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04/10/2000 | LUXEMBOURG | N°11898

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 octobre 2000, 11898


Numéro 11898 du rôle Inscrit le 28 mars 2000 Audience publique du 4 octobre 2000 Recours formé par Monsieur … LUCAS, … (D) contre une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’exercice d’un métier

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 11898 du rôle, déposée le 28 mars 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain LORANG, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembou

rg, au nom de Monsieur … LUCAS, demeurant à D-…, tendant à l’annulation d’une décis...

Numéro 11898 du rôle Inscrit le 28 mars 2000 Audience publique du 4 octobre 2000 Recours formé par Monsieur … LUCAS, … (D) contre une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’exercice d’un métier

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 11898 du rôle, déposée le 28 mars 2000 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain LORANG, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … LUCAS, demeurant à D-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 30 décembre 1999 lui ayant refusé l’autorisation d’exercer au Grand-

Duché les activités d’installateur de chauffage, de ventilation et de climatisation et d’installateur sanitaire;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 mai 2000;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Anne GROSSMANN et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 18 septembre 2000.

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En date du 2 décembre 1999, Monsieur … LUCAS, demeurant à D-…, déposa au ministère des Classes moyennes une demande en obtention de l’autorisation d’établissement pour les métiers d’installateur de chauffage, de ventilation et de climatisation et d’installateur sanitaire.

Suite à un avis défavorable, en raison du défaut d’avoir satisfait aux conditions d’équivalence fixées par les normes communautaires applicables, émis le 9 décembre 1999 par la commission spéciale prévue par l’article 2 (1) de la loi modifiée du 28 décembre 1988 réglementant l'accès aux professions d'artisan, de commerçant, d'industriel ainsi qu'à certaines professions libérales, ci-après désignée par « la loi d’établissement », le ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement rejeta ladite demande suivant décision du 30 décembre 1999 aux motifs suivants : « die beabsichtigten Tätigkeiten fallen in das Zentralheizungs-

und Luftheizungsbauerhandwerk, sowie das Gas-

und Wasserinstallateurhandwerk, Nrn 403-00 und 404-00 der durch grossherzoglichen Beschluss vom 19.2.90 vorgesehenen Handwerksliste, zu dessen Ausübung die Bedingungen der Richtlinie 64//427/EWG (Industrie und Handwerk) zu erfüllen sind. Laut der eingereichten EG-Bescheinigung entsprechen Sie jedoch nicht den Forderungen des Artikels 3 der obengenannten Richtlinie. Somit kann ich Ihrem Antrag leider im jetzigen Stand der Unterlagen nicht stattgeben ».

Par requête déposée le 28 mars 2000, Monsieur LUCAS a fait introduire un recours en annulation à l’encontre de la décision ministérielle de rejet précitée.

L’article 2 (6) de la loi d’établissement, tel que modifié par la loi du 4 novembre 1997 portant modification des articles 2, 12, 22 et 26 de la loi d’établissement, prévoyant expressément que le tribunal administratif statue comme juge d’annulation en matière d’autorisations d’établissement, le recours en annulation est recevable pour avoir par ailleurs été introduit suivant les formes et délai de la loi.

Quant au fond, le demandeur soutient qu’il satisferait aux conditions de qualification posées par l’article 3 de la directive 64/427/CEE prévisée, de sorte que le ministre aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en lui refusant l’autorisation litigieuse. Il se prévaut à cet égard, d’une part, du poste de direction, chargé de tâches techniques avec la responsabilité d’au moins un département de l’établissement, par lui occupé du 1er octobre 1980 au 31 décembre 1997 auprès de la société allemande DSD Dillinger Stahlbau dans le domaine de la ventilation et de la climatisation et, d’autre part, de son exercice en tant qu’indépendant de l’activité d’installateur sanitaire et de chauffagiste depuis le 5 janvier 1998 sur base d’une inscription dans la « Handwerksrolle » opérée le 15 janvier 1998. Il renvoie encore à la formation par lui suivie pour exercer le métier d’installateur sanitaire chauffagiste.

Le délégué du Gouvernement rétorque que le demandeur, ne disposant ni d’un brevet de maîtrise, ni d’un diplôme universitaire d’ingénieur de la branche, devrait établir sa qualification professionnelle au moyen d’une attestation établie par l’autorité compétente d’un autre Etat membre en vertu de la directive 64/427/CEE prévisée et que cette formation serait reconnue comme équivalente au brevet de maîtrise si les conditions prévues par ladite directive se trouvaient être vérifiées. Le diplôme soumis, à savoir un « Abschlusszeugnis der Staatlichen Fachschule für Technik Trier, Fachrichtung Maschinentechnik, Schwerkunkt Versorgungstechnik », établirait, d’après le représentant étatique, une formation de moins de 2 années non spécifique aux professions envisagées et correspondant à une 13ième technique qui n’aurait en principe pas permis au demandeur d’exercer les activités en cause à titre indépendant en Allemagne en tant que « Installateur und Heizungsbauer », cette faculté ne lui ayant été accordée que sur base d’une « Ausnahmebewilligung ». Après avoir relevé que l’Etat d’accueil ne serait tenu de reconnaître que les qualifications professionnelles rentrant dans les prévisions de la directive 64/427/CEE prévisée, le délégué du Gouvernement estime que le demandeur, tout en pouvant se prévaloir d’une expérience professionnelle d’au moins cinq années dans des fonctions dirigeantes, resterait en défaut d’établir une formation préalable d’au moins trois ans sanctionnée par un certificat reconnu par l’Etat de provenance ou jugée pleinement valable par un organisme professionnel compétent de cet Etat qui lui permettrait l’accès à la profession concernée, de sorte qu’il ne satisferait pas aux exigences de ladite 2 directive et que le Grand-Duché ne serait pas tenu de reconnaître sa qualification fondée sur une « Ausnahmebewilligung » non conforme à la même directive.

D’après le règlement grand-ducal du 26 mars 1994 déterminant le champ d’activité des métiers principaux et secondaires du secteur artisanal, les activités visées en l’espèce rentrent dans les métiers principaux de l’installateur de chauffage, de ventilation et de climatisation (n° 403-00), ainsi que de l’installateur sanitaire (n° 404-00).

Aux termes de l’article 13 (2) de la loi d’établissement, « les artisans exerçant un métier principal et les entrepreneurs industriels de construction doivent être en possession du brevet de maîtrise ou du diplôme universitaire d’ingénieur de la branche. Le ministre ayant dans ses attributions les autorisations d’établissement, sur avis de la commission prévue à l’article 2 et après consultation de la Chambre des Métiers, peut reconnaître à un postulant, démuni des diplômes précités, une qualification professionnelle suffisante soit pour l’ensemble, soit pour une partie d’un métier repris sur la liste établie par règlement grand-

ducal sur la base des pièces justificatives reconnues comme équivalentes, conformément aux critères à déterminer par règlement grand-ducal ».

Il s’ensuit que le demandeur doit en principe être titulaire d’un brevet de maîtrise pour cette activité ou d’un diplôme d’ingénieur de la branche concernée, sauf s’il est en mesure de présenter une qualification reconnue comme équivalente par le règlement grand-ducal du 15 septembre 1989 déterminant les critères d’équivalence prévus à l’article 13 (2) de la loi d’établissement.

Il ressort des éléments du dossier soumis au tribunal qu’en l’espèce le demandeur a joint à sa demande d’autorisation du 2 décembre 1999 un « Abschlusszeugnis der Staatlichen Fachschule für Technik Trier, Fachrichtung Maschinentechnik, Schwerpunkt Versorgungstechnik » confirmant le droit dans son chef de porter le titre de « staatlich geprüfter Techniker » et attestant une formation de deux années.

Le demandeur ne faisant dès lors pas état de la détention d’un diplôme visé par les articles 1 à 3 et 5 du règlement grand-ducal prévisé du 15 septembre 1989, il y a lieu d’admettre qu’il tend à se voir reconnaître le droit d’exercer les métiers principaux de l’installateur de chauffage, de ventilation et de climatisation, ainsi que de l’installateur sanitaire sur base de l’article 6 du même règlement grand-ducal du 15 septembre 1989 disposant que « les attestations délivrées par les organismes compétents des pays membres du Marché Commun sur base des directives communautaires dans le domaine de l’artisanat sont à considérer comme pièces équivalentes lorsque le bénéficiaire de l’attestation répond aux conditions de capacité professionnelle y prévues », étant précisé qu’il résulte du libellé global dudit règlement grand-ducal que les termes « pièces équivalentes » s’entendent de pièces équivalentes au brevet de maîtrise prévu à l’article 13 (2) prévisé.

Cette dernière disposition renvoie ainsi à la directive 64/427/CEE précitée du 7 juillet 1964, dont l’article 3 détermine les conditions sous lesquelles l’exercice effectif antérieur d’une profession dans un autre Etat membre doit être reconnu équivalent aux conditions de qualification fixées par l’Etat membre dans lequel l’artisan entend entamer l’exercice de la même profession. L’article 4, 2. de ladite directive confie à l’autorité compétente de l’Etat de provenance le soin d’attester l’envergure et la durée de l’exercice effectif d’une activité dans cet Etat, tout en précisant que cette attestation est « établie en fonction de la monographie professionnelle communiquée par l’Etat membre dans lequel le bénéficiaire veut exercer la profession de manière permanente ou temporaire ».

3 En l’espèce, l’attestation soumise par le demandeur au ministre en annexe à sa demande d’autorisation, émise le 23 novembre 1999 par la Handwerkskammer des Saarlandes, certifie l’exercice de l’activité de « Installateur- und Heizungsbauer » à titre indépendant à partir du 15 janvier 1998 pour une durée d’un an et de dix mois, ainsi que dans une fonction dirigeante auprès de la société Dillinger Stahlbau du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1997 et qualifie les activités ainsi exercées de celles d’installateur sanitaire et chauffagiste d’après la monographie de l’Etat d’accueil, en l’occurrence le Grand-Duché. La même attestation précise que le demandeur a bénéficié d’une « Ausnahmebewilligung » pour le métier du « Zentralheizungs- und Lüftungsbauer » lui accordée par le Ministerium für Wirtschaft des Saarlandes.

Aux termes de l’article 3 de ladite directive 64/427, « lorsque, dans un Etat membre, l’accès à l’une des activités mentionnées à l’article premier paragraphe 2, ou l’exercice de celles-ci, est subordonné à la possession de connaissances et d’aptitudes générales, commerciales ou professionnelles, cet Etat membre reconnaît comme preuve suffisante de ces connaissances et aptitudes l’exercice effectif dans un autre Etat membre de l’activité considérée :

a) soit pendant six années consécutives à titre indépendant ou en qualité de dirigeant chargé de la gestion de l’entreprise ;

b) soit pendant trois années consécutives à titre indépendant ou en qualité de dirigeant chargé de la gestion de l’entreprise, lorsque le bénéficiaire peut prouver qu’il a reçu, pour la profession en cause, une formation préalable d’au moins trois ans sanctionnée par un certificat reconnu par l’Etat ou jugée pleinement valable par un organisme professionnel compétent ;

c) soit pendant trois années consécutives à titre indépendant lorsque le bénéficiaire peut prouver qu’il a exercé à titre dépendant la profession en cause pendant cinq ans au moins ;

d) soit pendant cinq années consécutives dans des fonctions dirigeantes, dont un minimum de trois ans dans des fonctions techniques impliquant la responsabilité d’au moins un secteur de l’entreprise, lorsque le bénéficiaire peut prouver qu’il a reçu, pour la profession en cause, une formation préalable d’au moins trois ans sanctionnée par un certificat reconnu par l’Etat ou jugée comme pleinement valable par un organisme professionnel compétent ».

Etant donné que le demandeur n’a pas établi avoir été dans le passé chargé de la gestion d’une entreprise spécialisée dans les métiers en cause et qu’il ne peut faire état d’un exercice antérieur des mêmes métiers à titre indépendant durant six, voire trois ans, il ne rentre pas dans les cas de figure visés aux points a) et b) de l’article 3 précité.

Alors même qu’il ressort de l’attestation CEE prévisée du 23 novembre 1999 que le demandeur a exercé les métiers en cause à titre dépendant durant une période supérieure à cinq années, il reste en défaut d’établir, tant à la date de la décision ministérielle attaquée qu’à l’heure actuelle, leur exercice ultérieur à titre indépendant durant au moins trois ans, de manière à ce qu’il ne saurait non plus fonder sa revendication sur le point c) de l’article 3 précité.

Concernant le point d) dudit article 3, force est de constater que l’attestation versée par le demandeur à l’appui de sa demande établit dans son chef l’exercice des métiers en cause durant cinq ans dans des fonctions dirigeantes et que les autres pièces fournies indiquent l’exercice durant au moins trois ans dans des fonctions techniques afférentes. Au-delà 4 néanmoins des éléments de fait relatifs à l’exercice effectif des activités visées susceptibles d’être prouvées par la voie de l’attestation CEE, le point d) dudit article 3 pose l’exigence complémentaire d’une formation préalable d’au moins trois ans pour laquelle la charge de la preuve incombe en principe directement au demandeur d’autorisation. Or, en l’espèce, le « Abschlusszeugnis » de la Staatliche Fachschule für Technik Trier, sur lequel le demandeur s’est fondé devant le ministre, ne certifie qu’une formation de deux années au lieu des trois années requises par les dispositions de l’article 3 précité.

Il s’ensuit que le ministre a valablement pu décider, sur base du dossier lui présenté, que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences de la directive 64/427 prévisée afin de pouvoir revendiquer une autorisation d’établissement pour les métiers de l’installateur de chauffage, de ventilation et de climatisation, ainsi que de l’installateur sanitaire.

Il est vrai que, parmi les pièces déposées à l’appui de son recours, le demandeur a versé une pièce complémentaire, à savoir un « Prüfungszeugnis » émis le 23 janvier 1974 par la Kreishandwerkerkammer Trier lui certifiant la réussite à la « Gesellenprüfung » pour le métier de « Zentralheizungs- Lüftungsbauer » et qu’il affirme que ce certificat lui aurait été remis après avoir suivi une formation sur trois ans combinée avec l’exercice pratique du métier y mentionné.

Abstraction faite de la circonstance que cette pièce pourrait, le cas échéant, être considérée comme élément nouveau dans le cadre de l’évaluation de la qualification professionnelle du demandeur face aux exigences de l’article 3 de la directive 64/427/CEE prévisée justifiant une demande réitérée, elle constitue un fait nouveau qui n’avait pas été soumis au ministre avant sa prise de décision et que ce dernier n’était pas tenu de relever dans le cadre de son instruction du dossier, de sorte qu’elle ne saurait énerver la légalité de la décision litigieuse.

Il s’ensuit que le recours sous analyse doit être rejeté au stade actuel de l’affaire.

PAR CES MOTIFS Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond, le déclare non justifié, partant en déboute, laisse les frais à charge du demandeur.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 4 octobre 2000 par:

M. DELAPORTE, premier vice-président, Mme LENERT, premier juge, M. SCHROEDER, juge, 5 en présence de M. SCHMIT, greffier en chef s. SCHMIT s. DELAPORTE 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11898
Date de la décision : 04/10/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-10-04;11898 ?

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