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29/05/2000 | LUXEMBOURG | N°11689

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 mai 2000, 11689


N° 11689 du rôle Inscrit le 26 novembre 1999 Audience publique du 29 mai 2000

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Recours formé par Madame … SCHUMACHER-OTH, ..

contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11689 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 novembre 1999 par Madame … SCHUMACHER-OTH, sa

ns état, demeurant à L-…, dirigée contre la décision du directeur de l’administration des Contribution...

N° 11689 du rôle Inscrit le 26 novembre 1999 Audience publique du 29 mai 2000

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Recours formé par Madame … SCHUMACHER-OTH, ..

contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11689 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 novembre 1999 par Madame … SCHUMACHER-OTH, sans état, demeurant à L-…, dirigée contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 25 août 1999 lui notifiée le 27 août suivant (n° 10276C du rôle) statuant par rapport à sa réclamation du 20 avril 1999 portée contre le bulletin de l’impôt sur le revenu relatif à l’exercice 1997 émis par le bureau d’imposition Luxembourg VI en date du 11 mars 1999, limitée à la question de la non-prise en considération dans toute la mesure selon elle requise de sa demande en modération d’impôt introduite sur base de l’article 55 (5) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR) ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 février 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 mars 2000 par Madame … SCHUMACHER-OTH ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ensemble le dossier directorial ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Madame … SCHUMACHER-OTH, assistée de son fils, Monsieur … SCHUMACHER, en ses explications et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries à l’audience publique du 17 mai 2000.

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Considérant que Madame … SCHUMACHER-OTH, sans état, demeurant à L-…, a recueilli dans la succession de feu Monsieur X., décédé le 7 février 1996, en sa qualité d’héritière, une part équivalente à 44/420es s’établissant à 4.102.525.- francs du chef de laquelle le receveur de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, bureau de Cap, a, en date du 16 septembre 1997, établi les droits de succession redus à 1.107.006.- francs, montant vérifié le lendemain par un inspecteur principal premier en rang de ladite administration ;

Que les droits de succession en question s’établissent comme suit :

taux de base de 15 % sur 4.102.525.- francs = 615.379 majoration de 6/10ièmes = 369.227 estompage des limites : 102.525 : 2 = 51.263 sous-total = 1.035.869 intérêt de retard 341 jours à 7,25% l’an = 71.137 total = 1.107.006 ;

Que les effets immobiliers de la succession X. ont fait l’objet d’une vente publique, lors de laquelle un produit total de 34.056.000.- francs a été réalisé, représentant 71,65 % de l’actif brut global de la succession établi à 48.357.128.- francs ;

Que cette vente publique a dégagé un bénéfice de cession entraînant une imposition du chef de plus-values immobilières sur base des articles 99ter et suivants de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (LIR), se montant dans le chef de Madame … SCHUMACHER-OTH, en sa qualité d’héritière, à 80.510.- francs ;

Que dans le cadre de la déclaration pour l’impôt sur le revenu relativement à l’exercice fiscal 1997, Madame … SCHUMACHER-OTH a fait fruit de la possibilité lui ouverte par l’article 55 (5) LIR pour demander une réduction d’impôt du fait que l’impôt sur plus-values ci-avant déboursé n’a pas pu être pris en considération à l’époque comme passif de la succession lors du calcul des droits de succession en question ;

Considérant qu’elle estime que la réduction d’impôt doit s’élever au montant de 63.676.- francs, montant différentiel dégagé à partir d’un recalcul fictif des droits de succession effectué par le préposé du bureau Cap de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines dans l’hypothèse où l’impôt sur plus-values aurait pu être défalqué ab initio, calcul s’agençant comme suit :

Actif brut recueilli ajusté : 4.102.525 - 80.510 = 4.022.015 Droits de succession :

Taux de base 15% x 4.022.015 = 603.302 Majoration de 6/10ièmes = 361.081 estompage des limites :

22.015 : 2 = 11.008 Sous total :

= 976.291 Intérêts de retard :

341 jours à 7,25% l’an = 61.039 total :

= 1.043.330 ;

Considérant qu’à travers le bulletin d’impôt sur le revenu émis le 11 mars 1999, le bureau d’imposition Luxembourg VI a accordé une modération d’impôt sur base de l’article 55 (5) LIR de l’ordre de 21.867.- francs ;

2 Que suivant procès-verbal dressé en date du 20 avril 1999, Monsieur … SCHUMACHER, demeurant à L-…, a introduit auprès du bureau d’imposition Luxembourg VI une réclamation orale pour compte de sa mère, Madame SCHUMACHER-OTH, sur base d’une procuration datée du 14 avril 1999 ;

Que cette réclamation orale a été corroborée par une motivation écrite datée du 22 avril 1999 ;

Que par décision du 25 août 1999, notifiée le 27 suivant, le directeur des Contributions a reçu la réclamation en la forme et l’a déclarée partiellement fondée ;

Que réformant il a fixé la réduction de l’impôt au sens de l’article 55 (5) LIR au montant de 42.690.- francs ;

Que par application des dispositions combinée des articles 55 (5) LIR et 102 (13) LIR, le directeur a tenu compte du recalcul fictif précité du droit de succession établi le 23 février 1999, avant imposition, à la demande de la réclamante ;

Qu’après avoir énoncé que l’évaluation par voie de taxation du bureau d’imposition ne tenait pas compte de la progressivité résultant notamment de l’estompage des limites, il a retenu que le recours à la taxation s’imposait en l’espèce en raison, d’une part, du fait que le produit de la vente immobilière ne représentait pas la totalité de l’actif de la succession, mais seulement une quotité évaluée à 71,65% et que, d’autre part, l’article 55 (5) LIR ne visait que les droits de succession proprement dits, à l’exclusion des intérêts, lesquels ne feraient pas partie du tarif de ce droit ;

Considérant que par recours introduit en date du 26 novembre 1999, Madame … SCHUMACHER-OTH critique la décision directoriale en ce qu’elle n’a pas fixé la modération d’impôt sollicitée au montant de 63.676.- francs par elle avancé tout en formulant à son égard trois griefs distinctement énoncés ;

Qu’en premier lieu elle demande au tribunal de constater que l’article 205 (3) de la loi générale des impôts, dite Abgabenordnung, en abrégé “ AO ”, s’impose également au directeur statuant sur réclamation contre un bulletin de l’impôt sur le revenu, notamment en ce qui concerne les moyens de droit et de fait par lui soulevés d’office ;

Qu’en l’espèce les dispositions de l’article 205 (3) AO auraient été violées dans la mesure où le directeur aurait statué après avoir soulevé d’office des moyens de droit, notamment en ce qui concerne la ventilation opérée pour n’admettre qu’une modération d’impôt à raison de 71,65%, part des immeubles vendus dans l’actif brut de la succession, pourcentage appliqué pour ce surplus aux seuls droits de succession proprement dits, à l’exception des intérêts de retard ;

Que le second grief porte sur l’exclusion de l’assiette de la modération d’impôt des intérêts de retard, en ce qu’au-delà d’une analyse grammaticale des textes et notamment des articles 12 et 155bis LIR, une recherche d’équité prenant plus particulièrement en compte la situation spéciale de l’affaire dans le cadre de la ratio legis de la réforme ayant introduit en droit luxembourgeois la seconde desdites dispositions, aurait eu pour effet de dégager par préférence la solution contraire ;

3 Qu’en troisième lieu, elle demande à voir déclarer la ventilation suivant le pourcentage précité de 71,65% sans base légale aucune à la matière précise concernée, de sorte à devoir être écartée ;

Qu’en conséquence elle conclut à une modération d’impôt lui redue sur base de l’article 55 (5) LIR de 63.676.- francs, sinon subsidiairement de 59.578-. francs dans l’hypothèse ou les intérêts de retard ainsi qualifiés ne feraient pas partie de l’assiette de calcul de ladite modération ;

Considérant que le délégué du Gouvernement estime que l’article 205 AO est propre à la procédure d’imposition, tandis que la procédure contentieuse serait régie par le paragraphe 257 AO ;

Qu’il est d’avis que l’infirmation d’une imposition pour erreur de droit ne saurait être dépecée de la manière proposée par la demanderesse, car le contrôle de légalité sur base du paragraphe 249 AO serait inhérent à toute voie de recours en matière d’impôts directs et requerrait de celui qui l’exerce l’application d’office, dans les limites de sa saisine, du droit applicable à l’espèce, selon sa propre interprétation, rien n’obligeant par ailleurs son auteur à soumettre cette interprétation à l’avis préalable des administrés ou justiciables avant de l’appliquer ;

Qu’au fond il souligne qu’au-delà de la terminologie employée, les intérêts de retard ainsi qualifiés constitueraient des pénalités en matière de droits de succession comme en matière d’impôts directs ;

Que s’il était vrai que l’article 155bis LIR leur rend applicables des dispositions relatives aux impôts, du moins pour l’imposition du revenu et notamment la déductibilité, la question resterait ouverte si cette dérogation à l’article 12 LIR valait seulement pour les intérêts de retard encourus en vertu de l’article 155 LIR, ainsi que l’a retenu le directeur ;

Que le directeur aurait estimé à juste titre que la réduction d’impôt sur le revenu en cas de plus-values ayant supporté un droit de succession ne devait pas être affectée par le droit de succession grevant d’autres biens ;

Que tout en estimant qu’il est vrai que l’article 55 LIR ne précise pas si le droit de succession correspondant aux plus-values doit être déterminé par application du tarif, par comparaison avec le droit grevant le reste de la succession ou, comme l’a fait le directeur, par ventilation du droit grevant la succession toute entière, le délégué du Gouvernement se rapporte à la sagesse du tribunal y relativement ;

Considérant que la demanderesse n’étant pas professionnelle en la matière, sa requête tendant à voir porter la modération d’impôt à allouer sur base de l’article 55 (5) LIR de 42.690.- francs dégagés à travers les décisions directoriales déférées à 63.676.- sinon 59.578.-

francs s’analyse comme véhiculant un recours en réformation ;

Considérant qu’en vertu des dispositions combinées de l’article 8 (3) alinéa 1er de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et du paragraphe 228 AO, le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond en la matière ;

4 Que le recours, ayant par ailleurs été introduit suivant les formes et délai légaux, est recevable ;

Considérant que dans la mesure où les questions de procédure sont à analyser avant les questions ayant trait au fond, le tribunal est amené à examiner dans un premier temps le moyen invoqué par la demanderesse ayant trait à une prétendue violation de ses droits de la défense au cours de la procédure sur réclamation ayant abouti à la décision directoriale déférée ;

Considérant que le droit du contribuable d’être entendu avant la prise d’une décision administrative lui fixant une obligation patrimoniale plus lourde que celle par lui escomptée à travers sa déclaration ou lui fixant une imposition sur base des informations et documents qui sont à la disposition du bureau d’imposition, doit être interprété comme un droit élémentaire au profit du contribuable face à l’administration fiscale, découlant des droits de la défense et plus particulièrement du principe du contradictoire ;

Considérant que le paragraphe 205 (3) AO en disposant que : “ Wenn von der Steuererklärung abgewichen werden soll, sind dem Steuerpflichtigen die Punkte, in denen eine wesentliche Abweichung zu seinen Ungunsten in Frage kommt, zur vorherigen Äusserung mitzuteilen ”, met en substance à charge du bureau d’imposition, préalablement à l’émission du bulletin d’impôt, une obligation positive de communication des éléments au sujet desquels il envisage ne pas s’en tenir à la déclaration du contribuable, pour autant que ces éléments représentent une “ wesentliche Abweichung ” en défaveur du contribuable par rapport à sa déclaration ;

Considérant que dans la mesure où le directeur, lorsqu’il statue sur une réclamation dont il est saisi, agit en tant qu’autorité hiérarchique en vertu d’une procédure interne propre à l’administration des Contributions directes, ses décisions revêtent un caractère administratif (cf. projet de loi portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, doc. parl. 3940 A4, page 5) ;

Considérant que le paragraphe 244 AO énonce que “ die Rechtsmittelbehörden haben die Befugnisse, die den Steuerämtern im Besteuerungsverfahren gegeben sind ” et implique dès lors mutatis mutandis l’application corrélative des garanties y inhérentes pour le contribuable ;

Considérant qu’il s’ensuit que les dispositions du paragraphe 205 (3) AO s’imposent également au directeur pour sa propre instruction de la cause lui soumise, et ce non seulement lorsqu’il entend réformer l’imposition in pejus sur base de ses propres mesures d’instruction, par rapport à la décision du bureau, mais également lorsqu’il fixe une cote d’impôt, qui, tout en étant inférieure à celle retenue par le bureau, reste néanmoins plus élevée que celle initialement escomptée par le contribuable à travers sa déclaration ;

Que l’application des dispositions du paragraphe 205 (3) AO s’effectue au niveau directorial dans les limites y visées sans préjudice de celle des dispositions propres au Rechtsmittelverfahren, dont le paragraphe 257 AO invoqué par le délégué du Gouvernement ;

Considérant que se basant entre autres sur les énonciations de la décision déférée, la partie demanderesse n’invoque pas que l’analyse du directeur, statuant sur la réclamation lui soumise, aurait porté sur des pièces du dossier non connues par elle ;

5 Que plus particulièrement le document relatant le recalcul fictif du droit de succession a été établi par le préposé du bureau de l’administration de l’Enregistrement de Capellen, à la demande de la réclamante et introduit par celle-ci le 23 février 1999, soit avant imposition ainsi que prend soin de le souligner le directeur ;

Que de même les montants à la base de la ventilation opérée résultent du décompte du notaire, sinon versé par le demanderesse, du moins amplement connu par elle ;

Considérant qu’il convient de retenir que le directeur s’est basé sur des éléments de fait entièrement connus par la partie demanderesse au moment d’introduire sa réclamation et se mouvant dans un cadre légal précis se trouvant à la base de la demande en modération d’impôt introduite en vertu de l’article 55 (5) LIR ;

Considérant qu’il a dès lors été loisible et possible pour la partie demanderesse d’étayer toutes les considérations juridiques s’en dégageant dans le cadre de sa réclamation ;

Considérant que les dispositions du paragraphe 205 (3) AO n’imposent pas au directeur de mener avec le réclamant une discussion approfondie sur les différentes possibilités d’interprétation purement juridiques des dispositions de la loi applicable au-delà de la qualification des faits ;

Considérant que dans la mesure où la partie réclamante avait à sa disposition l’ensemble des éléments de fait sur lesquels s’est basé le directeur et que ce dernier a statué dans un cadre légal prétracé, sans invocation de dispositions autres que celles qu’a pu utilement analyser la demanderesse au moment de sa réclamation, comme de fait elle s’y est adonné, aucune audition préalable au vœu de l’article 205 (3) AO ne s’imposait en l’espèce ;

Que dès lors le premier moyen est à écarter ;

Considérant que l’article 55 (5) LIR dispose que : “ lorsque le contribuable a acquis l’entreprise, la partie ou la fraction d’entreprise dans les trois années précédant la réalisation et qu’il a payé de ce fait un droit de succession, l’impôt relatif au bénéfice de cession est réduit sur demande. La réduction d’impôt ne peut être supérieure au montant de la réduction de droit de succession que le contribuable aurait obtenue si l’impôt relatif au bénéfice de cession avait été pris en considération comme passif de la succession. L’impôt relatif au bénéfice de cession est égal à la diminution d’impôt qui résulterait de l’omission de ce bénéfice ” ;

Considérant que l’article 102 (13) LIR prévoit que “ l’alinéa final de l’article 55 est applicable à l’impôt résultant de l’application de chacun des quatre articles 99ter à 101 ” ;

Considérant qu’il est constant que l’impôt sur plus-values immobilières déboursé par la demanderesse dans la cadre de la succession de feu X. relève de l’article 102 (13) LIR ;

Considérant qu’ainsi que l’a analysé à juste titre le directeur dans sa décision déférée, les conditions d’application de l’article 55 (5) première phrase LIR sont à lire en combinaison avec celles de l’article 102 (13) LIR, de sorte que si le contribuable a acquis des immeubles dans les trois années précédant la réalisation et qu’il a payé de ce fait un droit de succession, l’impôt relatif à la plus-value est réduit sur demande ;

6 Considérant qu’il est encore constant qu’en l’occurrence le droit de succession payé du fait de la vente d’immeubles est inférieur au droit total, alors que l’actif brut comporte, d’après décompte du notaire, d’autres éléments ;

Que dès lors les conditions d’application combinées des articles 55 (5) et 102 (13) LIR se trouvent réalisées en l’espèce, ainsi que l’a relevé encore à juste titre la décision déférée ;

Considérant que le tribunal partage encore l’analyse directoriale déférée en ce que les dispositions de l’article 55 (5) seconde phrase LIR, dans leur combinaison avec celles de l’article 102 (13) LIR entraînent que la réduction d’impôt ne peut être supérieure au montant de la réduction de droit de succession que le contribuable aurait obtenue si l’impôt relatif à la plus-value immobilière avait été prise en considération comme passif de la succession ;

Considérant qu’il découle de la fixation d’un plafond ainsi effectué que la réduction d’impôt peut également être fixée à un montant inférieur à ce maximum représenté par la réduction de droit de succession visée ;

Que pareille réduction ne peut cependant s’opérer que pour des raisons légales dûment motivées, notamment en ce que le bénéfice de cession comprendrait des réserves occultes dont la naissance est postérieure à l’ouverte de la succession, étant entendu qu’au cas où ces réserves seraient importantes par rapport aux réserves existant déjà dans le chef du de cujus, la réduction pourrait être limitée en proportion (cf. doc. parl. 57113, p. 16) ;

Qu’ici encore le directeur a retenu à juste titre que pareille condition ne se trouvait pas être vérifiée en l’espèce ;

Considérant qu’il se dégage encore des développements qui précèdent que dans la mesure où aucune cause de réduction de la modération d’impôt prévue par l’article 55 (5) LIR en dessous du plafond y défini ne se trouve être vérifiée, il convient de faire droit à la demande en modération à concurrence du plafond en question qui n’est autre que la réduction de droit de succession que le contribuable aurait obtenue si l’impôt relatif à la plus-value immobilière avait été prise en considération à l’époque de sa liquidation, aurait-il été connu et dûment arrêté à ce moment ;

Considérant qu’il est constant que le droit de succession est perçu sur la valeur de tous les biens meubles et immeubles composant la succession, à l’exception des immeubles situés à l’étranger, et des meubles situés à l’étranger dans certains cas, déduction faite des dettes figurant au passif de la même succession ;

Que le droit de succession est dès lors calculé sur un total représentant l’actif net avant perception des droits, encore appelé part nette imposable recueillie ;

Que la part nette imposable recueillie est établie indépendamment des différentes composantes de l’actif et du passif l’ayant dégagée ;

Considérant que c’est également en fonction du montant total de la part nette imposable recueillie qu’est fixée la majoration du taux applicable suivant un tableau des dixièmes fixé par la loi ;

7 Qu’à cet égard, le mécanisme régulateur de l’estompage des limites spécialement prévu par la loi n’intervient qu’au niveau du calcul du droit de succession et ne saurait à son tour autrement influer sur la modération d’impôt à liquider sur base de l’article 55 (5) LIR ;

Considérant qu’il découle des développements qui précèdent que pour une succession qui par hypothèse légale comporte à côté des éléments ayant engendré l’impôt sur les plus-

values immobilières dont s’agit, d’autres postes d’actif, cette dernière circonstance n’influe pas sur le montant de la réduction d’impôt à allouer dans la mesure où de ce chef seule la part nette imposable globalement recueillie par l’héritier ou le légataire concerné s’en trouve modifiée vers le bas, avec pour conséquence un montant de droit de succession corrélatif amoindri conformément aux dispositions légales applicables ;

Qu’aucune ventilation suivant les différents éléments d’actif n’est dès lors à opérer dans le cadre de la fixation de la réduction d’impôt prévue l’article 55 (5) LIR ;

Considérant que le droit de succession est acquis au moment du décès, le tarif et la valeur applicables étant ceux de la loi en vigueur à cette époque ;

Considérant que, par essence, le droit de succession proprement dit ne comprend pas les intérêts de retard ainsi qualifiés, tout comme la part nette recueillie à la base du droit de succession n’est pas réévaluée au moment où sa liquidation intervient ;

Considérant que d’après l’article 12.4 LIR “ sans préjudice des dispositions relatives aux dépenses spéciales, ne sont déductibles ni dans les différentes catégories de revenus nets ni du total des revenus nets les dépenses ci-après énumérées : (…) 4. les amendes tant pénales qu’administratives, confiscations, transactions et autres pénalités de toute nature mises à charge du contribuable pour non-observation de dispositions légales ou réglementaires, même lorsque ces pénalités sont en rapport économique avec une ou plusieurs catégories de revenus nets ” ;

Considérant que l’article 155bis LIR tel que résultant de l’article 4 de la loi du 31 juillet 1982 modifiant certaines dispositions en matière d’impôts directs dispose que “ les intérêts de retard constituent des prestations accessoires aux impôts auxquels ils se rapportent. Les dispositions applicables à ces impôts sont d’application correspondante aux intérêts de retard ” ;

Considérant que dans la mesure où l’article 155bis LIR ne distingue pas, le droit de succession est à comprendre parmi les impôts y visés ;

Considérant que l’article 155bis LIR en question a été introduit pour entériner une pratique suivie par l’administration ayant consisté “ à ne pas attribuer à de tels [intérêts de retard dus au titre des différentes catégories d’impôt] la qualification d’une amende, ce qui les rendrait non déductibles par application de l’article 12. 4 LIR, mais de leur enlever la qualification d’intérêts déductibles, suivant le cas, comme dépenses d’exploitation, frais d’obtention ou dépenses spéciales, du moment qu’ils se rapportent à des impôts non déductibles comme le sont notamment l’impôt sur le revenu et l’impôt sur la fortune (doc.

parl. n° 25311, avis du Conseil d’Etat, ad. art. 4, p. 2) ” ;

8 Considérant qu’au-delà de la qualification des intérêts de retard en matière de droit de succession, le critère distinctif prévu par le législateur en vue de l’application de l’article 155bis LIR est celui de savoir si les droits de succession à la base sont déductibles, auquel cas les intérêts de retard y relativement déboursés le sont également ;

Considérant que la déduction d’impôt prévue par la combinaison des articles 55 (5) et 102 (13) LIR correspond en l’espèce au montant de la réduction de droit de succession fictivement dégagée pour le cas où l’impôt relatif à la plus-value immobilière concernée aurait pu être pris en considération à l’époque de sa liquidation ;

Considérant que dans la mesure où sur base de l’article 155bis LIR les intérêts de retard déboursés quant au droit de succession constituent des prestations accessoires à cette catégorie d’impôt, à laquelle ils se rapportent, les dispositions des articles combinés 55 (5) et 102 (13) LIR applicables au droit de succession proprement dit, sont dès lors d’application correspondante aux intérêts de retard sur base du libellé même de l’article 155bis LIR ;

Considérant qu’il se dégage de l’ensemble des développements qui précèdent que la demande en réduction présentée par Madame … SCHUMACHER-OTH sur base des articles combinés 55 (5) et 102 (13) LIR se trouve être fondée à concurrence du montant réclamé en ordre principal de 63.676.- francs ;

Que la décision directoriale déférée encourt partant la réformation en ce sens ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en réformation recevable ;

au fond le dit justifié ;

réforment, fixe la modération d’impôt sur base des articles 55 (5) et 102 (13) LIR combinés à 63.676.- francs ;

renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes en prosécution de cause ;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 mai 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 9


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11689
Date de la décision : 29/05/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-05-29;11689 ?

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