La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/01/2000 | LUXEMBOURG | N°11656C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 janvier 2000, 11656C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 11656C Inscrit le 11 novembre 1999 Audience publique du 27 janvier 2000 Recours formé par la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche contre … d’HUART en matière d’homologation des titres et grades étrangers - Appel -

(Jugement entrepris du 4 octobre 1999 / n° du rôle 11251)

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 11 novembre 1999

par le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en vertu d’un mandat de la ministre de l’Enseigne...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 11656C Inscrit le 11 novembre 1999 Audience publique du 27 janvier 2000 Recours formé par la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche contre … d’HUART en matière d’homologation des titres et grades étrangers - Appel -

(Jugement entrepris du 4 octobre 1999 / n° du rôle 11251)

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 11 novembre 1999 par le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en vertu d’un mandat de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 15 octobre 1999, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 4 octobre 1999 en matière d’homologation des titres et grades étrangers entre la partie appelante et … d’HUART, demeurant à F-… Vu la signification dudit acte d’appel à … d’HUART par acte d’huissier Pierre Kremmer à la date du 22 novembre 1999.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 19 novembre 1999 par Maître Dean Spielmann, avocat à la Cour, au nom d’… d’HUART.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 1999 par le délégué du Gouvernement.

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 6 janvier 2000 par Maître Dean Spielmann, avocat à la Cour, au nom d’… d’HUART.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 4 octobre 1999.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport et le délégué du Gouvernement Guy Schleder ainsi que Maître Dean Spielmann en leurs observations orales.

___________________________________________________________________________

1 Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 avril 1999 par Maître Dean SPIELMANN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, … d'HUART, ingénieur e. r., demeurant à F-…, a demandé l'annulation d'une décision de la ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle du 26 janvier 1999, confirmée sur recours gracieux en date du 8 mars 1999 et portant refus de l'homologation de son diplôme de maîtrise en droit privé, mention carrières judiciaires, qui lui fut décerné en date du 28 octobre 1997 par 1'université René Descartes de Paris V.

Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement en date du 4 octobre 1999, a reçu le recours en annulation en la forme, l’a déclaré justifié en annulant l'arrêté ministériel du 26 janvier 1999, ainsi que la décision confirmative du 8 mars 1999, tout en renvoyant le dossier pour prosécution de cause à la ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle.

Monsieur Guy Schleder, agissant en sa qualité de délégué du Gouvernement auprès des juridictions administratives, a interjeté appel contre ce jugement du tribunal administratif en vertu d'un mandat de Madame le Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche du 15 octobre 1999.

Le tribunal s’écarterait à tort de la jurisprudence antérieure du Comité du Contentieux du Conseil d'Etat qui, dans un arrêt Steichen (C.E. 21 nov. 1984), avait décidé qu'une équivalence accordée par une autorité universitaire étrangère ne s'imposait pas de plein droit aux autorités luxembourgeoises.

Le tribunal administratif aurait décidé à tort que le Ministre a une compétence liée et serait tenu d'homologuer un diplôme qualifié de "maîtrise en droit".

Ceci reviendrait à dire que le Ministre de l'Enseignement supérieur devrait dorénavant se contenter prendre acte de toutes les décisions d'équivalence prises par les universitaires étrangères, quelle que soit la durée des études de droit effectivement accomplies, ce qui ne pourrait être le sens de la législation luxembourgeoise qui exige l'accomplissement d'un cycle complet d'études de droit de quatre années.

La requérante d'Huart n'aurait pas introduit sa demande en se basant sur la directive 89/48/CEE relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans, mais elle aurait choisi la voie de la procédure d'homologation préalable à l'inscription aux cours complémentaires.

Le raisonnement des juges de première instance pourrait à la limite se comprendre si le litige avait trait à l'accession au barreau d'un ressortissant communautaire et si application devait être faite de la loi du 10 août 1991 déterminant, pour la profession d'avocat, le système général de reconnaissance des diplômes supérieurs ce qui ne serait le cas en l'espèce.

Les autorités luxembourgeoises ne sauraient être obligées à suivre aveuglément les décisions prises par les universités étrangères et à se laisser imposer les appréciations faites par ces autorités, résultat auquel aboutirait la décision du 4 octobre 1999 qui, si elle devait être confirmée, obligerait le Ministre à reconnaître dans toutes les disciplines visées par la législation sur l'homologation des décisions d'équivalence étrangères, qu'elles proviennent d'un 2 pays communautaire ou d'un Etat tiers, dès lors que toutes les autres conditions auxquelles l'homologation est subordonnée sont remplies.

Maître Dean SPIELMANN a déposé un mémoire en réponse en date du 19 novembre 1999 dans lequel il soulève d’abord l’irrecevabilité de l'acte d'appel pour absence de signification préalable dans le délai d'appel.

L’affaire ayant été introduite avant le 16 septembre 1999, les nouvelles dispositions procédurales ne seraient applicables et son instruction devrait se faire selon les anciennes règles de procédure.

L'acte d'appel serait encore irrecevable alors que se bornant à conclure à l'annulation du jugement du 4 octobre 1999 sans postuler sa réformation.

En ordre subsidiaire, l'appel ne serait pas fondé.

L’intimée rappelle qu’elle est titulaire d'un doctorat en sociologie et d'un certificat d'études littéraires générales délivré en date du 30 octobre 1950 par la Faculté des lettres de l'Université de Paris et que sur fondement de ces diplômes elle a été autorisée à s'inscrire en deuxième année de droit (Université de Paris V - René Descartes).

Elle a suivi durant ses études juridiques notamment des cours en droit civil, en droit commercial, en droit pénal, en droit judiciaire, en droit international et en droit administratif qui ont tous fait l'objet d'examens et qui sont repris dans les diplômes. Il échet également de noter que la requérante a suivi des cours de droit civil en 2e année de DEUG, en licence et en maîtrise.

L’intimée est d’avis que la motivation du jugement attaqué est correcte et que les juges administratifs ont retenu qu’elle a suivi toutes les matières requises par l'article 4 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 18 décembre 1970 en examinant le bien-fondé du motif de refus de Madame le Ministre.

Loin de priver les autorités luxembourgeoises de leur pouvoir de contrôle, le tribunal aurait tout simplement posé une limite au-delà de laquelle un éventuel refus d'homologation ne serait plus justifié.

Le jugement attaqué ne remettrait nullement en cause le contrôle de qualité des études, le ministre restant investi du pouvoir de contrôler si celles-ci englobent les matières juridiques jugées essentielles par le règlement grand-ducal précité.

Ce ne serait que dans le cas où cette exigence quant au programme suivi est remplie, que la compétence des autorités serait «liée», et qu'un refus de l'homologation ne serait plus justifié.

Le refus de l'homologation du diplôme de la requérante serait par ailleurs contraire au droit communautaire et plus particulièrement au droit d'établissement prévu à l'article 43 (ancien article 52) du traité CE.

L’intimée formule finalement une question préjudicielle sur le fondement de l'article 234 (ancien article 177) du traité CE à poser à la Cour de Justice des Communautés européennes.

3 Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réplique en date du 15 décembre 1999 dans lequel il fait valoir que l’acte d’appel serait à considérer comme recevable.

Il résulterait par ailleurs clairement de son texte pour quels motifs et dans quel but celui-ci a été interjeté de sorte qu’il contiendrait toutes les informations prévues par l'article 41 (1) de la loi du 21 juin 1999.

Le règlement grand-ducal modifié du 18 décembre 1970 fixant les critères d'homologation des titres et grades étrangers en droit prescrirait un "cycle complet d'études de droit" portant sur quatre années et l’inacceptation d’une équivalence serait exclusivement inspirée par le souci que les juristes, qu'ils soient luxembourgeois ou étrangers, disposent d'une formation optimale et complète en droit.

Aucun texte de droit communautaire obligerait un Etat membre à admettre au stage judiciaire le ressortissant d'un autre Etat membre dès lors qu'il remplit les conditions y relatives dans le pays d'origine.

L’intimée a déposé un mémoire en duplique en date du 6 janvier 2000 dans lequel elle maintient son argumentation au sujet de l’irrecevabilité de l’acte d’appel.

Ce ne serait qu'en date du 15 décembre 1999, dans son mémoire en réponse, que le délégué du Gouvernement demanderait la réformation du jugement attaqué de sorte que la demande de réformation du premier jugement serait demandée hors délai et se heurterait à la forclusion, sinon à l'irrecevabilité.

Pour ce qui est du droit communautaire, l’intimée note que la notion d'établissement engloberait certainement la faculté de s'établir comme avocat stagiaire et la question préjudicielle proposée tiendrait compte de cette nuance.

Quant à la recevabilité de l’appel L’intimée soulève l’irrecevabilité de l'acte d'appel pour absence de signification préalable dans le délai d'appel.

Les nouvelles dispositions procédurales ne seraient pas applicables au motif que l’article 69 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit que « les affaires introduites avant le 16 septembre 1999 continueront à être instruites selon les anciennes règles de procédure. » S’il est exact que la notion « d’affaire » est susceptible d’englober toutes les instances qu’un dossier contentieux peut parcourir, le législateur énumère néanmoins deux étapes fondamentalement différentes dans la genèse d’un dossier contentieux administratif qui sont l’introduction et l’instruction du dossier, le chapitre premier du titre premier de la loi du 21 juin 1999 étant intitulé «De l’introduction et de l’instruction des instances » et le chapitre premier du titre deux s’appelant « De l’appel et de l’instruction sur appel ».

La phase de l’instruction se situe ainsi après l’introduction du procès et la saisine du tribunal compétent et se termine par la prise en délibéré de l’affaire.

4 Contrairement aux développements de l’intimée, une instance d’appel n’est pas une continuation d’une instance en cours, mais une instance nouvelle dont les règles s’établissent suivant la loi applicable au jour de son introduction.

L’intimée fait ensuite valoir que l'acte d'appel serait irrecevable alors que se bornant à conclure à l'annulation du jugement du 4 octobre 1999 sans postuler sa réformation.

S’il est exact que l’appelant conclut à ce qu’il « plaise à la Cour d’annuler le jugement prononcé par le tribunal administratif le 4 octobre 1999 », il n’en demeure pas moins que l’acte déposé en date du 11 novembre 1999 au greffe de la Cour administrative est intitulé « acte d’appel » et qu’il renseigne à trois reprises que Madame le Ministre entend « interjeter appel » contre le jugement, le mandat donné au délégué de Gouvernement consistant par ailleurs à « interjeter appel. » Il en résulte que le recours déposé s’analyse, d’après les termes de l’intitulé de la requête combiné aux termes et conclusions y contenus, non comme un recours en annulation, mais comme un acte d’appel qui est à déclarer recevable.

Quant au fond Les juges de première instance ont fait une saine interprétation du règlement grand-ducal modifié du 18 décembre 1970 fixant les critères d’homologation des titres et grades étrangers en droit et ils les ont correctement appliqués au cas d’espèce.

La Cour se réfère aux développements exhaustifs en fait et en droit figurant dans le jugement entrepris pour déclarer l’appel non fondé.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l’appel de Madame le Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche;

le dit non fondé et en déboute;

partant confirme le jugement entrepris du 4 octobre 1999 dans toute sa teneur;

condamne l’Etat luxembourgeois aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Georges KILL, président Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller 5 Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par le président Georges KILL en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour …-Marie WILTZIUS.

le greffier le président 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11656C
Date de la décision : 27/01/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-01-27;11656c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award