N° 11025 du rôle Inscrit le 14 décembre 1998 Audience publique du 4 octobre 1999
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Recours formé par Monsieur … MIESZALA, … contre une décision du collège des bourgmestre et échevins de la commune de X.
en matière de marchés publics
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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 11025 et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 décembre 1998 par Maître Alain GROSS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MIESZALA, entrepreneur de constructions métalliques, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du collège des bourgmestre et échevins de la commune de X. du 4 juin 1998 portant adjudication de travaux de menuiserie en aluminium et vitrerie dans l’intérêt de l’école primaire de X. à l’entreprise RANO S.A., établie et ayant son siège social à Luxembourg,;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 18 décembre 1998 portant signification de ce recours à l’administration communale de X.;
Vu le mémoire en réponse déposé en date du 23 avril 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Arsène KRONSHAGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’administration communale de X.;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Michelle THILL, demeurant à Luxembourg, du 26 avril 1999 portant signification de ce mémoire à Monsieur … MIESZALA;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 mai 1999 par Maître Alain GROSS au nom de Monsieur … MIESZALA;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 25 mai 1999 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de X.;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er juillet 1999 par Maître Arsène KRONSHAGEN pour compte de l’administration communale de X.;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Michelle THILL, demeurant à Luxembourg, du 1er juillet 1999 portant signification de ce mémoire en duplique à Monsieur … MIESZALA;
1 Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Franck SCHAACK et Arsène KRONSHAGEN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 septembre 1999.
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Le 5 mai 1998, l’administration communale de X., ci-après dénommée “ la commune ”, procéda à l’ouverture d’une soumission publique en vue de l’adjudication de travaux de menuiserie en aluminium et vitrerie dans l’intérêt de l’école primaire de X.. Lors de sa séance du 3 juin 1998, le collège des bourgmestre et échevins de la commune décida d’adjuger lesdits travaux au deuxième offrant, l’entreprise Y. S.A. de Luxembourg, pour un montant de 13.532.835.-francs. L’entreprise … MIESZALA établie à L-…, qui était la moins disante avec une offre de 13.287.531.- francs fut écartée au motif suivant: “ Attendu que par lettre du 6 mai 1998 l’architecte demande à l’entreprise … MIESZALA avec siège à … les certificats desquels il résulte qu’elle n’a pas d’obligation ni envers le fisc, ni envers les assurances sociales;
Considérant que la date limite de présentation des certificats avait été fixée au 20 mai 1998 et que les certificats n’ont pas encore été remis à la date de ce jour;
Considérant que la commission des soumissions estime dans son avis du 8 avril 1998 qu’à défaut de soumettre les certificats demandés une entreprise ne peut entrer en ligne de compte pour l’adjudication;
Considérant encore que l’entreprise MIESZALA n’a qu’un agrément sur les profilés offerts et non pas l’agrément technique sur les constructions ”.
Cette décision fut portée à la connaissance de l’entreprise MIESZALA en date du 24 août 1998 par courrier de l’architecte … Monsieur Jos MIESZALA s’adressa à la commune par courriers des 30 août et 11 septembre 1998 et déclara ne pas avoir reçu en date du 6 mai 1998 de la part de l’architecte … de demande relative à des certificats qu’il aurait à présenter. En réponse à ces courriers, la commune, tout en lui signalant disposer de la confirmation de l’envoi par télécopieur de la demande en question émanant de l’architecte …, l’invita encore par courrier du 2 octobre 1998 à soumettre pour le 16 octobre 1998 au plus tard les attestations originales demandées documentant qu’il avait suffi à ses obligations de paiement avec effet au 20 mai 1998, date limite de la remise.
Monsieur MIESZALA n’ayant pas donné suite à cette invitation, la commune, par l’intermédiaire de son mandataire, l’informa par courrier du 3 novembre 1998 que “ comme vous ne voulez manifestement pas verser les certificats, l’administration communale considère cette affaire comme définitivement clôturée ”.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 décembre 1998 Monsieur MIESZALA fit alors introduire un recours tendant à l’annulation de la décision du collège des bourgmestre et échevins de la commune du 4 juin 1998 en faisant valoir que le motif retenu 2 pour écarter son offre, en ce qu’il est basé sur un défaut de présentation des certificats demandés à la date du 20 mai 1998, ne saurait valoir, alors que ni l’avis d’adjudication publié par voie de presse, ni le cahier des charges n’auraient spécialement réclamé ces documents et qu’il conteste par ailleurs avoir reçu une quelconque demande afférente de la part de l’architecte … en date du 6 mai 1998.
Quant à la recevabilité La commune soulève l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté. Elle souligne à cet effet que la délibération du collège des bourgmestre et échevins du 4 juin 1998 fut communiqué le 24 août 1998 à Monsieur MIESZALA, de sorte que le recours, déposé le 14 décembre 1998, aurait été introduit en dehors du délai de recours contentieux de trois mois.
Le soumissionnaire dont l’offre n’a pas été retenue étant à considérer, non comme tiers intéressé faisant partie d’un groupe indéterminé et indéterminable de personnes, mais comme destinataire direct de la décision d’adjudication autant que le soumissionnaire dont l’offre est retenue, il doit profiter, autant que le bénéficiaire de la soumission, des garanties découlant du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et en particulier de son article 14 en vertu duquel le délai du recours contentieux ne commence à courir à partir de la notification de décision faisant grief que pour autant que les voies de recours et le délai de recours y sont indiqués (cf. Trib. adm.
22.7.98, n°9707 du rôle, Pas. adm. 2/1999, v° Marchés publics, n°10 et autres références y citées).
En l’espèce il se dégage des pièces versées que le courrier de l’architecte … du 24 août 1998 portant à la connaissance de Monsieur MIESZALA la décision litigieuse du 4 juin 1998, ne contient aucune instruction sur les voies de recours, de sorte que la commune n’a pas satisfait aux exigences de la disposition réglementaire précitée. Il s’ensuit qu’aucun délai de recours n’a commencé à courir à l’encontre de la décision déférée dans le chef du demandeur.
Le recours en annulation est partant recevable pour avoir été introduit dans le délai et par ailleurs dans les formes prévus par la loi.
Quant au fond Le juge administratif saisi d’un recours en annulation a le droit et l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée ainsi que de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à la motiver légalement.
Il est précisé à l’article 45 sub (3) et (4) du règlement grand-ducal modifié du 10 janvier 1989 portant exécution du chapitre 2 de la loi du 4 avril 1974 concernant le régime des marchés publics de travaux et de fournitures que “(3) Le choix de l’adjudicataire ne peut se porter que sur des soumissionnaires qui se trouvent dans les conditions visées à l’article 14 et dont la compétence, l’expérience et les capacités techniques et financières, la situation fiscale et parafiscale, les moyens d’organisation en outillage, matériel et personnel qualifé, le degré d’occupation, ainsi que la probité commerciale offrent les garanties pour une bonne exécution des prestations dans les délais prévus. En cas d’entreprise générale, les conditions précitées devront également être remplies par les soustraitants. (4) Dans le cadre de cet examen, le commettant peut demander au soumissionaire de lui soumettre des états établis 3 par a. - le Centre d’informatique, d’affiliation et de perception des cotisations commun aux institutions de sécurité sociale; b. - l’Administration des Contributions; c.- l’Administration de l’Enregistrement et des Domaines; états dont il ressort qu’au cours des trois années précédant l’année de la soumission l’offrant s’est conformé aux obligations de déclaration, de paiement d’avance et de principal, à chaque terme, ou qu’il a respecté les délais lui consentis ”.
Dans un courrier daté du 6 mai 1998, adressé par télécopie et lettre simple tant à l’établissement Jos MIESZALA qu’à l’entreprise adjudicataire RANO S.A., l’architecte … a soumis la demande suivante: “ Suite à l’ouverture de la soumission publique du 5 mai 1998 et en vue de l’adjudication des travaux sous référence nous vous prions de nous remettre pour le mercredi, 20 mai 1998, à 17.00 heures, les certificats originaux attestant que l’entreprise n’a pas d’obligations envers les différentes Administrations (article 32 du règlement grand-ducal du 2 janvier 1989). ” Malgré la référence erronée au règlement grand-ducal modifié du 2 janvier 1989 portant institution d’un cahier général des charges applicable au marchés publics des travaux et de fournitures pour compte de l’Etat, cette demande s’inscrit quant à son contenu et aux documents concrètement visés dans les prévisions de l’article 45 du règlement grand-ducal modifié du 10 janvier 1989 précité applicable en l’espèce et relatif aux marchés publics pour compte des communes. Il s’ensuit que le motif de refus basé sur l’absence de production des certificats requis dans le délai imparti, en l’occurrence le 20 mai 1998, constitue en principe un motif légalement valable pour écarter un concurrent de l’adjudication, cette conclusion ne se trouvant par ailleurs pas contestée en tant que telle par le demandeur qui affirme seulement ne jamais avoir reçu les lettre et télécopie du 6 mai 1998 précitées.
Face aux contestations du demandeur, il y a dès lors lieu de vérifier si les faits invoqués à la base de ce motif, en l’occurrence l’envoi d’une demande afférente à Monsieur MIESZALA en date du 6 mai 1998 ainsi que le défaut dans son chef d’y donner suite, sont établis à suffisance de droit et de fait.
S’il est certes constant en cause que Monsieur MIESZALA est resté en défaut jusqu’à ce jour de faire parvenir à la commune les attestations litigieuses et ce pour le moins malgré l’invitation non contestée y relative de l’architecte … du 2 octobre 1998, il reste que le demandeur conteste avoir reçu pareille demande avant la prise de la décision déférée pour soutenir qu’il n’aurait pas été mis en mesure de satisfaire à cette condition en temps utile et que ce serait partant à tort que le non-respect de cette condition fut retenu comme motif de refus à son encontre.
Il se dégage des pièces versées au dossier qu’outre d’exhiber à l’appui de ses affirmations la confirmation d’un envoi par télécopieur, intitulé “ Sendeprotokoll ”, et renseignant la date du 6 mai 1998, ainsi que le numéro de fax de Monsieur MIESZALA et l’heure (10 :09 heures) et la durée de l’envoi (00 :40), la partie défenderesse fait état d’une pièce non autrement contestée documentant qu’une lettre à contenu identique fut envoyée par télécopieur le même jour, à deux minutes d’intervalle seulement (10 :07 heures) et pendant un temps de transmission par ailleurs identique, à l’entreprise adjudicataire Y. S.A..
Outre cette circonstance qui tend à corroborer la force probante de l’indice que constitue la simple présentation d’une confirmation d’envoi par télécopieur, la commune fait 4 encore valoir que le Centre commun de la sécurité sociale avait informé l’architecte …, sur demande, que Monsieur MIESZALA avait bien sollicité une attestation de non-obligation avant la date butoir du 20 mai 1998, mais que celle-ci ne lui fut envoyée que le 22 mai 1998, date du paiement effectif de ses arriérés de cotisations sociales par ordre de virement effectué à partir de la Banque Internationale de Luxembourg ledit 20 mai 1998.
La partie demanderesse rencontre les arguments de la commune en exposant avoir certes fait des démarches auprès de l’administration des Contributions directes avant le 20 mai 1998, mais ceci dans un but autre que d’obtenir l’un des certificats litigieux, en l’occurrence celui de contester un extrait de compte datant du 6 avril 1998.
Or, dans la mesure où les affirmations très concrètes de la commune concernent non pas l’administration des Contributions directes mais le Centre commun de la sécurité sociale, il y a lieu de constater que loin de se trouver ébranlées par les explications fournies en cause, elles ne font que conforter les autres indices dégagés ci-avant permettant de conclure que la partie demanderesse a effectivement reçu la demande de certificat de l’architecte … le 6 mai 1998.
Au vu des indices concordants dégagés ci-avant il y a dès lors lieu d’admettre que les faits à la base de la décision litigieuse sont établis à suffisance de droit et de fait et que Monsieur MIESZALA n’a pas suffi à l’obligation de verser les certificats requis pourtant légalement posée. Il s’ensuit que l’offre de preuve formulée par la partie défenderesse dans son mémoire en duplique est sans objet et que le recours en annulation laisse d’être fondé dans tous ses moyens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;
reçoit le recours en annulation en la forme;
au fond le dit non justifié;
partant en déboute;
laisse les frais à charge de la partie demanderesse.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 4 octobre 1999 par:
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
5 s. Schmit s. Delaporte 6