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24/01/2000 | LUXEMBOURG | N°11463

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 janvier 2000, 11463


N° 11463 du rôle Inscrit le 13 août 1999 Audience publique du 24 janvier 2000

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Recours formé par Monsieur … BOLLENDORFF, … contre une décision du directeur à la formation professionnelle en matière d’employé de l’Etat

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Vu la requête introduite sous le numéro 11463 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 août 1999 par Maître Romain ADAM, avocat à la Cour, inscrit au table

au de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BOLLENDORFF, employé de l’Etat, de...

N° 11463 du rôle Inscrit le 13 août 1999 Audience publique du 24 janvier 2000

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Recours formé par Monsieur … BOLLENDORFF, … contre une décision du directeur à la formation professionnelle en matière d’employé de l’Etat

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Vu la requête introduite sous le numéro 11463 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 août 1999 par Maître Romain ADAM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BOLLENDORFF, employé de l’Etat, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur à la formation professionnelle auprès du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle du 18 mai 1999 portant sa tâche hebdomadaire d’enseignement aux Centres de Formation Professionnelle Continue de 22 à 26 heures de leçons par semaine avec effet à partir du 1er décembre 1999, ainsi que pour autant que de besoin, de la communication du même directeur du 14 juin 1999 portant motivation et amplification de la décision précitée du 18 mai 1999 ;

Vu le mémoire du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 octobre 1999 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 novembre 1999 par Maître Romain ADAM, au nom de Monsieur … BOLLENDORFF ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 novembre 1999 ;

Vu le mémoire sur rupture du délibéré du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 janvier 2000 ;

Vu le mémoire sur rupture du délibéré déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 janvier 2000 par Maître Romain ADAM au nom de Monsieur … BOLLENDORFF ;

Vu les ordonnances du tribunal administratif des 27 septembre et 15 novembre 1999 constatant le maintien du recours au rôle et l’application des règles de procédure prévues par la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives conformément à son article 70 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les communications critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Romain ADAM et Messieurs les délégués du Gouvernement Guy SCHLEDER et … MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 6 et 20 décembre 1999, de même que du 17 janvier 2000.

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Considérant que Monsieur … BOLLENDORFF, employé de l’Etat, demeurant à L-…, expose être au service de l’Etat depuis près de 20 années en tant que chargé de cours suivant signature de plusieurs contrats stipulés à durée déterminée pour obtenir de façon formelle un engagement à durée indéterminée par contrat du 17 juin 1994 portant affectation dans son chef en tant que chargé de cours aux Centres de Formation Professionnelle Continue, désignés ci-après par « CFPC » ;

Que depuis plus de 10 ans sa tâche hebdomadaire pour un emploi à plein temps aurait été fixée à 22 heures de leçons par semaine ;

Qu’en février 1999 il aurait reçu un nouveau plan horaire ayant dû entrer en vigueur le 1er mars 1999 suivant lequel sa tâche hebdomadaire devait être portée de 22 à 26 heures par semaine ;

Que par courrier du 5 mars 1999 émanant du directeur à la Formation Professionnelle auprès du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, dénommé ci-

après le « directeur », il fut prié d’accepter l’horaire lui présenté par le CFPC d’Esch/Alzette comme s’imposant sur base de l’article 1.1.2 de l’instruction ministérielle du 17 janvier 1994 portant fixation de la tâche hebdomadaire du personnel enseignant et du personnel socio-

éducatif des CFPC, en vertu de laquelle il était à considérer comme chargé de cours pratiques engagé à durée indéterminée, pour lesquels la tâche hebdomadaire y est fixée à 26 leçons normales par semaine ;

Que suite à un courrier de réclamation de son mandataire du 12 mars 1999, Monsieur BOLLENDORFF s’est vu adresser en date du 5 mai 1999 un courrier de la part du directeur l’informant que l’entretien préalable au vœu de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail en vue de la révision de sa tâche hebdomadaire de 22 à 26 heures de leçons était fixé au 14 mai 1999 à 16.00 heures ;

Que par courrier du directeur du 18 mai 1999, sur entretien préalable du 14 précédent, Monsieur BOLLENDORFF a été informé que sa tâche hebdomadaire d’enseignement au CFPC d’Esch/Alzette était portée de 22 à 26 heures de leçons par semaine à partir du 1er décembre 1999, cette révision intervenant conformément à l’article 37 de la loi modifiée du 24 mai 1989 précitée ;

Que par courrier recommandé de son mandataire du 20 mai 1999, la communication des motifs à la base de la prédite révision de contrat a été demandée au ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle ;

Que par lettre recommandée du 14 juin 1999 le directeur a fait parvenir à Monsieur BOLLENDORFF les motifs demandés, en se plaçant dans le cadre de l’article 37 de la loi modifiée du 24 mai 1989 précitée ;

2 Considérant que par requête déposée en date du 13 août 1999, Monsieur BOLLENDORFF a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation dirigé tant contre la décision du 18 mai 1999 que contre la communication du 14 juin suivant précitées ;

Considérant qu’à titre préliminaire le tribunal a soulevé d’office la question de l’orthographe du nom patronymique de la partie demanderesse indiqué dans la requête introductive d’instance ainsi que dans le mémoire en réplique comme s’écrivant in fine avec un seul « f », étant entendu que dans bon nombre de pièces versées, dont la communication critiquée du 14 juin 1999, il est énoncé par « ff » ;

Considérant que d’après l’article 1er alinéa second de l’arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, applicable au moment du dépôt de la requête introductive d’instance, celle-ci doit contenir entre autres les noms des parties, tout comme cette exigence est par ailleurs reprise par l’article 1er de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Considérant qu’il résulte des conclusions concordantes des parties à l’audience du 6 décembre 1999 que le nom patronymique du demandeur s’énonce « BOLLENDORFF », de sorte qu’il est à lire sous cet orthographe dans tout acte de procédure où il figure sous une autre forme, cette mesure de pure administration s’imposant en l’absence de toute autre contestation afférente ;

Considérant que le représentant étatique conclut à l’irrecevabilité du recours en annulation dans la mesure où la loi prévoit un recours de pleine juridiction en la matière ;

Considérant qu’en vertu de l’article 11.1 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat, les contestations résultant du contrat d’emploi, de la rémunération et des sanctions et mesures disciplinaires sont de la compétence du tribunal administratif statuant comme juge du fond ;

Considérant que la qualité d’employé de l’Etat engagé suivant contrat de travail à durée indéterminée est établie à suffisance de droit dans le chef de Monsieur BOLLENDORFF sur base des pièces versées au dossier et plus particulièrement du contrat d’engagement du 17 juin 1994, portant pour l’Etat la signature de son ministre de l’Education nationale, sans qu’il ne faille à ce stade s’attarder sur la question de savoir à partir de quel moment son engagement a été à durée indéterminée ;

Considérant que l’augmentation critiquée de sa tâche hebdomadaire de 22 à 26 heures de leçons constitue une contestation résultant du contrat d’emploi, susceptible par ailleurs d’avoir une répercussion sur la rémunération du demandeur, de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal sur base de l’article 11.1 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 précitée ;

Considérant que par voie de conséquence le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est irrecevable ;

Considérant que le tribunal est amené à constater par ailleurs que la lettre incriminée du 14 juin 1999 portant communication des motifs à la demande de Monsieur BOLLENDORFF n’altère en rien le principe de l’augmentation de la tâche hebdomadaire 3 retenu par la décision déférée du 18 mai 1999, dont elle ne fait qu’indiquer, sinon amplifier la motivation ;

Que par voie de conséquence le recours est à déclarer irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la communication des motifs du 14 juin 1999 pour défaut d’élément décisionnel y contenu, celle-ci faisant corps avec la décision du 18 mai 1999 déférée ;

Considérant qu’introduit pour le surplus suivant les délai et formes prévus par la loi, le recours en réformation est recevable ;

Considérant qu’au fond le demandeur conclut essentiellement à l’annulation de la décision déférée dans le cadre du recours en réformation introduit, pour non-observation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes qui serait applicable, selon lui, en l’espèce au lieu des dispositions de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail précitée, comme devant se confiner au seul engagement effectué proprement dit ;

Considérant que la compétence de l’organe ayant pris la décision administrative déférée étant une question de fond touchant à l’ordre public, le tribunal a soulevé d’office le moyen tiré du point de savoir si, au regard des articles 4 et 5 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 précitée suivant lesquels respectivement l’engagement et la résiliation du contrat de l’employé de l’Etat sont effectués par le ministre compétent tel qu’y défini, compétence était dévolue au directeur pour procéder comme il l’a fait ;

Considérant que le délégué du Gouvernement, dans son mémoire après rupture du délibéré, a estimé que les décisions du directeur ne concernent ni l’engagement, ni la résiliation du contrat de Monsieur BOLLENDORFF, mais uniquement une modification de sa tâche hebdomadaire, Que dans l’enseignement, les décisions relatives aux tâches des enseignants seraient toujours prises par le directeur de l’établissement respectif, le ministre n’intervenant pas dans cette matière ;

Considérant que dans son mémoire additionnel, le demandeur a fait préciser que son recours était dirigé contre les décisions non pas du ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, mais du directeur agissant ès fonctions comme signataire des communications des 18 mai et 14 juin 1999 prévisées ;

Que tout comme il appartiendrait au ministre compétent de procéder à l’engagement des employés de l’Etat respectivement à la résiliation de leur contrat, compétence exlusive serait également dévolue à celui-ci concernant une éventuelle révision des conditions d’engagement en question ;

Que partant les décisions déférées seraient en ordre principal à réformer, sinon à annuler pour incompétence de leur auteur ;

Considérant que d’après l’article 4 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 précitée « l’engagement est effectué, sur avis du ministre de la Fonction publique, par le ministre qui a dans ses attributions l’administration ou le service dont relèvera l’employé – et qui est désigné ci-après par le terme « ministre compétent » - … » ;

4 Considérant que suivant l’article 5 de la même loi « la résiliation du contrat d’engagement est prononcée, sur avis du ministre de la Fonction publique, par le ministre compétent » ;

Considérant que sur base de l’article 4 qui précède, l’engagement est effectué suivant les modalités prévues par la loi du 24 mai 1989 précitée sous réserve de la fixation de l’indemnité conformément aux dispositions de l’article 23 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’Etat (trib. adm. 30 juillet 1997, Rollmann, n° 9937 du rôle, Pas. adm. 02/99, V° Fonction publique, n° 102, p. 144) ;

Considérant que d’après l’article 4 (2) de la loi modifiée du 24 mai 1989 précitée, considéré en ses points e) et f), le contrat de travail doit comporter obligatoirement les mentions de la durée de travail journalière ou hebdomadaire normale du travailleur ainsi que de l’horaire normal du travail ;

Considérant dès lors que toute modification de l’horaire normal du travail, sinon de la durée de travail journalière ou hebdomadaire normale du travailleur constitue pareillement une modification d’une des données de base de l’engagement et partant de l’engagement lui-

même ;

Considérant que par voie de conséquence la modification de l’engagement ainsi envisagée ne peut intervenir que par l’organe compétent pour l’engagement proprement dit, à savoir le ministre compétent tel que défini à l’article 4 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 précitée, en l’espèce la ministre ayant dans ses attributions la formation professionnelle, le tout sous l’observation des dispositions légales et réglementaires par ailleurs applicables ;

Considérant que la décision de porter la tâche hebdomadaire d’un chargé de cours de 22 à 26 heures de leçons par semaine ayant trait à l’engagement même de l’employé concerné relève de la compétence de la ministre en question, étant entendu qu’elle ne porte pas sur l’aménagement dans le temps des heures de travail à prester à l’intérieur de la tâche prédéfinie dans le cadre de l’engagement conclu entre parties ;

Considérant que dans la mesure où il n’est ni prouvé, ni même allégué que le directeur aurait agit sur délégation de la ministre compétente de l’époque, le directeur ayant signé la décision déférée en son nom propre, agissant ès fonctions, celle-ci est à annuler pour raison d’incompétence de l’organe ayant statué ;

Considérant qu’au vu de l’annulation ainsi dégagée, emportant le renvoi du dossier devant la ministre actuellement compétente, l’examen de tout autre moyen proposé devient superflu ;

Considérant que la partie demanderesse a encore formulé une demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 60.000.- francs sur base de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile, sous réserve de toute autre somme même supérieure à arbitrer ex aequo et bono par le tribunal ;

Considérant que du fait de l’issue du litige sur base notamment d’un moyen non proposé par la partie demanderesse, les conditions d’application de l’article 240 du Nouveau 5 code de procédure civile ne se trouvent pas être réunies en l’espèce, de sorte que cette demande est à écarter ;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare compétent pour connaître du recours en réformation ;

le déclare irrecevable en tant que dirigé contre la communication des motifs du 14 juin 1999 ;

le déclare recevable pour le surplus ;

le dit également fondé ;

partant annule la décision déférée du 18 mai 1999 et renvoie l’affaire devant la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

écarte la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 janvier 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président M. Schockweiler, vice-président M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11463
Date de la décision : 24/01/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-01-24;11463 ?

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