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19/06/2000 | LUXEMBOURG | N°11761

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 juin 2000, 11761


N° 11761 du rôle Inscrit le 5 janvier 2000 Audience publique du 19 juin 2000

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Recours formé par Madame … TOMCZYK, épouse …, … contre une décision de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11761 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 janvier 2000 par Ma

tre Roland ASSA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de ...

N° 11761 du rôle Inscrit le 5 janvier 2000 Audience publique du 19 juin 2000

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Recours formé par Madame … TOMCZYK, épouse …, … contre une décision de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11761 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 janvier 2000 par Maître Roland ASSA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … TOMCZYK, épouse …, chargée de cours, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports du 7 octobre 1999 concernant sa demande de reclassement du 28 septembre 1999 depuis le grade E2 au grade E3ter ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 février 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 mars 2000 par Maître Roland ASSA au nom de Madame … TOMCZYK ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision ministérielle critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Jeanne FELTGEN et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 29 mai 2000.

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Considérant que Madame … TOMCZYK, épouse …, chargée de cours, née le…, a obtenu en date du 27 juin 1973 le diplôme de graduée en secrétariat de direction, délivré par l’Institut d’Enseignement technique supérieur de l’Etat établi à B-1060 Bruxelles, 35, rue Jean Chapelle, actuellement dénommé Haute Ecole de la Communauté Française Paul-Henry Spaak, ayant relevé à l’époque de l’Enseignement supérieur économique de plein exercice et de type court, sanctionnant des études dont le programme a comporté un certain nombre de matières y plus particulièrement mentionnées, réparties sur deux années d’études ;

Que par courrier du 30 septembre 1997, Madame TOMCZYK a demandé à la ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle de revoir son classement, estimant être classée dans un grade ne correspondant pas à sa qualification, à savoir le grade E2 ;

Qu’elle s’appuie sur le fait que le diplôme de graduée en secrétariat de direction sanctionne actuellement un cycle d’études de trois ans, de sorte à pouvoir être assimilé à un diplôme de niveau bac+3, entraînant qu’elle devrait être classée au grade E3ter ;

Que par communication du 20 avril 1998 intervenue sur consultation de la commission chargée de faire des propositions relatives à l’équivalence de certaines études avec un diplôme ou un degré d’études déterminé pour l’admission à une fonction de l’Etat, appelée commission des équivalences, le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative a réitéré les explications orales déjà fournies à Madame TOMCZYK par le conseil de direction première classe au ministère de la Fonction publique pour admettre que sa situation était quelque peu particulière en ce sens que s’il était bien vrai qu’elle ne remplit pas les conditions d’études pour accéder au grade E3 en tant que chargée de cours, notamment en vertu des dispositions de l’article 3 alinéa 6 du règlement du Gouvernement en Conseil du 15 novembre 1974, ces mêmes conditions d’études lui permettraient, en l’état actuel la législation telle que se dégageant notamment de l’article 54 de la loi modifiée du 4 septembre 1990 portant réforme de l’enseignement secondaire technique et de la formation professionnelle continue d’accéder à la fonction de maître de cours spéciaux ;

Qu’en considération de cette légère incohérence des textes ainsi dégagée, le ministre en question s’est déclaré disposé à proposer au Conseil de Gouvernement, à titre tout à fait exceptionnel, un allongement de son grade de classement E2 de deux biennales supplémentaires par ajout des échelons ayant respectivement les indices 367 et 385 ;

Que la décision afférente a été prise en date du 15 mai 1998 par le Gouvernement en Conseil sur base des dispositions de l’article 23 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’Etat, ainsi que du règlement modifié du Gouvernement en Conseil du 1er mars 1974 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’Etat en date du 15 mai 1998 ;

Que par courrier du 23 mars 1999, Madame TOMCZYK s’est adressée au ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle pour solliciter l’assimilation de son diplôme de graduée en secrétariat de direction délivré le 27 juin 1973 à un diplôme de niveau bac+3 ;

Que par ailleurs, Madame TOMCZYK a pu obtenir de la part du professeur attaché Jean TAGLIAFERRI, signant pour la ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, la communication non datée au libellé suivant :

“ J’ai l’honneur de vous informer que, selon la documentation disponible au ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, votre diplôme belge de graduée en secrétariat de direction, décerné par l’Institut d’Enseignement Technique Supérieur de l’Etat – Bruxelles, sanctionne une formation d’enseignement supérieur non universitaire d’une durée de trois années ” ;

2 Que par courrier du 14 juin 1999, Madame TOMCYZK s’est adressée au ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative dans les termes suivants :

“ Monsieur le ministre, Je prends la respectueuse liberté de revenir à mon dossier 1187/97- demande de reclassement, ainsi qu’au courrier de mon avocat, Maître Roland ASSA réf. RA/ACAP/ Consultations diverses.

En vue de mon attestation du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle Réf Esup/TT dont copie en annexe, sanctionnant ma formation comme formation d’enseignement supérieur d’une durée de trois années, je vous prie de bien vouloir revoir l’intégralité de mon dossier et m’accorder un classement supérieur tel que de droit.

Je vous prie de me faire parvenir une décision individuelle susceptible de recours.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre, … ” ;

Que par courrier du 28 septembre 1999, Madame TOMCZYK s’est adressée à la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports comme suit :

“ Madame la ministre, Par la présente, je prends la respectueuse liberté de vous soumettre ma demande de révision de classement.

Je crois être classée à l’époque dans un grade ne correspondant pas à ma qualification.

Engagée au Lycée technique depuis 1979, je remplis toutes les conditions d’admission au concours de recrutement. En 1996 en vue de ma candidature à l’examen-concours de recrutement, un dossier complet vous a été remis.

Après avoir accompli une scolarité de treize ans au Luxembourg clôturant mes études secondaires par l’examen de fin d’études secondaires section latine, j’ai obtenu un diplôme de graduat en secrétariat de direction sanctionnant un cycle d’études de trois ans à plein temps à l’Institut supérieur de l’Etat à Bruxelles. Pour la bonne forme, je me permets de vous joindre à la présente le diplôme final de l’enseignement supérieur économique – Bruxelles. ” ;

Que par réponse du 7 octobre 1999, ladite ministre s’est adressée à Madame TOMCZYK dans les termes suivants :

“ Madame, Après avoir réexaminé votre classement ainsi que les différentes pièces ayant servi à la prise de décision, je suis au regret de vous informer que les conclusions tirées par le 3 ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en date du 20 avril 1998 restent toujours valables.

En effet, il se dégage de votre diplôme de graduée en secrétariat de direction, établi le 27 juin 1973, qu’il sanctionne un programme de formation de l’enseignement supérieur économique de plein exercice et de type court, “ réparti sur deux années d’études ”, alors que la réglementation qui vous est applicable exige pour l’accès à un grade supérieur au grade E02 soit un cycle unique et complet de deux années d’études universitaires, soit des études portant sur trois années d’études universitaires ou supérieures.

Je dois par ailleurs reconnaître que le certificat établi le 1er avril 1999 par le service de l’enseignement supérieur du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle repose sur une lecture erronée de vos diplômes et certificats et ne peut donc servir de base au reclassement sollicité.

Veuillez agréer,… ” ;

Considérant que par requête déposée en date du 5 janvier 2000 Madame TOMCZYK a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation dirigé contre la communication ministérielle prérelatée du 7 octobre 1999 ;

Qu’elle y conclut en ordre principal à l’existence d’un recours en réformation en vertu de l’article 4 de la loi du 17 juin 1963 ayant pour objet de protéger les titres d’enseignement supérieur en faisant valoir que sa demande précitée libellée “ demande d’assimilation ”, adressée à la ministre en date du 23 mars 1999 était à comprendre comme demande d’inscription de son diplôme de graduée en secrétariat de direction en tant que diplôme bac+3, inscription qu’elle demande au tribunal d’ordonner en ordre principal ;

Qu’en ordre subsidiaire pour le cas où la décision du 7 octobre 1999 ne devrait pas s’analyser en une décision rendue en matière d’inscription dudit titre ou ne devait pas être susceptible d’être entreprise par un recours en réformation, elle déclare agir en annulation ;

Considérant que le délégué du Gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté en ce que la décision déférée ne ferait que confirmer la décision du ministre de la Fonction publique précitée du 20 avril 1998, étant donné que Madame TOMCZYK aurait dû exercer dans les délais son recours éventuel contre ladite décision ministérielle, sinon contre celle du Gouvernement en Conseil du 15 mai 1998 subséquente ;

Qu’en second lieu, le recours ne serait pas recevable en tant que recours en réformation alors que la demanderesse n’aurait jamais demandé formellement l’inscription de son diplôme au registre des titres créé par ladite loi du 17 juin 1963, son courrier précité du 23 mars 1999 se bornant à réclamer l’assimilation de son diplôme à un diplôme de niveau bac+3 sans faire la moindre allusion à ladite loi, ni à une quelconque inscription de titres ;

Considérant qu’en premier lieu le tribunal est amené à déterminer sa compétence au regard de la décision administrative individuelle lui déférée ;

4 Qu’en l’espèce la décision de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports du 7 octobre 1999 prend de façon expresse position par rapport à la demande de reclassement de Madame TOMCZYK du 28 septembre 1999 ;

Que la décision déférée ne prend aucunément position par rapport au courrier de Madame TOMCZYK du 23 mars 1999, lequel, au-delà de la demande d’assimilation de son diplôme y exprimée ne comporte par ailleurs aucune indication qu’une inscription au registre des diplômes prévu par la loi modifiée du 17 juin 1963 soit sollicitée par elle ;

Que force est dès lors de constater que la décision déférée ne statue aucunément en matière de protection des titres d’enseignement supérieur et d’inscription des diplômes au registre afférent ;

Considérant que s’agissant d’une demande en reclassement d’une employée de l’Etat, celle-ci doit s’analyser en contestation résultant à la fois du contrat d’emploi et de la rémunération de Madame TOMCZYK, de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit par elle en ordre principal, par substitution de base légale, conformément à l’article 11.1 de la loi du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat ;

Considérant que s’il est vrai que Madame TOMCZYK n’a introduit, d’après les informations fournies au tribunal, aucun recours contentieux contre la décision du Gouvernement en Conseil arrêtée en date du 15 mai 1998, il n’en reste pas moins qu’aucun délai de recours n’a commencé à courir dans la mesure où d’après les pièces versées, la décision en question n’était assortie d’aucune indication des voies de recours conformément à l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, également applicable en matière d’employés de l’Etat ;

Considérant que pour le surplus la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports a statué sur réexamen du dossier, le recours ayant été introduit dans les trois mois de la notification de sa décision ;

Que partant l’exception de tardiveté soulevée est en toute occurrence à rejeter ;

Considérant que le recours en réformation ayant été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable, étant précisé que les moyens proposés concernant la non-

inscription du diplôme de Madame TOMCZYK sont sans objet suivant le cadre légal ci-avant dégagé, à l’exception des éléments et moyens proposés ayant trait à la question du reclassement faisant l’objet de la décision déférée ;

Considérant qu’au fond il est constant en cause que suite à l’arrêté du Gouvernement en Conseil précité du 15 mai 1998, Madame TOMCZYK a adressé une première demande de reclassement au ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en date du 14 juin 1999, pour encore s’adresser à la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports par courrier prérelaté du 28 septembre 1999 ayant essentiellement le même objet ;

5 Considérant que d’après l’article 23 de la loi modifiée du 22 juin 1963 précitée, les indemnités revenant notamment aux employés de l’Etat sont fixées par le Gouvernement en Conseil ;

Considérant qu’en vertu de l’article 25 du règlement modifié du Gouvernement en Conseil du 1er mars 1974 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’Etat, les décisions individuelles de classement sont prises par le ministre de la Fonction publique ;

Considérant que la demanderesse souligne que d’après l’article 3 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 précité, l’administration est tenue d’appliquer d’office les règles de droit ayant trait à la demande lui soumise ;

Considérant qu’au regard de l’article 1er du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, toute autorité administrative saisie d’une demande de décision examine d’office si elle est compétente et, lorsqu’elle s’estime incompétemment saisie, elle transmet sans délai la demande à l’autorité compétente, en en avisant l’administré concerné ;

Que l’article 1er en question constitue une application particulière en matière de compétence de l’autorité administrative saisie des dispositions de l’article 3 ci-avant relevées par la demanderesse ;

Considérant que saisie de la demande de reclassement lui adressée le 28 septembre 1998, la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports, aurait d’office dû continuer celle-ci au ministre compétent, à savoir le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, par ailleurs saisi d’une demande à l’objet sinon identique, du moins parallèle ;

Considérant que les règles de compétence étant d’ordre public, la décision déférée encourt l’annulation dans le cadre du recours en réformation reçu, sans autre examen des moyens par ailleurs proposés ;

Considérant que la partie demanderesse sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 50.000.- francs, sous réserve de tout autre montant même supérieur à arbitrer ex æquo et bono par le tribunal ;

Considérant qu’au vu de l’issue du litige, non directement dégagée depuis les moyens proposés par la demanderesse, l’élément d’iniquité à la base de la liquidation de pareille indemnité laisse d’être établi, de sorte que la demande afférente est à rejeter ;

Considérant que chacune des parties ayant succombé en partie dans les moyens par elles proposés, il convient de faire masse des frais et de les imposer par moitié aux colitigants respectifs ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare compétent pour reconnaître du recours en réformation ;

6 le dit également recevable dans la mesure des moyens tendant au reclassement de la demanderesse ;

le dit sans objet pour le surplus ;

au fond annule la décision déférée et renvoie l’affaire devant le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

impose les frais par moitié à la demanderesse et à l’Etat.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 19 juin 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11761
Date de la décision : 19/06/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-06-19;11761 ?

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