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08/11/1999 | LUXEMBOURG | N°10878

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 novembre 1999, 10878


N° 10878 du rôle Inscrit le 10 septembre 1998 Audience publique du 8 novembre 1999

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Recours formé par Monsieur … SCHOENTGEN et par son épouse, Madame …, X.

contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en présence de Monsieur Y. et de la société anonyme SOCIETE Z. S.A.

en matière de permis de construire

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 septembre 1998 par M

aître Alain BINGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à X., au nom de Monsieur ...

N° 10878 du rôle Inscrit le 10 septembre 1998 Audience publique du 8 novembre 1999

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Recours formé par Monsieur … SCHOENTGEN et par son épouse, Madame …, X.

contre une décision du bourgmestre de la commune de X.

en présence de Monsieur Y. et de la société anonyme SOCIETE Z. S.A.

en matière de permis de construire

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 septembre 1998 par Maître Alain BINGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à X., au nom de Monsieur … SCHOENTGEN et de son épouse, Madame …, les deux demeurant ensemble à L-…, tendant à l’annulation d’une autorisation de construire délivrée le 11 juin 1998 par le bourgmestre de la commune de X. à Monsieur Y., demeurant à L-…, ainsi qu’à la SOCIETE Z. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, autorisant la transformation de l’HOTEL Z., sis à L-…, et contenant une demande de sursis à l’exécution de la décision attaquée;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch., du 14 septembre 1998, par lequel cette requête a été signifiée à l’administration communale de X., ainsi qu’à Monsieur Y. et à la SOCIETE Z. S.A.;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 novembre 1998 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur Y. et de la SOCIETE Z. S.A.;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 5 novembre 1998, par lequel ce mémoire en réponse a été signifié aux époux SCHOENTGEN-

…;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 6 novembre 1998, par lequel ce mémoire en réponse a été signifié à l’administration communale de X.;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 novembre 1998 par Maître Nicolas DECKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l'administration communale de X.;

1 Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, demeurant à Luxembourg, du 28 octobre 1998, par lequel ce mémoire en réponse a été signifié à Monsieur Y. et à la SOCIETE Z. S.A.;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, préqualifié, du 30 octobre 1998, par lequel ce mémoire en réponse a été signifié aux époux SCHOENTGEN-…;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;

Vu le résultat de la visite des lieux du 15 octobre 1999;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maîtres Alain BINGEN, Nicolas DECKER et Albert RODESCH, en leurs plaidoiries respectives.

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Par décision du 11 juin 1998, le bourgmestre de la ville de X. accorda à « Monsieur Y., SOCIETE Z. S.A.,… » un permis de construire pour procéder à la transformation de l’Hôtel Z., situé à L-… Par requête déposée le 10 septembre 1998, Monsieur … SCHOENTGEN et son épouse, Madame …, les deux demeurant ensemble à L-…, ci-après les « époux SCHOENTGEN-… », ont introduit un recours en annulation contre l’autorisation de construire précitée du 11 juin 1998, en précisant que le recours vise uniquement la construction d’une annexe à l’arrière de l’hôtel et que, par conséquent, les dispositions de l’autorisation de construire concernant la transformation du bâtiment principal abritant l’hôtel, ne sont pas attaquées. Dans ce contexte, ils font valoir que, contrairement à l’énoncé de l’autorisation de construire, les travaux à effectuer ne se limiteraient pas à une simple transformation de l’hôtel Z., mais qu’il s’agirait en outre d’une démolition suivie de la construction d’une nouvelle annexe aux dimensions différentes de celle ayant existé auparavant. Ils soutiennent qu’une telle démolition n’aurait pas été autorisée et que par ailleurs la nouvelle annexe ne rentrerait pas dans « l’économie générale d’un hôtel ». Ils exposent à ce sujet que l’annexe projetée, abritant des garages au rez-de-chaussée, serait en outre, au premier étage, destinée à l’habitation, ce qui serait contraire à l’article 34 du règlement sur les bâtisses de la ville de X..

Ils concluent dès lors à la violation de l’article 34 précité, ainsi que de l’article 21 du prédit règlement qui impose le respect d’une marge de reculement arrière de dix mètres.

Dans cette même requête, les époux SCHOENTGEN-… sollicitent le sursis à l’exécution de l’autorisation de construction litigieuse.

L’administration communale de X., désignée ci-après « la commune », ensemble Monsieur Y. et la SOCIETE Z. S.A., contestent en premier lieu l’intérêt à agir des demandeurs en faisant valoir que s’il était vrai qu’en règle générale le propriétaire d’un immeuble contigu à une construction litigieuse aurait intérêt à attaquer un permis de construire s’il était établi que ce dernier n’est pas conforme au règlement des bâtisses, néanmoins faudrait-il encore que les irrégularités dont il fait état, devraient être susceptibles d’aggraver sa situation de voisin. Ils considèrent que dans le cas d’espèce, les transformations projetées auraient pour conséquence que l’annexe adossée au mur mitoyen ne dépassera ce dernier que de 32 centimètres, de sorte que cette transformation ne saurait entraîner ni une privation d’air ou de lumière du terrain, ni une dévaluation de la maison des demandeurs. Monsieur Y. et la SOCIETE Z. S.A. relèvent 2 encore que même si l’autorisation litigieuse prévoyait un dépassement minime de la nouvelle construction par rapport au mur mitoyen, ils auraient néanmoins « préféré rester en dessous du niveau du mur mitoyen pour éviter toute difficulté ». Ils précisent encore qu’au cours des négociations ayant précédé la délivrance du permis de construire, ils auraient proposé aux demandeurs d’abaisser le mur mitoyen afin que leur terrain soit plus dégagé, mais que ces derniers auraient refusé au motif que le mur mitoyen les protégerait des émissions de bruits des voitures circulant dans l’avenue de la Gare.

Ils concluent dès lors que les demandeurs n’auraient pas d’intérêt à agir, l’autorisation délivrée n’aggravant en rien leur situation de voisins.

Il est constant que toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel, distinct de l’intérêt général. S’il est vrai que les proches voisins ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation ne constitue qu’un indice pour l’intérêt à agir, alors qu’elle ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner l’aggravation concrète de la situation de voisin dans le chef de la partie demanderesse en question (Cour adm. 24 juin 1997, Pas. adm.

02/99, V° Procédure contentieuse n°7 et autres références y citées).

Dans cet ordre d’idées, le tribunal est amené à examiner l’autorisation de construire telle que délivrée par la commune et non pas l’exécution qui en a été faite par les titulaires de cette autorisation. Ainsi, le fait que la construction de l’annexe, telle qu’elle a été réalisée sur base du permis de construire déféré ne dépasse pas le mur mitoyen en hauteur, nonobstant le fait que le permis ait autorisé un dépassement de 32 centimètres par rapport à ce mur, ne saurait être pris en considération par le tribunal.

En se basant sur des arguments relatifs au recul et à l’implantation de la construction litigieuse, ensemble le fait que celle-ci est susceptible de dépasser le mur mitoyen conformément au permis de construire délivré par le bourgmestre et que les demandeurs ont une vue directe, du moins du premier étage de leur maison, sur la prédite construction, ils justifient, en tant que voisins directs et immédiats, d’un intérêt personnel, direct et légitime suffisant à voir contrôler la conformité du permis aux dispositions réglementaires en vigueur, notamment dans la mesure où les irrégularités invoquées sont de nature à aggraver leur situation de voisins. (cf. trib.adm. 20 octobre 1997, Pas. adm. 02/99, V° Procédure contentieuse n°9 et autres références y citées).

Le recours ayant par ailleurs été introduit dans le délai et les formes de la loi, il est recevable.

Quant au fond, la commune, Monsieur Y. ainsi que la SOCIETE Z. S.A., relèvent que le permis de construire, autorisant notamment la nouvelle annexe, incluait implicitement mais nécessairement l’autorisation de démolir l’ancienne construction. Ils contestent encore que les transformations projetées ne rentreraient pas dans l’économie générale d’un hôtel. Ils estiment ensuite que l’article 34 du règlement sur les bâtisses ne serait pas applicable, étant donné qu’il ne s’agirait pas, en l’espèce, d’une dépendance mais d’un bâtiment accolé, qui aurait pu être autorisé sur base des articles 27 et 29 b du règlement sur les bâtisses.

3 Il est constant que l’immeuble faisant l’objet de l’autorisation de construire délivrée en date du 11 juin 1998 se situe dans un secteur dit « de forte densité ». Les demandeurs ne critiquent pas l’autorisation de transformer le bâtiment principal donnant sur l’avenue de la Gare, qui comprend l’hôtel proprement dit, mais l’autorisation de construire un bâtiment annexe à l’arrière de la prédite construction. Il se dégage des plans versés en cause et des explications fournies par les parties, notamment lors de la visite des lieux à laquelle le tribunal a procédé en date du 15 octobre 1999, qu’à l’emplacement de l’actuelle annexe litigieuse, il existait jadis un fumoir aux dimensions de 8,47 mètres de longueur et de 7,13 mètres de hauteur. Ce bâtiment a été démoli et remplacé par une construction aux dimensions de 16,24 mètres de longueur et de 4,70 mètres de hauteur, celle-ci abritant au rez-de-chaussée 4 garages et une cave et au premier étage, une salle de bains, une cuisine, un séjour et une chambre.

Il résulte de ce qui précède que l’annexe existant à l’heure actuelle constitue une nouvelle construction, soumise comme telle aux dispositions du règlement sur les bâtisses de la ville de X. actuellement en vigueur, notamment en ce qui concerne les marges de reculement à respecter, et que l’hypothèse de la transformation d’un bâtiment existant, doit donc être écartée.

En principe, toute nouvelle construction doit respecter les marges de reculement telles que prescrites par l’article 21 du règlement sur les bâtisses.

En l’espèce, la configuration des lieux est telle que la construction projetée est appelée à respecter, par rapport aux voisins en cause, une marge de recul latéral qui, aux termes de l’article 21 du règlement sur les bâtisses, est de 3 mètres. Or, il est établi que la nouvelle construction est érigée à la limite de la propriété des demandeurs sans respecter une marge de recul latéral de 3 mètres qui, aux termes de l’article 8 e.) du prédit règlement est à respecter, si une construction existante sur un terrain attenant accuse un recul sur la limite latérale mitoyenne, ce qui est le cas dans la présente cause.

Il convient encore d’examiner la nature exacte du bâtiment en cause pour déterminer si, le cas échéant, les dispositions dérogatoires de l’article 34 du règlement sur les bâtisses trouvent application.

Aux termes de cet article, le bourgmestre pourra autoriser la construction de dépendances (garages, remises, etc.) dans les espaces réglementaires entre bâtiments et entre les bâtiments et limites latérales de propriétés voisines, à condition toutefois que ces dépendances ne servent pas à l’habitation ou à l’exercice d’une activité professionnelle.

Etant donné que l’annexe litigieuse est destinée à abriter au premier étage un logement, elle ne saurait tomber sous les dispositions de l’article 34 précité.

Les défendeurs entendent encore justifier l’octroi du permis de construire en invoquant l’article 27 du règlement sur les bâtisses et en soutenant que l’annexe serait à considérer comme bâtiment accolé.

Cette argumentation est cependant dénuée de fondement, étant donné que, abstraction faite de la question de savoir si, en l’espèce, l’annexe litigieuse tombe sous la qualification de « bâtiment accolé », cet article, en tout état de cause, n’entend pas déroger aux marges de reculement prescrites.

4 Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent qu’en autorisant une construction ne respectant pas une marge de recul latérale d’au moins 3 mètres, l’autorisation de construire déférée du 11 juin 1998 encourt l’annulation.

Quant à la demande en sursis à exécution, les parties défenderesses, dans leur mémoire en réponse, ont conclu au rejet de cette demande au motif que l’exécution de l’acte attaqué ne causerait pas un préjudice grave et irrécouvrable à la partie demanderesse.

Comme le recours introduit est en l’état d’être toisé à ce stade par l’annulation de la décision déférée, la demande en sursis à exécution du permis de construire, telle que présentée, est devenue sans objet et il échet d’en débouter la partie demanderesse.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

reçoit le recours en la forme;

au fond le dit justifié;

partant annule la décision du bourgmestre de la ville de X. du 1l juin 1998 déférée et renvoie l’affaire devant ledit bourgmestre;

dit la demande en effet suspensif sans objet;

condamne l’administration communale de X. aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 8 novembre 1999 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10878
Date de la décision : 08/11/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-11-08;10878 ?

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