N°s 11448 et 11449 du rôle Inscrits le 5 août 1999 Audience publique du 23 février 2000
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Recours formé par Monsieur … RUPPERT, Sandweiler contre une délibération du conseil communal de Sandweiler et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de délibération communale
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I.
Vu la requête inscrite sous le numéro 11448C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative en date du 5 août 1999 par Maître François BILTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … RUPPERT, conseiller communal, demeurant à L-…, tendant à l’annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif 1.) de la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 prise dans le cadre du point 13 de l’ordre du jour ayant trait à la rue de contournement de Sandweiler et l’excluant des débats et du vote sur base de l’article 20 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 au motif de l’existence d’un intérêt personnel dans son chef relativement à l’affaire soumise au conseil 2.) d’une décision du ministre de l’Intérieur du 5 mai 1999 refusant de faire droit à sa réclamation du 15 février 1999 dirigée contre son exclusion des délibération et vote en question ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Marcel HERBER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 4 août 1999 portant signification de ce recours à l’administration communale de Sandweiler ;
Vu l’article 71 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives opérant la transmission au tribunal administratif sans autre forme de procédure du recours inscrit sous le numéro 11448 C du rôle, y inscrit dorénavant sous le numéro 11448 du rôle ;
II.
Vu la requête inscrite sous le numéro 11449 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 août 1999 par Maître François BILTGEN, au nom de Monsieur … RUPPERT, préqualifiés, tendant à la réformation, sinon à l’annulation des délibération communale du 3 février 1999 et décision du ministre de l’Intérieur du 5 mai 1999 précitées dans la mesure où elles s’analyseraient en décisions individuelles ;
Vu les ordonnance et jugement du tribunal administratif des 27 septembre et 15 novembre 1999 constatant le maintien des deux recours au rôle et l’application des règles de procédure prévues par la loi du 21 juin 1999 précitée, conformément à son article 70 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé pour les deux recours au greffe du tribunal administratif en date du 1er décembre 1999 ;
Vu le mémoire en réponse déposé pour les deux recours au greffe du tribunal administratif en date du 15 décembre 1999 par Maître Nicolas DECKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de l’administration communale de Sandweiler ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Frank SCHAAL, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 7 décembre 1999 portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … RUPPERT ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 décembre 1999 par Maître Elisabeth ALEX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … RUPPERT ;
Vu l’acte d’avocat à avocat du 28 décembre 1999 portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Nicolas DECKER ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les délibération communale et décision ministérielle critiquées ;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Elisabeth ALEX et Nicolas DECKER, de même que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 31 janvier 2000.
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Considérant que par courrier recommandé du 3 décembre 1998 le ministre des Travaux publics a saisi le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Sandweiler de l’avant-
projet sommaire et de l’étude d’évaluation des incidences sur l’environnement naturel et humain y relative concernant la construction du contournement de Sandweiler, déclarant agir en exécution de l’article 14 bis de la loi modifiée du 16 août 1967 ayant pour objet la création d’une grande voirie de communication et d’un fonds des routes, et du règlement grand-ducal modifié du 31 octobre 1995 déterminant le contenu des études d'évaluation des incidences sur l’environnement naturel et humain et la procédure de consultation publique en application de l’article 14 bis précité ;
Que suivant certificat de publication établi à Sandweiler le 1er février 1999 et signé par les bourgmestre et secrétaire de la commune de Sandweiler, il est certifié que l’enquête de commodo et incommodo concernant le projet de contournement précité a été dûment publiée et affichée au lieu même de l’établissement et au tableau d’affiches communal à partir du 16 décembre 1998 jusqu’au 16 janvier 1999, de même qu’en date du 16 décembre 1998 dans quatre journaux quotidiens du pays ;
2 Qu’il résulte du procès-verbal d’enquête de commodo et incommodo dressé le même jour par les mêmes signataires, que le bourgmestre, après avoir constaté que le délai prévu pour la publication s’était écoulé, relate que des observations au sujet du projet en question ont été présentées par :
“ a. Le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Contern, b. M. …, pour compte du tennis Club de Sandweiler, c. M. … Ruppert d. M. Raymond Freylinger e. la “ Biergerinitiativ : fir e besseren contournement vun Sandweiler ” ;
Que le bourgmestre relate encore avoir entendu le même 1er février 1999 toutes les personnes qui se sont présentées au secrétariat communal de Sandweiler énumérées au nombre de 19, parmi lesquelles Monsieur … RUPPERT ;
Qu’en date du 3 février 1999 le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Sandweiler a émis son avis, suivant lequel en conclusion “ la construction du contournement tel que prévu sera bénéfique pour tous les habitants de Sandweiler ” ;
Que le conseil communal de Sandweiler s’est réuni en séance publique le 3 février 1999, sur convocation datant du 28 janvier 1999, ayant à son ordre du jour sous le point n° 13 le projet de contournement en question ;
Que l’extrait du registre des délibérations du conseil communal de Sandweiler relatif au point 13 de l’ordre du jour en question est libellé comme suit : “ Objet : rue de contournement Le Conseil communal, Vu le projet de Contournement de Sandweiler présenté par Monsieur le Ministre des Travaux Publics le 3 décembre 1998, comprenant l’avis au public, les copies de la loi du 31-
7-1995, du règlement grand-ducal du 31-10-1995, du règlement grand-ducal du 17-6-1996, le rapport de synthèse et les plans du projet, ainsi que l’étude d’impact établie par le bureau d’études … de Luxembourg ;
Vu les objections présentées suite à la publication du projet pendant la période du 16-
12-1998 au 16-1-1999 et pendant la consultation publique du 1-2-1999 ;
Vu l’avis du Collège des Bourgmestre et Echevins de Sandweiler du 3-2-1999, émis dans le cadre de la consultation publique prévue par la législation afférente ;
Considérant que les conseillers communaux Pierre X. et … Ruppert ont réclamé contre le projet en question, que Monsieur le Bourgmestre les a exhortés de quitter la séance en vertu de l’article 20 de la loi communale du 13-12-1988, mais que les deux conseillers ont refusé de quitter la séance et ont participé au débat contradictoire ;
Vu les arguments exposés par le collège échevinal dans son avis du 3-2-1999 ;
Fait siennes [sic] les arguments et explications du collège des bourgmestre et échevins et 3 Emet à l’unanimité des voix un avis favorable au sujet du projet de Contournement de Sandweiler présenté par Monsieur le Ministre des Travaux Publics le 3 décembre 1998.
(Les conseillers X. et Ruppert n’ont pas voté étant donné qu’ils ont présenté des objections écrites à l’encontre du projet et qu’il est inadmissible que d’un côté une personne présente des réclamations et que d’un autre côté elle décide à l’assemblée du conseil communal si ces réclamations sont acceptées ou non.) Ainsi décidé en séance, date qu’en tête. ” Qu’en date du 15 février 1999 Monsieur … RUPPERT a adressé au ministre de l’Intérieur une réclamation dirigée contre le vote du conseil communal de Sandweiler prédit du 3 février 1999 pour les raisons suivantes:
“ 1. Le vote au conseil communal avait comme objet le projet en tant que tel et non pas les différentes réclamations présentées dans le cadre de la procédure publique. En relation avec le projet du contournement de Sandweiler, je n’ai pas un intérêt direct et personnel (suivant Art. : 20 de la loi communale) qui pourrait m’interdire de participer à ce vote.
2. Je ne peux pas admettre que le seul fait d’avoir signé, dans le cadre de la procédure publique, une pétition resp. une lettre de réclamation ayant des intérêts publics et non particulier, soit suffisant pour être exclu du vote du conseil communal. ” Que Maître François BILTGEN, agissant en tant que mandataire de Monsieur RUPPERT a adressé en date du 9 mars 1999 une réclamation ampliative au ministre de l’Intérieur ;
Que le ministre de l’Intérieur a pris position suivant courrier daté du 5 mai 1999 et référencé sous le numéro 26/99 pour retenir en premier lieu que ce n’est pas sur base de l’article 20 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 que les conseillers X. et RUPPERT auraient dû se voire refuser leur droit de vote, rejoignant en cela la réclamation de ce dernier suivant laquelle il ne possédait aucun intérêt personnel dans l’affaire soumise au vote ;
Que le ministre a cependant estimé que l’exclusion du vote se justifiait sur base des principes généraux du droit applicables en la matière en ce que d’une part nul ne peut être juge et partie à la fois, et que d’autre part le conseiller communal, ayant opté pour formuler une réclamation écrite dans le cadre de la consultation publique, ne saurait plus être admis par la suite lors des délibération et vote du conseil communal y relativement en vertu du principe una via electa, étant donné que retenir le contraire reviendrait à instaurer une inégalité entre citoyens non conforme avec l’article 11 (2) de la Constitution, devenu l’article 10 bis ;
Que sur base des motifs ainsi substitués et en considération du fait que la participation des conseillers X. et RUPPERT n’aurait rien changé au résultat du vote, le ministre a retenu 4 qu’il ne procéderait pas à l’annulation de la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 en question ;
Considérant que par requête déposée en date du 5 août 1999, Monsieur … RUPPERT sollicite l’annulation à la fois de la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 et de la décision du ministre de l’Intérieur du 5 mai 1999 en l’envisageant sous deux points de vues juridiques différents suivant la nature juridique à retenir dans le chef de la délibération communale en question ;
Que suivant le recours inscrit sous le numéro 11448C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, la délibération communale critiquée est attaquée dans la mesure où elle constituerait un acte administratif à caractère réglementaire, la décision ministérielle intervenue sur réclamation devant suivre le même sort ;
Que le recours inscrit sous le numéro 11449 du rôle et déposé au greffe du tribunal administratif analyse la délibération en question comme étant un acte administratif à caractère individuel “ prévu par l’article 35 de la loi du 8 février 1961 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat ”, la décision ministérielle du 5 mai 1999 étant analysée sous le même angle de vue ;
Considérant que conformément à l’article 71 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, entrée en vigueur le 16 septembre 1999, le recours introduit sous le numéro 11448C du rôle devant la Cour administrative et y non encore entièrement instruit à cette date, a été transmis au tribunal administratif sans autre forme de procédure, pour y revêtir le numéro 11448 du rôle ;
Considérant que dans la mesure où les deux recours sont dirigés contre les mêmes actes, sinon décisions critiqués, il convient dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice des les joindre pour les toiser par un seul et même jugement ;
Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Considérant que préliminairement il convient de déterminer la nature juridique des actes critiqués, analysés par la partie demanderesse sous le double aspect non-conciliable d’actes administratifs à caractère réglementaire et de décisions individuelles, cette analyse conditionnant à la fois le champ de compétence du tribunal, ainsi que la recevabilité et le bien-
fondé des recours lui respectivement soumis ;
Considérant que la partie demanderesse fait préciser de prime abord que l’acte communal attaqué en l’espèce ne serait pas la délibération dans son résultat, mais la délibération en tant que processus d’élaboration d’une décision ;
Qu’elle souligne encore que le vote du conseil du 3 février 1999, ne constituerait en fait qu’un avis non obligatoirement requis par la législation applicable, mais spontanément formulé ;
Que peu importerait la nature de la délibération du conseil communal du 3 février 1999 proprement dite, étant donné que le point important à la base des recours sous analyse 5 consisterait dans le fait que dans le cadre de sa délibération, le conseil communal a décidé d’exclure du vote deux conseillers, motif pris de ce qu’ils auraient un intérêt personnel dans l’affaire soumise au vote ;
Que c’est cette décision qui serait susceptible de causer immédiatement grief ;
Que dans la mesure où cette décision affecterait une délibération d’un organe du corps communal, elle serait susceptible d’avoir des effets tant sur un nombre indéterminé de personnes que sur le bon fonctionnement du corps communal ;
Que si elle avait particulièrement touché le demandeur … RUPPERT et que si en ce sens elle avait une portée individuelle certaine, elle aurait néanmoins également affecté les intérêts de toute la collectivité communale ;
Que cette décision serait pour le surplus intervenue sur la toile de fond de grands travaux d’intérêt général, revêtant un caractère général s’étendant à toutes les décisions participant à celle définitivement prise pour autoriser les travaux en question ;
Que le caractère impersonnel de la décision critiquée et les références à la loi communale lui imprimeraient pour le surplus un volet normatif certain, alors qu’il s’agirait en l’espèce de régir une problématique et de combler un vide juridique, non sans l’impulsion gouvernementale ;
Que sur base des éléments d’appréciation ainsi étayés, la partie demanderesse conclut d’une part dans le cadre du recours inscrit sous le numéro 11448 du rôle à qualifier la délibération communale déférée comme étant un acte administratif à caractère réglementaire, tout en envisageant dans le recours portant le numéro 11449 du rôle la possibilité de l’analyser en décision à caractère individuel, dans la mesure où Monsieur RUPPERT, en sa qualité de conseiller communal, s’est vu interdire de participer au vote en question pour des motifs liés à sa personne et compte tenu du fait qu’il avait préalablement objecté contre le projet soumis à délibération ;
Considérant que le délégué du Gouvernement ne prend pas directement position concernant la nature de la délibération communale critiquée ;
Qu’il partage l’analyse faite par le demandeur en ce que la délibération en question ne tendait qu’à exprimer un avis par ailleurs non requis par la législation en vigueur, tout en soulignant que Monsieur RUPPERT n’aurait aucun intérêt à agir, étant donné que même s’il avait été admis au vote, cette participation n’aurait rien changé au résultat final, vu que six conseillers votants se sont prononcés à l’unanimité en faveur du projet de contournement tel que présenté par le ministre des Travaux publics ;
Que le délégué du Gouvernement d’analyser la nature de la réponse ministérielle du 5 mai 1999 en retenant en ordre principal que les principes généraux du droit y énoncés s’imposeraient obligatoirement à l’administration, de sorte que nul ne serait besoin de prendre une décision positive pour les faire valoir, alors qu’ils s’appliqueraient d’office de par leur nature ;
6 Qu’il conclut à l’irrecevabilité du recours en tant que dirigé contre la lettre ministérielle du 5 mai 1999 à défaut de décision administrative existante, tout comme la réponse en question ne constituerait pas un acte administratif à caractère réglementaire dans la mesure où elle devrait s’analyser en une information sur le droit applicable à la situation concrète qui s’était posée au conseil communal lors de sa séance du 3 février 1999 en question ;
Considérant que le mandataire de la commune conclut à l’irrecevabilité du recours dans la mesure où la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 est qualifiée d’acte administratif à caractère réglementaire, celle-ci ayant tout au plus un caractère individuel, dans la mesure où il s’agirait d’un acte administratif susceptible d’être entrepris ;
Qu’il fait valoir que le conseil communal étant de par la loi habilité à régler tout ce qui est d’intérêt communal, il y aurait été décidé d’ouvrir le débat à l’ensemble des élus et de consulter également l’organe suprême de la commune, bien que d’après la législation spécifique applicable aux grands travaux envisagés, seul l’avis du collège échevinal soit requis en la matière ;
Que l’avis consultatif du conseil communal donné ne constituerait en toute occurrence qu’un simple acte préparatoire d’une décision administrative, de sorte que le recours dirigé à son encontre serait irrecevable, entraînant l’irrecevabilité de celui porté contre la réponse ministérielle également déférée ;
Que les parties défenderesses se rejoignent pour conclure en toute occurrence à l’irrecevabilité du recours en réformation formé contre les deux actes déférés envisagés sous l’angle de vue de décisions individuelles, aucun texte légal ne prévoyant pareille possibilité ;
Considérant que la partie demanderesse fait répliquer que la délibération communale déférée ne serait pas critiquée dans son résultat – l’avis formulé – mais dans le fait de son exclusion des délibérations et vote prononcée ;
Que de même le résultat final de l’avis importerait peu, le demandeur exigeant la reconnaissance de l’existence d’un recours contre une décision faisant grief dans la mesure où un élu local a été exclu de l’assemblée, dont il relève, pour des motifs non établis en droit et en fait ;
Que le ministre ayant pris une décision positive, faisant également grief, en refusant de faire droit à la réclamation lui présentée par le demandeur, un recours devrait être ouvert y relativement, la loi s’imposant également à l’administration ;
Qu’en conclusion le demandeur estime en ordre principal que les décisions attaquées ont un caractère réglementaire, étant donné que le fait qu’il a été membre de l’opposition à la date de la décision ne conférerait pas obligatoirement à ces décisions un caractère individuel, celles-ci ayant manifestement été prises dans l’intérêt général de la commune et de ses habitants ;
Que s’il était décidé qu’elles n’avaient pas un caractère réglementaire, les décisions auraient alors incontestablement un caractère individuel ;
7 Considérant qu’il est constant que le collège échevinal de la commune de Sandweiler a été saisi le 3 décembre 1998 par le ministre des Travaux publics en exécution de l’article 14 bis de la loi modifiée du 16 août 1967, ainsi que des dispositions du règlement grand-ducal modifié du 31 octobre 1995 précités, concernant le projet de contournement de la localité de Sandweiler ;
Considérant que d’après l’article 14 bis de la loi modifiée du 16 août 1967 précitée, la détermination du tracé ne peut être arrêtée qu’après consultation publique ;
Que le contenu de l’étude d’évaluation y également inscrite ainsi que la procédure de la consultation publique à organiser sont prévus, d’après les dispositions du même article, par règlement grand-ducal ;
Que le règlement grand-ducal modifié du 31 octobre 1995 prévoit en son article 5 les précisions relatives à l’affichage et la publication du projet de construction, ainsi qu’au procès-
verbal à établir suite à la consultation publique organisée, de même qu’à l’avis de la commune à formuler ;
Qu’ainsi, “ à l’expiration du délai d’affichage de 30 jours, le bourgmestre ou un commissaire spécial qu’il délègue à cet effet, recueille les observations écrites et procède dans la ou les communes concernées par le projet de construction à une consultation publique et dans laquelle sont entendus tous les intéressés qui se présentent. Il est dressé procès-verbal de cette consultation.
Le dossier avec les pièces attestant la publication, le procès-verbal de la consultation et l’avis du collège des bourgmestre et échevins est retourné, au plus tard un mois après l’expiration du délai d’affichage, en trois exemplaires au ministère des Travaux publics, qui communiquera un exemplaire au ministre de l’Aménagement du Territoire et au ministre de l’Environnement ” ;
Considérant qu’il est patent que c’est uniquement l’avis du collège des bourgmestre et échevins de la ou des communes concernées qui est obligatoirement nécessité d’après les dispositions de l’article 5 prérelaté ;
Considérant que s’agissant d’une construction d’intérêt éminemment communal, il était loisible au conseil communal d’émettre spontanément son avis relativement au projet de contournement de la localité de Sandweiler soumis au collège échevinal, sans que cet avis ne fût légalement requis ;
Considérant qu’il n’est pas établi en l’espèce que l’avis du conseil communal résultant de la délibération précitée du 3 février 1999 ait, au-delà de celui du collège échevinal de la commune de Sandweiler, contribué à la décision finalement prise en la matière au nom de l’Etat ;
Considérant que le fait pour le conseil communal d’exclure deux de ses membres des délibération et vote dans le cadre de l’élaboration d’un avis non légalement requis constitue un incident de la procédure de prise d’un avis par un organe communal ;
8 Considérant que l’acte administratif à caractère réglementaire visé par l’article 7 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, à la base du recours direct en annulation y prévu est à entendre en ce sens que tout en étant une norme à caractère réglementaire, il n’en a pas moins un effet direct sur les intérêts privés d’une ou de plusieurs personnes dont il affecte immédiatement la situation, sans nécessiter pour autant la prise d’un acte administratif individuel d’exécution (cf. Cour adm. 23 juillet 1997, n° 10128 du rôle, Linster ; trib. adm. 31 janvier 2000, n° 11432 du rôle, Fortes) ;
Considérant que si l’exclusion des délibération et vote prononcée affecte immédiatement la situation de l’élu local, Monsieur … RUPPERT, il n’en est pas moins que la décision y afférente n’a aucun caractère normatif, tout comme elle ne pose pas de règle générale ;
Que dès lors elle ne rentre pas en tant que telle dans la catégorie des actes administratifs à caractère réglementaire prévue par l’article 7 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 en question ;
Considérant que n’ayant pas été établi que l’avis du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 ait participé à la décision finale prise relativement au contournement de la localité de Sandweiler, le caractère réglementaire de cette décision finale ne saurait valablement avoir été épousé par la délibération communale adoptant l’avis en question, ni a fortiori par celle toisant un incident y relativement ;
Que même si le caractère réglementaire était d’une quelconque manière revêtu par l’adoption de l’avis du conseil communal en question, il n’en resterait pas moins que l’incident de procédure consistant en l’exclusion des délibération et vote de deux conseillers communaux constitue en tant que tel un élément détachable, abstraction faite de l’incidence relative des deux votes en question, eussent-ils été exprimés, au vu des six autres votes ayant opté pour le projet gouvernemental présenté ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que la décision du conseil communal de Sandweiler d’exclure Monsieur … RUPPERT des délibérations et vote relativement au point 13 de son ordre du jour du 3 février 1999 n’est pas à analyser en tant qu’acte administratif à caractère réglementaire au sens de l’article 7 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée ;
Considérant que le fait pour un conseil communal d’exclure un de ses membres, élu au suffrage universel, des délibérations et vote, au motif contesté d’un intérêt personnel dans l’affaire soumise au vote, revêt à son égard un caractère décisionnel faisant grief ;
Considérant que l’article 35 de la loi du 8 février 1961 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, tel qu’invoqué dans la requête introductive du recours inscrit sous le numéro 11449 du rôle, doit être écarté à un titre multiple ;
Que s’il devait s’agir de l’article 35 de la loi du 8 février 1961 portant organisation du Conseil d’Etat, malgré l’intitulé cité, cette dernière serait inapplicable en l’espèce pour avoir été abrogée avec effet à partir du 1er janvier 1997 par la loi du 12 juillet 1996 portant réforme du Conseil d’Etat, l’article 35 de la loi du 8 février 1961 ayant de toute façon été étranger à la présente matière ;
9 Que s’il devait s’agir de l’article 35 de l’arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, tel que maintenu en vigueur à travers l’article 98 (1) de la loi du 7 novembre 1996 précitée, à travers son intitulé énoncé, cet article serait encore inapplicable à la présente matière, alors que traitant “ du recours contre les décisions contradictoires ” ouvert dans deux cas limitatifs y prévus, si la décision contradictoire a été rendue sur pièces fausses ou si la partie a été condamnée faute de représenter une pièce décisive qui était retenue par son adversaire, aucune de ces hypothèses n’est vérifiée en l’espèce ;
Considérant qu’aucune disposition légale ne prévoit un recours de pleine juridiction relativement à la décision d’exclusion déférée ;
Considérant que d’après l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, le tribunal administratif statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements ;
Considérant que par voie de conséquence la décision d’exclusion déférée du conseil communal de Sandweiler tombe sous les prévisions de l’article 2 (1) prérelaté, l’intérêt à agir de Monsieur RUPPERT venant d’être dégagé ;
Considérant qu’à travers son écrit du 5 mai 1999 et contrairement aux conclusions du représentant étatique, le ministre de l’Intérieur n’a pas seulement émis son point de vue en ce qui concerne la base légale de l’exclusion du vote et les arguments qui, selon lui, justifiaient cette décision par lui attribuée au bourgmestre ;
Considérant qu’abstraction faite de la question de savoir si le conseil communal ou le bourgmestre a pris la décision d’exclusion en question, - problème de compétence relevant du fond de l’affaire - le ministre, après avoir affirmé statuer sur des considérations de pure légalité, tirées notamment des principes généraux du droit, a retenu qu’il ne procéderait pas à l’annulation de la délibération en question, telle que sollicitée à travers la réclamation ampliative du mandataire de Monsieur RUPPERT sur base des articles 103 et 104 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, par lui invoqués à travers les précisions fournies dans ses recours sous analyse ;
Considérant que ce faisant le ministre a non seulement rejeté la réclamation portée devant lui, mais encore effectué un contrôle de légalité de la décision d’exclusion des vote et délibération lui soumise comme incident à la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 ;
Considérant que la situation du ministre de l’Intérieur statuant de façon expresse dans le cadre de la tutelle d’annulation prévue par les articles 103 et 104 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 est fondamentalement différente de celle où, appelé par une partie intéressée à statuer, le ministre choisit de ne pas y donner de suite ;
Que cette dernière faculté de ne pas exercer les pouvoirs lui conférés plus précisément à travers l’article 104 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 n’est soumise à 10 aucun contrôle juridictionnel, contrairement au contrôle de la légalité effectué par le ministre, ayant accepté de statuer dans le cadre tutélaire prédit ;
Considérant que par voie de conséquence la lettre ministérielle du 5 mai 1999 est également à considérer comme décision individuelle faisant grief contre laquelle aucun autre recours n’est par ailleurs admissible d’après les lois et règlements conformément à l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée ;
Considérant qu’il se dégage de ce qui précède que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal sous le numéro 11449 du rôle ;
Considérant que le recours en annulation inscrit sous le numéro 11448 du rôle et basé sur l’article 7 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée, est irrecevable, à défaut d’acte administratif à caractère réglementaire soumis au tribunal ;
Considérant que le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire sous le numéro 11449 du rôle est recevable pour avoir été formulé suivant les formes et délai légaux comme étant dirigé à la fois contre la décision d’exclusion des délibérations et vote du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 et contre la décision ministérielle du 5 mai suivant ;
Considérant que dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse s’est rapportée à prudence de justice quant à la recevabilité en la pure forme du mémoire en réponse déposé par le délégué du Gouvernement le 1er décembre 1999, ainsi que du mémoire en réponse déposé au nom de l’administration communale de Sandweiler le 15 décembre 1999 et lui signifié le 7 précédent ;
Considérant qu’il convient liminairement de déterminer la loi de procédure applicable dans le temps, compte tenu de la promulgation de la loi du 21 juin 1999 précitée ;
Considérant que suivant l’article 70 de ladite loi du 21 juin 1999, pour les affaires dans lesquelles seule la requête introductive aura été communiquée à sa date d’entrée en vigueur le 16 septembre 1999, dont celles sous révues, le tribunal a été amené à rendre une ordonnance le 27 septembre 1999, notifiée le lendemain, enjoignant à chaque fois à la partie demanderesse de déclarer au greffe dans un délai d’un mois, à peine de forclusion, si elle entendait poursuivre le recours, demande à laquelle Monsieur RUPPERT a fait répondre par l’affirmative concernant les deux recours déposés ;
Que suivant les dispositions de l’article 70 alinéa 3 en question, les présentes affaires sont à instruire conformément aux dispositions de la nouvelle loi de procédure avec effet à partir de l’écoulement du délai d’un mois précité, réalisé le 28 octobre 1999 (cf. trib. adm. 13 décembre 1999, Rausch, n° 10980 du rôle ; trib. adm. 9 février 2000, Clees, n° 11418 du rôle, non encore publiés) ;
Considérant que le délai de trois mois accordé par l’article 5 (1) de la loi du 21 juin précitée aux parties défenderesse en vue de fournir leur mémoire en réponse a dès lors commencé à courir à partir du 28 octobre 1999 ;
Que force est de constater que tant le mémoire du délégué du Gouvernement que celui du mandataire de la commune ont été fournis dans le délai ainsi imparti ;
11 Que dès lors le moyen de tardiveté est à écarter ;
Quant au fond Considérant que la partie demanderesse conclut au mal-fondé des décisions communale et ministérielle déférées concernant les arguments juridiques respectivement avancés à leur base ;
Considérant que le seul argument juridique invoqué au niveau communal pour justifier l’exclusion des délibération et vote, consistait à dire que Monsieur RUPPERT avait un intérêt personnel à l’issue du vote et que partant il serait empêché de participer tant à la délibération qu’au vote conformément aux dispositions de l’article 20 de la loi modifiée du 13 décembre 1988 ;
Que le demandeur fait siens les propos y relatifs du ministre rejetant cette argumentation comme étant sans fondement en l’espèce ;
Qu’il critique pour le surplus les motifs invoqués par le ministre en vue de justifier la décision communale attaquée ;
Qu’après avoir expliqué que ses courriers des 15 janvier et 1er février 1999 auraient été rédigés en sa qualité de conseiller communal, même si cela n’y figurait pas expressément, et qu’ils correspondaient au souhait de laisser aux autres membres du conseil communal le temps nécessaire pour se pencher sur les questions de fond y relevées, plutôt que de les surprendre par des observations orales proposées lors de la réunion du conseil communal, le demandeur conclut à l’inapplicabilité en l’espèce du principe général du droit invoqué par le ministre, selon lequel nul ne saurait être juge et partie à la fois ;
Qu’en partant du constat que l’avis du conseil communal n’aurait aucune valeur juridique, le demandeur pose la question de savoir à quel titre le reproche pourrait lui être fait d’avoir tenté d’être juge dans une affaire où rien n’était décidé et où personne ne pouvait être considéré comme juge ;
Que le principe constitutionnel de l’égalité des citoyens devant la loi serait également invoqué par le ministre à mauvais escient, étant donné qu’il ne s’agirait pas en l’espèce de distinguer entre deux catégories de citoyens, à savoir ceux qui ne peuvent que présenter une réclamation et ceux qui en plus prendraient part aux discussions et participeraient à l’examen de celle-ci au sein du conseil communal ;
Qu’ayant agi en tant que conseiller communal, sa façon de faire ne rentrerait pas sous les prévisions du principe ainsi circonscrit par le ministre ;
Que selon le demandeur, le ministre lui-même aurait violé le principe qu’il entendait consacrer : qu’en défendant à un élu du peuple de prendre position par écrit par ailleurs sur une question relativement à laquelle il serait appelé à exprimer son vote dans l’enceinte de l’assemblée dont il relève, aurait tout simplement pour conséquence de transformer l’élu en une sorte “ d’eunuque politique ” ;
12 Que ce serait encore à tort que le ministre reprocherait au demandeur d’avoir présenté ses observations par écrit dans le cadre de la procédure préalable, au lieu de s’exprimer de manière orale dans l’enceinte du conseil communal ;
Que dans la mesure où le conseil communal aurait pu décider à tout moment d’examiner la réclamation en question comme si elle avait été présentée lors des discussions, l’adage una via electa ne serait pas non plus applicable en l’espèce ;
Considérant que le délégué du Gouvernement souligne que le ministre ne se serait basé en l’espèce que sur des considérations de pure légalité, tirées notamment des principes généraux du droit ;
Que si le ministre avait pu retenir à juste titre que les dispositions de l’article 20 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 ne s’appliquaient pas en l’espèce, contrairement au motif indiqué par la décision d’exclusion communale, il n’en resterait pas moins que cette dernière se trouverait être justifiée sur base des principes généraux du droit invoqués par le ministre ;
Que le représentant étatique de réexposer les arguments étayés dans la décision ministérielle prérelatée ;
Que d’après lui il serait en effet inconcevable dans un Etat de droit qu’un conseiller communal puisse statuer au sujet du bien-fondé d’une réclamation dont il est lui-même l’auteur ;
Que par analogie tirée des principes énoncés par l’arrêt Procola de la Cour Européenne des Droits de l’Homme du 28 septembre 1995, Monsieur RUPPERT, conseiller communal, s’étant pour la première fois exprimé de façon écrite lors de la consultation publique n’aurait plus pu valablement une seconde fois s’exprimer en tant que conseiller communal dans l’enceinte du conseil et statuer à nouveau sur la réclamation précédemment formulée, entraînant qu’il serait de la manière permis de douter de son impartialité lors du vote ;
Que s’agissant de l’égalité des citoyens devant la loi, il serait inacceptable de tolérer l’existence de deux catégories de citoyens, dont les premiers pourraient simplement présenter une réclamation tandis que les autres auraient en plus le droit de faire valoir leurs arguments dans l’enceinte du conseil communal tout en y participant à l’examen du bien-fondé de ladite réclamation ;
Considérant que le mandataire de la commune de Sandweiler retient en premier lieu que Monsieur RUPPERT aurait participé à la consultation publique organisée conformément aux dispositions de la loi modifiée du 16 août 1967 précitée, tout en signant la pétition du 15 janvier 1999 et en étant entendu en ses observations le 1er février 1999, non pas en sa qualité de conseiller communal, par ailleurs non invoquée tout au long de la procédure en question, mais comme tout autre citoyen de la commune, libre de s’élever contre un projet qui porte, à ses yeux, atteinte à ses droits ;
Que la pétition du 15 janvier 1999 critiquerait plus particulièrement le projet gouvernemental en ce que le contournement y prévu se trouve être auprès de maisons d’habitation ;
13 Qu’il résulterait des éléments du dossier versé que le demandeur avait un intérêt direct et personnel dans l’objet de la délibération incriminée du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999, de sorte que ce serait à juste titre et sur base de l’article 20.1 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 que l’interdiction de participer aux délibération et vote en question aurait été exprimée à son encontre ;
Que s’il n’avait pas participé au vote, il n’aurait néanmoins pas donné suite à l’ordre lui donné de quitter la séance, son attitude dénotant ainsi dans le chef du demandeur un mépris des dispositions légales en vigueur ;
Que le demandeur n’ayant pu être à la fois juge et partie, les recours en annulation ne seraient en tout occurrence pas fondés ;
Considérant qu’il est constant que la décision d’exclusion des délibération et vote prise à l’égard du conseiller communal … RUPPERT eut lieu dans le cadre de l’élaboration par le conseil communal de Sandweiler d’un avis non légalement requis concernant le projet gouvernemental de contournement de la localité du chef-lieu de ladite commune ;
Considérant que le ministre de l’Intérieur, saisi de la réclamation lui adressée par le demandeur n’a pas su agir par la voie directe dans le cadre de l’article 103 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 précitée, le pouvoir d’annulation des actes collectifs et individuels des autorités communales y prévus étant expressément réservé au Grand-Duc ;
Que dès lors la compétence ministérielle est à analyser dans le cadre de l’article 104 de la loi communale en question, suivant lequel “ le ministre de l’Intérieur peut, par arrêté motivé, suspendre l’exécution de l’acte par lequel une autorité communale viole la loi ou lèse l’intérêt général. Les motifs de la suspension sont communiqués à l’autorité communale dans les cinq jours de la suspension. Si l’annulation de l’acte par le Grand-Duc n’intervient pas dans les quarante jours à partir de la communication à l’autorité communale, la suspension est levée ” ;
Que le ministre aura dès lors tout au plus pu suspendre, sinon décider de ne pas suspendre l’acte communal soumis à réclamation ;
Considérant que c’est à tort que Monsieur … RUPPERT a été exclu des délibération et vote lors de la séance du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 concernant le point 13 à l’ordre du jour sur invocation de l’article 20 de la loi communale modifiée en question ;
Qu’ainsi que l’a relevé à juste titre le ministre de l’Intérieur, les dispositions de l’article 20 en question ne s’appliquaient pas en l’espèce, aucun intérêt direct cristallisé dans le chef du conseiller communal … RUPPERT n’ayant été établi en cause conformément au dit texte légal ;
Que dès lors la décision communale d’exclusion n’est point légalement motivée par le seul motif par elle indiqué ;
14 Que cependant il convient encore d’analyser si un motif légal justifiant cette décision n’a pu être utilement substitué, notamment à partir des éléments avancés par le ministre de l’Intérieur, voire par les mandataires des parties défenderesses dans le cadre de la procédure contentieuse ;
Considérant que dans la mesure où le ministre de l’Intérieur a été appelé à suspendre l’exécution de l’acte par lequel une autorité communale viole la loi, il a statué non seulement relativement à la question de l’observation de la loi proprement dite, mais de l’ensemble des dispositions de droit positif, y compris les principes généraux du droit ;
Considérant qu’étant donné que la délibération du conseil communal de Sandweiler du 3 février 1999 tendait à aboutir à un avis, par ailleurs non obligatoirement prévu par la loi modifiée du 16 août 1967 précitée, dans le cadre de laquelle s’inscrit le projet de contournement à la base de la consultation publique, l’organe communal en question n’était pas appelé à trancher un litige, voire un différend, sinon une question d’ordre juridique ;
Considérant que dès lors que le conseil communal de Sandweiler n’a aucunément exercé un attribut quelconque relevant de la fonction de juger, le principe général du droit invoqué, suivant lequel nul ne peut être juge et partie à la fois, ne saurait valablement s’appliquer en l’espèce ;
Considérant que dans la mesure où le conseil communal de Sandweiler, dans le cadre de sa délibération du 3 février 1999 relative au point 13 de l’ordre du jour n’a fait que formuler un simple avis, par ailleurs non obligatoirement requis, il n’a tranché aucune réclamation, ni statué sur le mérite des objections présentées dans le cadre de la consultation publique ;
Considérant que ledit conseil communal n’ayant pas statué sur une réclamation, la catégorisation opérée par le ministre de l’Intérieur suivant les personnes n’ayant pu intervenir qu’au niveau de la seule enquête publique et les conseillers communaux appelés à s’exprimer sur les réclamations proposées au sein du conseil communal tombe également à faux ;
Que dès lors l’analyse de la conformité de la décision communale déférée par rapport à l’article 11 (2) de la Constitution, devenu, suite à la révision du 29 avril 1999, l’article 10bis, devient également sans objet dans le cas d’espèce ;
Considérant que pareillement l’adage una via electa, non datur recursus ad alteram, relevant plus particulièrement de l’ordre procédural, considéré essentiellement sous son volet pénal, puisse-t-il être érigé en principe général du droit au-delà des articles du code d’instruction criminelle le consacrant, ne trouve aucune application dans le cas d’espèce, dans la mesure où à travers l’avis globalement fourni par le conseil communal, il n’est pas statué sur des réclamations présentées ;
Considérant que force est pour le surplus de constater que ni les parties défenderesses dans le cadre de la procédure pré-contentieuse, ni les éléments du dossier présentés au tribunal dans la phase contentieuse ne font dégager un motif légal pouvant être valablement substitué à celui invoqué à tort à la base de la décision d’exclusion communale déférée ;
Considérant qu’il découle de l’ensemble des développements qui précèdent qu’au-delà de la question de l’identité de l’organe communal ayant pris en définitive la décision 15 d’exclusion déférée à l’égard de Monsieur RUPPERT, celle-ci ne se trouve légalement justifiée ni par le motif invoqué tiré de l’article 20 de la loi communale modifiée précitée, ni par aucun autre élément de droit fourni soit par le ministre de l’Intérieur, soit au cours de la procédure contentieuse, de sorte qu’elle encourt l’annulation du chef de violation de la loi ;
Que l’annulation ne vise que la décision d’exclusion de Monsieur RUPPERT des délibération et vote concernés proprement dite, la délibération du conseil communal du 3 février 1999 adoptant à l’unanimité des votants l’avis en question n’étant pas déférée, faute d’élément décisionnel y relatif ;
Considérant que s’il se dégage des développements qui précèdent que si c’est à juste titre, mais pour des motifs autres ci-avant dégagés, que le ministre de l’Intérieur a refusé d’annuler la décision communale d’exclusion critiquée, faute de pouvoir légal lui conféré à ce sujet par l’article 103 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 précitée, il découle de l’annulation encourue par la décision d’exclusion communale déférée à sa base que sa propre décision est devenue sans objet ;
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
joint les recours introduits respectivement sous les numéros 11448 et 11449 du rôle ;
se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation introduit sous le numéro 11449 du rôle ;
déclare le recours en annulation inscrit sous le numéro 11448 du rôle irrecevable ;
déclare le recours en annulation introduit sous le numéro 11449 du rôle recevable ;
au fond le dit également justifié ;
annule la décision communale d’exclusion déférée et déclare la décision ministérielle également déférée sans objet ;
fait masse des frais et les impose pour moitié à l’administration communale de Sandweiler et pour l’autre moitié à l’Etat.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 février 2000 par :
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
16 s. Schmit s. Delaporte [Considérant que si la Constitution prévoit depuis sa révision du 29 avril 1999 en son article 10bis que les luxembourgeois sont légaux devant la loi (ancien article 11 (2)) elle énonce en son article 11 (3) que l’Etat garantit les droits naturels de la personne humaine, dont la liberté d’expression également couverte par l’article 24 de la loi fondamentale ;
Considérant que dans l’hypothèse sous revue ou le conseil communal a fourni spontanément un avis non obligatoirement requis, la distinction ministérielle entre deux catégories de citoyens dont les premiers ne peuvent que présenter une réclamation et les autres, élus communaux auraient la possibilité des les faire valoir en plus au sein du conseil communal, ne rime à rien ;
Que restant dans le domaine purement consultative, toute expression d’opinion doivent rester libre étant donné que l’élu, représentant du peuple, appelé par excellence à exprimer des opinions publiquement ne saurait se voir poser le moindre frein y relativement sauf l’observation des lois de l’ordre public et des bonnes meurses ;
Que décidé autrement reviendrait à une défense généralisée d’expression infligée à tous les élus appelé dans l’enceinte de l’assemblée dont il relève à exprimer leur vote concernant un avis à formuler, sans leur donner la possibilité d’échanger utilement leurs idées et position, notamment avec les personnes leur ayant confié le mandat électoral en question ;
17 Considérant que si les principes généraux du droit peuvent être utilement invoqués dans le cadre du contrôle de l’égalité à opérer par le ministre de l’Intérieur, il ne constitue cependant pas des fo ? tout ;
Que l’adage una via electa trouvant son reflet dans certaines dispositions légales d’ordre procédural ne saurait tenir en échec, la garantie constitutionnelle de la liberté d’expression, valant à plus fortes raisons dans le chef de l’élu au suffrage universel, de sorte que le reproche fait sur cette base à Monsieur RUPPERT suivant lequel il n’aurait plus pu présenter ses considérations générales au sein du conseil communal pour les avoir déployés dans le cadre de la consultation publique doit également tomber à faux ;] “ Maître, Il résulte de votre lettre du 9 mars 1999 que la délibération reprise sous rubrique du conseil communal de Sandweiler fait l’objet d’une réclamation de la part de votre mandant du fait que Monsieur le Bourgmestre a exhorté Messieurs les conseillers Pierre X. et … Ruppert “ de quitter la séance en vertu de l’article 20 de la loi communale du 13 décembre 1988… ”.
En ce qui concerne le fond de l’affaire, par conséquent l’exclusion du vote, j’acquiesce avec vous que ce n’est point sur base de l’article 20 de la loi communale que les conseillers X. et Ruppert auraient dû se voir refuser leur droit de vote car comme vous le mentionnez à juste titre votre mandant ne possédait aucun intérêt personnel dans cette affaire.
Il n’est cependant pas moins vrai que le commissaire de district de Luxembourg, après concertation avec le département ministériel de l’Intérieur, a fait connaître la position de ce dernier à Monsieur le Bourgmestre. Cette position a d’ailleurs été explicitée dans le cadre d’une question parlementaire posée par Madame la Députée Françoise Kuffer.
A toutes fins utiles je me permets de vous rappeler les termes de ma réponse qui garde toute sa valeur :
“ Dans le cas qui vous préoccupe mes services ont en effet été contactés tant par Monsieur le Bourgmestre que par un conseiller communal qui voulaient tous les deux savoir si un conseiller communal qui lors d’une procédure de consultation publique avait introduit une réclamation pouvait participer à la délibération et au vote du conseil communal statuant sur ladite réclamation.
L’affaire ayant été sommairement esquissée, il devient vite clair que l’on ne saurait imputer au conseiller en cause un intérêt direct au sens de l’article 20 de la loi communale, voilà pourquoi mes services ont formellement exclu l’applicabilité de l’article précité.
Cependant ils ont fait savoir qu’il était de doctrine courante que le Ministère, sur base des principes généraux du droit, avançait deux causes qui empêcheraient quand-même le conseiller ayant présenté une réclamation lors de la procédure de consultation de participer à la délibération et au vote ayant pour objet ces mêmes réclamations.
D’abord, y aurait-il violation du principe général du droit affirmant que “ nul ne peut être juge et partie à la fois ”.
18 Il est en effet inconcevable dans un Etat de Droit qu’un conseiller communal puisse statuer au sujet du bien-fondé d’une réclamation dont il est lui-même l’auteur.
Ensuite y aurait-il violation du principe à valeur constitutionnelle de l’égalité des citoyens devant la loi, dans la mesure où il y aurait deux catégories de citoyens, les premiers qui, simplement, peuvent présenter une réclamation et les autres, qui, en plus, pourraient faire valoir leurs arguments dans l’enceinte du conseil et y participer à l’examen de leur bien-fondé.
Le point de vue que mes services ont exprimé dans ce dossier est fondé sur des considérations de pure légalité, tirées notamment des principes généraux du droit.
Le respect de la légalité est l’un, sinon l’essentiel, des principes fondateurs de toute démocratie. Son respect, loin de pouvoir nuire à la démocratie, ne fait que favoriser son développement. C’est dans le respect de la légalité que s’inscrit l’exercice et des droits des citoyens et de ceux des conseillers communaux.
Je voudrais enfin signaler qu’il n’était jamais question lors desdits entretiens de “ refuser ” à quiconque son droit de vote. On ne faisait que développer les considérations qui guideraient les services dans l’exercice du contrôle de légalité, une fois qu’ils seraient saisis de la délibération dûment formalisée. Sachant que le contrôle de la légalité des affaires délibérées par les autorités communales est un contrôle a posteriori, on ne saurait parler de refus ou de privation du droit de vote ”.
En outre on pourrait encore argumenter comme suit :
La réclamation du sieur Ruppert a été déposée dans le cadre d’une procédure de consultation, mais le sieur Ruppert ne fait valoir dans son chef aucun intérêt matériel personnel direct ni même indirect. Sa réclamation, au contraire, ne traite que de considérations générales intéressant l’intérêt collectif ou l’intérêt social.
Si l’on considère que dans le cadre de la procédure de consultation ne sont recevables que les objections basées sur un intérêt direct, né et actuel, donc sur une lésion particulière à caractère individuel dérivant immédiatement du projet en question, la réclamation du sieur Ruppert aurait été irrecevable et aurait dû être écartée.
La discussion des considérations d’intérêt général et collectif est une prérogative essentiellement politique et appartient dès lors au conseil communal. C’est donc dans l’enceinte du conseil communal que le sieur Ruppert aurait dû développer ses considérations au lieu d’en faire l’objet d’une réclamation écrite dans le cadre de la procédure de consultation politique.
Comme le sieur Ruppert a opté pour agir dans le cadre de la consultation publique plutôt que de présenter ses considérations générales au sein du conseil communal on peut lui appliquer l’adage “ Une via electa non datur recursus ad alteram ”.
Sur base de ce qui précède je conclue donc que ce n’est point sur base de l’article 20 mais sur base des arguments développés par le Ministère de l’Intérieur que le sieur Ruppert, 19 partant également le sieur X., auraient dû être invités à ne point prendre part aux discussions et au vote.
A part ce fait et étant donné que ceci n’aurait rien changé au résultat du vote, j’ai le regret de vous informer que je ne procéderait pas à l’annulation de la délibération en question.
Veuillez agréer, Maître,…… ”.