N° 11684 du rôle Inscrit le 25 novembre 1999 Audience publique du 23 décembre 1999
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Recours formé par Monsieur … CONTER, … contre deux décisions du ministre des Transports en matière de permis de conduire
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Vu la requête déposée le 25 novembre 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Robert LOOS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … CONTER, ambulancier, demeurant à L-…, tendant à l'annulation d’une décision du ministre des Transports du 5 août 1999 portant retrait de son permis de conduire un véhicule automoteur et un cycle à moteur auxiliaire et des permis internationaux qui lui avaient été délivrés, ainsi que de la décision confirmative dudit ministre en date du 16 novembre 1999, rendue suite à un recours gracieux;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 1er décembre 1999;
Vu le mémoire en réplique déposé le 7 décembre 1999 au greffe du tribunal administratif au nom du demandeur;
Vu le mémoire en duplique déposé le 13 décembre 1999 par le délégué du gouvernement;
Vu les pièces versées et notamment les décisions attaquées;
Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Robert LOOS et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.
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Le 30 janvier 1988, Monsieur … CONTER, ambulancier, demeurant à L-…, passa avec succès l'examen en vue de l'obtention d'un permis de conduire de la catégorie B. Depuis le 1er août 1989, Monsieur CONTER est titulaire d’un permis de la catégorie A.
Suite à différentes infractions aux règles de la circulation routière commises par Monsieur CONTER, le ministre des Transports, sur base d’un avis du procureur général d’Etat en date du 9 août 1989 et d’un avis de la commission spéciale prévue par l’article 90 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, décida, par arrêté du 31 octobre 1989, que « la période de stage est prorogée pour une durée de 24 mois. La validité du permis de conduire des catégories A, sous 2, 3; B, E sous 1 et F délivré à M. … CONTER préqualifié est limitée à la fin de la période de stage ainsi prorogée. Le cas échéant, le permis pourra être prorogé dans la suite ».
2 Par jugement du 31 mars 1993, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, chambre correctionnelle, condamna Monsieur CONTER pour avoir conduit un véhicule automoteur sur la voie publique « en présentant des signes manifestes d’ivresse, même s’il n’a pas été possible de déterminer un taux d’alcoolémie, (…) sachant qu’il a causé un accident, avoir pris la fuite pour échapper aux constatations utiles, (…) défaut de se comporter raisonnablement et prudemment de façon à ne pas causer un dommage aux propriétés privées, (…) inobservation du signal C.2 / circulation interdite dans les deux sens » à une peine d’amende de 30.000.- francs ainsi qu’à une interdiction de conduire pendant une durée de trois ans, à l’exception des trajets professionnels pendant trente mois.
Il se dégage d’un rapport n° 1026/98 en date du 19 novembre 1998 de la police du Grand-Duché de Luxembourg qu’en date du 10 novembre 1998 la police a été informée par l’ambassade des Pays-Bas que, pour des raisons inexplicables, Monsieur CONTER a disparu depuis une semaine. Ledit rapport précise encore que: « Ausserdem sei CONTER noch im Besitz der Wohnungsschlüssel des Botschafters, sowie der Schlüssel eines Fahrzeugs der Botschaft. CONTER hätte am 03.11.1998 den niederländischen Botschafter nach Strasbourg und zurück gefahren und sei seitdem nicht wieder aufgetaucht.
Im Laufe des Vormittags konnte CONTER dann bei seiner Mutter, zu Luxemburg, …angetroffen werden, dies in betrunkenem Zustand. Er gab an, seit genau einer Woche auf Zechtour gewesen zu sein, und sich an nichts mehr erinnern zu können.
Zusammen mit CONTER fuhren wir dann zu dessen Wohnung, gelegen zu Strassen, 8, rue de la Chapelle, wo wir dann oben erwähnte Gegenstände auffanden. Bei dieser Gelegenheit wurde festgestellt, dass in der genannten Wohnung Beruhigungs- resp.
Schlafmittel herumlagen. Indem eine halbwegs normale Befragung von CONTER, gesehen seinem Zustand nicht möglich war, wurde er für den folgenden Vormittag zum hiesigen Kommissariat bestellt. Als er bis 11,00 Uhr nicht erschienen war, rief Erstberichtender bei seiner Mutter an. Es gelang auch, CONTER ans Telefon zu bekommen, jedoch war er noch betrunkener als am Tag zuvor. Er konnte kaum ein Wort hervorbringen, es konnte jedoch entnommen werden , dass er am Abend zuvor seine Zechtour unbeeindruckt fortgesetzt hatte.
Seitdem wurde er von Berichtenden nicht mehr angetroffen.
Laut Angaben des niederländischen Botschafters,… hatte CONTER bereits bei der Fahrt nach Strasbourg einen "komischen" und "abwesenden" Eindruck hinterlassen. Ob er das Fahrzeug jedoch unter Alkoholeinfluss steuerte, konnte der Botschafter nicht angeben.
CONTER wurde aus seinem Dienst entlassen und besitzt zur Zeit keine Arbeit. Es ist jedoch nicht auszuschliessen, dass es ihm gelingt in Zukunft wieder eine Anstellung als Fahrer zu erhalten, und eventuelle Folgen, betreffend einen Transport von Personen wären kaum auszudenken.
Es sei erwähnt, dass CONTER in den Jahren 1992 und 1996 bereits zwei Alkoholentziehungskuren in Ettelbrück resp. Useldingen erfolglos absolviert hat.
Indem aus Vorstehendem hervorgeht, dass CONTER eine erhebliche Gefahr als Verkehrsteilnehmer darstellt, sind Unterzeichnete der Meinung, dass eventuelle Verwaltungsmassnahmen in Sachen Führerschein sich dringend aufdrängen ».
3 Il se dégage entre autres d’un rapport de la brigade de Bertrange de la gendarmerie grand-ducale n° 387 du 15 mars 1999 que « die allgemeine Führung des Interessenten als Verkehrsteilnehmer ist als schlecht zu bewerten. (…) Ausser den in den beigefügten Akten erwähnte Vorfall (Bericht Nr. 1026/98 der Polizei LUXEMBURG-GARE liegen keine weitere Vergehen vor. Laut eigenen Angaben hat CONTER keinen Unfall auf gütlichem Wege bereinigt. (…) CONTER erklärte, dass er dem Alkohol nicht übermässig zusprechen und dass er keine Drogen konsumieren würde. Offenkundige Anzeichen betreffend Alkohol- oder Drogenmissbrauch wurden nicht festgestellt.
Es sei noch bemerkt, dass am 25. Dezember 1998, CONTER seitens der Gendarmerie STEINFORT kontrolliert wurde, als derselbe unter Alkoholeinfluss stand. Derselbe hatte als Beifahrer in einem Pkw Platz genommen, welches in einen Unfall verwickelt war.
Zwei Tage zuvor war die selbe Gendarmerie bereits mit einer Untersuchung befasst worden, als in STRASSEN ein Fahrzeug verkehrsbehindernd und gefährlich in einer Kurve stehen gelassen hatte [sic], ohne es abzusichern. Deren Untersuchung ergab, dass CONTER das Fahrzeug gesteuert hatte. Indem CONTER nicht angetroffen werden konnte, konnten [die] Beamten nicht in Erfahrung bringen, ob der Fahrer (CONTER) das Fahrzeug unter Alkoholeinfluss gesteuert hatte. (…) ».
Le 27 avril 1999, le procureur général d’Etat informa le ministre des Transports qu’il était d’avis « qu’il a lieu à retrait administratif du permis de conduire ».
Le 4 mai 1999, Monsieur CONTER fut convoqué pour le 28 juin 1999 devant la commission spéciale des permis de conduire pour être entendu dans ses moyens et explications.
Monsieur CONTER ne s’étant pas présenté à la date précitée, mais s’étant fait excuser, il fut reconvoqué par lettre du 2 juillet 1999 pour le 26 juillet 1999.
Le 26 juillet 1999, la commission spéciale des permis de conduire, en l’absence de Monsieur CONTER, statua par défaut à l’égard de Monsieur CONTER, et, sur base des éléments du dossier et en relevant entre autres que l’intéressé présente des signes manifestes d’alcoolisme, proposa à l’unanimité de procéder au retrait administratif du permis de conduire de Monsieur CONTER.
Par arrêté ministériel du 5 août 1999, le ministre des Transports retira le permis de conduire un véhicule automoteur et un cycle à moteur auxiliaire de Monsieur CONTER et les permis internationaux qui lui avaient été délivrés. L'arrêté en question retint notamment que Monsieur CONTER « a à plusieurs reprises enfreint les règles de la circulation » et qu’il « présente des signes manifestes d’alcoolisme ».
Comme suite à un recours gracieux daté du 11 octobre 1999, le ministre des Transports confirma la décision de retrait par un courrier du 16 novembre 1999.
Par requête du 25 novembre 1999, Monsieur CONTER a introduit un recours tendant à l'annulation de l'arrêté de retrait de son permis et de la décision confirmative.
4 Il reproche à ces décisions de ne pas être légalement motivées « en ce qu’elles omettent de préciser en quoi consisteraient les prétendus signes manifestes d’alcoolisme [qui lui sont] reprochés ».
Il estime par ailleurs que l'administration a commis une erreur d'appréciation manifeste au motif qu’il n’aurait plus enfreint les règles de la circulation routière depuis l’affaire ayant donné lieu au jugement précité du 31 mars 1993. Dans ce contexte, il admet avoir « à l’une ou l’autre occasion et sans démesure » consommé de l’alcool, cependant il n’aurait plus jamais conduit un véhicule sous l’influence d’alcool.
Le demandeur ajoute qu’il ne ressortirait d’aucun élément du dossier qu’il présenterait, au moment de la prise des décisions incriminées, des signes manifestes d’alcoolisme. A l’appui de cette affirmation, il verse un certificat médical daté du 1er décembre 1999 tendant à établir son état général amélioré et l’absence de tout symptôme d’alcoolémie depuis le début d’une thérapie et d’un traitement, à savoir le 17 juillet 1999.
Le délégué du gouvernement répond que les décisions attaquées sont suffisamment motivées au regard des exigences de la procédure administrative non contentieuse, étant donné que, d’une part, le demandeur a été convoqué pour être entendu sur le retrait envisagé et, dès lors qu’il n’aurait pas fait usage de cette possibilité, il serait mal placé pour invoquer une violation de la loi, et, d’autre part, l'arrêté ministériel en question indique la base légale du refus et se réfère aux infractions en matière de circulation commises par Monsieur CONTER.
Par ailleurs, en ordre subsidiaire, le délégué relève que l’administration pourrait produire ou compléter la motivation de ses décisions en cours d’instance et que, de toute façon, la sanction d’une absence de motivation suffisante ne saurait consister que dans la suspension des délais de recours et non pas en une annulation de la décision administrative.
Il entend pareillement rejeter le reproche d'une erreur d'appréciation manifeste dans le chef du ministre, au motif que les faits à la base des décisions incriminées documenteraient que le demandeur n’a pas les capacités et qualités requises pour la conduite d’un véhicule automoteur et que lesdits faits seraient suffisamment graves pour justifier la mesure prise dans l’intérêt de la circulation routière.
Dans sa réplique, Monsieur CONTER, après avoir développé ses moyens et arguments, demande au tribunal, « en présence du risque accru (…) [qu’il] perde son emploi actuel puisque son travail d’ambulancier implique d’être disponible comme chauffeur, (…) en cas de rejet de son recours (…) d’ordonner l’effet suspensif de son recours pendant le délai et l’instance d’appel et pour le cas où son recours devait être déclaré fondé, de prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir ».
Le délégué du gouvernement rétorque que ces deux demandes additionnelles manqueraient de fondement et seraient à rejeter.
Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, non autrement contesté sous ce rapport, il est recevable.
C'est à tort que le demandeur reproche à l'arrêté ministériel du 5 août 1999, ainsi qu'à la décision confirmative du 16 novembre 1999, de ne pas être suffisamment motivées.
5 Le ministre a en effet pris le soin, d’une part, de préciser la base légale sur laquelle il a fondé sa décision et, d’autre part, de relever que Monsieur CONTER a, à plusieurs reprises, enfreint les règles de la circulation routière et qu’il présente des signes manifestes d’alcoolisme.
Il s’est en plus référé à l'avis négatif du procureur général d'Etat, ainsi qu'à l'avis émis par la commission spéciale en matière de permis de conduire, pour décider, sur base de ces éléments, ensemble les autres pièces du dossier administratif, qui ont pu être librement discutés au cours de la procédure contentieuse, le retrait des permis de conduire de Monsieur CONTER. - Cette conclusion n’est pas ébranlée par le fait que la décision ministérielle confirmative du 16 novembre 1999 ne contient pas de motivation propre, étant donné que, en l’absence d’éléments nouveaux, elle a pu, à bon droit, se borner à renvoyer à la décision initiale, les deux décisions attaquées ayant ainsi vocation à constituer un tout indissociable.
L’article 2 de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques prévoit que le ministre des Transports ou son délégué peuvent retirer le permis de conduire notamment lorsque l’intéressé « 3) .. est dépourvu du sens des responsabilités requis, dans l’intérêt de la sécurité routière, pour la conduite d’un véhicule ».
Le but assigné aux mesures prévues par l’article 2 de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée est celui d’écarter de la circulation routière publique des personnes ne présentant plus, en raison des circonstances énumérées audit article, les garanties nécessaires pour pouvoir admettre dans leur chef une participation à ladite circulation dans des conditions satisfaisant à la sécurité de tous les autres participants. La finalité primordiale de telles mesures est ainsi celle de protéger, pour l’avenir, la sécurité des autres usagers de la route contre des personnes représentant un danger potentiel à leur égard.
L’appréciation de la question de savoir si une personne présente encore les garanties susvisées repose sur son comportement global, pour l’évaluation duquel les infractions antérieurement constatées constituent nécessairement un élément essentiel.
Dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif vérifie l’exercice conforme de son pouvoir d’appréciation par l’administration en considération de la situation de droit et de fait au jour où la décision en cause a été prise. Il s’ensuit que s’il est vrai que le certificat médical du 1er décembre 1999 produit en cause constitue un indice que la situation de Monsieur CONTER s’est améliorée depuis le mois de juillet 1999 et que la poursuite régulière et fructueuse de son traitement médical laisse entrevoir la possibilité d’un réexamen ultérieur du dossier par l’autorité compétente, il n’en reste pas moins que son moyen tendant à voir reconnaître l’incidence en l’espèce dudit certificat médical postérieur pour l’appréciation de la légalité des décisions déférées doit être écarté.
En l’espèce, force est de constater qu’il se dégage des pièces du dossier que la période de stage initiale de Monsieur CONTER a été prorogée de 24 mois à la suite de différentes infractions aux règles de la circulation routière par lui commises, notamment « à cause du penchant prononcé de l’intéressé pour l’alcool », qu’en date du 10 octobre 1992, il a commis un délit de fuite et a circulé en état d’ivresse, infractions qui ont impliqué une condamnation à une amende et une interdiction de conduire de 3 ans, que pendant les années 1992 et 1996, il a suivi sans succès deux cures de désintoxication et que ses problèmes d’alcool ont persisté au cours de l’année 1998 (cf. rapport de police précité du 19 novembre 1998 et rapport de la brigade de Bertrange de la gendarmerie grand-ducale du 15 mars 1999).
6 Au regard de l’ensemble des faits établis en l’espèce, l’arrêté ministériel se justifie et le ministre a pu estimer, au stade où il a été appelé à statuer, sans transgresser les limites de son pouvoir d’appréciation, que Monsieur CONTER présentait toujours des signes manifestes d’alcoolisme, lesquels, ensemble les infractions au code de la route, certes datant d’un certain temps, mais dont la gravité empêche de ne pas en tenir compte, justifient le retrait du permis de conduire de Monsieur CONTER. C'est donc à tort que le demandeur reproche aux décisions ministérielles attaquées de procéder d'une erreur d'appréciation manifeste. Le moyen afférent est donc également à écarter.
Pour regrettable que soit la circonstance que Monsieur CONTER, ne pouvant assumer son emploi d’ambulancier que s'il est en possession d'un permis de conduire, risque de ne pas pouvoir conserver ledit emploi s'il est dépourvu de permis, elle n'est pas de nature à entraîner l'illégalité de la mesure prise à son encontre.
Il suit des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à rejeter.
Comme il se dégage de ce qui précède que les moyens d’annulation proposés par Monsieur CONTER sont mal fondés, sa demande formulée afin de voir ordonner le sursis à exécution des décisions attaquées pendant le délai et l’instance d’appel laisse d’être fondée et doit être rejetée.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, rejette la demande tendant à voir ordonner le sursis à exécution des décisions attaquées pendant le délai et l’instance d’appel, condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par:
M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 23 décembre 1999, par le vice-président, en présence de M.
Legille, greffier.
Legille Schockweiler