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20/09/2000 | LUXEMBOURG | N°11301a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 septembre 2000, 11301a


N° 11301a du rôle Inscrit le 27 mai 1999 Audience publique du 20 septembre 2000

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Recours formé par Monsieur … DEBOUCHE contre un arrêté du ministre de la Force publique en matière de classement

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Vu la requête déposée le 27 mai 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … DEBOUCHE, commissaire de police, demeurant à L-…, tendant principalem

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N° 11301a du rôle Inscrit le 27 mai 1999 Audience publique du 20 septembre 2000

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Recours formé par Monsieur … DEBOUCHE contre un arrêté du ministre de la Force publique en matière de classement

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Vu la requête déposée le 27 mai 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … DEBOUCHE, commissaire de police, demeurant à L-…, tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’un arrêté du ministre de la Force publique du 1er octobre 1997 par lequel il a été classé au grade A7 ;

Vu le jugement du 3 février 2000 par lequel le tribunal administratif s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire tout en déclarant le recours en annulation, introduit en ordre principal, recevable quant à la forme, et par lequel il a invité les parties à se prononcer par écrit sur l’incidence éventuelle de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 10 février 2000 par Maître Gaston VOGEL au nom de Monsieur … DEBOUCHE ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 mars 2000 par le délégué du gouvernement ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, Maître Pascal PEUVREL, en remplacement de Maître Gaston VOGEL, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 mai 1999, Monsieur … DEBOUCHE, commissaire de police, demeurant à L-…, a introduit un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’un arrêté du ministre de la Force publique du 1er octobre 1997 par lequel il a été classé au grade A7.

Dans son jugement rendu en date du 3 février 2000, le tribunal administratif s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre subsidiaire et a déclaré recevable le recours en annulation formé en ordre principal. Dans ce jugement, le tribunal a encore rejeté comme étant non fondés tant le moyen tiré d’une insuffisance de motivation de la décision critiquée que celui basé sur un prétendu détournement de pouvoir qui aurait été commis par le ministre de la Force publique en ce que celui-ci aurait en réalité infligé une mesure disciplinaire à Monsieur DEBOUCHE sans respecter la procédure applicable. Quant au fond, le tribunal a encore retenu que le fait de retirer un grade de substitution ne constitue ni une rétrogradation au sens de l’article 47 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ni, en principe, une sanction disciplinaire. Comme les parties n’avaient pas soulevé le moyen tiré d’une éventuelle violation de l’article 9, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et comme ce moyen risquait d’avoir une incidence sur l’issue du litige, le tribunal l’a soulevé d’office tout en invitant les parties à y prendre position par un mémoire écrit supplémentaire.

Dans son mémoire complémentaire, le demandeur estime qu’au moment où l’autorité compétente se proposait de révoquer d’office pour l’avenir la décision du 1er septembre 1994 par laquelle il avait été nommé au grade de substitution A7bis, il n’y avait aucun péril en la demeure. Il fait encore exposer qu’avant la prise de la décision litigieuse du 1er octobre 1997, par laquelle il a été reclassé au grade A7, il n’avait été informé ni des éléments de fait ni des éléments de droit amenant l’autorité compétente à agir, de sorte qu’il n’aurait pas pu faire valoir utilement ses droits de la défense, tel que cela est prévu par l’article 9 précité. Il conclut partant à l’annulation de la décision incriminée, au motif que le respect des droits de la défense serait d’ordre public.

Le délégué du gouvernement estime que, comme le fait de retirer au demandeur le grade de substitution ne constituerait ni une sanction ni une atteinte grave à sa situation, il n’y aurait pas lieu de faire application de l’article 9 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979. Par ailleurs, la décision incriminée n’entraînerait aucun bouleversement de la situation juridique du demandeur dont elle ne lèserait aucun intérêt légalement protégé, dans la mesure où celui-ci ne bénéficierait pas d’un droit acquis au grade bis. Le ministre de la Force publique n’aurait partant pas été obligé d’observer les formalités telles que prévues par l’article 9 précité.

Au vœu de l’article 9, alinéa 1er du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, et “ sauf s’il y a péril en la demeure, l’autorité qui se propose de révoquer (…) d’office pour l’avenir une décision ayant créé (…) des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir ”.

S’il est vrai qu’avant l’édiction du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, le comité du contentieux du Conseil d’Etat avait dégagé une jurisprudence selon laquelle l’administration était obligée d’entendre l’intéressé préalablement à toute décision prise en dehors de son intervention à partir du moment où cette décision consistait soit dans une sanction administrative soit dans une atteinte grave à ses intérêts patrimoniaux ou à sa situation individuelle, le règlement grand-ducal précité, dans son article 9, alinéa 1er, a 2 élargi cette protection, en étendant le principe du contradictoire également aux cas où l’administration agit d’office, en dehors de toute initiative de l’intéressé. Ainsi, cette protection des administrés, parmi lesquels figurent également les fonctionnaires de l’Etat, ayant pour objet d’assurer le respect des droits de la défense, devra être assurée par l’administration même dans les cas où la décision à prendre en dehors de l’initiative de la partie concernée ne constitue ni une sanction administrative ni une atteinte grave aux intérêts patrimoniaux ou à la situation individuelle de l’administré en question. Cette solution ressort des dispositions de l’article 9, alinéa 1er précité, sans qu’il y ait lieu de recourir aux développements contenus dans les travaux parlementaires afin de l’interpréter, le texte clair se suffisant à lui-même.

Au cas où, comme en l’espèce, l’autorité compétente, en révoquant d’office pour l’avenir la décision par laquelle Monsieur DEBOUCHE s’est vu attribuer le grade A 7 bis, a en tout état de cause agi en-dehors de l’initiative de la personne concernée, elle était dès lors obligée, avant de prendre la décision en question, d’aviser la personne concernée de son intention, c’est-à-dire de l’ouverture de la procédure, en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir. Elle devra plus particulièrement lui indiquer le sens et la nature de la décision à laquelle elle entend aboutir et l’inviter à présenter sa défense, c’est-à-dire ses observations et arguments à l’encontre des moyens avancés (F. Schockweiler, Contentieux administratif et la Procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, 2e éd., 1996, n° 386, p. 118) En l’espèce, il est constant que le demandeur n’a pas été informé avant la prise de la décision litigieuse du 1er octobre 1997 de l’intention du ministre de la Force publique de prendre celle-ci et partant il n’a pas été en mesure de faire valoir ses droits de la défense.

Par ailleurs, il n’a été ni allégué ni établi qu’il y a eu en l’espèce péril en la demeure qui aurait pu décharger le ministre de la Force publique de son obligation telle que résultant de l’article 9, alinéa 1er du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979.

Il suit de ce qui précède que l’arrêté du ministre de la Force publique du 1er octobre 1997 par lequel le demandeur a été classé au grade A7 est à annuler sans qu’il y ait lieu de prendre position par rapport aux autres moyens et arguments développés par les parties à l’instance.

Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

vidant le jugement interlocutoire du 3 février 2000 ;

déclare le recours en annulation fondé, partant annule l’arrêté du ministre de la Force publique du 1er octobre 1997 par lequel Monsieur … DEBOUCHE a été classé au grade A7 ;

renvoie le dossier pour prosécution de cause au ministre de la Force publique ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par :

3 M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme. Lenert, premier juge et lu à l’audience publique du 20 septembre 2000 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11301a
Date de la décision : 20/09/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-09-20;11301a ?

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