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16/02/2000 | LUXEMBOURG | N°11309

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 février 2000, 11309


N° 11309 du rôle Inscrit le 2 juin 1999 Audience publique du 16 février 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée CLUB GANTENBEINSMILLEN, … contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en matière d'heures d'ouverture des débits de boissons alcooliques

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Vu la requête déposée le 2 juin 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la sociÃ

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N° 11309 du rôle Inscrit le 2 juin 1999 Audience publique du 16 février 2000

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Recours formé par la société à responsabilité limitée CLUB GANTENBEINSMILLEN, … contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en matière d'heures d'ouverture des débits de boissons alcooliques

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Vu la requête déposée le 2 juin 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée CLUB GANTENBEINSMILLEN, établie et ayant son siège à L-…, Gantenbeinsmillen, représentée par ses gérants actuellement en fonctions, tendant à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de X. du 26 mars 1999 portant refus d'accorder à la société requérante quatre nuits blanches toutes les semaines;

Vu l'exploit de l'huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 26 mai 1999, portant signification dudit recours à l'administration communale de X.;

Vu le mémoire en réponse déposé le 29 juin 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean BRUCHER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, pour le compte de l'administration communale de X.;

Vu l'exploit de l'huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 18 juin 1999, portant signification dudit mémoire en réponse au CLUB GANTENBEINSMILLEN, préqualifié;

Vu les pièces versées et notamment la décision attaquée;

Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Marc SUNNEN, en remplacement de Maître Jean BRUCHER, en ses plaidoiries.

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Le 19 mars 1999, la société à responsabilité limitée CLUB GANTENBEINSMILLEN, établie et ayant son siège à L-… Gantenbeinsmillen, représentée par ses gérants actuellement en fonctions, sollicita du bourgmestre de la commune de X. l'autorisation de déroger aux heures normales d'ouverture des débits de boissons alcooliques. La demande précisait qu'il n'y aurait ni discothèque, ni club, ni cabaret. L'exploitation ciblant une clientèle du style "jeunes cadres dynamiques", l'autorisation de quatre nuits blanches par semaine, à savoir les mercredis, jeudis, vendredis et samedis était sollicitée.

Le 26 mars 1999, le bourgmestre répondit qu'il avait l'intention d'accorder, "à titre exceptionnel, des dérogations individuelles (…) sur demande motivée pour une manifestation spéciale telle que mariage", tout en précisant que ces dérogations ne pouvaient être accordées 2 que lorsqu'il n'y aurait lieu de craindre ni des troubles à l'ordre et à la tranquillité publics ni des inconvénients intolérables pour le voisinage.

Par requête déposée le 2 juin 1999, la société à responsabilité limitée CLUB GANTENBEINSMILLEN a introduit un recours tendant à l'annulation de la décision du bourgmestre du 26 mars 1999.

Le recours ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Au fond, la société demanderesse soutient que l'article 17 de la loi modifiée du 29 juin 1989 portant réforme du régime des cabarets lui confère le droit de bénéficier de dérogations aux heures normales d'ouverture des débits de boissons alcooliques. La commune rétorque qu'il se dégage du texte légal en question qu'il s'agit d'une simple faculté accordée à titre précaire au tenancier d'un débit de boissons alcooliques.

L'article 17 de la loi précitée du 29 juin 1989 dispose que les heures normales d'ouverture des débits de boissons alcooliques sont fixées de six heures du matin à une heure du matin du jour suivant, et que des dérogations individuelles prorogeant les heures d'ouverture jusqu'à trois heures du matin peuvent être accordées, sur demande, par le bourgmestre, lorsqu'il n'y a lieu de craindre ni des troubles à l'ordre et la tranquillité publics ni des inconvénients intolérables pour le voisinage.

En disposant que des dérogations aux heures normales d'ouverture peuvent être accordées, le législateur n'a pas entendu conférer au bourgmestre un pouvoir discrétionnaire voire arbitraire, mais il a conféré aux tenanciers des débits de boissons un véritable droit à bénéficier de "nuits blanches", ce droit devant cependant s'exercer dans le respect de l'ordre et de la tranquillité publics, le bourgmestre étant appelé à mettre en balance le droit à des dérogations aux heures normales d'ouverture et le droit des voisins à ne pas subir des inconvénients intolérables. Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, le bourgmestre doit prendre en compte la situation du débit de boissons, son éloignement de maisons habitées devant faciliter l'octroi de dérogations, ainsi que la fréquence des dérogations sollicitées, des dérogations systématiques étant moins compatibles avec le droit à la tranquillité des riverains que des dérogations en vue de manifestations présentant un caractère exceptionnel.

Le CLUB GANTENBEINSMILLEN estime que le bourgmestre ne saurait refuser des dérogations que sur base d'un règlement communal déterminant les modalités de l'autorisation. Un tel règlement n'ayant pas été pris, le bourgmestre ne serait pas en droit de refuser une quelconque dérogation.

Il est vrai que l'article 17, alinéa 1er in fine de la loi modifiée du 29 juin 1989 dispose que l'autorisation de dérogation est soumise à une taxe au profit de la commune dont le montant est fixé par règlement communal qui détermine également les autres modalités de l'autorisation. Il est par ailleurs constant qu'à part une "circulaire" émanant du bourgmestre de la commune de X. et datée du 23 janvier 1990, qui n'a pas été prise dans les formes pour constituer un règlement communal et n'a partant aucune valeur obligatoire, aucun règlement pris par le conseil communal de X. ne détermine les modalités des autorisations de nuit blanche.

Cette carence ne soustrait pas, cependant, le bourgmestre appelé à accorder des dérogations aux heures normales d'ouverture des débits de boissons alcooliques, à l'obligation 3 de prendre en considération, conformément aux exigences légales, l'ordre et la tranquillité publics ainsi que le risque d'inconvénients intolérables pour le voisinage, ces critères, qui résultent de la loi constituant, à défaut de règlement apportant des précisions en la matière, une base suffisante pour que le bourgmestre puisse exercer son droit d'appréciation sans verser dans l'arbitraire.

Le CLUB GANTENBEINSMILLEN reproche encore à la décision de refus de ne pas être motivée et d'encourir partant l'annulation.

Il est vrai que la motivation contenue dans la décision du 26 mars 1999, se résumant à dénier sans autres explications à la requérante les dérogations sollicitées et à exiger, pour l'avenir, une demande motivée pour chaque dérogation sollicitée, est respectivement insuffisante en ce qu'elle n'indique pas le motif du refus de la dérogation générale telle que demandée, et illégale en ce qu'elle ne considère comme recevables que les demandes de dérogations individuelles, alors que l'article 17 de la loi du 29 juin 1989 prévoit expressément la possibilité d'obtenir des autorisations de nuit blanche pour tous les jours.

D'autre part cependant, l'administration communale a complété la motivation de son refus en cours d'instance en invoquant un trouble grave et répété à l'ordre et à la tranquillité publics de la part des exploitants du CLUB GANTENBEINSMILLEN. Elle expose que le bourgmestre a été saisi d'un nombre impressionnant de plaintes de la part de riverains faisant état de violations répétées des règles du code de la route par les clients de l'établissement, de tapage nocturne jusqu'aux petites heures du matin. Elle précise encore que malgré le refus d'autorisations de déroger aux heures normales d'ouverture, les tenanciers de l'établissement dépasseraient de manière régulière l'heure normale en question, et que lors de l'établissement des nombreux procès-verbaux pour non-respect de l'heure légale de fermeture, ils feraient régulièrement savoir aux forces de l'ordre qu'ils n'auraient pas l'intention de se conformer à la loi. Elle indique finalement que lors d'une intervention d'urgence, le service d'incendie et de sauvetage de la commune de X. aurait mis plus de trois quarts d'heure pour accéder à l'établissement, à cause de l'encombrement de la voie publique par le comportement des clients ayant garé leurs voitures de manière chaotique.

Les affirmations de l'administration communale n'ont pas été contredites par la partie demanderesse. Elles sont de plus étayées par les pièces du dossier.

Eu égard à ces éléments, c'est à bon droit que le bourgmestre a refusé l'autorisation de déroger aux heures normales d'ouverture de l'établissement de manière régulière à raison de quatre jours par semaine.

Il s'ensuit que le recours laisse d'être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.

4 Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 16 février 2000 par:

M. Ravarani, président, M. Schockweiler, vice-président, Mme. Lamesch, juge, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Ravarani


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11309
Date de la décision : 16/02/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-02-16;11309 ?

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