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29/06/2000 | LUXEMBOURG | N°11876C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 juin 2000, 11876C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 11876C Inscrit le 13 mars 2000

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Audience publique du 29 juin 2000 Recours formé par Dzevat HRUSTIC et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (appel contre un jugement du 10 février 2000, n° 11776 du rôle) Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 13 mars 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de Dzevat Hrustic et de s

on épouse Nevresa Mehmedovic, agissant en leur nom personnel et au nom de le...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 11876C Inscrit le 13 mars 2000

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Audience publique du 29 juin 2000 Recours formé par Dzevat HRUSTIC et consorts contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (appel contre un jugement du 10 février 2000, n° 11776 du rôle) Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 13 mars 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de Dzevat Hrustic et de son épouse Nevresa Mehmedovic, agissant en leur nom personnel et au nom de leurs deux enfants mineurs Irma et Dzeveda, demeurant à L-1718 Luxembourg, 18, rue Haute, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 10 février 2000;

Vu le mémoire en réponse de Monsieur le délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 16 mars 2000;

Vu le mémoire en réplique déposé par Maître Ardavan Fatholahzadeh en date du 17 avril 2000;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 10 février 2000;

Ouï le conseiller-rapporteur en son rapport, Maître Ardavan Fatholahzadeh et la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbruck en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 11776 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2000 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, Dzevat Hrustic et son épouse Nevresa Mehmedovic, tous les deux de nationalité yougoslave, agissant tant en leur nom personnel qu’en nom et pour compte de leurs deux enfants mineurs Irma et Dzeveda, ont demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 1er septembre 1999, notifiée le 6 septembre 1999, par laquelle leurs demandes en obtention du statut de réfugié politique ont été déclarées page 1 manifestement infondées, ainsi que d’une décision confirmative du 10 décembre 1999, rendue sur recours gracieux en date du 4 octobre 1999.

Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement en date du 10 février 2000 s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en ce qu’il a tendu à la réformation des décisions entreprises des 1er septembre et 10 décembre 1999 du ministre de la Justice.

Il a reçu le recours en ce qu’il a tendu à l’annulation des décisions précitées, au fond l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh a déposé une requête d’appel contre ce jugement au greffe de la Cour administrative en date du 13 mars 2000 au nom de Dzevat « Huristic », en première instance Hrustic.

Les appelants renvoient la Cour à l'exposé des faits tel qu'il résulte du recours introductif d'instance déposé auprès du greffe du tribunal administratif en date du 13 janvier 2000.

En droit, les appelants rappellent le sens communément admis de la notion de crainte tel qu'il se dégage de la doctrine concernant le statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du protocole relatif au statut des réfugiés, approuvé par une loi du 20 mai 1953, et du protocole relatif au statut des réfugiés, rédigé à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971.

Qu'ainsi serait-t-il de principe que la crainte est raisonnable lorsqu'elle est basée sur une évaluation objective de la situation dans le pays d'origine du demandeur d'asile. (Véronique Le Blanc, Délégation régionale du H.C.R auprès des États du Benelux et des Institutions européennes, Revue du droit des étrangers page 569) Que cette crainte découlerait du manquement de l'Etat d'origine du demandeur à remplir ses obligations de protection de ses citoyens.

Les appelants renvoient la Cour dans ce contexte à leur recours gracieux détaillant leur crainte légitime.

Le délégué du Gouvernement, dans un mémoire en réponse déposé en date du 16 mars 2000, demande la confirmation du premier jugement.

Les appelants ont déposé un mémoire en réplique en date du 17 avril 2000 dans lequel ils se réfèrent à une décision de la Commission des Recours des Réfugiés en France.

Face à l’impossibilité de pouvoir se prévaloir utilement de la protection de l’autorité confédérale ou de la communauté internationale, les appelants demandent la réformation du premier jugement.

Aux termes de l’article 9 de la loi du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile« une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la page 2 Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement … ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

Il ne suffit pas qu’un demandeur d’asile invoque un ou des motifs tombant sous le champ d’application de la Convention de Genève, il faut encore que les faits invoqués à la base de ces motifs ne soient pas manifestement incrédibles ou, eu égard aux pièces et renseignements fournis, manifestement dénués de fondement.

Le tribunal administratif a examiné sur base de l’ensemble des pièces du dossier et des renseignements qui lui ont été fournis si les faits développés par les consorts Huristic peuvent être qualifiés de manifestement incrédibles ou manifestement dénués de fondement.

C’est à juste titre qu’il est parvenu, après l’examen des faits et motifs invoqués par les demandeurs à l’appui de leur demande d’asile, à la conclusion qu’ils n’ont manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles suffisamment précises de nature à établir dans leur chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans leur pays de provenance, à savoir la Bosnie-Herzégovine.

En effet, au cours de leurs auditions respectives, telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, Dzevat Huristic et Nevresa Mehmedovic ont uniquement affirmé avoir quitté leur pays d’origine, à savoir la Fédération de Bosnie et Herzégovine, faisant partie de la Bosnie-Herzégovine, où ils résidaient dans le village musulman de Kalesija depuis l’année 1992, après avoir dû quitter leur village d’origine Kusonja en 1992, qui se trouve actuellement dans la République serbe de Bosnie et Herzégovine, à la suite des violences qui y ont été commises par des groupes paramilitaires serbes, qui ont notamment eu pour conséquence qu’une partie de leur maison familiale a été brûlée et qu’une autre partie de cette même maison a été expropriée au profit des « Serbes », en raison du fait qu’ils n’avaient plus les moyens d’y vivre, alors que l’usine où Dzevat Huristic avait travaillé, avait fait faillite.

Concernant les faits et motifs relatifs à leur départ de la République serbe de Bosnie et Herzégovine, c’est à bon droit que le ministre de la Justice n’en a pas tenu compte dans le cadre de leurs demandes d’asile respectives, étant donné que les faits en rapport avec le départ de leur village natal, à savoir Kusonja, se trouvant actuellement dans la République serbe de Bosnie et Herzégovine, s’avèrent être sans relation causale directe avec leur départ de la Fédération de Bosnie et Herzégovine du même pays.

Les appelants restent partant en défaut d’établir et même d’alléguer en quoi leur situation particulière ait été telle qu’ils pouvaient avec raison craindre qu’ils feraient ou pourraient faire l’objet de persécutions, au sens de la Convention de Genève, dans leur pays d’origine, à savoir la Fédération de Bosnie et Herzégovine, regroupant essentiellement les communautés musulmane et croate de Bosnie et Herzégovine, et, ainsi, les autorités luxembourgeoises ont été mises dans l’impossibilité d’examiner, en plus de la situation générale régnant en Bosnie et page 3 Herzégovine, leur situation particulière et de vérifier concrètement et individuellement s’ils ont raison de craindre d’y être persécutés.

Il résulte des développements qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre de la Justice a déclaré les demandes d’asile des consorts Huristic comme étant manifestement infondées.

Le jugement entrepris est par conséquent à confirmer.

PAR CES MOTIFS la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport du conseiller, reçoit l’appel;

le dit non fondé et en déboute;

partant confirme le jugement du 10 février 2000 dans toute sa teneur;

condamne les appelants aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Marion Lanners, vice-présidente, Jean-Mathias Goerens, premier conseiller, Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur et lu par la vice-présidente en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef la vice-présidente page 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11876C
Date de la décision : 29/06/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-06-29;11876c ?

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