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10/07/2000 | LUXEMBOURG | N°10646

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 juillet 2000, 10646


N° 10646 du rôle Inscrit le 27 mars 1998 Audience publique du 10 juillet 2000

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Recours formé par Monsieur … GRAFFE et son épouse, Madame … contre un bulletin émis par le bureau d’imposition Luxembourg 8 en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 10646 et déposée le 27 mars 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avocat à la Cour, inscrit au ta

bleau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … GRAFFE, promoteur immobilier,...

N° 10646 du rôle Inscrit le 27 mars 1998 Audience publique du 10 juillet 2000

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Recours formé par Monsieur … GRAFFE et son épouse, Madame … contre un bulletin émis par le bureau d’imposition Luxembourg 8 en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 10646 et déposée le 27 mars 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … GRAFFE, promoteur immobilier, et de son épouse, Madame …, employée, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation d’un bulletin d’impôt sur le revenu de l’année 1991, émis le 14 décembre 1995;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 juin 1999;

Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement le bulletin entrepris;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Alain STEICHEN, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives.

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Par courrier du 9 janvier 1996 adressé au directeur de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après le « directeur », la fiduciaire …, a introduit au nom et pour compte de Monsieur … GRAFFE, promoteur immobilier, et de Madame …, employée, demeurant ensemble à L-…, une réclamation à l’encontre d’un bulletin d’impôt sur le revenu pour l’année 1991 émis le 14 décembre 1995 à leur encontre, dans la mesure où le bureau d’imposition Luxembourg 8 a considéré qu’il y aurait eu dans leur chef une distribution cachée de dividendes d’un montant de …- francs provenant de la société X., établie et ayant son siège social à L-…, dénommée ci-après « X. », dont Monsieur … GRAFFE est le gérant et dans laquelle il détient 76% des parts sociales, son épouse, Madame … détient 9% des parts sociales et son fils, … GRAFFE détient 15% des parts sociales.

En l’absence d’une décision directoriale à la suite de la susdite réclamation du 9 janvier 1996, les époux GRAFFE-…, par le biais de leur mandataire, ont introduit le 27 mars 1998 une requête tendant à la réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu relatif à l’année 1991.

Le délégué du gouvernement estime en premier lieu que « comme en droit luxembourgeois aucune disposition ne permet de dé… au détriment de la femme mariée à la 1 règle qu’un bulletin d’impôt n’a d’effet qu’à l’égard de celui auquel il a été régulièrement notifié (§91AO) ni au principe de la notification individuelle (cf. Solus-Perrot I n°338), le bulletin portant imposition collective des revenus sous le seul numéro fiscal et d’identité du mari n’a aucun effet à l’égard de l’épouse tant que celle-ci, qui est un contribuable distinct avec son propre numéro fiscal dérivé du numéro d’identité national, n’en a pas elle-même reçu due notification. En attendant, son recours, à le supposer régulier et recevable, ne peut avoir d’autre résultat que de faire constater l’absence de cote légalement fixée à son égard.

Or les voies de recours du droit luxembourgeois supposent une décision à réformer ou à annuler ».

Les demandeurs n’ont pas pris position par voie écrite quant à ce moyen.

Il est vrai que l’impôt sur le revenu frappe les personnes et non pas les ménages, de sorte que chaque époux constitue un contribuable distinct, même si les deux époux sont ensemble redevables d’une même cote d’impôt, qui doit entamer pour son propre compte les voies de recours lui ouvertes à l’encontre d’un bulletin d’impôt dont il est le destinataire.

En l’espèce, les époux GRAFFE-… ont agi devant le tribunal administratif moyennant une requête introduite en leurs noms par leur mandataire. Le recours ainsi introduit est dirigé contre le même bulletin d’impôt litigieux du 14 décembre 1995 fixant à leur encontre une cote d’impôt sur le revenu commune, de sorte que le recours ainsi introduit n’encourt pas d’irrecevabilité de ce chef (cf. trib. adm. 27 octobre 1999, Greiveldinger, n° 11196, Pas. adm.

1/2000, v° Impôts, n° 172).

Encore que le tribunal ne puisse constater en l’espèce sur base du dossier présenté que les bulletins initialement critiqués aient été valablement notifiés aux demandeurs, force est de constater que le défaut de notification d’un bulletin d’imposition ne conditionne pas son existence juridique, mais uniquement son efficacité à travers la force exécutoire qu’elle lui confère. En effet, le paragraphe 91 de la loi générale des impôts modifiée du 21 mai 1931, communément appelée « Abgabenordnung », ci-après dénommée « AO », en disposant dans son alinéa (1) que « Verfügungen (Entscheidungen, Beschlüsse, Anordnungen) der Behörden für einzelne Personen werden dadurch wirksam, dass sie demjenigen zugehen, für den sie ihrem Inhalt nach bestimmt sind (Bekanntgabe) …. », érige le bulletin d’imposition non pas en un acte réceptice, n’ayant d’existence juridique qu’à la condition d’être notifié à son destinataire, mais en un acte ayant une existence juridique propre, sa notification ne conditionnant que ses effets au stade de l’exécution.

Dans la mesure où conformément au paragraphe 238 AO, qui dispose que « befugt, ein Rechtsmittel einzulegen, ist der, gegen den der Bescheid oder die Verfügung ergangen ist », le destinataire d’un bulletin effectivement émis a qualité pour introduire un recours à son encontre, le tribunal administratif, qui, conformément à l’organisation juridictionnelle luxembourgeoise, n’est pas le juge des contestations relatives au recouvrement de l’impôt sur le revenu, n’est en principe pas appelé à se prononcer sur le caractère valable ou non de la notification à la base de la mise à exécution d’un bulletin d’imposition, sous peine d’empiéter sur une compétence du juge judiciaire et d’être à l’origine, le cas échéant, de décisions juridictionnelles contradictoires.

D’un autre côté, le juge judiciaire n’est pas compétent pour toiser les questions relatives au principe d'imposition et à la cote d'impôt, de sorte que le refus du juge administratif de connaître de celles-ci au motif d’une notification non conforme à la loi, nonobstant le fait 2 qu’un bulletin d’imposition a été émis, risquerait de priver, le cas échéant, le contribuable d’un recours effectif contre une décision d’imposition lui faisant grief au sens du paragraphe 232 AO.

Une irrégularité, voire un défaut de notification d’un bulletin d’impôt, outre l’incidence éventuelle sur la recevabilité ratione temporis d’un recours dirigé à son encontre, reste en effet sans incidence sur la question de l’intérêt à agir du destinataire du bulletin. En effet, cet intérêt est conditionné par les dispositions du paragraphe 232 AO et le contribuable est admis comme se sentant lésé (« sich beschwert fühlt ») par l’imposition nonobstant l’existence d’une irrégularité éventuelle au niveau de la notification qui, pour effectivement faire obstacle à l’exécution, doit être constatée en dernière analyse par le seul juge judiciaire. (réf.

MIRARCHI) Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen du délégué du gouvernement tendant à l’irrecevabilité du recours dans le chef de Madame … est dès lors à rejeter, Au voeu des dispositions combinées des articles 8 (3) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et des paragraphes 228 et 235 AO, le tribunal administratif est compétent pour statuer comme juge du fond sur les recours contre des bulletins de l’impôt sur le revenu en cas de silence du directeur suite à une réclamation dûment introduite par le contribuable. Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit par Monsieur GRAFFE et Madame …. Le recours ayant été déposé dans les formes et délai de la loi, il est également recevable.

A l’appui de leur recours, les demandeurs font exposer que Monsieur GRAFFE, dans le cadre de ses fonctions de gérant de la société X. aurait avancé des fonds à une société allemande Y. GmbH, dénommée ci-après « Y. » et que les fonds ainsi avancés par Monsieur GRAFFE s’élèveraient à …- francs. Du fait d’un problème de trésorerie dans le chef de la société X., il aurait consenti cette « avance » à Y. moyennant des sommes prélevées de sa fortune privée. Le 28 décembre 1990, « X. [aurait remboursé] à Monsieur GRAFFE l’avance que celui-ci avait consenti à Y. pour compte de X. ». Ils expliquent encore que le bureau d’imposition, lors de l’émission du bulletin d’impôt de 1991, aurait considéré « qu’un montant de …- francs devait être imposé dans le chef de Monsieur GRAFFE au titre de dividendes occultes, au motif sans doute que Monsieur GRAFFE avait transféré à X. une créance véreuse sur Y.. Les dividendes étant versés au Luxembourg après perception d’une retenue à la source, retenue que X. n’avait en l’occurrence pas effectuée, le bureau d’imposition a considéré que le montant de LUF …- était un montant net de retenue à la source, ce qui équivaut à un montant brut de …- ». Le mandataire des demandeurs renvoie le tribunal « au recours Z. c / l’administration des Contributions directes pour de plus amples développements quant à la nature des relations existant entre X. et Y. ainsi que les raisons de l’intervention de Monsieur GRAFFE en tant que prêteur de Y. ».

Il ressort de l’exposé des faits du prédit recours, ayant fait l’objet d’un jugement du tribunal administratif en date du 29 avril 1999, portant le numéro du rôle n°10645 et ayant été introduit par la société X. à l’encontre d’un bulletin d’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 1991, que cette dernière aurait entretenu d’étroites relations commerciales avec Y.. Les deux sociétés auraient été constituées en 1989 et la société allemande aurait servi de relais pour les clients allemands qui n'auraient pas voulu traiter avec une firme luxembourgeoise, en l’occurrence X.. Y. serait détenue par X., en précisant que « l’actionnaire de Y. », Madame …, serait salariée auprès de X. et qu’elle aurait agi à titre fiduciaire pour cette dernière lors de 3 l’acquisition des parts sociales dans Y.. Il est encore précisé que X. aurait été le fournisseur quasi unique de Y.. Dans cette optique, des avances de fonds auraient été accordées par X.

afin de donner à Y. les moyens financiers pour développer ses activités en Allemagne (il s’agirait en l’occurrence d’un montant de …- francs au titre de l’année 1990). Par ailleurs, d’autres avances de fonds auraient été faites directement par le gérant de X. en son nom personnel pour parer aux problèmes de trésorerie ponctuels que Y. aurait dû affronter (il s’agirait en l’occurrence d’un montant de …- francs au titre des années 1989 et 1990).

Il ressort par ailleurs du prédit recours qu’il se serait avéré par la suite que la stratégie commerciale qui consistait à se servir de Y. comme « tremplin pour l’Allemagne » s’était soldée par un échec en raison notamment « des malversations manifestes et permanentes de Monsieur …, associé à la Y. ». Monsieur GRAFFE aurait même engagé une action judiciaire contre Monsieur … auprès du « Landgericht Münster ».

La société X. avait ensuite fait exposer que la créance qu’elle détenait sur Y. serait devenue irrécouvrable en raison de la « mise en faillite de Y. ». La créance aurait alors été comptabilisée dans les états financiers de X. comme charge de l’exercice 1991.

Dans le présent recours, Monsieur GRAFFE et Madame … font contester l’analyse faite par le bureau d’imposition Luxembourg 8 qui a vu dans « l’amortissement » de cette créance une distribution cachée de bénéfices dans leur chef. En effet, le bureau d’imposition aurait sans doute considéré que le montant de …- francs « devait être imposé dans le chef de Monsieur GRAFFE au titre de dividendes occultes, au motif sans doute (le bulletin n’est pas clair sur ce point) que Monsieur GRAFFE avait transféré à X. une créance véreuse sur Y. ».

A ce titre, ils font valoir que le prêt de …- francs accordé par X. à Y. se subdiviserait en deux parties. Il serait composé, d’une part, d’une avance de …- francs qu’ils auraient accordée personnellement et, d’autre part, d’une avance de …- francs accordée directement par X. à Y.. Ils concluent que la distribution cachée de bénéfices pourrait au maximum s’élever au montant qu’ils auraient avancé eux-mêmes et qui leur aurait été remboursé par X., soit …-

francs. Le bureau d’imposition aurait donc « fait une erreur manifeste sur le montant de …-

francs ».

Concernant le montant de …- francs, ils font valoir que s’il y avait eu une distribution cachée de dividendes, elle aurait nécessairement eu lieu au moment où X. leur avait remboursé les fonds qu’ils avaient avancés à Y.. Or, ce remboursement aurait été effectué le 28 décembre 1990 alors que le bureau d’imposition qualifierait ce remboursement en tant que distribution cachée de dividendes au titre de l’exercice 1991. Ils estiment que conformément à l’article 100 de la Constitution et à l’article 1er de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR », qui énoncent le principe de l’annualité de l’impôt, chaque exercice fiscal doit être apprécié individuellement. Le bureau d’imposition n’aurait dès lors pas le droit de « rattraper » à l’occasion de l’établissement du bulletin d’impôt relatif à l’année 1991 une erreur qu’il aurait commise lors de l’établissement du bulletin d’impôt relatif à l’année 1990.

A titre subsidiaire, ils contestent que le remboursement de la dette de Y. par X. à leur profit s’expliquerait uniquement par leur statut d’associé. Ils soutiennent que Monsieur GRAFFE aurait avancé les prédits fonds en sa qualité de gérant de X. et il aurait dès lors agi en tant que mandataire légal de X. et non pas à titre privé. Le financement de Y. par X., cette dernière étant la société mère de Y., ne pourrait pas non plus prêter à critique au vu des liens 4 commerciaux étroits qui auraient existé entre les deux sociétés, étant entendu que « l’une ne pourrait fonctionner sans l’autre ». Ce serait dans le cadre de cette interdépendance qu’il aurait agi à titre de gérant de X. et qu’il aurait « avancé les sommes servant tant aux besoins de l’une qu’aux intérêts de l’autre ». Quant au fait qu’il aurait avancé personnellement les fonds à Y. lorsque cette dernière avait des problèmes de trésorerie, ceci s’expliquerait par le mode de gestion de ces deux sociétés, étant donné que faute de temps et en raison d’un « certain relâchement dans la gestion administrative », il aurait souvent dû rendre « visite » à Y. et il aurait alors accordé des avances par le débit de son compte bancaire plutôt que de passer par X..

A titre plus subsidiaire, ils font exposer que Monsieur GRAFFE aurait agi dans le cadre d’une gestion d’affaires pour X.. Le code civil imposerait dès lors l’obligation au géré d’indemniser le gérant pour tout préjudice personnel qu’il aurait subi et notamment de lui rembourser toutes les dépenses utiles et nécessaires qu’il aurait engagées en tant que gérant, ce qui serait le cas en l’espèce. Ils en concluent que le remboursement par X. des avances accordées par Monsieur GRAFFE à Y. ne saurait être qualifié de distribution cachée de dividendes.

Ils soutiennent finalement qu’il incomberait au bureau d’imposition d’assumer la charge de la preuve en matière de revenus imposables et comme celui-ci n’aurait pas apporté la preuve des faits qui auraient déclenché ou augmenté la charge fiscale, il y aurait lieu d’éliminer de l’assiette imposable de l’année 1991 la somme de …- francs de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Le délégué du gouvernement limite ses observations à trois points en relevant que « a.) une distribution cachée de bénéfices n’étant imposable auprès du bénéficiaire qu’au titre de l’année de la mise à disposition, le recourant ne peut être imposé en 1991 sur les 4.5 millions de francs qu’il avait reçus dès le 28 décembre 1990 au vu de son extrait de banque. b.) Bien que X. ait amorti en 1991 comme créance irrécouvrable une prétendue créance en restitution de TVA allemande, cette opération peu orthodoxe n’entraîne pas en elle-même l’allocation au recourant d’un produit indirect de sa participation. c.) Si les prêts que X. avait faits dans le passé, apparemment sans aucune garantie, à des collaborateurs de la société Y. ainsi qu’à cette dernière s’expliquent, comme l’admet le tribunal dans son jugement du 29 avril 1999 n°10645 par des liens personnels que le recourant avait avec les bénéficiaires, ils ont constitué, au moment de l’octroi, un avantage indirect pour le recourant. Qu’ils se soient révélés irrécouvrables en 1991, en revanche, entraîne moins l’allocation d’un produit indirect à l’associé qu’il n’engage la responsabilité civile du gérant ».

Le recours est basé sur ce que le bureau d’imposition Luxembourg 8 aurait considéré à tort qu’il y aurait eu une distribution cachée de dividendes dans le chef des époux GRAFFE-… à hauteur du montant de …- francs.

Selon les explications fournies par les demandeurs, la somme de …- francs se subdiviserait en deux montants, à savoir, d’une part, en un prêt de …- francs accordé par Monsieur GRAFFE personnellement respectivement à Y. et à Messieurs …, actionnaires de Y.

et, d’autre part, en un prêt de …- francs accordé directement par X. à Y. ou à Monsieur … Il convient donc en premier lieu d’examiner si le remboursement du « prêt » en date du 28 décembre 1990 par X. à Monsieur GRAFFE d’un montant de …- francs est constitutif d’une distribution cachée de bénéfices au titre de l’année 1991.

5 A ce titre, il ressort des pièces à disposition du tribunal qu’au courant de l’année 1990, X. s’est fait céder par Monsieur GRAFFE une créance du montant de …- francs contre Y. et qu’elle a en conséquence remboursé ce montant à Monsieur GRAFFE en date du 28 décembre 1990. Au courant de l’année 1991, il se serait avéré que la créance que X. détenait sur Y.

serait irrécouvrable, de sorte qu’elle a procédé à son amortissement intégral au titre de l’exercice 1991.

Aux termes de l’article 108 (1) 1. LGI, « les recettes sont à attribuer à l’année d’imposition au cours de laquelle elles sont mises à disposition du contribuable. Toutefois, lorsque des recettes à caractère périodique sont mises à la disposition du contribuable peu de temps avant le début ou peu de temps après la fin de l’année à laquelle elles se rapportent du point de vue économique, elles sont à attribuer à cette année » .

En l’espèce, il résulte d’un extrait de banque que le montant de …- francs a été mis à disposition de Monsieur GRAFFE en date du 28 décembre 1990. Cette somme est donc en principe à attribuer à l’année d’imposition 1990. Ce principe reçoit exception lorsqu’il s’agit d’une recette à caractère périodique, mise à disposition du contribuable peu de temps avant le début ou peu de temps après la fin de l’année à laquelle elle se rapporte du point de vue économique. Aucune des parties n’a étayé cette hypothèse, qui, par ailleurs ne trouve pas appui dans le dossier qui est à disposition du tribunal. C’est dès lors à juste titre que le délégué du gouvernement a soutenu que les demandeurs ne peuvent pas être imposés au titre de l’année 1991 sur le montant de …- francs reçu le 28 décembre 1990.

Concernant le montant de …- francs, les demandeurs soutiennent que ce montant aurait été accordé dès l’origine par X. à Y., de sorte qu’il ne saurait être question d’un remboursement de ce montant à leur profit et partant il ne pourrait s’agir d’une distribution cachée de bénéfices dans leur chef. Les demandeurs ne donnant aucune autre explication dans le présent recours, le tribunal, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, doit se référer au contenu du recours précité Z. c/ l’administration des Contributions directes portant le n° du rôle 10645.

Il ressort des pièces versées lors de l’instruction du prédit recours, notamment des écritures comptables du compte intitulé « débiteurs divers », que seulement une écriture avait trait à une créance que X. détenait à l’encontre de Y., et ceci à hauteur de …- francs. Pour le surplus, il s’agissait de prêts accordés par X. à Messieurs …, associé de Y., …, collaborateur de Y. et Monsieur …, collaborateur salarié de Y., ainsi que d’une créance du paiement d’une dette de TVA allemande.

Comme la charge de la preuve des faits déclenchant ou augmentant la charge fiscale appartient au bureau d’imposition et comme le délégué du gouvernement n’a pas mis en doute le déroulement des opérations telles que décrites ci-dessus, en ce qu’il exclut que les époux GRAFFE-… auraient bénéficié directement ou indirectement du produit de ces différents prêts ou créances, il y a lieu de retenir que le bureau d’imposition n’a pas établi que le montant de …- francs versé directement par X. à des personnes privées et à Y., serait constitutif d’une distribution cachée de bénéfices au titre de l’article 164 (3) LIR dans le chef des époux GRAFFE-….

Il suit des développements qui précèdent que le recours est fondé et qu’il y a lieu d’éliminer de l’assiette imposable de l’impôt sur le revenu de l’année 1991 le montant de ….-

6 francs ajouté par le bureau d’imposition Luxembourg 8 dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers.

Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond dit le recours justifié;

partant dit que l’imposition des demandeurs est à reconsidérer en éliminant des bases d’imposition le montant de …- francs ajouté par le bureau d’imposition Luxembourg 8 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

renvoie le dossier au directeur de l’administration des Contributions directes pour prosécution de cause ;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, Mme Lamesch, juge M. Schroeder, juge et lu à l’audience publique du 10 juillet 2000, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 7


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10646
Date de la décision : 10/07/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-07-10;10646 ?

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