N° 11138 du rôle Inscrit le 19 février 1999 Audience publique du 25 octobre 1999
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Recours formé par Madame … GRBIC contre une décision de la commission instituée sur base du règlement grand-ducal modifié du 23 juillet 1983 en matière d'aides au logement
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Vu la requête déposée le 19 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc THEISEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … GRBIC, infirmière, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du 18 novembre 1998 de la commission instituée sur base du règlement grand-ducal modifié du 23 juillet 1983, visée et approuvée par le ministre du Logement, lui refusant l’aide à l’acquisition d’un appartement;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 6 avril 1999 au greffe du tribunal administratif;
Vu le mémoire en réplique de la demanderesse déposé le 21 juin 1999 au greffe du tribunal administratif ;
Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;
Ouï le juge rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Steve COLLART, en remplacement de Maître Marc THEISEN, et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.
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Par acte notarié établi en date du 27 mai 1998, Madame … GRBIC, infirmière, née à Ettelbruck le 20 octobre 1962, épouse de Monsieur X., les deux étant mariés sous le régime de la séparation des biens, a acquis un appartement dans un immeuble dénommé « Résidence … » sis à …, la surface utile d’habitation étant fixée dans le prédit acte à 117,21 m2.
Suite à une demande « en obtention des aides au logement », la commission, instituée par l’article 12 du règlement grand-ducal modifié du 23 juillet 1983 fixant les mesures d’exécution relatives aux primes et subventions d’intérêts en faveur du logement prévues par la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement, ci-après dénommée « la commission », rejeta cette demande par décision du 18 novembre 1998 au motif que « la surface utile d’habitation de 125,98 m2 dépasse la limite admissible de 120 m2 prévue par l’article 7 du prédit règlement grand-ducal [du 23 juillet 1983] ».
Par requête du 19 février 1999, Madame GRBIC a introduit devant le tribunal administratif un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du 18 novembre 1998.
Aucune disposition légale ne conférant compétence au juge administratif pour statuer comme juge du fond en matière d’aides au logement, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande en réformation de la décision critiquée.
Le recours en annulation, régulier eu égard aux conditions de forme et de délai, est recevable.
A l’appui de son recours, la demanderesse fait valoir que la surface utile d’habitation figurant dans l’acte notarié de vente de son appartement serait de 119,25 m2 et qu’elle ne saurait dès lors accepter « l’estimation » faite par le ministère du Logement. Elle donne à considérer que la décision de refus litigieuse lui ferait perdre non seulement le soutien financier du ministre du Logement mais également celui de la commune. Elle conclut dès lors qu’« elle ne peut accepter que le Ministère change arbitrairement la surface de son appartement qu’elle occupe avec ses deux petits enfants tout en étant obligée de travailler à mi-temps comme infirmière dans un hôpital pour pouvoir subvenir aux besoins de sa petite famille ».
Le délégué du gouvernement fait valoir que s’il est vrai que l’acte de vente prévoit une surface inférieure à 120 m2, à savoir 117,21 m2 et non 119,25m2 comme le soutient la demanderesse, qui aurait fait une confusion avec le chiffre se référant au nombre des millièmes, les fonctionnaires du département du logement auraient néanmoins procédé à deux mesurages, à savoir, d’une part, sur base des plans mis à la disposition du service des aides au logement, dégageant une surface utile d’habitation de 125,98 m2, et, d’autre part, sur base d’un mesurage effectué sur place en date du 15 janvier 1999 et dégageant une surface utile d’habitation de 121,17 m2. Ce serait dès lors à juste titre que le ministre a refusé l’octroi des aides sollicitées, étant donné qu’une des conditions auxquelles le payement des aides au logement est subordonné ne serait pas remplie.
Dans son mémoire en réplique, la demanderesse relève que les deux mesurages, effectués par des fonctionnaires du ministère du Logement, auraient donné des résultats discordants et que des résultats « à tel point inégaux » proviendraient sans doute d’erreurs de mesurage, de sorte que le tribunal ne saurait fonder sa décision sur ces mesures. Elle conclut dès lors à l’annulation de la décision de refus attaquée, sinon à ce qu’une expertise en vue d’établir la surface exacte du logement soit ordonnée par le tribunal.
Aux termes de l’article 7, 1.) du règlement grand-ducal modifié du 23 juillet 1983, précité, les aides au logement ne sont pas accordées si, pour un appartement en copropriété divise, la surface utile d’habitation dépasse 120 m2.
En l’espèce, il ressort d’un mesurage effectué sur base des plans soumis par la demanderesse à la commission que la surface utile d’habitation de son appartement, pour lequel elle a sollicité l’aide au logement, serait de 125,98 m2. Un deuxième mesurage a été effectué par les fonctionnaires du ministère du Logement suite à une descente sur les lieux le 15 janvier 1999. Ce mesurage a dégagé une surface utile d’habitation de 121,17 m2. Ainsi, les deux mesurages aboutissent chaque fois à une surface utile d’habitation supérieure à celle autorisée par l’article 7 précité, de sorte que c’est à bon droit que la commission a refusé d’accorder les aides au logement sollicités. - Dans ce contexte, il y a lieu de relever que si les chiffres retenus lors des deux mesurages sont divergents, ceci s’explique par le fait que les mesurages ont été effectués sur base de supports différents, à savoir, le premier mesurage sur base des plans de construction de l’appartement versés par la demanderesse, et le deuxième mesurage sur base de la surface réelle d’habitation prise en considération lors d’une descente sur les lieux après l’achèvement de l’appartement. On ne saurait donc pas parler d’erreur de mesurage comme le soutient la partie demanderesse.
La demanderesse sollicite par ailleurs l’institution d’une mesure d’expertise, afin d’établir la surface exacte du logement en question.
Cette demande est à rejeter à défaut d’éléments concordants résultant du dossier permettant au tribunal de conclure à la pertinence d’une telle mesure d’expertise, celle-ci n’étant en l’espèce pas de nature à apporter des éléments nouveaux par rapport à ceux qui figurent déjà au dossier. En effet, dans le cadre d’un recours en annulation, le juge doit vérifier si les faits sur lesquels l’administration s’est fondée sont matériellement établis, mais cette vérification ne peut pas aboutir à instituer une mesure d’instruction sur simple allégation par une partie de faits non étayés par des éléments du dossier (CE 5 janvier 1985, Mieszala, n°du rôle 7347). S’il est vrai que l’acte de vente indique une surface utile inférieure à 120 m2, cette indication ne constitue pas une présomption absolue et, en l’espèce, elle a été contredite à deux reprises à une date postérieure au prédit acte, notamment sur base d’un mesurage effectué sur place.
La demanderesse demande en dernier lieu au tribunal de statuer en « équité ».
Saisi d’un recours en annulation, le rôle du juge se limite à la vérification de la légalité et de la régularité formelle de l’acte administratif attaqué, de sorte qu’il ne lui incombe pas de se prononcer sur l’opportunité de la décision litigieuse. - Il est cependant loisible à la demanderesse d’introduire une demande auprès du ministre du Logement qui, conformément aux dispositions de l’article 7 (1) alinéa 2 du règlement grand-ducal précité 23 juillet 1983, peut dispenser de la condition minima pour des cas à caractère social.
Il suit des considérations qui précèdent que le recours est à rejeter.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, reçoit le recours en annulation en la forme, rejette la demande d’expertise sollicitée par la demanderesse, au fond déclare le recours non justifié et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé par:
M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge, et lu à l’audience publique du 25 octobre 1999 par le vice-président, en présence de M.
Legille, greffier.
Legille Schockweiler