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03/07/2000 | LUXEMBOURG | N°11311

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 juillet 2000, 11311


N° 11311 du rôle Inscrit le 2 juin 1999 Audience publique du 3 juillet 2000

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Recours formé par Mesdames … SINNER-MULLER, et … contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de l’administration communale de Weiler-la-Tour en matière d’aménagement des agglomérations

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11311C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative en date du 2 j

uin 1999 par Maître Claude COLLARINI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à ...

N° 11311 du rôle Inscrit le 2 juin 1999 Audience publique du 3 juillet 2000

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Recours formé par Mesdames … SINNER-MULLER, et … contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de l’administration communale de Weiler-la-Tour en matière d’aménagement des agglomérations

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11311C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative en date du 2 juin 1999 par Maître Claude COLLARINI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Madame … SINNER-MULLER, demeurant à L-…, et …, ci-après désignées par “ consorts MULLER ”, tendant à l’annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif de la décision du ministre de l’Environnement du 30 octobre 1998 prise dans le cadre de la procédure d’approbation du nouveau plan d’aménagement général de la commune de Weiler-la-Tour en ce qu’elle arrête plus particulièrement le maintien en zone verte de leur terrain sis à … au lieu-dit “ … ”, inscrit au cadastre de la commune de Weiler-la-Tour, section …, sous le numéro cadastral …, d’une contenance de … ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative en date du 2 août 1999 ;

Vu l’article 71 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives opérant la transmission au tribunal administratif sans autre forme de procédure du recours inscrit sous le numéro 11311C du rôle, y inscrit dorénavant sous le numéro 11311 du rôle ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 octobre 1999 par Maître Claude COLLARINI, au nom des consorts MULLER ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc KERGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 janvier 2000 ;

Vu la rupture du délibéré du 12 janvier 2000 ;

Vu la requête de mise en intervention de l’administration communale de Weiler-la-Tour déposée au nom des consorts MULLER au greffe du tribunal administratif par Maître Claude COLLARINI en date du 26 janvier 2000 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Frank SCHAAL, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 27 janvier 2000 portant signification de cette requête de mise en intervention, ensemble le recours en annulation originaire, à l’administration communale de Weiler-la-Tour ;

Vu le mémoire en réponse de l’administration communale de Weiler-la-Tour déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 avril 2000 par Maître Guy LUDOVISSY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Michelle THILL, demeurant à Luxembourg, du 7 avril 2000 portant signification de ce mémoire en réponse aux consorts MULLER ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle attaquée ;

Ouï Maîtres Marc KERGER et Jean SCHUTZ, ainsi que Messieurs les délégués du Gouvernement Guy SCHLEDER et Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 22 mai et 19 juin 2000.

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Considérant que Madame … SINNER-MULLER, demeurant à L-…, et …, ci-après désignées par “ consorts MULLER ”, sont propriétaires par indivis d’un terrain sis à …, inscrit au cadastre de la commune de Weiler-la-Tour, section …, au lieu-dit “ … ” sous le numéro cadastral …, d’une contenance de … ;

Considérant que dans sa séance du 27 mai 1993, le conseil communal de Weiler-la-

Tour a adopté à l’unanimité à titre provisoire le nouveau plan d’aménagement général, désigné ci-après par “ PAG ”, issu de l’avant-projet de révision, parties écrite et graphique, datant du 18 mars 1982 ;

Que suivant le PAG provisoirement adopté le terrain précité des consorts MULLER au lieu-dit “ … ” est resté classé en zone agricole suivant extrait de la partie graphique afférente déposé au tribunal par le mandataire de l’administration communale de Weiler-la-Tour en date du 13 juin 2000 ;

Que suite aux objections des consorts MULLER tendant à l’inclusion de leur dit terrain dans le périmètre d’agglomération de la localité de …, le collège échevinal, dans sa séance du 6 août 1993, a décidé à l’unanimité de formuler les prises de position et proposition suivantes au conseil communal concernant le terrain des consorts MULLER : “ condition que le P.A.P. à présenter confirme la possibilité de raccordement au réseau de canalisation-déclivité naturelle ” ;

Que lors de sa séance du 25 octobre 1994, le conseil communal de Weiler-la-Tour décida, d’une part, “ d’approuver les prises de position et proposition formulées par le collège des bourgmestre et échevins dans le corps de sa délibération du 6 août 1993 ” et d’autre part “ d’approuver définitivement le projet de révision du projet d’aménagement général présenté (parties graphique et écrite) ” ;

2 Que suivant le PAG définitivement adopté, la parcelle des consorts MULLER “… ” a été incluse dans une zone d’habitation soumise à un plan d’aménagement particulier, ci-après désigné par “ PAP ” et est incluse dans le périmètre d’agglomération de la localité de … ;

Considérant que par courrier du 7 août 1997, le ministre de l’Environnement s’est adressé au bourgmestre de la commune de Weiler-la-Tour en ces termes :

“ Le plan d’aménagement communal que vous m’avez soumis pour approbation devrait être revu par l’autorité communale en tenant compte du reclassement en zone verte des parties du territoire communal suivantes : … à …. partie de la zone d’habitation à faible densité sise au lieu dit “ … ”…. Pour votre gouverne, ces parties ont été délimitées sur les extraits de plan joints en annexe. Ces propositions tiennent compte des avis émis par l’administration des eaux et forêts et du Conseil Supérieur pour la Protection de la Nature ” ;

Qu’en date du 6 septembre 1997, les consorts MULLER se sont adressés au conseil communal de Weiler-la-Tour dans les termes suivants repris tels quels:

“ Messieurs, Nous vous prions de prendre en considération les arguments suivants :

Au côté droite du terrain ci-haut est déjà bâtie des maisons traditionnelles. Vis-à-vis de la rue sont également construit des maisons, soit en partie en bois soit de manière traditionnelle.

Nos terrains seront aménagés par une firme de construction sous considération de tous le prescriptions hygiéniques, urbanistiques et techniques. Les espaces vertes restent pour la plupart existé par de terre arable naturelle. Le canal sera construit par déclivité naturelle.

Les plans seront réalisés par un architecte diplômé. On réalisera seulement des maisons traditionnelles qui n’entraînent pas l’infrastructure du village idyllique.

Conclusion : Vu tous ces arguments, nous Vous prions de bien vouloir reconsidérer notre demande. La présente vaut comme réintroduction de la demande qui a été approuvée le 25 octobre 1994 ” ;

Que par délibération du 11 septembre 1997, le conseil communal de Weiler-la-Tour décida à l’unanimité des membres présents d’accepter à ce stade le reclassement préconisé par le ministre de l’Environnement à l’exception des points plus amplement définis et commentés par la suite, dont celui ayant trait au terrain des consorts MULLER sis au lieu-dit “ … ” à … toisé comme suit : “ les membres du conseil communal font leurs les observations et justifications pertinentes formulées dans la lettre jointe du 6 septembre 1997 des consorts intéressés ”, tout en priant le ministre de l’Environnement “ de bien vouloir reconsidérer gracieusement ses décisions concernées du 7 août 1997 en présence des arguments développés ci-dessus et de statuer définitivement en conséquence, décision globale qui saurait pouvoir trouver l’acceptation (unanime) du conseil communal de Weiler-la-Tour ” ;

Considérant que par arrêté du 30 octobre 1998, le ministre de l’Environnement a approuvé le projet d’aménagement général de Weiler-la-Tour “ tel qu’il a été adopté provisoirement respectivement définitivement par le conseil communal en date du 10 mars 3 1995 [sic] et du 31 mars 1995 [sic] ”, sous réserve que les aires ci-après énumérées restent classées en zone verte au sens de l’article 2 de la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles: “ … à … : - partie de la zone d’habitation à faible densité sise au lieu-dit “ … ” …. ” au motif notamment que “ dans l’optique d’un développement durable qui vise à concilier le développement urbanistique et la protection de l’environnement naturel, l’autorité communale devra favoriser et encourager des conceptions urbanistiques moins consommatrices d’espaces naturels, notamment au niveau des zones soumises à plan d’aménagement particulier ” et que “ le développement urbanistique potentiel des agglomérations de Weiler-la-Tour, de … et de … devrait être flanqué d’importantes mesures d’intégration et il y aurait dès lors lieu de prévoir des zones vertes de transition comportant des éléments de verdure aux périphéries des périmètres d’agglomération ” ;

Que cette décision ministérielle a été portée à la connaissance du public en date du 15 mars 1999 par voie d’affichage, tout comme les demandeurs en ont été informés par courrier recommandé du même jour ;

Considérant que par requête déposée au greffe de la Cour administrative en date du 2 juin 1999, les consorts MULLER ont dirigé un recours en annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif contre la décision du ministre de l’Environnement précitée du 30 octobre 1998 dans la mesure du maintien de leur parcelle sise au lieu-dit “ … ” à … dans la zone verte au sens de l’article 2 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée ;

Considérant que la commune se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours ;

Considérant que le délégué du Gouvernement estime que la décision déférée du ministre de l’Environnement s’analyse comme étant un acte de tutelle administrative rétroagissant à la date de la décision approuvée, laquelle, une fois approuvée serait censée être valable dès son origine ;

Que dans la mesure où les décisions du conseil communal de Weiler-la-Tour portant adoption respectivement provisoire et définitive du PAG en question ont toutes les deux été prises avant la date d’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 précitée, le 1er janvier 1997, le recours se cristallisant ainsi à une date où aucun recours contre un acte administratif à caractère réglementaire n’était prévu par le législateur en la matière, devrait être déclaré irrecevable, dans la mesure où l’existence d’une voie de recours constituerait une règle de fond du droit et serait régie par la loi sous l’empire de laquelle la décision attaquée a été rendue ;

Considérant que ni le délégué du Gouvernement ni le représentant de la commune ne prennent autrement position relativement à la compétence du tribunal saisi ;

Considérant que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par disposition générale et permanente l’aménagement des territoires qu’ils concernent et le régime des constructions à y élever, ont un caractère réglementaire (cf. Cour adm. 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Gloesener, Pas. adm. 1/2000, V° Acte réglementaire, n° 6, p.

25 et autres décisions y citées) ;

4 Que plus particulièrement la décision du ministre de l’Environnement, statuant dans le cadre de ses attributions lui conférées par l’article 2 alinéa final de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée participe au caractère réglementaire de l’acte à approuver (cf. ibidem ; trib. adm.

2 février 2000, n°s 10929 et 10939 du rôle, Kremer) ;

Considérant que d’après l’article 7 (1) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, entrée en vigueur le 1er janvier 1997, telle qu’applicable au moment de l’introduction du recours “ la Cour administrative statue encore sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi et des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent ” ;

Considérant que la décision du ministre de l’Environnement qui maintient en zone verte un terrain classé dans une zone d’habitation suivant décision communale d’adoption d’un plan d’aménagement général comporte par essence un effet direct sur la situation patrimoniale des propriétaires concernés (cf. trib. adm. 19 juin 2000, n° 10009 du rôle, Barthelemy) ;

Considérant que la Cour administrative était dès lors compétente, au jour d’introduction du recours, pour en connaître, cette compétence ayant été dévolue au tribunal administratif en vertu de l’article 71 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Que n’ayant pas encore été instruite à la date de l’entrée en vigueur de ladite loi du 21 juin 1999, l’affaire sous analyse a été transmise en vertu de son article 71 au tribunal administratif sans autre forme de procédure pour y revêtir le numéro 11311 du rôle ;

Considérant que suivant son article 1er la décision déférée du ministre de l’Environnement déclare approuver le projet d’aménagement général de Weiler-la-Tour tel qu’il a été adopté provisoirement respectivement définitivement par le conseil communal en date du 10 mars 1995 et du 31 mars 1995 sous réserve des aires par elle énumérées audit article, dont le terrain au lieu-dit “ … ” à …, appartenant aux consorts MULLER ;

Considérant qu’il est patent que ce faisant le ministre a commis une erreur matérielle concernant les dates des délibérations du conseil communal de Weiler-la-Tour par lui visées ;

Qu’il est constant en cause à partir des pièces versées au tribunal suivant sa demande que l’adoption provisoire du PAG en question a eu lieu en date du 27 mai 1993, tandis que son adoption définitive résulte de la délibération du conseil communal de Weiler-la-Tour du 25 octobre 1994 ;

Que force est de constater que ce sont ces deux décisions communales qui sont visées par la décision ministérielle déférée ;

Considérant que le ministre de l’Environnement a statué sur base de l’article 2 alinéa final de la loi précitée du 11 août 1982, libellé comme suit : “ Toute modification de la délimitation d’une zone verte découlant du vote provisoire, selon l’article 9 de la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, est soumise à l’approbation du ministre. Cette approbation est également requise pour toute création d’une zone verte en vertu de l’adoption d’un premier projet d’aménagement. Le 5 projet d’aménagement définitivement adopté est, pour autant qu’il a été modifié, également soumis à l’approbation du ministre ” ;

Considérant que le présent recours se limite à attaquer la décision ministérielle en question dans la mesure où la parcelle précitée des consorts MULLER est concernée ;

Considérant qu’il est constant que suivant le PAG adopté provisoirement le 27 mai 1993, cette parcelle s’est trouvée en zone verte au sens de l’article 2 de la loi modifiée du 11 août 1982 et qu’elle a été sortie de la zone verte pour être incluse dans une zone d’habitation soumise à PAP suite aux objections des demandeurs par la délibération communale précitée du 25 octobre 1994 ;

Que relativement à la parcelle en question, le ministre de l’Environnement a dès lors été appelé à statuer suivant la phrase in fine de l’article 2 alinéa final de la loi précitée du 11 août 1982 par rapport au plan d’aménagement définitivement adopté, pour autant qu’il a été modifié concernant le changement de la délimitation de la zone verte au niveau de ladite propriété des consorts MULLER ;

Considérant qu’il appert que dans la mesure où le ministre de l’Environnement, à travers sa décision déférée, a arrêté le maintien en zone verte de la parcelle des consorts MULLER au lieu-dit “ … ” à …, il a refusé d’approuver la délibération du conseil communal de Weiler-la-Tour du 25 octobre 1994 pour le moins dans la mesure limitée où elle se rapporte à cette parcelle portant le numéro cadastral 545 ;

Considérant que la même analyse s’impose pour la décision ministérielle déférée globalement analysée, étant entendu que celle-ci statue à la fois par rapport à la délibération du conseil communal de Weiler-la-Tour portant adoption provisoire du PAG et par rapport à celle en portant adoption définitive ;

Qu’à chaque niveau – délimitation communale provisoire et définitive de la zone verte -

la décision d’approbation ainsi désignée comporte des exceptions consistant dans le maintien de certaines parcelles en zone verte, contrairement aux décisions communales soumises à l’approbation ministérielle ;

Que dès lors à chaque niveau l’approbation de principe prononcée est assortie d’exceptions de maintien de terrains en zone verte ;

Considérant que d’après l’article 107 (6) de la Constitution “ la loi règle la surveillance de la gestion communale. Elle peut soumettre certains actes des organes communaux à l’approbation de l’autorité de surveillance et même en prévoir l’annulation ou la suspension en cas d’illégalité ou d’incompatibilité avec l’intérêt général, sans préjudice des attributions des tribunaux judiciaires ou administratifs ” ;

Considérant que d’après l’article 107 (1) les communes forment des collectivités autonomes ;

Considérant que l’autonomie communale constitue la règle, la tutelle étant l’exception (cf. Buttgenbach, Manuel de droit administratif, édition 1959, n° 147, p. 142) ;

6 Considérant qu’il s’ensuit que l’approbation par l’autorité ministérielle d’un acte soumis à son contrôle doit en principe être pure et simple, cette autorité ne pouvant en règle générale rien ajouter, ni rien retrancher à la décision soumise à son contrôle ;

Qu’à titre d’exception, l’approbation partielle d’un acte soumis au contrôle de l’autorité investie du pouvoir d’approbation est ainsi permise à la condition que les dispositions approuvées et celles non approuvées ne soient pas liées entre elles au point de former un ensemble indissociable (cf. Cour adm. 25 novembre 1997, n° 9477C du rôle, Commune de Berdorf, Pas. adm. 01/2000, V° Tutelle administrative, n° 11, p. 440 et autres décisions y citées) ;

Considérant que le maintien en zone verte des différentes parcelles énumérées par la décision ministérielle déférée procède, d’après ses considérants et pétitions de principe inscrits à ses articles 2 et 3 d’une démarche commune, de sorte à ne dégager aucun élément dissociable, du moins concernant les terrains aux périphéries des périmètres d’agglomérations, dont celui des consorts MULLER ;

Considérant que si la décision du ministre de l’Environnement déférée s’entendait comme décision d’approbation telle qu’y énoncée, l’approbation donnée aurait dû être pure et simple ;

Qu’il est patent que tel n’est pas le cas en l’espèce, au vu des parcelles maintenues en zone verte, contrairement à ce qui a été arrêté par les délibérations communales soumises au contrôle tutélaire ministériel ;

Que force est partant de retenir que la décision globalement considérée s’analyse en un refus d’approbation, tout comme cette analyse est encore vérifiée concernant le terrain des consorts MULLER par rapport auquel seul la décision ministérielle est déférée ;

Considérant que ratione temporis il est contant que les deux délibérations communales à la base de l’intervention du ministre de l’Environnement se situent avant l’entrée en vigueur le 1er janvier 1997 de la loi du 7 novembre 1996 précitée, tandis que la décision déférée a été prise en 1998 sous l’empire de ladite loi et de son article 7 ;

Considérant que les dispositions de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 ont été décrites comme constituant un système original, inspiré, il est vrai, par les législation et pratique belges (François Biltgen et Luc Frieden, La grande réforme du Contentieux administratif et fiscal in Articles et Conférences – Banque Internationale à Luxembourg 2/97 p. 40 et documents parlementaires 39402 et 3940A, y cités) ;

Considérant que la majorité de la doctrine et de la jurisprudence judiciaire belges ainsi que la jurisprudence du Conseil d’Etat belge retiennent que l’approbation et l’acte approuvé constituent deux actes juridiques distincts (cf. Buttgenbach, op. cit., n° 158, p. 153 et références y citées) ;

Considérant que c’est en vertu de ce principe que l’acte d’approbation s’analyse en une décision administrative, susceptible en tant que telle d’un recours en annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 précitée ;

7 Considérant que classiquement la décision à approuver est analysée comme étant prise sous la condition suspensive de l’intervention de la décision d’approbation requise par la loi ;

Considérant que contrairement à la décision d’approbation laissant subsister celle approuvée, le refus d’approbation entraîne que la condition suspensive dont l’acte était affecté ne se réalise pas, de sorte que ce dernier doit être considéré comme non avenu (cf.

Buttgenbach, op. cit. n° 159, p. 155) ;

Considérant qu’abstraction faite de la portée d’une approbation tutélaire sur la décision approuvée, un effet rétroactif ne se conçoit pas en matière de refus d’approbation, étant donné qu’à travers pareil refus prononcé, la décision à approuver à sa base est appelée à disparaître, de sorte que seul l’acte de tutelle subsiste et peut rester sujet à critique ;

Considérant qu’il découle des développements qui précèdent que l’admissibilité d’un recours en annulation contre l’acte de tutelle seul subsistant doit s’apprécier au moment où l’autorité de tutelle a statué, soit en l’espèce en l’année 1998, partant sous l’empire de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 entraînant que l’exception de tardiveté soulevée est à écarter ;

Considérant qu’il appert que les consorts MULLER justifient d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain suffisant au regard des critères posés par l’article 7 (2) de la loi du 7 novembre 1996 précitée dans la mesure où la décision ministérielle déférée affecte leur propriété sise à … “ … ”;

Considérant que partant le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, étant entendu qu’il a été valablement signifié à l’administration communale de Weiler-la-Tour en tant que partie tierce intéressée ;

Considérant qu’au fond les consorts MULLER estiment qu’aucun des critères posés par les articles 2 in fine et 36 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée ne serait rempli dans le chef du ministre de l’Environnement pour justifier le refus d’approbation prononcé concernant leur terrain, alors qu’au contraire le projet d’aménagement particulier par eux préparé arrondirait le périmètre d’agglomération à cet endroit et serait dès lors favorable aux intérêts de la collectivité ;

Considérant que la commune se borne à constater que le recours serait exclusivement dirigé contre l’arrêté ministériel déféré et n’aurait dès lors aucun impact sur les délibérations communales soumises au contrôle tutélaire ministériel, de sorte qu’elle se rapporte à prudence de justice quant au bien-fondé du recours ;

Que d’après le délégué du Gouvernement la décision ministérielle déférée s’appuierait sur des motifs tenant à l’amélioration de la beauté et du caractère du village de … et de la sorte du paysage en général, de manière à rencontrer les exigences légales posées par l’article 36 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée ;

Considérant qu’au fond le tribunal est amené à réitérer l’analyse ci-avant faite concernant plus particulièrement la nature de l’acte tutélaire posé par le ministre de l’Environnement en l’espèce sur la toile de fond dressée par la Constitution en son article 107 en ce que l’autonomie communale constitue la règle, les attributions d’approbation tutélaire étant l’exception ;

8 Considérant qu’il découle directement des dispositions de l’article 2 alinéa final de la loi modifiée du 11 août 1982 que toute modification de la délimitation d’une zone verte découlant du vote provisoire, de même que toute création d’une zone verte en vertu de l’adoption d’un premier projet d’aménagement sont à soumettre à l’approbation tutélaire du ministre de l’Environnement avant qu’il ne soit procédé au vote définitif par délibération afférente du conseil communal compétent ;

Considérant que dans la mesure où la décision ministérielle déférée statue par rapport à un changement de délimitation de la zone verte intervenu uniquement au niveau du vote définitif, conformément à la phrase finale de l’article 2 dernier alinéa en question, le ministre n’a eu compétence que pour statuer par rapport à la délibération du 25 octobre 1994 approuvant définitivement le PAG de la commune de Weiler-la-Tour en ce qui concerne le terrain des consorts MULLER uniquement visé à travers le recours sous analyse ;

Considérant qu’il est intéressant de souligner par ailleurs que le ministre de l’Intérieur ayant statué par rapport à la même délibération d’adoption définitive du PAG dans le cadre de ses compétences tutélaires propres issues plus particulièrement des dispositions de l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, a, sur recours gracieux ainsi désigné de l’administration communale de Weiler-la-Tour, fini par approuver l’inclusion du terrain des consorts MULLER en zone d’habitation soumise à PAP, après avoir, dans un premier stade, exigé son maintien en zone verte;

Considérant qu’il a été dégagé ci-avant que la décision ministérielle déférée ne s’analyse point en une approbation pure et simple, tout comme elle ne constitue pas un refus d’approuver pur et simple, de sorte à ne pas correspondre aux exigences fondamentales posées par la loi en la matière, notamment en vertu de l’article 107 de la Constitution ;

Considérant que si le ministre de l’Environnement avait utilement voulu voir maintenir en zone verte les parcelles par lui désignées, il lui aurait incombé de façon successive, statuant d’abord par rapport à l’adoption provisoire, puis par rapport à l’adoption définitive du PAG, d’en refuser l’approbation, tant que et dans la mesure où l’autorité communale concernée n’acceptait pas de rencontrer utilement sa prise de position concernant la délimitation de la zone verte conformément à l’article 2 alinéa final de la loi modifiée du 11 août 1982 prérelaté ;

Considérant que par voie de conséquence la décision ministérielle qui n’a ni refusé d’approuver, ni approuvé purement et simplement la délibération communale d’adoption définitive du PAG, mais l’a approuvé de façon partielle en l’assortissant d’exceptions non dissociables tendant au maintien de certaines parcelles en zone verte, viole le principe constitutionnel de l’autonomie communale et encourt partant l’annulation ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

9 partant annule la décision ministérielle déférée et renvoie l’affaire devant le ministre de l’Environnement ;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 juillet 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 10


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11311
Date de la décision : 03/07/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-07-03;11311 ?

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