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25/08/1999 | LUXEMBOURG | N°10456

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 août 1999, 10456


N° 10456 du rôle Inscrit le 11 décembre 1997 Audience publique du 25 août 1999

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Recours formé par Monsieur … WELTER et Madame X., Luxembourg contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition Luxembourg 4 de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, intitulée « Conclusions », inscrite sous le numéro 10456 du rôle, déposée en date du 11 décembre 1

997 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avocat à la Cour, inscrit au tab...

N° 10456 du rôle Inscrit le 11 décembre 1997 Audience publique du 25 août 1999

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Recours formé par Monsieur … WELTER et Madame X., Luxembourg contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition Luxembourg 4 de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, intitulée « Conclusions », inscrite sous le numéro 10456 du rôle, déposée en date du 11 décembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Alain STEICHEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … WELTER et de son épouse, Madame X., les deux demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu relatif à l’année 1989, émis le 10 novembre 1994 par le bureau d’imposition Luxembourg 4 de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes;

Vu le mémoire en réponse déposé en date du 24 février 1999 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement;

Vu le mémoire en réplique déposé le 18 mars 1999 au nom des demandeurs;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin d’impôt entrepris;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Alain STEICHEN et Monsieur le délégué du gouvernement …-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives.

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Le 10 novembre 1994, le bureau d’imposition Luxembourg 4 de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes adressa à Monsieur … WELTER et à son épouse, Madame X., les deux demeurant ensemble à L-…, un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année fiscale 1989.

Contre ledit bulletin de l’impôt sur le revenu Monsieur … WELTER introduisit le 5 janvier 1995 une réclamation devant le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé le « directeur ».

En l’absence d’une décision directoriale à la suite de ladite réclamation, Monsieur … WELTER et son épouse, Madame X. ont fait introduire le 11 décembre 1997 un recours en réformation contre le bulletin précité du 10 novembre 1994.

1 Le délégué du gouvernement relève que la réclamation devant le directeur a été faite au seul nom de Monsieur … WELTER et, sur ce, il conclut à l’irrecevabilité du recours dans la mesure où il émane de Madame X. faute de qualité à agir dans son chef. - Il estime en outre que Madame X. n’aurait aucun intérêt à devenir partie à un recours contre un bulletin qui ne lui aurait pas été notifié et ne porte que le numéro fiscal de Monsieur WELTER, « alors surtout qu’il s’agit de l’année d’imposition 1989 ».

Les demandeurs n’ont pas répliqué relativement à ce moyen d’irrecevabilité.

Au voeu du paragraphe 228 de la loi générale des impôts, communément appelée « Abgabenordnung », ci-après dénommée « AO » et de l’article 8 paragraphe (3) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, un recours contentieux dirigé contre un bulletin d’impôt est irrecevable omisso medio si ledit bulletin et les contestations formulées n’ont pas été soumis préalablement pour examen et décision au directeur de l’administration des Contributions directes (cf. trib. adm. 6 août 1997, Pas. adm.

2/99, V° Impôts - VII Procédure contentieuse, n° 162, p. 186).

En outre, s’il est vrai que l’impôt sur le revenu frappe les personnes et non le foyer, il n’en demeure pas moins vrai que le ménage soumis à l’imposition collective est à considérer comme « une unité économique, comme une communauté fiscale de revenus et de biens quel que soit le régime matrimonial des époux » (doc. parl. 5714, ad. art. 5, p. 4) et que les époux le composant se voient fixer une cote d’impôt sur le revenu unique, opposable en principe aux deux époux.

Par conséquent, les deux époux constituent des contribuables (« Steuerpflichtige ») au sens du paragraphe 97 (1) AO et se voient conférer individuellement par les paragraphes 228, 232 et 238 AO une voie de recours contre cette cote d’impôt commune.

Cependant, une réclamation introduite par un époux en son seul nom ne rend pas automatiquement l’autre époux partie à cette voie de recours.

En l’espèce, comme il est constant que la réclamation auprès du directeur du 5 janvier 1995 a été introduite en nom et pour compte du seul sieur … WELTER, comme pareille réclamation, sur base des considérations qui précèdent, ne saurait être considérée comme ayant été formulée également au nom de son épouse et comme il ne ressort pas des éléments et pièces du dossier que Madame X. ait introduit une réclamation devant le directeur contre le bulletin entrepris, il s’ensuit que le recours contentieux introduit au nom de Madame X.

encourt l’irrecevabilité pour raison d’omisso medio.

Le recours, ayant par ailleurs été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable pour le surplus en tant qu’introduit par Monsieur WELTER.

Le demandeur fait exposer qu’il a été propriétaire, d’une part, de 100 parts sociales de la société à responsabilité limitée Y.-MONTAGE, dont le capital social était représenté par 200 parts sociales et, d’autre part, de 153 parts sociales de la société à responsabilité limitée Y., dont le capital social était représenté par 300 parts sociales. Par l’effet d’un acte de donation fait au profit de ses enfants en date du 11 juillet 1983, il aurait transféré la nue-

propriété de 54 parts sociales de la société Y.-MONTAGE et 81 parts sociales de la société 2 Y., de sorte qu’il lui seraient restés 46 parts sociales en pleine propriété dans Y.-MONTAGE, soit 23% du capital social de ladite société, et 72 parts sociales en pleine propriété dans Y., soit 24% du capital social de cette société, et, dans ledit acte de donation, il se serait réservé l’usufruit des parts sociales transférées. Enfin, il ajoute que les deux sociétés Y.-MONTAGE et Y. auraient été liquidées le 17 mars 1989.

Il demande la réformation du bulletin d’impôt entrepris en ce que ce dernier lui impute un bénéfice de cession de …- francs en provenance de la liquidation des deux susdites sociétés au motif qu’il aurait détenu des participations que le bureau d’imposition a qualifiées d’importantes aux sens et fins de l’article 101 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR ».

Le demandeur soutient que les conditions pour qu’il soit imposable au titre de l’article 100 LIR ne seraient pas remplies, ni en ce qui concerne l’élément temporel, au motif que l’acte de donation aurait précédé la date de mise en liquidation des deux sociétés de plus de 5 ans, ni en ce qui concerne l’importance de la participation, au motif que ses enfants, qui ont bénéficié de la donation auraient été majeurs à la date de l’acte de donation, de sorte que leurs parts sociales ne sauraient être additionnées à celles détenues par lui. Pour le surplus, concernant ce dernier élément, le demandeur estime que l’administration ne saurait pas non plus se baser sur une appréciation économique de l’acte de donation et soutenir que la propriété économique des parts sociales transférées serait restée dans ses mains, dès lors que l’article 108 bis LIR établirait une « notion autonome » de l’usufruit en matière d’impôt sur le revenu, selon laquelle le nu-propriétaire est considéré comme ayant la pleine propriété sous réserve de l’obligation de céder les fruits à l’usufruitier. En l’espèce, les recettes perçues par lui en vertu de son droit d’usufruit ne seraient imposables dans son chef au motif que ces revenus ne sont pas imposables dans le chef d’un nu-propriétaire qui cède des capitaux se trouvant en dehors du champ d’application de la loi sur l’impôt sur le revenu. Il fait ajouter que, dans sa circulaire n° 53, le directeur aurait confirmé l’applicabilité de l’article 108 bis LIR aux participations dans des sociétés.

Par ailleurs, le demandeur conteste que l’existence de l’usufruit serait douteuse ou qu’il y aurait eu dénaturation de la notion d’usufruit.

Le délégué du gouvernement estime que le recours ne serait pas fondé. Il soutient que, abstraction faite de ce que l’article 108 bis LIR admettrait aussi des lectures qui le mettent moins radicalement en opposition avec le droit civil que celle proposée par le demandeur, « le nu-propriétaire réputé acquérir et céder ne cède que parce qu’il acquiert » et « l’article 12 LIR ne s’oppose nullement à la déduction des frais d’obtention ».

Il soutient en outre que le lien entre la déduction auprès du débiteur et l’imposition auprès du bénéficiaire serait propre aux revenus de pensions et de rente (art. 96 LIR), mais n’existerait pas pour les revenus divers.

Enfin, le représentant étatique met en doute qu’en l’espèce, il s’agisse en fait d’un usufruit au motif que l’usufruitier s’est réservé dans les statuts des deux sociétés l’exercice de tous les droits attachés à la propriété des parts, mais surtout il a recueilli lors de la liquidation tout l’accroissement de valeur des titres, laissant aux nus-propriétaires la seule valeur nominale. Le délégué estime qu’un tel état des choses ressemble plus à une promesse de somme d’argent qu’à une donation avec réserve d’usufruit. - Comme le demandeur aurait lui-

3 même et directement réalisé le revenu litigieux, le délégué arrive à la conclusion que le demandeur aurait été imposé à bon droit.

Selon l’article 100 LIR « est imposable aux termes du présent article le revenu provenant de l’aliénation, à titre onéreux, plus de six mois après leur acquisition, d’actions de parts sociales (…) dans les sociétés de capitaux (…) lorsque le cédant a eu une participation importante. (…) Une participation est à considérer comme importante lorsque le cédant, seul ou ensemble avec son conjoint et ses enfants mineurs, a participé de façon directe ou indirecte, à un moment quelconque au cours des cinq années antérieures au jour de l’aliénation pour plus de vingt-cinq pour cent au capital (…) ».

Au voeu de l’article 101 LIR, en cas de partage de l’actif social notamment d’une société de capitaux, le produit alloué aux possesseurs de participations importantes est considéré comme le produit d’une aliénation de la participation au sens de l’article 100 LIR. -

L’actif social est censé être partagé notamment en cas de dissolution de la société.

En l’espèce, le tribunal est appelé à toiser la question de savoir si le bureau d’imposition compétent a valablement pu imposer dans le chef du demandeur un bénéfice de cession de 82.751.664.- francs, montant qui n’est pas critiqué en tant que tel, provenant de la liquidation des deux sociétés à responsabilité limitée Y. et Y.-MONTAGE dans lesquelles le demandeur a détenu une participation et, plus spécialement, si ledit bureau a valablement pu juger que lesdites participations sont importantes aux fins des articles 100 et 101 LIR.

Dans ce contexte, d’un côté, il est constant qu’au moment de la dissolution des deux sociétés susvisées (17 mars 1989 pour Y.-MONTAGE et 13 avril 1989 pour Y.), le demandeur détenait deux participations en pleine propriété respectivement de 23% du capital social de la société Y.-MONTAGE (46 parts sociales sur un total de 200 parts) et d’environ 24% du capital social de la société Y. (72 parts sociales sur un total de 300 parts). Il est encore incontestable et incontesté que ces deux participations en pleine propriété sont chacune, à elles-seules, insuffisantes pour constituer des participations importantes au sens de l’article 100 LIR précité.

D’un autre côté, le demandeur avait, à cette époque, un droit d’usufruit sur respectivement 54 parts sociales de la société Y.-MONTAGE, représentant 27 % de son capital social, et 81 parts sociales de la société Y., représentant environ 27 % de son capital social. Concernant l’origine desdits droits d’usufruit, il importe de relever que le demandeur, antérieurement propriétaire de 100 parts de la société Y.-MONTAGE et de 153 parts de la société Y., avait, par deux actes notariés en date du 11 juillet 1983, fait donation de la nue-

propriété de 54 parts sociales de la société Y.-MONTAGE et de 81 parts de la société Y. à ses 3 enfants, sous réserve de l’usufruit à son propre profit. Il convient encore de relever qu’il est constant en cause que les enfants du demandeur étaient majeurs lorsque furent dressés devant notaire les susdits actes de donation.

Aux termes de l’article 108 bis (1) LIR « le nu-propriétaire est réputé acquérir les revenus du bien qui est grevé de l’usufruit et les céder à l’usufruitier ».

4 L’article 108 bis LIR a pour objet d’organiser le « traitement de l’usufruitier et du nu-

propriétaire à propos des revenus d’un bien grevé d’usufruit et [l’] imposition des plus values de cession de la nue-propriété ou de l’usufruit » (Code fiscal, vol. 2, note relative à l’objet de l’article 108 bis LIR figurant à la suite dudit article).

Il convient de relever qu’au sein de la LIR, l’article 108 bis fait partie du Titre I - Impôt sur le revenu des personnes physiques, Chapitre IV. - Revenu imposable et de la Section III intitulée « Dispositions communes aux catégories de revenus nets visées aux numéros 4 à 8 de l’article 10 ». Plus particulièrement encore, il y fait l’objet d’une cinquième rubrique intitulée « Nue-propriété et usufruit ».

L’article 108 bis (1) a été introduit par l’article 3 de la loi du 27 décembre 1973 modifiant certaines dispositions relatives à la loi générale des impôts et aux impôts directs. Il n’a pas apporté de changement à la pratique antérieure d’imposition du nu-propriétaire et de l’usufruitier, mais « ne fait que la légaliser pour des raisons de sécurité juridique » (doc. parl.

n°1706, relatif à la loi précitée du 27 décembre 1973, commentaire des articles, ad article 3 du projet, p. 8).

L’article 108 bis (1) ne concerne donc ni la détermination du bénéfice commercial, ni du bénéfice agricole et forestier ni, enfin, celle du bénéfice provenant de l’exercice d’une profession libérale. Par contre, pour ce qui est de la détermination des 5 autres catégories de revenus visées à l’article 10 LIR, il « assimile le nu-propriétaire d’un bien à une personne qui aurait acquis la pleine propriété du bien moyennant paiement à l’usufruitier d’un capital et d’une rente viagère, le montant des arrérages de la rente étant égal en principe au revenu net touché par l’usufruitier » (doc. parl. n°1706, op. cit., p. 8).

« Par cette disposition légale, le législateur fiscal s’écarte délibérément de la notion d’usufruit telle que la conçoit le code civil qui veut que ce soit l’usufruitier qui retire directement les fruits du bien grevé d’usufruit (…) » (N. FEHLEN, L’impôt sur le revenu (V) commentaire des articles 105 à 107, 108 et 108 bis, 109 à 114, 132 et 131 de la LIR, XIX Nue-propriété et usufruit, commentaire de l’article 108 bis LIR, in Etudes fiscales n°77, décembre 1987, p. 609).

Le traitement fiscal du nu-propriétaire et de l’usufruitier a fait l‘objet d’une circulaire du directeur (circulaire n° 53 du 19 juillet 1974). Selon ladite circulaire « l’article 108bis établit une notion autonome de l’usufruit en matière d’impôt sur le revenu. Tandis qu’en droit civil l’usufruitier retire directement les fruits du bien grevé d’usufruit en vertu d’un droit réel qui constitue une parcelle de propriété, l’usufruitier n’a, au regard de l’impôt sur le revenu, qu’un droit de créance envers le nu-propriétaire qui est considéré comme ayant la pleine propriété sous réserve de l’obligation de céder les fruits à l’usufruitier.

En pratique le nu-propriétaire sera donc traité comme s’il encaissait les fruits du bien grevé d’usufruit et comme s’il avait envers l’usufruitier la charge d’une rente équivalente aux fruits du bien en cause. (…) ».

Concernant plus spécialement, comme en l’espèce, le traitement fiscal d’un nu-

propriétaire et d’un usufruitier lorsque la relation de droit particulière entre le nu-propriétaire et l’usufruitier tire son origine directement d’un acte à titre gratuit qui a été constitué entre 5 personnes susceptibles de se réclamer mutuellement des aliments en cas de besoin, le nu-

propriétaire est en principe imposable comme s’il avait la pleine propriété.

Par conséquent, et dans la mesure où le tribunal limiterait son analyse aux seules formes juridiques utilisées pour l’opération, il se dégagerait des considérations qui précèdent que les droits d’usufruit dont a bénéficié le demandeur devraient rester sans incidence dans le cadre de l’appréciation et la qualification des participations détenues par lui dans les prédites sociétés au jour de leur dissolution.

Cependant, le tribunal ne saurait s’arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais il est appelé, au delà de l’apparence juridique, de rechercher et d’analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques.

Il est en effet de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d’après des critères économiques.

En effet, « le droit fiscal est mû par le désir impératif de saisir la réalité des faits sans se laisser abuser par des constructions juridiques qui en rendent parfois l’interprétation excessivement pénible. Sur le plan des faits matériels l’appréciation économique permet d’appliquer aux faits, circonstances et événements qui, quoique se présentant sous des aspects juridiques différents, ont la même portée ou la même signification économique, le même régime fiscal. L’appréciation économique est surtout utile, lorsque les contribuables travertissent sous des constructions juridiques à régime fiscal moins onéreux des faits taxés plus lourdement. Ainsi, il arrive que des rapports contractuels ne sont pas imposés d’après la forme juridique qu’ils revêtent, mais doivent l’être d’après leur signification économique (…) » (J. Olinger, La procédure contentieuse en matière d’impôts directs, Etudes fiscales n°s 81-85, novembre 1989, n°194, p.122).

Il convient encore de relever que le paragraphe 11 de la loi d’adaptation fiscale, communément appelée « Steueranpassungsgesetz », lequel constitue une « émanation de la conception économique du droit fiscal et de son interprétation » (J. Olinger, op. cit., n° 193, p. 120), dispose en son quatrième point que « Wirtschaftsgüter, die jemand in Eigenbesitz hat, werden dem Eigenbesitzer zugerechnet. Eigenbesitzer ist, wer ein Wirtschaftsgut als ihm gehörig besitzt ».

Or, cette définition du « Eigenbesitzer » « constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil » et « il se dégage du terme « Eigenbesitzer » que la loi envisage plutôt la situation d’un possesseur, que d’un propriétaire juridique, de sorte qu’elle n’exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dans la personne de ce possesseur spécial » (C.E. 15 juillet 1953, Société Nationale des Chemins de Fer Luxembourgeois, n°5248 du rôle).

En l’espèce, il se dégage des pièces produites par le délégué du gouvernement que le même jour où les deux actes de donation précités ont été dressés, soit le 11 juillet 1983, les associés des deux sociétés Y.-MONTAGE et Y. ont fait modifier les statuts sociaux desdites sociétés, notamment pour les conformer à la nouvelle situation au niveau des associés et pour y ajouter respectivement un nouvel alinéa 3 à l’article 8 et un alinéa 2 à l’article 10 d’un même libellé, à savoir: « En cas de démembrement de la propriété d’une ou de plusieurs parts 6 sociales et notamment en cas de scission de la propriété en nue-propriété et usufruit, l’usufruitier exerce seul tous les droits découlant de la propriété des parts et notamment le droit de vote dans les assemblées générales, quels que soient les points à l’ordre du jour ».

S’il est vrai qu’en cas de démembrement du droit de propriété, la simple existence d’un droit d’usufruit ne constitue pas automatiquement un droit de propriété au sens économique du terme, il n’en reste pas moins qu’au cas où, comme en l’espèce, l’usufruitier de parts sociales qui « exerce seul tous les droits découlant de la propriété des parts », notamment un droit de vote inconditionnel dans toutes les assemblées « quels que soient les points à l’ordre du jour », c’est-à-dire qu’il peut participer non seulement aux résolutions concernant l’affectation des bénéfices, mais encore à celles qui impliquent des actes de disposition, notamment celles relatives à la dissolution anticipée et la liquidation de la société, de telles circonstances particulières révèlent que le nu-propriétaire se trouve en fait démuni au profit de l’usufruitier de l’exercice des droits inhérents à son droit de propriété, sinon dans son intégralité, du moins de telle façon que d’un point de vue économique l’usufruitier peut poser tous les actes de jouissance, d’administration et même des actes de disposition sur la chose soumise à l’usufruit et la position juridique créée à son profit se rapproche de celle d’un propriétaire effectif.

C’est partant à bon droit que le bureau d’imposition compétent a, implicitement mais nécessairement, qualifié le demandeur de propriétaire effectif au regard de la loi fiscale, que le bureau a ajouté les participations sur lesquelles le demandeur n’avait, eu égard à l’apparence juridique, qu’un droit d’usufruit, à celles dont il avait la pleine propriété, afin de qualifier sa participation aux fins des articles 100 et 101 LIR et enfin, qu’il a valablement pu conclure à l’existence d’une participation importante aux fins des prédits articles, partant a valablement imposé dans le chef du demandeur le bénéfice de cession lui imputable provenant de la liquidation des deux sociétés à responsabilité limitée Y. et Y.-MONTAGE.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé et que le bulletin entrepris est à confirmer.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, déclare le recours irrecevable dans la mesure où il a été introduit au nom de Madame X., pour le surplus, reçoit le recours en la forme en tant qu’introduit par Monsieur … WELTER, le dit cependant non fondé, partant le rejette, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par:

7 M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 25 août 1999 par le vice-président, en présence de M. May, greffier en chef de la Cour administrative, greffier assumé.

s. May s. Schockweiler 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10456
Date de la décision : 25/08/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-08-25;10456 ?

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