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08/05/2000 | LUXEMBOURG | N°11431

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 mai 2000, 11431


N° 11431 du rôle Inscrit le 2 août 1999 Audience publique du 8 mai 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée GTA, s. à r.l., Luxembourg contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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Vu la requête déposée en date du 2 août 1999 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …

, réviseur d’entreprises, demeurant à L-…, au nom de la société à responsabilité limitée GTA s. à r.l.,...

N° 11431 du rôle Inscrit le 2 août 1999 Audience publique du 8 mai 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée GTA, s. à r.l., Luxembourg contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt commercial communal

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Vu la requête déposée en date du 2 août 1999 au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, réviseur d’entreprises, demeurant à L-…, au nom de la société à responsabilité limitée GTA s. à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, dirigée contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 3 mai 1999 déclarant la réclamation introduite par Monsieur … au nom de la GTA s. à r.l. contre les bulletins de l’impôt commercial communal des années 1991, 1992, 1993 et 1994, ainsi que de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 1994, tous émis le 18 avril 1996, irrecevable pour défaut d’existence d’un mandat ad litem à l’époque de la réclamation ;

Vu le mémoire du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 31 janvier 2000 ;

Vu le mémoire en réplique déposée au greffe du tribunal administratif par Monsieur …, au nom de la société GTA s. à r.l. en date du 25 février 2000 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur … en ses observations et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries à l’audience publique du 15 mars 2000.

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En date du 18 juin 1996, la société à responsabilité limitée …, sous la signature de Monsieur …, réviseur d’entreprises, introduisit au nom de la société à responsabilité limitée GTA s. à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, ci-après appelée “ la société GTA ”, une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après appelé “ le directeur ”, contre les bulletins de l’impôt commercial communal des années 1991, 1992, 1993 et 1994, ainsi que de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 1994, tous émis le 18 avril 1996.

Cette réclamation fut complétée par une procuration datée du 17 juillet 1996 et libellée comme suit :

“ Vollmacht zur Vetretung im Steuerverwaltungsverfahren von der Administration des Contributions mit uneingeschränkter Empfangsvollmacht Die Steuerberatungsgesellschaft … Audit s. à r.l. (Bevollmächtigte) wird hiermit ermächtigt, uns in allen steuerlichen Angelegenheiten zu vertreten. Diese Vollmacht berechtigt insbesondere vor der Steuerverwaltung (Administration des Contributions) -

zur Abgabe und Entgegennahme von Erklärungen jeder Art, -

zur Stellung von Anträgen in Haupt-, Neben- und Folgeverfahren, -

zur Einlegung und Rücknahme aussergerichtlicher Rechtsbehelfe jeder Art sowie zum Rechtsbefehlverzicht, -

zu aussergerichtlichen Verhandlungen jeder Art und zur Erledigung der Angelegenheit durch Vergleich, Verzicht und Mahnungen, -

zum Empfang von Steuerbescheiden und Mahnungen.

Die Vollmacht berechtigt auch zur Erteilung und zum Widerruf von Untervollmacht.

Mitteilungen jeder Art, insbesondere Verwaltungsakte und sonstige Mitteilungen, sind der Bevollmächtigten zuzustellen. Soweit solche Schriftstücke den Vollmachtgebern zugestellt werden, wird gebeten, die Bevollmächtigte abschriftlich zu informieren ”.

Suivant courrier datant du 31 mars 1999, le directeur adressa à Monsieur … une demande de régularisation de la procédure ainsi introduite en lui demandant de verser au dossier jusqu’au 15 avril 1999 un mandat personnel exprès et spécial conformément aux paragraphes 107, 238 et 254 de la loi générale sur les impôts, appelée “ Abgabenordnung ”, désignée ci-après par “ AO ”, et en lui signalant qu’une procuration délivrée à une société ne serait pas suffisante.

A la suite de cette demande, la société GTA soumit au directeur une procuration donnée à Luxembourg le 12 avril 1999 libellée comme suit :

“ Herr …, réviseur d’entreprises, wird hiermit ermächtigt, uns in allen steuerlichen und sonstigen Angelegenheiten im Sinne der §§ 107, 238 und 254 AO zu vertreten. Diese Vollmacht berechtigt insbesondere vor der Steuerbehörde -

zur Abgabe und Entgegennahme von Erklärungen jeder Art, -

zur Stellung von Anträgen in Haupt – Neben – und Folgeverfahren, 2 -

zur Einlegung und Rücknahme aussergerichtlicher Rechtsbehelfe jeder Art - insbesondere von Anfechtungsakten – sowie zum Rechtsbehelfsverzicht, -

zu aussergerichtlichen Verhandlungen jeder Art und zur Erledigung der Angelegenheit durch Vergleich, Verzicht oder Anerkenntnis, -

zum Empfang von Steuerbescheiden und Mahnungen.

Der Bevollmächtigte ist befugt, Steuererstattungen und Steuervergütungen sowie sonstige Geldleistungen, Wertsachen und Urkunden, insbesondere auch den Streitgegenstand durch die zu erstattenden Beträge entgegenznehmen.

Die Vollmacht berechtigt auch zur Erteilung und zum Widerruf von Untervollmacht.

Mitteilungen jeder Art, insbesondere Verwaltungsakte und sonstige Mitteilungen, sind dem Bevollmächtigten zuzustellen. Soweit solche Schriftstücke dem Vollmachtgeber zugestellt werden, wird gebeten, den Bevollmächtigten abschriftlich zu informieren ”.

En date du 3 mai 1999, le directeur statua sur la réclamation introduite le 18 juin 1996 en la déclarant irrecevable faute de qualité, au motif que 1. la procuration du 17 juillet 1996 jointe à la requête et ayant nommé comme mandataire la société … s. à r.l., ci-après appelée “ la société … ”, ne répondrait pas aux conditions légales en ce que cette société ne serait “ qu’une abstraction inhabile à postuler et donc insusceptible de recevoir un mandat ad litem ” et que 2. le mandat produit daté du 12 avril 1999 a été donné postérieurement non seulement à la date de l’introduction de la réclamation, mais également à celle de l’expiration du délai contentieux ouvert contre les bulletins d’imposition déférés.

A l’encontre de cette décision sur réclamation, la société GTA a fait introduire en date du 2 août 1999 un recours contentieux par l’intermédiaire de Monsieur …, réviseur d’entreprises, préqualifié.

A l’appui de son recours, la société demanderesse fait valoir que la société …, en sa qualité de société de réviseurs d’entreprises, aurait valablement pu la représenter sur base d’un mandat ad litem dans le cadre de la réclamation introduite en date du 18 juin 1996 devant le directeur. La considération du directeur suivant laquelle cette société serait une “ abstraction inhabile à postuler ” ne serait qu’une simple affirmation non autrement motivée. La demanderesse relève en outre à cet égard que parmi les personnes énumérées au paragraphe 107 alinéa 3 AO comme ne pouvant pas être refusées en tant que mandataires ad litem par le directeur, il y aurait lieu de compter non seulement les avocats, mais également les experts-

comptables et les réviseurs d’entreprises et signale que par ailleurs et contrairement aux avocats, les réviseurs d’entreprises peuvent, conformément aux dispositions de l’article 3 (2) de la loi modifiée du 28 juin 1984 portant organisation de la profession de réviseurs d’entreprises, exercer leur profession sous la forme d’une personne morale. Elle en déduit que ce serait dès lors à tort que le directeur a refusé de reconnaître dans le chef de la société … le pouvoir d’agir pour son compte dans le cadre d’une réclamation en tant que mandataire ad litem, et estime que cette conclusion se trouverait confortée par les dispositions de la “ Verordnung vom 18. Februar 1937 zur Durchführung des § 107 der Abgabenordnung ” en ce qu’elle s’opposerait à ce qu’une société de réviseurs d’entreprises soit refusée en tant que mandataire ad litem au sens du paragraphe 107 AO.

3 Le délégué du Gouvernement rétorque que même abstraction faite de la considération que la société … dispose uniquement d’un agrément en tant que société de réviseurs d’entreprises et non pas en tant que “ Steuerberatungsgesellschaft ”, ainsi que du fait que la procuration litigieuse du 17 juillet 1996 ne répondrait pas aux exigences d’un mandat ad litem, une société de capitaux ne serait qu’une abstraction inhabile à postuler, de sorte qu’elle ne saurait en tout état de cause agir en tant que mandataire ad litem. Eu égard au fait que les avocats ne pourraient postuler qu’en tant que personnes physiques, il serait par ailleurs indiqué, de l’avis du représentant étatique, de retenir le même standard en ce qui concerne l’activité des réviseurs d’entreprises pour autant qu’elle touche à l’activité de conseil juridique et de représentation en justice.

Le recours étant dirigé contre une décision directoriale statuant sur une réclamation introduite à l’encontre de bulletins de l’impôt commercial communal et de l’impôt sur le revenu des collectivités, le tribunal est compétent, en vertu des dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 (3) 1 de la loi du 7 novembre 1996 précitée, pour statuer en tant que juge du fond. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Concernant le premier volet de la décision déférée ayant trait plus particulièrement à la procuration datant du 17 juillet 1996, il est constant que le directeur a retenu que cette procuration ne répond pas aux conditions légales au motif notamment que la société …, en tant que société de capitaux, serait une abstraction inhabile à postuler et partant non susceptible de recevoir un mandat ad litem.

S’il est certes constant qu’à l’époque où la réclamation fut introduite, la qualité d’une juridiction de première instance dans le chef du directeur étant déjà non reconnue par la Cour de Justice des Communautés Européenne, il n’en demeure pas moins que la notion de juridiction retenue à cet égard au niveau communautaire est une notion autonome et que le législateur luxembourgeois n’a consacré le principe dégagé au niveau communautaire qu’à travers la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, entrée en vigueur le 1er janvier 1997.

Il s’ensuit qu’au jour de l’introduction de la réclamation par la société GTA en date du 18 juillet 1996, le directeur pouvait encore se prévaloir de la qualité d’une juridiction de premier degré suivant les prévisions de droit national et que l’exigence d’un mandat ad litem pour introduire cette réclamation était partant encore admise à ce moment de sorte, que la procuration sous examen du 17 juillet 1996 est à analyser, au regard de sa validité, tant par rapport aux exigences générales du mandat ad litem que par rapport aux exigences spécifiques en la matière.

Le paragraphe 107 (2) AO, en disposant que “Bevollmächtigte, die aus der Erteilung von Rat und Hilfe in Steuersachen ein Geschäft machen oder denen die Fähigkeit zum geeigneten schriftlichen oder mündlichen Vortrag mangelt, können zurückgewiesen werden ”, confère au directeur la possibilité de rejeter une procuration lorsque le mandataire n’est pas capable de postuler.

Une personne morale peut être par ailleurs considérée comme une abstraction en ce sens qu’elle ne peut agir non pas personnellement, au sens strict du terme, mais uniquement par l’intermédiaire de ses organes investis du pouvoir de la représenter, et cette particularité au 4 niveau de sa manière d’agir la distingue à cet égard d’une personne physique. Il reste cependant à examiner si cette particularité permet à elle seule de conclure dans le chef d’une personne morale revêtant par ailleurs la qualification spécifique de réviseur d’entreprises, à une incapacité de postuler avec impossibilité afférente de se voir conférer un mandat ad litem.

Il est en l’espèce constant que la société à responsabilité limitée …, avec siège social à L-…, fut agréée en tant que réviseur d’entreprises par arrêté du ministre de la Justice du 26 août 1991 sur base de l’article 3 (2) de la loi modifiée du 28 juin 1984 portant organisation de la profession de réviseurs d’entreprises. Ledit agrément fut remplacé par un nouvel agrément accordé sur la même base légale à la société anonyme …, ayant son établissement professionnel à L-…, suivant arrêté ministériel du 24 octobre 1996. Les deux arrêtés ministériels ainsi visés comportent un article 2 libellé comme suit : “ Seuls le ou les administrateurs ou gérants qui sont des personnes physiques titulaires de l’agrément ministériel pour exercer au Luxembourg la profession de réviseur d’entreprises, sont autorisés à effectuer le contrôle légal des comptes et engager la société ”.

Il est encore constant à travers les dispositions de l’article 2, paragraphe 1er de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat, telle que modifiée par l’article 109 (1) de la loi du 7 novembre 1996 précitée, que le législateur a entre-temps reconnu que les justiciables ont la faculté “ d’agir par eux mêmes ou de se faire représenter ou assister par un expert comptable ou un réviseur d’entreprises, dûment autorisés à exercer leur profession, devant le tribunal administratif appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes ”.

Il se dégage de la genèse du texte de loi précité, telle que documentée par les travaux parlementaires afférents (cf. projet de loi portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, n° 3940A), que l’abandon de la proposition initiale de prévoir le ministère d’avocat pour tous les recours devant les nouvelles juridictions administratives, fut le résultat d’un long débat axé autour de considérations laborieuses et controverses relatives à l’intérêt du justiciable face notamment à un ordre juridictionnel administratif caractérisé par la procédure écrite. L’option finalement retenue par le législateur pour une solution consistant à prévoir la faculté pour les justiciables d’agir devant le tribunal administratif appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes par eux-mêmes ou de s’y faire représenter ou assister notamment par un réviseur d’entreprises, dûment autorisé à exercer sa profession, traduit la volonté de rétablir ce qui était de mise dans le passé, lorsque le contribuable pouvait se défendre seul ou encore assisté par un expert comptable ou un réviseur d’entreprises.

Dans la mesure où cette faculté de se faire représenter par un réviseur d’entreprises, notamment devant le Comité du contentieux du Conseil d’Etat, découla également déjà de la loi du 10 août 1991 sur la profession d’avocat dans sa teneur initiale, il y a lieu de s’y référer plus particulièrement pour examiner la question de savoir si la notion retenue de “ réviseur d’entreprises dûment autorisé à exercer sa profession ” y consacrée s’entend comme visant le seul réviseur d’entreprises personne physique ou doit au contraire englober indistinctement les réviseurs d’entreprises, tant personnes physiques que personnes morales.

Force est de constater à cet égard que ni les travaux parlementaires relatifs à la loi du 10 août 1991 précitée (doc. parl. n° 3273), ni ceux prévisés relatifs à la loi du 7 novembre 1996 n’évoquent la nécessité de restreindre la possibilité d’agir en tant que mandataire ad litem aux seuls réviseurs d’entreprises personnes physiques. La profession de réviseur d’entreprises étant par ailleurs une profession réglementée, il y a dès lors lieu d’admettre que le législateur, 5 en se référant aux réviseurs d’entreprises dûment autorisés à exercer leur profession, a nécessairement entendu se référer aux réviseurs d’entreprises au sens de l’article 1er de la loi modifiée du 28 juin 1984 précitée.

Dans la mesure où la loi du 28 juin 1984 précitée, loin de réserver la possibilité de revêtir la qualité de réviseur d’entreprises aux seules personnes physiques, l’envisage également et expressément dans le chef de personnes morales dans son article 3 (2), la notion de réviseur d’entreprises consacrée à l’article 2 de la loi modifiée du 10 août 1991, en l’absence d’une quelconque autre précision tendant à réduire cette notion aux seuls réviseurs personnes physiques, doit dès lors s’entendre comme englobant également les personnes morales agréées en tant que réviseur d’entreprises, sous peine de rajouter à la loi une restriction non prévue en tant que telle.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le législateur luxembourgeois, en introduisant pour un réviseur d’entreprises dûment autorisé à exercer sa profession, la possibilité de représenter un justiciable devant le tribunal administratif appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes, a, par ce biais, consacré la possibilité dans le chef des réviseurs d’entreprises personnes morales de recevoir un mandat ad litem, et par-là également reconnu leur capacité de postuler dans les limites tracées.

S’il est vrai que la conclusion ci-avant dégagée est basée sur l’expression de la volonté du législateur à travers une loi non encore applicable au moment de l’introduction de la réclamation de la société GTA en date du 18 juin 1996, il n’en demeure pas moins qu’eu égard à cette expression à la fois postérieure à celle à la base du paragraphe 107 (2) AO précité, et spéciale au regard de la question sous examen de la capacité de postuler dans le chef d’une personne morale réviseur d’entreprises, il y a lieu de se laisser guider, pour l’application des dispositions dudit paragraphe 107 (2) AO, par cette volonté du législateur et de retenir en conséquence qu’une procuration pour introduire une réclamation devant le directeur donné à une société de réviseur d’entreprises dûment agréée, ne peut être refusée au motif que cette société serait inhabile à postuler.

Face au principe ainsi dégagé, il y a lieu d’examiner ensuite le libellé de la procuration du 17 juillet 1996, ceci par référence aux règles afférentes du droit civil auxquelles le paragraphe 102 (2) AO renvoie en l’absence de dispositions spécifiques dans l’AO, pour déterminer si la société … était effectivement investie du pouvoir d’introduire une réclamation pour compte de la société GTA.

La procuration sous examen étant limitée aux seules affaires fiscales (“ Steuerliche Angelegenheiten ”) de la société GTA, elle est de nature non pas générale, mais spéciale au sens de l’article 1987 du code civil. Dans la mesure où elle ne confère cependant pas un pouvoir exprès pour des actions déterminées au mandataire, mais un pouvoir général pour toute une catégorie d’actions (“ aussergerichtliche Behelfe ”), elle est à considérer comme étant conçue en termes généraux au sens de l’article 1988 du code civil, de manière à n’investir la société … que du seul pouvoir d’accomplir des actes d’administration, voire conservatoires.

L’acte d’introduire une réclamation devant le directeur, eu égard plus particulièrement au risque y inhérent de voir l’imposition revue le cas échéant in pejus, présente un risque de voir modifier de manière permanente et irrévocable la situation de l’intéressé. Une procuration afférente doit dès lors être expresse et spéciale et renseigner clairement l’intention du mandant 6 d’investir le mandataire du pouvoir d’agir par la voie d’une réclamation à l’encontre d’une décision déterminée avec toute la précision requise.

Il se dégage des considérations qui précèdent que la société …, investie par la procuration sous examen datant du 17 juillet 1996 d’un mandat conçu en termes généraux, n’a pas pu introduire pour compte de la société GTA une réclamation devant le directeur.

Concernant ensuite l’objection du directeur tirée du libellé de la procuration donnée en date du 12 avril 1999 à Monsieur …, en ce que le mandat ne serait donné que postérieurement non seulement à la date de l’introduction de la réclamation, mais également à celle de l’expiration du délai contentieux ouvert contre les bulletins d’imposition déférés, il y a lieu de constater d’abord que par sa demande du 31 mars 1999 le directeur a agi sur base du paragraphe 254 alinéa 2 AO suivant lequel “ Bevollmächtigte und gesetzliche Vertreter haben sich auf Verlangen als solche auszuweisen ” pour voir produire devant lui une procuration documentant qu’à la date de l’introduction de la réclamation, en l’occurrence le 18 juin 1996, le signataire de celle-ci fut investi d’un mandat valable.

Or, même abstraction faite de la considération que la procuration du 12 avril 1999, par son libellé également conçu en termes généraux, n’est pas non plus de nature à conférer un mandat exprès à Monsieur … pour introduire la réclamation en question, il résulte encore de son libellé non autrement sujet à interprétation qu’elle est appelée à produire ses effets seulement à partir de sa date d’émission et ne comporte aucun élément habilitant à l’introduction de ladite réclamation antérieure en date (cf. Cour adm. 21 décembre 1999, n° 11382C du rôle, Thorn-Muller, Pas. adm. 1/2000, v° Impôts n° 160, p. 212).

S’il est en effet certes possible pour le directeur, tant qu’il n’a pas statué, d’exiger la preuve écrite du mandat de celui qui a introduit une réclamation, ce mandat, quelle que soit l’époque à laquelle il est effectivement produit, doit néanmoins avoir existé dès l’introduction de la réclamation auprès du directeur.

C’est dès lors à bon droit que le directeur a déclaré la réclamation irrecevable faute de qualité. Il s’ensuit que le recours est à déclarer non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 mai 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge 7 en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11431
Date de la décision : 08/05/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-05-08;11431 ?

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