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02/12/1999 | LUXEMBOURG | N°11153

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 décembre 1999, 11153


N° 11153 du rôle Inscrit le 26 février 1999 Audience publique du 2 décembre 1999 Recours formé par Monsieur … WAGNER contre une décision du ministre des Transports en matière de transports Vu la requête déposée le 26 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie ERPELDING, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … WAGNER, …, demeurant à L-…, tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’une décision du ministre des Transports du 3 décembre 1998 par laque

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N° 11153 du rôle Inscrit le 26 février 1999 Audience publique du 2 décembre 1999 Recours formé par Monsieur … WAGNER contre une décision du ministre des Transports en matière de transports Vu la requête déposée le 26 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie ERPELDING, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … WAGNER, …, demeurant à L-…, tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’une décision du ministre des Transports du 3 décembre 1998 par laquelle il a été informé que son véhicule présentait une défectuosité technique lors d’un contrôle sur route effectué en date du 10 novembre 1998 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 avril 1999 ;

Vu le mémoire en réplique, intitulé mémoire en réponse au mémoire du délégué du gouvernement, déposé au nom du demandeur au greffe du tribunal administratif le 27 mai 1999 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Marc WALCH, en remplacement de Maître Jean-Marie ERPELDING, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

Il ressort d’un procès-verbal établi en date du 5 juillet 1996 par la “ brigade volante ” de la gendarmerie grand-ducale, qu’en date du 11 mai 1996 Monsieur … WAGNER, …, demeurant à L-…, circulant à bord de son véhicule immatriculé … (L), a fait l’objet d’un contrôle de gendarmerie lors duquel il a pu être constaté ce qui suit : “ … Dass die Vorderseite seines Pkw’s mit einer Erkennungstafel versehen war, welche das Emblem der Europäischen Gemeinschaften trug ”. Ledit procès-verbal fait encore état de ce que “ eine solche Tafel darf nur auf der Rückseite des Fahrzeuges angebracht sein und dies ist im Art. 62 des Code de la Route ausdrücklich erwähnt. Art. 68 sieht dann vor, dass es verboten ist andere als in dem besagten Beschluss vorgesehenen Buchstaben, Nummern oder Zeichen anzubringen ”.

En date du 10 novembre 1998, un autre procès-verbal a été dressé à l’encontre de Monsieur WAGNER par les “ unités spéciales de la brigade volante ” de la gendarmerie grand-

ducale, dont il ressort qu’en date du même jour, les agents verbalisant de ladite brigade ont constaté ce qui suit : “ WAGNER hat an seinem Pkw vorne eine hintere E-tafel von 520mm angebracht, anstatt wie vorgesehen eine solche von 340mm. Desweiteren sind auf der vorderen E-tafel, links von den Buchstaben und Ziffern, die Embleme der EG in azurblauer Farbe mit 12 Sternen angebracht ”.

1 Le ministre des Transports informa Monsieur WAGNER, par courrier du 3 décembre 1998, que son véhicule “ présentait une défectuosité technique lors d’un contrôle sur route le 10.11.98 ” et que “ conformément aux prescriptions de l’article 4 modifié de la loi du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, le véhicule sus-visé doit être présenté au contrôle technique avant sa remise en circulation ”.

Par requête déposée le 26 février 1999, Monsieur … WAGNER a introduit un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle précitée du 3 décembre 1998.

Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

En l’espèce, et en l’absence d’une disposition légale ou réglementaire accordant le pouvoir aux juridictions administratives de statuer en tant que juge du fond en la présente matière, le tribunal administratif doit se déclarer incompétent pour statuer sur le recours en réformation introduit à titre subsidiaire.

Le recours de droit commun en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Le demandeur soutient en premier lieu que la décision critiquée ne serait motivée que “ de manière stéréotype ” et qu’elle ne tiendrait pas compte de sa situation particulière. Ainsi, la référence faite à une prétendue “ défectuosité technique ” de son véhicule ne saurait à son avis constituer un motif valable suffisant pour motiver la décision en question. Il conclut partant à une absence de motifs, en ce que la décision ne préciserait en rien en quoi consiste la prétendue défectuosité technique qui aurait été constatée sur son véhicule.

C’est à bon droit que le délégué du gouvernement, d’une part, admet que la décision critiquée ne contient aucune indication précise quant à la non-conformité constatée lors du contrôle routier et, d’autre part, estime qu’une telle motivation incomplète n’entraîne pas l’annulation de la décision, étant donné que la sanction de l’obligation de motiver une décision administrative consiste dans la suspension des délais de recours. La décision reste valable et l’administration peut produire ou compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois devant le juge administratif (Cour adm. 8 juillet 1997, n° 9918C du rôle, Pas.

adm. 2/99, V° Procédure administrative non contentieuse, III. Motivation de la décision administrative, n° 28, p. 222).

En l’espèce, le représentant étatique a fourni, dans le cadre de son mémoire en réponse, une motivation de la décision déférée tirée à la fois de l’article 4 de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques et de l’article 62 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques.

La décision déférée étant ainsi suffisamment motivée, il y a lieu d’écarter le moyen afférent présenté par le demandeur comme n’étant pas fondé.

2 Monsieur WAGNER demande encore au tribunal d’écarter deux pièces auxquelles le représentant étatique a fait référence dans son mémoire en réponse, à savoir un procès-verbal établi par les unités spéciales de la “ brigade volante ” de la gendarmerie grand-ducale en date du 10 novembre 1998, ainsi qu’un procès-verbal d’agréation, au motif que ces pièces ne lui auraient pas été communiquées et qu’elles ne se trouveraient pas à sa disposition.

Il ressort du dossier dont dispose le tribunal que le représentant étatique a déposé au greffe du tribunal administratif, en date du 22 avril 1999, ensemble avec son mémoire en réponse, une photocopie du procès-verbal précité du 10 novembre 1998. Cette pièce se trouvait partant à la disposition du demandeur dans la mesure où il aurait pu la consulter audit greffe et y prendre position, le cas échéant, dans son mémoire en réplique déposé au greffe le 27 mai 1999. Le fait pour la partie demanderesse de ne pas consulter les pièces déposées par le représentant étatique au greffe du tribunal à l’appui de son mémoire en réponse ne saurait entraîner comme conséquence que lesdites pièces devraient être écartées des débats. Il y a partant lieu de maintenir ce procès-verbal parmi les pièces soumises au tribunal.

En ce qui concerne un prétendu procès-verbal d’agréation auquel il est fait référence dans le même mémoire en réponse du délégué du gouvernement, le tribunal constate qu’une telle pièce ne figure pas parmi les pièces versées par le délégué du gouvernement. Cette pièce n’a partant pas pu être discutée notamment par la partie adverse, aucune conséquence préjudiciable au demandeur ne pourra en être tirée. Elle ne pourra par ailleurs pas être écartée des débats, puisqu’elle n’a pas été versée.

Quant au fond, le demandeur conteste que l’apposition de l’emblème de l’Union Européenne sur la plaque d’immatriculation avant de son véhicule constitue une défectuosité technique manifeste telle que visée par l’article 4, alinéa 3, point 7 de la loi précitée du 14 février 1955, et comme il s’agirait tout au plus d’une non-conformité réglementaire, elle ne donnerait pas le droit au ministre des Transports de retirer ledit véhicule de la circulation en obligeant son propriétaire à le présenter au service du contrôle technique.

Le délégué du gouvernement précise dans son mémoire en réponse que la décision déférée du 3 décembre 1998 contiendrait une erreur matérielle dans la mesure où elle aurait dû se référer à une “ non-conformité réglementaire ” au lieu de se référer à une “ défectuosité technique ”.

Il se base encore sur l’article 62 de l’arrêté grand-ducal précité du 23 novembre 1955 ainsi que sur la directive 70/222/CEE du Conseil du 20 mars 1970 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relative à l’emplacement et au montage des plaques d’immatriculation arrières des véhicules à moteur et de leurs remorques, pour retenir qu’à l’avant des véhicules la longueur des plaques d’immatriculation serait de 340mm et qu’en vertu des prescriptions de la directive précitée 70/222/CEE, seules les plaques arrière pourraient avoir une longueur de 520mm à condition qu’elles comportent en outre l’emblème de l’Union Européenne. Une telle possibilité dérogatoire n’existant pas pour les plaques avant, celles-ci ne sauraient être munies d’un tel emblème. Dans la mesure où le véhicule du demandeur comporterait à l’avant une plaque d’immatriculation de 520mm portant en outre l’emblème communautaire, il présenterait ainsi une non-conformité formelle par rapport aux conditions réglementaires existant en la matière.

3 En vertu de l’article 62, a), sixième alinéa, de l’arrêté grand-ducal précité du 23 novembre 1955 “ la longueur des plaques [d’immatriculation] avant est de 340mm…. ”.

Comme ni l’arrêté grand-ducal précité ni la directive précitée 70/222/CEE qui ne réglemente d’ailleurs que la forme et le contenu des plaques d’immatriculation arrière, ne prévoient une dérogation à cette règle, seules peuvent être autorisées l’apposition de plaques d’immatriculation à l’avant du véhicule ayant une dimension en longueur de 340mm.

S’il est vrai que des règles spécifiques sont prévues en ce qui concerne l’emplacement de la plaque d’immatriculation arrière des véhicules par à la fois la directive précitée 70/222/CEE et plus particulièrement par les prescriptions figurant à son annexe, ainsi que par l’article 62, a) alinéa 4 de l’arrêté grand-ducal précité du 23 novembre 1955 dans la mesure où ces plaques doivent obligatoirement comporter l’emblème des Communautés Européennes et que cet emblème devra être apposé à gauche des lettres et chiffres formant la plaque d’immatriculation, au cas où l’emplacement prévu pour l’apposition d’une telle plaque d’immatriculation a une longueur de 520mm et en dessous à gauche des lettres et chiffres en question au cas où l’emplacement en question n’a qu’une longueur de 340mm, il n’en demeure pas moins que cette réglementation est exclusivement applicable aux plaques d’immatriculation arrière et qu’elle ne saurait trouver application aux plaques d’immatriculation à apposer à l’avant des véhicules visés par la directive en question.

Le demandeur, dans la mesure où il a apposé à l’avant de son véhicule une plaque d’immatriculation d’une longueur de 520mm, contenant également l’emblème des Communautés Européennes, a violé la réglementation applicable en la matière.

Le demandeur soutient encore que le fait d’apposer une plaque d’immatriculation d’une longueur de 520mm à l’avant de son véhicule ne constituerait pas une défectuosité technique telle que retenue par le ministre dans la décision déférée du 3 décembre 1998, mais qu’il s’agirait tout au plus d’une non-conformité réglementaire ne donnant pas droit au ministre des Transports de procéder suivant les formes prévues par l’article 4 alinéa 3, point 7 de la loi précitée du 14 février 1955, en retirant le véhicule de la circulation et en obligeant son propriétaire à le présenter à nouveau aux services du contrôle technique.

Le délégué du gouvernement a précisé dans son mémoire en réponse que la décision critiquée comporterait une erreur matérielle en ce qu’elle se réfère à une prétendue défectuosité technique alors qu’elle aurait dû indiquer que la violation de la réglementation constatée par les agents verbalisant constitue une non-conformité réglementaire.

D’après l’article 6, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux dont l’existence au jour de la prise de décision est contrôlée par le tribunal dans le cadre d’un recours en annulation, l’indication de ces motifs ne doit cependant pas obligatoirement figurer en toute hypothèse dans la décision elle-même.

Si l’alinéa 2 du même article 6 précise encore que la décision doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, notamment lorsqu’elle refuse de faire droit à la demande de l’intéressé, il n’en reste pas moins que, dans le cadre du recours en annulation, la juridiction administrative est appelée à contrôler également les motifs complémentaires lui soumis par la partie ayant pris la décision déférée en cours de procédure contentieuse via son 4 mandataire (trib. adm. 15 avril 1997, n° 9510 du rôle, Pas. adm. 2/99, V° Procédure administrative non contentieuse, III. Motivation de la décision administrative, n° 34 et autres références y citées).

En l’espèce, et abstraction faite de la considération que la motivation contenue dans la décision déférée du 3 décembre 1998 est erronée dans la mesure où elle se réfère à une prétendue défectuosité technique, alors qu’au contraire il ressort du procès-verbal de la gendarmerie grand-ducale du 10 novembre 1998 que les agents verbalisant ont constaté une non-conformité de la plaque d’immatriculation avant du véhicule du demandeur par rapport à la législation en vigueur, il est constant en cause, comme il résulte des développements qui précèdent, que la plaque d’immatriculation avant dudit véhicule ne correspondait pas, au moment de la prise de la décision litigieuse, aux dispositions réglementaires en vigueur. C’est partant à juste titre que le représentant étatique a apporté un complément de motivation en cours d’instance, motivation additionnelle ayant par ailleurs existé au moment où la décision a été prise, par rapport à laquelle la partie demanderesse a pu prendre position dans son mémoire en réplique. Le tribunal constate partant que la décision du ministre des Transports est motivée à suffisance de droit, en ce qu’elle se réfère à une non-conformité de la plaque d’immatriculation avant du véhicule du demandeur par rapport à la législation en vigueur et il y a partant lieu de rejeter le moyen afférent de celui-ci comme n’étant pas fondé.

Le demandeur reproche encore au ministre d’avoir décidé, par sa décision du 3 décembre 1998, que le véhicule ne pourrait être remis en circulation qu’après avoir été soumis à un contrôle technique préalable. Il estime plus particulièrement que le ministre ne pourrait pas l’obliger à présenter son véhicule audit contrôle technique, au motif que le règlement ministériel modifié du 16 avril 1963 fixant les modalités de fonctionnement d’un système de contrôle pour les véhicules automoteurs et remorques et les prix des contrôles pris en application de l’article 4, alinéa 1er, point 4 de la loi précitée du 14 février 1955 aurait été pris en violation de l’article 36 de la Constitution, ce qui aurait pour conséquence que son application devrait être refusé au cas d’espèce. Il demande partant au tribunal administratif de saisir la Cour constitutionnelle conformément à l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle afin de faire reconnaître l’inconstitutionnalité de l’article 4, alinéa 1er , point 4 de la loi précitée du 14 février 1955.

Le délégué du gouvernement rétorque en soulignant, d’une part, que la décision déférée ne se fonderait pas exclusivement sur le règlement ministériel précité du 16 avril 1963, en ce que l’obligation de soumettre un véhicule automoteur à un contrôle technique est également prévue par la loi précitée du 14 février 1955 et par le règlement grand-ducal précité du 23 novembre 1955, et, d’autre part, que ledit règlement ministériel contiendrait des modalités pratiques qui n’auraient pas “ leur place ” dans un règlement grand-ducal. En l’espèce, le règlement ministériel constituerait “ une mesure générale de mise en œuvre qui peut être prise par le gouvernement ”.

D’une part, l’article 1er, alinéa 2 de la loi précitée du 14 février 1955 dispose qu’il appartient à un règlement d’administration publique de prescrire les mesures concernant notamment le contrôle auquel les véhicules doivent se soumettre. Sur base de cette disposition légale habilitante, le règlement grand-ducal précité du 23 novembre 1955 a pris dans ses articles 58 à 61, les dispositions réglementant d’une manière générale les conditions et modalités générales dudit contrôle des véhicules automoteurs et de leurs remorques.

5 D’autre part, l’article 4, alinéa 1er, point 4 de la loi précitée autorise le ministre des Transports à réglementer “ le fonctionnement d’un système de contrôle pour véhicules automoteurs et remorques ”, et en exécution de cette disposition légale a été pris le règlement ministériel précité du 16 avril 1963 qui ne contient pas seulement des mesures administratives techniques ou de détail relatives à l’organisation pratique du système de contrôle, mais qui détermine également, d’une manière générale, les différents types de contrôle à effectuer par l’organisme de contrôle, le contenu du rapport technique à dresser lors desdits contrôles techniques ainsi que le contenu du rapport d’agréation établi au cas où le véhicule est immatriculé pour la première fois au Luxembourg ou s’il change de propriétaire et qui désigne encore la Société Nationale de Contrôle Technique s. à r.l., avec siège social à Sandweiler, comme organisme chargé du contrôle technique des véhicules automoteurs, des remorques et des cycles à moteurs auxiliaires. Ledit règlement ministériel, signé par le ministre des Transports, contient par ailleurs une disposition conférant au même ministre des Transports la “ surveillance permanente sur l’organisation et le fonctionnement financier, technique et administratif de l’organisme de contrôle ”. Il se pose la question de savoir, au vu du libellé très vaste et général de l’article 4, alinéa 1er , point 4 précité, si la loi précitée du 14 février 1955 a pu, par ledit article, et sans enfreindre l’article 36 de la Constitution, déléguer une telle compétence à un ministre.

En vertu de l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle, une juridiction à laquelle est posée une question relative à la conformité d’une loi à la Constitution est tenue de saisir la Cour Constitutionnelle sauf au cas où ladite Cour a déjà statué sur une question ayant le même objet.

Par arrêt du 6 mars 1998, la Cour Constitutionnelle a déclaré non conforme à l’article 36 de la Constitution l’article 5 alinéa 1er de la loi modifiée du 13 juillet 1935 portant réglementation des conditions d’obtention du titre et du brevet de maîtrise et disposant que le programme et la procédure des examens seront fixés par un règlement ministériel, au motif que ledit règlement ministériel à prendre “ constitue une mesure normative nécessaire pour l’exécution de ladite loi du 13 juillet 1935 [qui] ne se suffit partant pas à elle-même pour pouvoir été appliquée dans toute son étendue ” et que seul le Grand-Duc pouvait prendre les règlements portant exécution des lois, sans que ce pouvoir ne puisse être conféré à une autre autorité, et plus particulièrement à un ministre. En l’espèce, s’il est vrai que l’article 1er de la loi précitée du 14 février 1955 a chargé le Grand-Duc de prendre un règlement d’administration publique en vue de prendre des dispositions nécessaires afin d’assurer le contrôle des véhicules et que sur base de cette disposition habilitante ont été pris les articles 58 à 61 du règlement grand-ducal précité du 23 novembre 1955, il n’en reste pas moins que l’article 4, alinéa 1er, point 4 de la même loi a chargé le ministre des Transports à prendre les dispositions réglementaires nécessaires en vue d’assurer le “ fonctionnement d’un système de contrôle pour véhicules automoteur et remorques ” et l’a partant chargé de prendre des dispositions d’ordre général afin d’assurer l’exécution de la loi en question qui, sur ce point, ne se suffit pas à elle-

même pour pouvoir être appliquée dans toute son étendue.

Comme l’arrêt précité de la Cour Constitutionnelle du 6 mars 1998 a eu à statuer sur une question ayant le même objet que la question qui est posée dans le cadre de la présente instance, une nouvelle saisine de ladite Cour ne s’impose pas en l’espèce, le tribunal administratif disposant de tous les éléments nécessaires en vue de trancher lui-même la question de la conformité de l’article 4, alinéa 1er, point 4 de la loi précitée du 14 février 1955 à l’article 36 de la Constitution.

6 Dans la mesure où ladite disposition légale ne se borne pas à charger le ministre des Transports à prendre les mesures administratives techniques ou de détail relatives à l’organisation pratique du système de contrôle, mais lui délègue au contraire un pouvoir de réglementation général dudit système de contrôle, elle viole l’article 36 de la Constitution en vertu duquel “ le Grand-Duc fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution ”.

Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision déférée du 3 décembre 1998 doit être annulée dans la mesure où elle oblige le demandeur à présenter son véhicule au contrôle technique avant sa remise en circulation, cette partie de la décision étant basée sur l’article 2, premier alinéa, dernier tiret du règlement ministériel précité du 16 avril 1963 ayant été pris sur base de l’article 4, alinéa premier, point 4 de la loi précitée du 14 février 1955 dont l’inconstitutionnalité a été constatée ci-avant.

Au vu du bien-fondé partiel du recours introduit par le demandeur, il y a lieu de faire masse des frais et de les imposer pour moitié à charge de chacune des parties.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter des débats le procès-verbal établi par les unités spéciales de la “ brigade volante ” de la gendarmerie grand-ducale établi en date du 10 novembre 1998 ;

le déclare fondé dans la mesure où la décision ministérielle du 3 décembre 1998 contient l’obligation à charge du demandeur de présenter son véhicule au contrôle technique avant sa remise en circulation et annule la décision déférée dans cette mesure ;

le déclare non fondé pour le surplus et en déboute dans cette mesure ;

fait masse des frais et les impose pour moitié à charge de l’Etat et pour moitié à charge du demandeur.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 2 décembre 1999 par le premier juge, délégué à cette fin, en présence de M. Legille, greffier.

7 Legille Schockweiler 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11153
Date de la décision : 02/12/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-12-02;11153 ?

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