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28/06/2000 | LUXEMBOURG | N°11908

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juin 2000, 11908


N° 11908 du rôle Inscrit le 4 avril 2000 Audience publique du 28 juin 2000

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Recours formé par Monsieur … GASPARINI, … contre une décision de la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière de traitement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11908 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif par Maître Vic KRECKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Or

dre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … GASPARINI, instituteur d’enseignement spécial...

N° 11908 du rôle Inscrit le 4 avril 2000 Audience publique du 28 juin 2000

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Recours formé par Monsieur … GASPARINI, … contre une décision de la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière de traitement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11908 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif par Maître Vic KRECKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … GASPARINI, instituteur d’enseignement spécial, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 14 septembre 1999 portant refus de procéder à la rectification du calcul de son traitement avec effet à partir du 15 septembre 1997 par prise en compte du bénéfice de la bonification d’ancienneté de service prévue à l’article 7 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’Etat ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 mai 2000 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Vic KRECKE et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 juin 2000.

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Considérant que Monsieur … GASPARINI, instituteur d’enseignement spécial, né le 30 juin 1938, demeurant à L-…, a obtenu une première nomination comme instituteur de l’enseignement primaire dans la commune de X., en 1960, fonction pour laquelle démission honorable lui a été accordée sur sa demande par délibération du conseil communal de X. du 14 juillet 1964 ;

Qu’il a par la suite accédé à la fonction d’instituteur dans la commune de Y., puis démissionné en 1966 pour s’occuper de l’entreprise familiale et revêtir un poste de travail dans le secteur privé jusqu’en 1975 ;

Qu’en 1975 il a obtenu une nouvelle nomination comme instituteur d’enseignement primaire de la Ville de Luxembourg, fonction pour laquelle il a introduit sa démission le 29 juillet 1983 après avoir bénéficié d’un congé sans traitement durant trois années, démission qui a été acceptée par délibération du conseil communal de Luxembourg du 7 novembre 1983 ;

Que depuis 1983 il s’est à nouveau occupé de l’entreprise familiale et a obtenu une nomination comme instituteur d’enseignement spécial avec effet au 15 septembre 1997 ;

Que par courrier du 20 octobre 1998 Monsieur GASPARINI s’est adressé au directeur de l’administration du personnel de l’Etat en faisant valoir que sa matricule passait sous silence plus de dix années de sa carrière comme instituteur et que ses nominations antérieures obtenues en cette fonction s’opposeraient à l’application à son cas des dispositions de l’article 7. 6 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’Etat ;

Qu’il a en outre indiqué ne pas bénéficier non plus de l’avantage du certificat d’études pédagogiques ;

Que par courrier du 28 octobre 1998, le directeur de l’administration du personnel de l’Etat a informé Monsieur GASPARINI que sa rentrée en service au 15 septembre 1997 en qualité d’instituteur de l’enseignement spécial était à considérer comme première nomination dans la carrière, de sorte que son âge ayant excédé les 55 ans à ce moment, aucune bonification pour ancienneté de service n’aurait pu lui être accordée conformément aux dispositions de l’article 7. 6 en question ;

Qu’en application des articles 3, premier alinéa, 22/IV/17 et 22/V/4° de ladite loi modifiée du 22 juin 1963 son traitement de base s’élèverait dès lors à 290 points indiciaires avec effet au 15 septembre 1997 ;

Que relativement à la mise en compte du certificat d’études pédagogiques il a été prié de s’adresser au ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle compétent en la matière ;

Que par courrier du 10 août 1999, le mandataire de Monsieur GASPARINI s’est adressé au ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative en vue de réitérer son désaccord avec la fixation du traitement à la date du 15 septembre 1997 sans prise en compte d’aucune bonification d’ancienneté de service ;

Que par décision du 14 septembre 1999, la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, sous la signature de Monsieur Joseph Schaack, secrétaire d’Etat, a déclaré se rallier au point de vue exposé par le directeur de l’administration du personnel de l’Etat dans sa lettre prédite du 28 octobre 1998, dont il a confirmé et réitéré le contenu par renvoi ;

Que complémentairement, il a encore fait valoir qu’il ressortirait de l’article 38 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après appelée “ le statut général ”, et d’un arrêt du Conseil d’Etat du 6 octobre 1986 (n° 7760 du rôle, Mines) que la démission du fonctionnaire avait pour effet d’éteindre tous les droits qu’il détenait en vertu de son statut, y inclus ceux résultant de l’ancienneté de service ou de nominations antérieures ;

2 Que par courrier de son mandataire du 10 décembre 1999, Monsieur GASPARINI a fait formuler un recours gracieux contre la prédite décision ministérielle du 14 septembre 1999 ;

Que la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, sous la signature de Monsieur Joseph Schaack, secrétaire d’Etat, a, par courrier du 5 janvier 2000 portant le tampon à la poste du 12 suivant, déclaré confirmer sa décision précitée du 14 septembre 1999 à défaut d’éléments nouveaux révélés par le recours gracieux, tout en précisant que l’Etat se réservait le droit de soulever l’irrecevabilité dudit recours pour cause d’introduction tardive ;

Que par requête déposée en date du 4 avril 2000, Monsieur GASPARINI a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 14 septembre 1999 ;

Considérant que le délégué du Gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en annulation tout en se rapportant à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en réformation dans la mesure où la première réclamation quant à la fixation de son traitement avec effet au 15 septembre 1997 n’a été introduite que plus d’une année plus tard, le 20 octobre 1998 ;

Considérant qu’en vertu de l’article 26 du statut général, les contestations auxquelles donneront lieu les décisions relatives à la fixation des traitements en principal et accessoires et des émoluments des fonctionnaires de l’Etat sont de la compétence du tribunal administratif statuant comme juge du fond ;

Que dès lors le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal ;

Que par voie de conséquence le recours en annulation formé en ordre subsidiaire est irrecevable ;

Considérant que le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative est seul compétent en matière de statut et, par l’intermédiaire de l’administration du personnel de l’Etat, en matière de fixation et de calcul des traitements ;

Considérant qu’il ne résulte d’aucune pièce versée au dossier que les décisions antérieures portant fixation du traitement de Monsieur GASPARINI avec effet au 15 septembre 1997 aient été pourvues d’une quelconque indication des voies de recours, contrairement à la décision déférée du 14 septembre 1999 ;

Que partant aucun délai de recours contentieux n’avait commencé à courir, de sorte que le recours, introduit suivant les délais prévus par la loi, moins de trois mois après la décision confirmative sur recours gracieux, faisant corps avec celle purement et simplement confirmée, est recevable, étant entendu que le recours gracieux a lui-même été introduit dans les délais légaux ;

Que le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit suivant les formes légales, il est recevable ;

3 Considérant qu’au fond la partie demanderesse critique la décision ministérielle déférée en ce qu’à travers son analyse de la rentrée en service au 15 septembre 1997 comme première nomination dans la carrière, elle fait abstraction de toutes ses nominations antérieurement obtenues en tant qu’instituteur ;

Que pour le surplus toute démission d’un fonctionnaire, pour quelque raison que ce soit, serait assortie d’un effet punitif en ce qu’elle rendrait inapplicables les dispositions de l’article 7.2 du statut général et à travers elles les bonifications d’ancienneté de service y prévues ;

Que cette punition frapperait d’autant plus lourdement les instituteurs que suivant la pratique constante en la matière, chaque nouvelle nomination dans une autre commune, serait précédée d’une démission concernant le poste antérieurement revêtu ;

Que Monsieur GASPARINI critique encore l’interprétation faite par ladite ministre des effets d’une démission d’un fonctionnaire en ce que celle-ci, loin d’éteindre ses droits, donnerait en principe lieu à la naissance de nouveaux droits, tels celui à la pension ou à l’attribution du titre honorifique de ses fonctions ;

Qu’il fait encore valoir que sous l’angle du droit communautaire et plus précisément de l’article 13 du Traité d’Amsterdam, la barrière constituée par la limite d’âge de 55 ans inscrite à l’article 7. 6 alinéa second de la loi modifiée du 22 juin 1963 précitée devrait tomber comme étant contraire à une norme d’essence supérieure de droit international ;

Qu’il conclut partant à un recalcul de son traitement avec effet à partir du 15 septembre 1997 en tenant compte de la bonification d’ancienneté pour le temps passé au service de l’Etat suivant les dispositions légales applicables ;

Considérant que le délégué du Gouvernement reprend la motivation contenue dans la décision ministérielle déférée ensemble l’avis du directeur de l’administration du personnel de l’Etat auquel elle renvoie directement, tout en faisant préciser que l’article 13 du Traité d’Amsterdam ne porterait pas à conséquence en l’espèce en ce que cette disposition ne serait pas self-executing, seule une possibilité d’agir y étant prévue dans le chef du Conseil ;

Considérant que l’article 7 de la loi modifiée du 22 juin 1963 précitée dispose en son point 6 alinéa second qu’“ aucune bonification n’est accordée au fonctionnaire qui obtient la première nomination de fonctionnaire après l’âge de 55 ans ” ;

Considérant que la décision ministérielle déférée ayant refusé le bénéfice de la bonification d’ancienneté à Monsieur GASPARINI au motif que sa première nomination dans la carrière était celle intervenue au 15 septembre 1997 ayant donné lieu au calcul du traitement actuellement critiqué, en se basant sur l’article 7. 6 alinéa second prérelaté, il convient de délimiter la portée de “ la première nomination de fonctionnaire ” à la base de l’exclusion de bonification critiquée ;

Considérant que d’après l’article 1er de la loi du 22 juin 1963 “ au sens des dispositions de la présente loi le terme de fonctionnaire vise les fonctionnaires de l’Etat et les personnes qui leur sont assimilées quant au traitement et dont la fonction figure aux annexes A et B de la présente loi ” ;

4 Considérant que l’annexe A en question comprend sous son point IV, intitulé “ enseignement ” tant les fonctions d’instituteur de l’enseignement primaire que celles d’instituteur d’enseignement spécial ;

Que dès lors Monsieur GASPARINI est à qualifier de fonctionnaire au sens de la prédite loi, tant pour ce qui concerne ses nominations antérieures que pour celle intervenue avec effet au 15 septembre 1997 ;

Considérant qu’en présence d’un texte clair et précis, ni les avis et opinions exprimés au niveau des travaux parlementaires préparatoires de la loi sous analyse, ni le recours à des textes antérieurs ne sont appelés par le tribunal à servir à l’exégèse des termes employés par le législateur, dans la mesure où le libellé même de ceux-ci ne donne lieu à aucune question d’interprétation sur le sens exact leur attribué par leur auteur (trib. adm. 12 janvier 1999, Petry, n° 10800 du rôle, Pas. adm. 01/2000, V° Lois et règlements, n° 24, p. 236) ;

Considérant que le texte de loi ne distinguant point, la première nomination de fonctionnaire visée par l’article 7.6 alinéa second prérelaté s’apprécie quelle que soit la carrière dans laquelle elle intervient et abstraction faite de l’activité antérieure de la personne concernée ;

Que dès lors force est de constater que la première nomination de fonctionnaire au sens de la loi modifiée du 22 juin 1963 précitée, intervenue dans le chef de Monsieur GASPARINI, est celle à la fonction d’instituteur par lui obtenue en 1960, non mise en échec quant à son existence par la démission ultérieure, donnée et acceptée par ailleurs en vue d’accéder à un autre poste de fonctionnaire ;

Qu’il s’ensuit que la nomination à la fonction d’instituteur d’enseignement spécial intervenue avec effet au 15 septembre 1997 n’a pas constitué pour le demandeur la première nomination de fonctionnaire au sens de ladite loi modifiée du 22 juin 1963 ;

Considérant que par voie de conséquence c’est à tort que la ministre a opposé à Monsieur GASPARINI l’exclusion de toute bonification d’ancienneté prévue par l’article 7.6 alinéa second en question, de sorte que sa décision doit être reformée sur ce point ;

Considérant que dans la mesure où le tribunal ne s’est pas vu soumettre la matricule du demandeur, ni n’a à sa disposition un relevé complet du temps de service passé soit en tant que fonctionnaire au sens de la loi modifiée du 22 juin 1963 précitée, soit ailleurs, il convient de renvoyer l’affaire devant la ministre compétente pour nouvelle fixation de traitement avec effet à partir du 15 septembre 1997 ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

5 partant, réformant, écarte l’exclusion de toute bonification d’ancienneté opposée sur base de l’article 7.6 alinéa second de la loi modifiée du 22 juin 1963 et renvoie l’affaire devant la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative pour nouvelle fixation de traitement avec effet à partir du 15 septembre 1997 ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge et lu à l’audience publique du 28 juin 2000 par le premier juge à ce délégué, en présence de M.

Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11908
Date de la décision : 28/06/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-06-28;11908 ?

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