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23/05/2000 | LUXEMBOURG | N°11206a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 mai 2000, 11206a


N° 11206a du rôle Inscrit le 23 mars 1999 Audience publique du 23 mai 2000

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Recours formé par Madame … GALLO, … contre deux délibérations du conseil communal de … et une décision d’approbation tutélaire du ministre de l’Intérieur en présence de la société à responsabilité limitée X., … en matière de plan d’aménagement particulier

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11206C du rôle et

déposée au greffe de la Cour administrative en date du 23 mars 1999 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cou...

N° 11206a du rôle Inscrit le 23 mars 1999 Audience publique du 23 mai 2000

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Recours formé par Madame … GALLO, … contre deux délibérations du conseil communal de … et une décision d’approbation tutélaire du ministre de l’Intérieur en présence de la société à responsabilité limitée X., … en matière de plan d’aménagement particulier

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11206C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative en date du 23 mars 1999 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … GALLO, employée privée, demeurant à L-…, tendant à l’annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif 1.

de la délibération du conseil communal de … du 25 novembre 1996 ayant porté adoption provisoire du projet d’aménagement particulier, en abrégé “ PAP ”, au lieu-dit “ … ”, présenté par la société à responsabilité limitée X. (société d’aménagement de sites), établie et ayant son siège social à L-…, 2.

des délibérations du conseil communal de … des 29 avril et 25 mai 1998 ayant porté adoption définitive dudit PAP, 3.

de la décision du ministre de l’Intérieur du 14 décembre 1998 notifiée à Madame GALLO le 4 janvier 1999 portant approbation de la délibération précitée du conseil communal de … du 25 mai 1998, et écartant comme irrecevable la réclamation par elle introduite ;

Vu le jugement du 21 février 2000 ordonnant, avant tout autre progrès en cause, la réouverture des débats pour permettre aux parties de prendre position par rapport à la recevabilité ratione temporis du recours, tout en autorisant chacune d’elles à déposer un mémoire complémentaire dans le mois de sa notification ;

Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 mars 2000 par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Roland FUNK, demeurant à Luxembourg, du 15 mars 2000 portant signification de ce mémoire complémentaire à Madame … GALLO, ainsi qu’à la société à responsabilité limitée X. ;Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 mars 2000 par Maître Jean MEDERNACH, au nom de Madame … GALLO ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 13 mars 2000 portant notification de ce mémoire complémentaire à Maître Roger NOTHAR ;

Vu le mémoire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 17 mars 2000 par Maître Gerry OSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 17 mars 2000 portant signification de ce mémoire à Madame … GALLO, ainsi qu’à l’administration communale de … ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Roger NOTHAR, Cathy ARENDT et Luc REDING, de même que Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 avril 2000.

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Considérant que par requête déposée en date du 23 mars 1999 au greffe de la Cour administrative et inscrite sous le numéro 11206C du rôle, Madame … GALLO, employée privée, demeurant à L-…, a formé un recours en annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif dirigé à la fois contre 1. la délibération du conseil communal de … du 25 novembre 1996 ayant porté adoption provisoire du projet d’aménagement particulier, en abrégé “ PAP ”, au lieu-dit “ … ”, présenté par la société à responsabilité limitée X. (société d’aménagement de sites), établie et ayant son siège social à L-…, 2. les délibérations du conseil communal de … des 29 avril et 25 mai 1998 ayant porté adoption définitive dudit PAP, et 3. la décision du ministre de l’Intérieur du 14 décembre 1998 lui notifiée le 4 janvier 1999 portant approbation de la délibération précitée du conseil communal de … du 25 mai 1998, et écartant comme irrecevable la réclamation par elle introduite ;

Considérant que le recours ayant été transmis sans autre forme de procédure au tribunal administratif suivant les dispositions de l’article 71 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, pour y revêtir le numéro 11206 du rôle, le tribunal administratif, par son jugement du 21 février 2000 (n° 11206 du rôle), a retenu que l’intérêt à agir de Madame GALLO remplissait les conditions fixées par l’article 7 (2) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée et a écarté l’irrecevabilité omisso medio soulevée par les parties défenderesses ;

Considérant qu’après avoir retenu que fondamentalement les délibérations communales portant adoption respectivement provisoire et définitive d’un PAP, ainsi que la décision d’approbation ministérielle y relative, constituent, chacune en ce qui la concerne, un acte 2 administratif réglementaire au sens de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, et que chacun de ces actes pouvait être attaqué individuellement devant le tribunal administratif sur base dudit article 7 dans la mesure des moyens de légalité dirigés à son encontre et le concernant directement, le tribunal a ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de prendre position par rapport à la recevabilité ratione temporis du recours ;

Considérant qu’il est constant en cause que ladite loi du 7 novembre 1996 est entrée en vigueur le 1er janvier 1997, tandis que la décision d’adoption provisoire du conseil communal de … est antérieure pour dater du 25 novembre 1996, les autres décisions déférées y étant postérieures ;

Considérant que les parties se rejoignent pour admettre que l’existence d’une voie de recours est une règle de fond et non pas une règle de forme, régie dès lors par la loi en vigueur au moment où la décision visée au recours a été rendue ;

Qu’elles conviennent encore de ce que la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur intervient en tant qu’acte de tutelle et rétroagit dès lors à la date de la décision approuvée ;

Que la commune fait valoir que par application de l’article 12 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, l’approbation tutélaire rétroagirait à la date du dépôt des plans provisoirement approuvés par le conseil communal à la maison communale, soit en l’espèce au 2 décembre 1996 ;

Qu’elle en conclut que le recours réglementaire serait irrecevable, pour ne pas avoir existé avant le 1er janvier 1997 ;

Que Madame GALLO fait valoir que la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur du 14 décembre 1998 serait intervenue à l’égard de la délibération du conseil communal de … du 25 mai 1998 portant adoption définitive du PAP, de sorte qu’elle rétroagirait, quant à ses effets, à une date postérieure au 1er janvier 1997 ;

Que par voie de conséquence le recours serait pour le moins recevable en tant que dirigé contre les décisions d’adoption définitive du PAP et d’approbation ministérielle déférées ;

Considérant que l’existence de la voie de recours créée par l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, question concernant le fond du droit et non la procédure, est régie, en l’absence de mesures transitoires, par la loi selon laquelle a été rendue la décision attaquée (Cour adm. 10 juillet 1997, Gloesener, n° 9804C du rôle) ;

Considérant que par voie de conséquence le recours dirigé sur base de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 contre la délibération du conseil communal de … du 25 novembre 1996 portant adoption provisoire du PAP est irrecevable ratione temporis ;

Considérant que la procédure inscrite dans les dispositions de l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée est applicable pour tous les projets d’aménagement, qu’ils 3 soient particuliers ou généraux, ledit article 9 prenant soin in limine de préciser qu’il s’applique “ sans préjudice de la disposition inscrite à l’article 3, alinéa 3 ” ;

Considérant que suivant l’article 3 alinéa 3 de ladite loi modifiée du 12 juin 1937, un vote d’ensemble définitif par le conseil communal, ainsi qu’une approbation ministérielle d’ensemble sont prévus, en ce qu’il y est prescrit que les projets imposés aux associations, sociétés et particuliers, doivent être revêtus de l’approbation gouvernementale (C.E. 12 avril 1984, P. 26, p. 91, trib. adm. 2 février 2000, Kremer, n°s 10929 à 10931 du rôle, trib. adm. 21 février 2000, Gallo, n° 11206 du rôle, trib. adm. 21 février 2000, Feitler, n° 11434 du rôle) ;

Qu’il convient de relever par ailleurs que dans la mesure où dans le chef des plans d’aménagement particuliers les dispositions des articles 3 alinéa 3 et 9 de la loi modifiée du 12 juin1937 précitée s’appliquent cumulativement, sous réserve de leur compatibilité, la possibilité de diriger des réclamations au gouvernement contre les délibérations du conseil communal portant adoption définitive d’un PAP est ouverte à plus forte raison, en ce que le conseil communal, en procédant à un vote d’ensemble définitif, a statué à nouveau par rapport à l’ensemble des dispositions du PAP ;

Considérant qu’en l’espèce, par sa décision déférée du 14 décembre 1998, le ministre de l’Intérieur s’est à la fois exprimé, parmi d’autres, par rapport à la réclamation introduite par Madame GALLO, en la déclarant irrecevable en la forme en tant que faisant preuve d’un vice de procédure et a approuvé la délibération du conseil communal de … du 25 mai 1998 portant adoption définitive du PAP ;

Considérant que conformément aux dispositions combinées des articles 3 alinéa 3 et 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, la décision d’approbation tutélaire du ministre de l’Intérieur ne se rapporte pas à la délibération du conseil communal ayant porté approbation provisoire du PAP ;

Considérant que dès lors à la fois les délibérations du conseil communal de … portant adoption définitive du PAP et la décision d’approbation ministérielle statuant y relativement se situent après le 1er janvier 1997, date d’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 précitée ;

Que dès lors le recours, en ce qu’il est dirigé contre ces deux séries de décisions, n’est pas irrecevable ratione temporis ;

Considérant que la commune soulève encore l’irrecevabilité du recours pour non-

respect du délai de trois mois prévu à l’article 7 (3) de la loi du 7 novembre 1996 précitée, étant donné qu’en matière d’actes administratifs à caractère réglementaire, la possibilité d’un recours gracieux ne serait pas donnée et que le recours contentieux devrait être obligatoirement intenté dans les trois mois de la publication de l’acte attaqué sinon, à défaut de publication, de sa notification ou du jour où la requérante en a eu connaissance ;

Que la connaissance de la demanderesse des décisions d’adoption définitive du PAP des 29 avril et 25 mai 1998 remonterait pour le moins à la date du 17 juin 1998, ainsi qu’il résulterait de sa lettre de réclamation émanant de son mandataire adressée au ministre de l’Intérieur ;

4 Que dès lors le recours introduit le 23 mars 1999 serait irrecevable en raison de sa tardiveté ;

Considérant qu’il est constant que les décisions d’adoption communales du PAP concerné et d’approbation ministérielle subséquente participent toutes de la procédure prévue aux dispositions combinées des articles 3 et 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 aboutissant à la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur statuant en tant qu’autorité tutélaire dans le cadre des pouvoirs lui conférés sur base de l’article 107 de la Constitution ;

Considérant qu’en règle générale les actes de tutelle administrative rétroagissent quant à leurs effets à la date de la décision approuvée (Cour adm. 7 avril 1998, Schmit-Fischbach, n° 10562C du rôle, Pas. adm. 01/2000, V° Tutelle administrative, n° 18, p. 343 et autres références y citées) ;

Considérant que nonobstant le caractère rétroactif de l’acte de tutelle, le délai d’introduction du recours contentieux ne commence cependant à courir qu’à partir du jour de l’acte d’approbation en cas de recours d’un administré pour excès de pouvoir, l’acte initial soumis à l’approbation du Gouvernement ne faisant pas grief à l’administré tant que l’approbation n’est pas intervenue (même décisions citant Buttgenbach, Manuel de droit administratif, 2e éd., 1959, n°s 157 et 158) ;

Considérant que la doctrine belge considère en général, à l’instar de son homologue français, que l’excès de pouvoir englobe l’ensemble des illégalités objectives de l’acte administratif, bien que la loi ne consacre pas expressément cette désignation (Auby et Fromont, Les recours contre les actes administratifs dans les pays de la Communauté Economique Européenne, p. 156 ; trib. adm. 31 janvier 2000, Fortes, n° 11432 du rôle) ;

Considérant qu’il est constant que le système de recours en annulation contre les actes administratifs à caractère réglementaire introduit à travers l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 par le législateur luxembourgeois a été qualifié d’original, tout en s’étant inspiré des législation et pratique belges (François Biltgen et Luc Frieden – La grande réforme du contentieux administratif et fiscal – in Articles et conférences, Banque Internationale à Luxembourg, 2/1997, p. 40) ;

Considérant qu’il s’ensuit que non seulement pour le cas d’ouverture de l’excès de pouvoir stricto sensu au sens de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, mais pour tous les cinq cas d’ouverture y contenus, les délais de recours contentieux prévus au même article ne commencent à courir à l’encontre de l’acte à approuver qu’à partir du jour de la publication de l’acte statuant sur son approbation ;

Considérant que cette conclusion n’est pas énervée en matière d’élaboration des plans d’aménagement communaux sur base des dispositions de l’article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937, en ce qu’en vertu de l’article 12 de la même loi, certains effets provisoires sont attachés aux projets d’aménagement en question dès leur dépôt à la maison communale ;

Qu’en effet, d’après le second alinéa dudit article 12, en cas de contestations de la part des intéressés, il y est statué par le ministre de l’Intérieur et, dans les 8 jours de la notification de sa décision, les intéressés pourront former un recours au tribunal administratif qui 5 statuera avec juridiction directe, bien que s’agissant à la base d’actes administratifs à caractère réglementaire ;

Considérant que le recours introduit le 23 mars 1999 répond au délai légal prévu par l’article 7 alinéa 3 de la loi du 7 novembre 1996 précitée en ce qu’il est intervenu moins de trois mois après la notification faite à Madame GALLO le 4 janvier 1999 de la décision tutélaire du ministre de l’Intérieur en question ;

Que le moyen de tardiveté doit dès lors également être écarté ;

Que la demande en relevé de forclusion présentée par Madame GALLO en ordre subsidiaire devient par voie de conséquence sans objet ;

Considérant que la commune conclut encore à l’inexistence d’un recours devant le ministre de l’Intérieur, alors que d’après elle, le jugement du 21 février 2000 intervenu dans la présente affaire aurait encore admis pour droit que les dispositions de l’article 9 alinéa 3 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée ne vaudraient comme telles que pour la seule procédure d’adoption des plans d’aménagement généraux, les PAP étant soumis à un régime spécifique d’adoption et d’approbation suivant son article 3 ;

Que dès lors au lieu de déclarer irrecevable omisso medio la réclamation de la requérante, le ministre de l’Intérieur aurait dû la déclarer irrecevable comme n’étant pas prévue par la loi en matière de PAP ;

Que la demanderesse de conclure que l’administration communale de …, n’ayant pas introduit dans le délai légal un recours contentieux contre l’acte d’approbation du ministre de l’Intérieur du 14 décembre 1998, serait actuellement forclose à critiquer les motivations de sa décision, sa demande afférente étant encore à la fois irrecevable et non fondée ;

Considérant qu’il vient d’être dégagé qu’en matière de plans d’aménagement particuliers, les dispositions des articles 3 alinéa 3 et 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 s’appliquent de façon cumulative, dans la mesure de leur compatibilité ;

Considérant que le fait pour le plan d’aménagement particulier d’être soumis à la fois à un vote d’ensemble définitif par le conseil communal et à une approbation ministérielle d’ensemble à travers l’article 3 alinéa 3 de ladite loi n’est certainement pas incompatible avec la possibilité d’une réclamation au Gouvernement ouverte par son article 9 alinéa 3 ;

Que bien au contraire la possibilité du recours au Gouvernement n’en est que confirmée et étendue, dans la mesure où également les intéressés qui ne s’étaient pas opposés à la délibération communale portant adoption provisoire du PAP gardent qualité pour s’adresser au Gouvernement suite à l’adoption définitive qui en a été faite, sans encourir de ce chef une irrecevabilité omisso medio, ce que justement le jugement précité du 21 février 2000 a retenu ;

Considérant qu’étant donné que le moyen soulevé par la commune s’analyse en moyen d’ordre public, les arguments tendant à son irrecevabilité, tels que présentés par la demanderesse, sont à écarter ;

Que néanmoins le moyen en lui-même n’est pas fondé ;

6 Considérant qu’il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours en annulation déposé sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 précitée est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi dans la mesure où il est dirigé à l’encontre des délibérations du conseil communal de … des 29 avril et 25 mai 1998 ayant porté adoption définitive du PAP, ainsi que de la décision ministérielle déférée du 14 décembre 1998 ;

Considérant qu’il est constant que le conseil communal de … statuant définitivement sur l’adoption du PAP en ses séances des 29 avril et 25 mai 1998, n’était pas, à l’époque, saisi d’une réclamation de Madame GALLO, tandis que le ministre de l’Intérieur, saisi d’une réclamation de Madame GALLO, a déclaré celle-ci irrecevable omisso medio ;

Considérant qu’il découle directement des développements du jugement précité du 21 février 2000, réitérés ci-haut, que c’est à tort que le ministre de l’Intérieur a prononcé l’irrecevabilité en question ;

Considérant que le tribunal est encore saisi des moyens proposés au fond à l’égard des décisions communales d’adoption définitive du PAP déférées, dont les conclusions ont été épousées par le ministre de l’Intérieur à travers sa décision d’approbation, étant précisé que dans la mesure où lesdits moyens seraient déclarés non fondés par le tribunal, le rejet de la réclamation prononcée par le ministre serait justifié par voie de substitution de motifs au fond ;

Considérant que la demanderesse se rapporte d’abord à prudence de justice quant à la régularité de la procédure de formalisation du PAP menée ;

Qu’elle soutient ensuite que ni le plan d’aménagement général, ni le règlement sur les bâtisses de la commune de … ne prévoient la possibilité de ne couvrir la zone définie au PAG comme “ zone soumise à un plan vert détaillé ”, que par un PAP englobant une partie du nouveau quartier seulement et excluant, comme en l’espèce, certains fonds tels ceux de la demanderesse, qui, par ailleurs, sont classés d’après le PAG en secteur constructible et deviendraient par voie de conséquence totalement inutilisables et sans valeur aucune ;

Que le PAP litigieux, ne couvrant qu’une partie de la zone concernée, serait dès lors illégal, partant nul ;

Que même à supposer la possibilité d’un PAP partiel en l’espèce, celui proposé n’aurait pu trouver l’approbation des autorités communales et étatiques saisies que dans la mesure où il ne compromet pas l’aménagement rationnel et cohérent de l’ensemble de la zone, y compris le restant et ne lèse pas les droits des propriétaires des autres parcelles non comprises dans le périmètre du PAP partiel ;

Qu’en l’espèce les parcelles GALLO, non comprises dans le PAP, seraient bloquées entre la voie publique et le lotissement, privées à tout jamais d’une profondeur utile et renseignées comme plage de verdure, de sorte à être soustraites à toute construction future ou autre utilisation rationnelle, situation revenant à une expropriation de fait illégale et sans indemnité aucune ;

7 Que suivant la configuration des lieux les parcelles GALLO auraient absolument dû être incluses dans le périmètre du PAP, quitte à les destiner, si nécessaire, à des plages de verdure, mais après remembrement ou rectification des limites des surfaces de l’ensemble du lotissement ;

Que la commune estime que l’article 2.3.6 Rb, en tant que disposition d’un règlement de police appelant une interprétation restrictive, permettrait à celui qui fait établir un plan d’aménagement particulier dans la zone concernée de limiter le PAP à la zone prévue pour l’aménagement de son projet sans avoir besoin d’établir un PAP couvrant la totalité de la zone prévue au PAG en tant que zone soumise à un plan vert détaillé ;

Que cette interprétation serait conforme aux dispositions de l’article 1er de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée ;

Que si en l’espèce le PAP “ … ” couvrait une surface totale de 250 ares 90 centiares, cet aréal, certes important, n’engloberait pas la totalité de la zone prévue au plan d’aménagement général comme zone soumise à un plan vert détaillé ;

Que dès lors qu’un particulier entreprenant de créer ou de développer des lotissements de terrains ou des groupes d’habitation serait tenu de faire élaborer un projet d’aménagement au sens de l’article 1er de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, il ne disposerait cependant d’aucun pouvoir pour contraindre d’autres particuliers à participer audit lotissement ;

Que de même ni l’administration communale, ni l’Etat n’auraient la permission d’intervenir dans les discussions entre particuliers et de peser sur les négociations en matière de prix ;

Que dans la mesure où Madame …, la mère de la demanderesse, n’a pas trouvé d’accord avec la société X. sur le prix des terrains, elle aurait à bon droit pu décider de ne pas participer au lotissement ;

Que ce faisant elle serait malvenue de discuter et de contester la concertation des autres propriétaires ayant abouti à un accord pour l’organisation dudit lotissement ;

Que la partie demanderesse de répliquer que dans son avis du 14 octobre 1998, la commission d’aménagement près du ministère de l’Intérieur, tout en qualifiant le recours par elle introduit auprès du Gouvernement comme irrecevable retiendrait néanmoins qu’elle partage ses vues au fond et que le PAP actuellement présenté serait contraire à un urbanisme cohérent ;

Que sur base de cette seule constatation objective, le ministre de l’Intérieur aurait eu l’obligation, de plein droit et même en l’absence de toute réclamation de la part d’un administré de refuser l’approbation du PAP litigieux ;

Que l’argumentation de la commune, reprenant celle du promoteur suivant laquelle les terrains GALLO, compte tenu leurs formes et dimensions, n’auraient jamais constitué de places à bâtir, serait inopérante au regard de l’existence de mécanismes légaux, tels le remembrement et la rectification des limites appelés à éviter pareille situation ;

8 Que dans son mémoire en duplique, la commune estime que l’avis précité de la commission d’aménagement serait contraire aux dispositions de l’article 2.3.6 Rb également précité, d’après lequel un PAP pourrait être limité à une partie déterminée de la zone en question, de sorte que le ministre n’aurait pas pu se baser valablement d’office sur les conclusions de la commission en question ;

Qu’en vertu du principe d’autonomie de la volonté des administrés, la commune n’aurait pas le pouvoir de contraindre une personne à participer à un lotissement, tout comme il serait contraire à la loi d’accorder un droit de veto à une minorité insignifiante eu égard au projet commun de la majorité des propriétaires prêts à participer au lotissement ;

Que dans son mémoire du 17 mars 2000, la société X. se rallie entièrement aux conclusions de l’administration communale de …, sauf à relever des tractations récentes avec Madame GALLO mettant derechef à jour l’énorme différence subsistant entre elles, sur l’évaluation réciproque de la valeur des terrains de la demanderesse ;

Considérant qu’il est constant en cause que tant les terrains litigieux de Madame GALLO que ceux soumis au PAP sous analyse relèvent de la zone soumise à un plan vert détaillé tel que défini à l’article 2.3.6 Rb ;

Qu’il est encore acquis que les terrains soumis au PAP, outre les parcelles de Madame GALLO, n’englobent pas l’entièreté des fonds soumis à cette zone au lieu-dit “ … ” ;

Considérant que d’après l’article 2.3.6 Rb “ les secteurs classés en zone soumise à un plan vert détaillé sont des secteurs constructibles sous condition que le milieu naturel existant ne supporte pas de nuisances. Les biotopes de valeur existant dans ces secteurs (par ex. zones humides, vergers, rangées de haies, etc.) devront être sauvegardés. Exceptionnellement, si l’aménagement rationnel du secteur serait compromis, ces biotopes pourront être remplacés qualitativement et quantitativement par des biotopes de compensation dans le même secteur ou dans son voisinage immédiat.

Avant toute construction dans ces secteurs, le demandeur fera établir un plan d’aménagement particulier conformément à la loi du 9 juin 1937 ainsi qu’un plan vert détaillé qui portera sur les points suivants :

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inventaire et évaluation des éléments naturels existants dans la zone prévue pour l’aménagement ;

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propositions concernant des restrictions pour l’utilisation du sol ;

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aménagement paysager de la zone et mesures d’entretien des biotopes existants et projetés.

Le plan vert détaillé doit être approuvé par le Conseil Communal. …… ” ;

Considérant que dans la mesure où la disposition précitée énonce sous son premier tiret que le plan vert détaillé se rapportera à “ la ” zone prévue pour l’aménagement et qu’il ne définit pas autrement, ni ne distingue la délimitation de cette zone, il convient de retenir que celle-ci peut englober soit la totalité de la zone soumise à un plan vert détaillé à l’endroit, soit partie d’elle seulement, à condition qu’il ne compromette pas l’aménagement rationnel et cohérent de la zone concernée;

9 Considérant que l’exigence d’un plan d’aménagement particulier est constante en toute hypothèse prévue par l’article 2.3.6. Rb;

Considérant qu’un projet d’aménagement est désigné comme particulier non parce qu’il a été dressé dans un intérêt particulier, mais parce qu’il modifie et complète pour des terrains déterminés le plan d’aménagement général ;

Qu’ainsi, le plan d’aménagement particulier dûment approuvé participe au caractère de règlement de police à l’instar des règlements communaux en matière de bâtisses et il est dans cette mesure à caractère strict, tout comme il constitue une disposition permanente et générale conditionnant l’aménagement des agglomérations (cf. trib. adm. 15 juillet 1997, Welter, n° 9842 du rôle, Pas. adm. 01/2000, V° Urbanisme, n° 74 et autres références y citées) ;

Considérant qu’à travers ses critiques au fond, Madame GALLO reproche aux autorités communales et ministérielles de ne pas avoir imposé l’inclusion dans le périmètre du PAP de ses propres parcelles, quitte à les destiner, si nécessaire à des plages de verdure, le tout après remembrement ou rectification des limites et surface de l’ensemble du lotissement ;

Considérant que la procédure de rectification de limite entre riverains prévue aux articles 45 et suivants de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée s’opère à deux niveaux ;

Que dans un premier temps le propriétaire d’une parcelle qui, à raison de sa forme, ne permet pas une utilisation rationnelle comme place à bâtir, peut demander le redressement de ses limites par voie d’échange au propriétaire de la parcelle contiguë complémentaire ;

Que si le voisin en question refuse de coopérer à un redressement de limite, ou que les intéressés n’arrivent pas à s’entendre, chaque partie peut, sur base de l’article 50 de ladite loi, réclamer l’intervention du collège des bourgmestre et échevins, qui, s’il trouve la demande justifiée, établira d’office un projet de reclassement, sur lequel le ministre de l’Intérieur statuera en cas de contestation ;

Considérant qu’il n’a pas été établi en l’espèce que Madame GALLO ait, ne fût-ce qu’entamé une procédure de rectification des limites conformément aux articles 45 et suivants précités ;

Qu’à défaut d’initiative privée, les textes légaux en question ne prévoient pas la possibilité pour les autorités communales d’imposer pareille rectification dans le cadre légal précité ;

Considérant que le remembrement prévu aux articles 22 et suivants de la même loi est ordonné, d’après son article 23, par le ministre de l’Intérieur, sur l’initiative soit du collège échevinal, soit des propriétaires, s’ils représentent la majorité des intéressés et en même temps plus de la moitié de la surface des terrains à comprendre dans le remembrement, tout comme il pourra être décrété d’office sur les propositions de la commission d’aménagement ;

Considérant que Madame GALLO, à elle seule propriétaire minoritaire, ne rentre pas dans les prévisions de l’article 23 en question ;

10 Que d’après les données du dossier, le ministre de l’Intérieur n’a pas été saisi d’une demande en remembrement conformément à l’article 23 ;

Considérant que s’il est vrai que la commission d’aménagement, dans son avis du 14 octobre 1998, cité par ailleurs par la partie demanderesse, énonce qu’elle “ partage les vues de la réclamante que l’exclusion des terrains dont question est contraire au projet d’aménagement général et rend ces derniers inutilisables et donc sans valeur, ce qui est contraire à un urbanisme cohérent ”, il n’en reste pas moins qu’elle n’a pas par là même fait des propositions en vue d’un remembrement incluant ces parcelles, permettant de décréter cette mesure d’office ;

Qu’étant donné que les conditions posées par la loi en vue d’ordonner un remembrement ne sont pas réunies en l’espèce, ni le conseil communal, ni le ministre de l’Intérieur, saisis dans le cadre de l’adoption, voire de l’approbation d’un PAP, n’ont pu procéder spontanément à pareille mesure, telle que suggérée par Madame GALLO ;

Considérant que dans la mesure où Madame GALLO n’a pas entamé la procédure d’une rectification des limites entre riverains et conformément aux articles 45 et suivants de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée et que les conditions d’un remembrement incluant ses parcelles ne sont pas remplies pour voir imposer cette mesure, force est de constater que les critiques par elle actuellement portées contre le PAP sous rubrique se limitent à souligner un intérêt privé non autrement par elle corroboré d’après les possibilités ouvertes par les dispositions légales applicables ;

Considérant que pour le surplus elle n’établit pas que le PAP présenté compromettrait l’aménagement rationnel et cohérent de la zone soumise à un plan vert détaillé concernée ;

Considérant que s’il est vrai qu’une utilisation rationnelle du sol aurait été possible à partir de la rue de … en englobant les terrains GALLO, il n’en reste pas moins que le PAP actuellement présenté est cohérent en lui-même d’après le périmètre par lui tracé et l’urbanisation menée le long des voies de circulation projetées ;

Considérant que le tribunal saisi dans le cadre d’un recours dirigé contre un acte administratif à caractère réglementaire sur base de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée n’est point appelé à analyser l’opportunité ayant guidé les autorités compétentes, dont les décisions lui sont déférées ;

Considérant qu’après avoir constaté que le PAP litigieux répondait aux impératifs légaux posés concernant la délimitation du périmètre d’aménagement par lui prévu, il n’appartient pas au tribunal d’y substituer une autre variante par inclusion forcée de parcelles potentiellement constructibles, pour lesquelles leur propriétaire n’a par ailleurs pas autrement épuisé les mécanismes légaux de mise en valeur ;

Considérant qu’il résulte des développements qui précèdent que le recours laisse d’être fondé ;

Par ces motifs, 11 le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours irrecevable en tant que dirigé contre la délibération du conseil communal de … du 25 novembre 1996 ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 mai 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 12


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11206a
Date de la décision : 23/05/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-05-23;11206a ?

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