imposition litigieuses, par la voie d’une prise en location, un appartement, sis à L-…, de sorte que la condition de la possession matérielle d’une habitation se trouve être vérifiée dans son chef. Il résulte encore de l’exposé des faits non autrement mis en cause que le demandeur a résidé au Luxembourg au cours des jours ouvrables et qu’il est retourné en Belgique, auprès de sa famille, à un rythme de trois week-end sur quatre, étant entendu que le quatrième week-end son épouse l’a rejoint au Luxembourg. Il se dégage de cette situation de fait que le demandeur, résident au Luxembourg au cours de la majeure partie des années litigieuses, avait l’intention de conserver et d’occuper de manière permanente une habitation et il disposait de ce fait d’un domicile fiscal au Grand-Duché de Luxembourg au cours des années litigieuses, le seul fait qu’il ait passé les trois quarts des week-end ainsi que les périodes de congé en Belgique étant indifférent sous ce rapport.

La notion de séjour habituel au sens du paragraphe 14 StAnpG vise l’endroit où une personne séjourne dans des circonstances qui font apparaître qu’elle reste dans la localité ou dans le pays considéré non seulement à titre passager. Le séjour habituel est admis de droit lorsque le séjour effectif au pays excède six mois consécutifs. En l’espèce, il résulte des éléments et renseignements fournis, non autrement contestés, tels que ci-avant relatés, que le séjour au pays du demandeur a eu un caractère continu durant les années d’imposition en cause, de sorte qu’un séjour habituel au Grand-Duché doit être retenu dans son chef.

Il s’ensuit que c’est à juste titre que le bureau d’imposition a qualifié le demandeur de contribuable résident au titre des années d’imposition en cause pour les besoins de l’imposition des revenus pour lesquels le droit d’imposition revenait au Luxembourg. En effet, c’est à bon droit que ledit bureau d’imposition a retenu le Luxembourg comme constituant l’Etat avec lequel les intérêts personnels et économiques du demandeur étaient les plus étroits et qu’il y possédait le centre des intérêts vitaux, sur base de l’article 4. § 2,1) de la convention de non-

double imposition entre la Belgique et le Luxembourg.

Ce raisonnement ne saurait être énervé par le fait qu’au cours des années d’imposition 1995 à 1997, l’administration fiscale belge a considéré Monsieur RYMER comme constituant un résident fiscal belge, imposable sur son revenu mondial en Belgique, étant donné que le fait d’être reconnu comme résident fiscal dans deux Etats différents et la double imposition en découlant doivent être résolus par le biais d’une procédure amiable telle que prévue par la convention de non double imposition conclue entre la Belgique et le Luxembourg.

C’est partant à tort que le demandeur entend être qualifié de contribuable non résident au Luxembourg. Le moyen afférent est partant à écarter.

Faute de domicile fiscal ou de séjour habituel de l’épouse du contribuable au Luxembourg, cette dernière ne satisfait pas aux conditions pour être qualifiée de contribuable résident au sens de l’article 2 LIR. L’imposition collective au sens de l’article 3 LIR n’étant admise que lorsque les deux époux sont contribuables résidents, le contribuable et son épouse ne rentrent pas dans le champ d’application de ce régime d’imposition (trib. adm. 23 juillet 4 1997, n° 9614 du rôle, Pas. adm. 1/2000, V° Impôts, II. Impôt sur le revenu, C. Imposition collective, n° 26, p. 180).

En l’espèce, il est constant en cause que l’épouse de Monsieur RYMER n’a pas la qualité de contribuable résident au Luxembourg. Partant, c’est à tort que le demandeur souhaite être classé dans la classe d’imposition 2 et le moyen afférent est également à rejeter.

En outre, concernant les enfants que le demandeur prétend avoir eu à sa charge pendant au moins une partie des années litigieuses, il échet de constater que ceux-ci n’ont pas fait partie de son ménage au Luxembourg et ils ne sauraient partant être pris en considération en vue de la fixation de la classe d’imposition de Monsieur RYMER. Ce moyen est partant également à écarter.

Enfin, c’est à tort que le demandeur sollicite l’application de l’article 157bis (3) LIR, étant donné qu’en sa qualité de résident fiscal au Luxembourg, il ne tombe pas dans le champ d’application de cette disposition.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours est à déclarer non fondé.

Le recours en annulation est à déclarer irrecevable, étant donné qu’en la présente matière, seul un recours en réformation a pu être dirigé contre les bulletins d’impôt litigieux.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre une prétendue décision implicite de rejet d’une réclamation par le directeur de l’administration des Contributions directes, à la suite d’une réclamation introduite en date du 17 septembre 1998, restée sans réponse ;

reçoit le recours en réformation en la forme dans la mesure où il est dirigé contre les quatre bulletins de l’impôt sur le revenu émis en date du 18 juin 1998, au sujet des années d’imposition 1994 à 1997 ;

déclare le recours non justifié, partant en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme. Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 18 octobre 2000 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

5 s. Legille s.

Schockweiler 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11395
Date de la décision : 18/10/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-10-18;11395 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award