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19/07/2000 | LUXEMBOURG | N°10591

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 juillet 2000, 10591


N° 10591 du rôle Inscrit le 2 mars 1998 Audience publique du 19 juillet 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de délégation du personnel

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 1998 par Maître Eliane SCHAEFFER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée JOHANNS &

Cie, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions,...

N° 10591 du rôle Inscrit le 2 mars 1998 Audience publique du 19 juillet 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie, … contre une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière de délégation du personnel

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 1998 par Maître Eliane SCHAEFFER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à l’annulation d’une décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 2 décembre 1997, par laquelle ledit ministre a fixé le jour du scrutin pour des élections de la délégation du personnel pour la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie;

Vu l’ordonnance de la deuxième chambre du tribunal administratif du 27 septembre 1999, rendue en exécution de l’article 70, alinéa 3 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, par laquelle la demanderesse a été invitée à indiquer au tribunal si elle entendait maintenir son recours;

Vu la déclaration de Maître Eliane SCHAEFFER faite à la suite de l’ordonnance précitée du 27 septembre 1999, déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 octobre 1999, par laquelle elle a déclaré que sa mandante entendait poursuivre le présent recours;

Vu le jugement de la deuxième chambre du tribunal administratif du 15 novembre 1999, rendu en exécution de l’article 70, alinéa 3 de la loi précitée du 21 juin 1999, constatant que la présente affaire est à instruire conformément à la nouvelle loi de procédure;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 janvier 2000;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom de la demanderesse le 24 février 2000;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Françoise HILGER, en remplacement de Maître Eliane SCHAEFFER, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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1 Suivant arrêté du 2 décembre 1997 du ministre du Travail et de l’Emploi, ci-après dénommé le « ministre »: « le jour du scrutin pour l’élection de la délégation du personnel pour la société JOHANNS & Cie Sàrl, …, ayant son siège social à L-…, est fixé au 18 février 1998.

(…) L’inspection du travail et des mines est chargée de veiller à la mise en application des dispositions du présent arrêté conformément aux dispositions légales et réglementaires régissant les opérations électorales pour la désignation des délégations du personnel. (…) ».

Un recours gracieux introduit en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie, par lettre de son mandataire portant la date du 3 février 1998, resta sans réponse de la part du ministre.

Par requête déposée le 2 mars 1998, la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie a introduit un recours tendant à l’annulation de l’arrêté ministériel précité du 2 décembre 1997.

Le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité du recours dans les formes et délai. - En outre, il « soulève la question de l’intérêt d’agir de la requérante au vu du temps qui s’est écoulé entre la date d’introduction du recours et la date de la décision à intervenir ».

En ce qui concerne l’intérêt à agir de la partie demanderesse, il convient en premier lieu de relever que l’intérêt pour agir en justice est une condition de recevabilité que le juge est appelé à examiner d’office et qu’il examine au moment du dépôt de la requête introductive d’instance.

En l’espèce, force est de constater qu’au moment du dépôt de la requête introductive, la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie, en tant que destinataire direct d’une décision administrative prise d’office et affectant ses droits administratifs individuels en lui fixant une obligation personnelle, avait un intérêt suffisant à obtenir une décision relativement à la légalité de la décision attaquée de la part des juridictions administratives.

Il s‘ensuit que le moyen d’irrecevabilité suggéré par le représentant étatique laisse d’être fondé.

Le recours ayant été introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Au fond, la demanderesse conclut à l’annulation de la décision attaquée « pour excès de pouvoir, sinon détournement de pouvoir, sinon pour violation de la loi respectivement des textes réglementaires, sinon pour incompétence ».

Elle expose qu’au moment de la prise de la décision attaquée, elle se serait trouvée dans une phase intermédiaire, étant précisé que son entreprise aurait été confrontée à des « impératifs de restructuration », que « depuis la décision intervenue », le nombre de ses salariés aurait été réduit, qu’en raison de la résiliation du contrat d’exploitation par le concédant, elle aurait perdu un de ses deux points de vente, que pour cette raison elle aurait 2 licencié une salariée avec effet au 1er avril 1998, que le contrat d’une autre salariée aurait été résilié avec effet au 31 mars 1998 et qu’un troisième salarié aurait démissionné avec effet au 31 décembre 1997, sans avoir été remplacé par la suite, et que, pour des raisons de « rationalisation et de transparence », elle aurait envisagé de confier des tâches purement administratives à une autre société, laquelle se proposerait de reprendre à son service le personnel actuellement occupé aux dites tâches administratives, à savoir un total de 5 salariés.

Sur ce, elle soutient que le nombre minimum de personnes engagées déclenchant l’obligation de créer une délégation du personnel ne serait plus rempli et que la décision ministérielle encourrait l’annulation.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour manquer de fondement au motif que le ministre se serait basé sur un relevé du centre commun de la sécurité sociale datant du 4 novembre 1997 duquel ressortirait que la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie disposait d’un effectif de 18 personnes dont 15 auraient une ancienneté de service d’un an, de sorte qu’en application de la loi modifiée du 18 mai 1979 portant réforme des délégations du personnel, une délégation du personnel aurait dû être désignée.

Aux termes de l’article 18 (3) de la loi précitée du 18 mai 1979, « (…) le ministre du Travail peut faire procéder au renouvellement intégral d’une délégation du personnel en dehors de la période visée au paragraphe (2) qui précède, dès que sur une liste les membres effectifs ne sont plus en nombre et qu’il n’y a plus de membres suppléants pour occuper le ou les sièges vacants.

De même, des élections doivent être organisées en dehors de la période visée au paragraphe (2) qui précède, lorsque le personnel de l’établissement atteint l’effectif minimum requis pour la mise en place d’une délégation du personnel. (…) ».

Aux termes de l’article 1er de la loi précitée de 1979, « (1) tout employeur du secteur privé est tenu de faire désigner les délégués du personnel dans les établissements occupant régulièrement au moins 15 travailleurs liés par contrat de louage de services quelles que soient la nature de ses activités et sa forme juridique (…) ».

Selon l’article 44 du règlement grand-ducal du 21 septembre 1979 concernant les opérations électorales pour la désignation des délégués du personnel, « pour la computation de l’effectif des travailleurs occupés régulièrement dans l’établissement, sont pris en considération les travailleurs occupés d’une façon permanente par l’établissement au cours des douze mois précédant celui dans lequel se situe l’affichage de l’avis fixant la date des élections ».

Il importe encore de relever que le rôle du juge administratif, en présence d’un recours en annulation, se limite à la vérification de la légalité et de la régularité formelle de l’acte administratif attaqué. L’appréciation des faits échappe au juge de la légalité, qui n’a qu’à vérifier l’exactitude matérielle des faits pris en considération par la décision. Le juge ne peut que vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute (trib. adm 27 janvier 1997, n° 9724, Pas. adm. 1/2000, Recours en annulation, n° 8, et autres références y citées).

3 Or, il se dégage des pièces produites en cause et des informations qui ont été soumises au tribunal, notamment d’un relevé du centre commun de la sécurité sociale du 4 novembre 1997, sur lequel le ministre s’est fondé pour prendre la décision litigieuse, et d’un relevé du prédit centre commun détaillant la situation au 2 décembre 1997, qu’au moment de la prise de la décision, la société à responsabilité limitée JOHANNS & Cie avait un effectif de 18 personnes dont 15 avaient une ancienneté de service d’un an, c’est-à-dire que les conditions légales requérant la mise en place d’une délégation du personnel étaient vérifiées et le ministre du Travail et de l’Emploi, autorité compétente pour prendre cette décision sur base de l’article 18 (3) susénoncé, a valablement pu ordonner l’organisation des élections pour la désignation d’une délégation du personnel au sein de la société demanderesse.

La demanderesse n’a pas contesté les prédits chiffres, mais elle se fonde essentiellement sur ce que l’effectif de ses travailleurs aurait été réduit par la suite. Or, même en admettant que la réduction de l’effectif soit établie à suffisance de droit - quod non -, force est de constater qu’elle est postérieure à la prise de la décision, de sorte qu’elle n’est pas de nature à affecter la légalité de la décision ministérielle qui s’est nécessairement fondée sur la situation de fait qui existait au moment de la prise de la décision.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours manque de fondement et qu’il doit être rejeté.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

reçoit le recours en la forme;

au fond le dit non fondé et en déboute;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme. Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 19 juillet 2000 par le vice-président, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Schockweiler 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10591
Date de la décision : 19/07/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-07-19;10591 ?

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