N° 11208 du rôle Inscrit le 24 mars 1999 Audience publique du 28 juillet 1999
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Recours formé par Monsieur … SANTOS DE CARVALHO contre une décision du ministre de la Justice en matière d’expulsion
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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 11208 et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 1999 par Maître Guillaume RAUCHS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Laurence CAUWEL, avocat inscrit au prédit tableau, au nom de Monsieur … SANTOS DE CARVALHO, de nationalité portugaise, actuellement incarcéré au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 29 septembre 1998 refusant de rapporter la mesure d’expulsion prise à son encontre par arrêté ministériel du 28 décembre 1994.
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mai 1999;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juin 1999 au nom de Monsieur … SANTOS DE CARVALHO;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Laurence CAUWEL, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.
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Le 28 décembre 1994, le ministre de la Justice prit un arrêté d’expulsion, sur base de l’article 9 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant: 1. l’entrée et le séjour des étrangers;
2. le contrôle médical des étrangers; 3. l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère, à l’encontre de Monsieur … SANTOS DE CARVALHO, né le …, de nationalité portugaise. L’arrêté d’expulsion a encore précisé que « l’intéressé devra quitter le pays le jour de sa mise en liberté, celle-ci ayant été subordonnée à la condition qu’il ne revienne plus au pays ».
L’expulsion de Monsieur SANTOS DE CARVALHO était motivée comme suit:
« - l’intéressé a subi les condamnations suivantes: - 30 juillet 1987 - Tribunal Correctionnel de Luxembourg: vol, vol à l’aide d’escalade, 2 ans de prison, 10.000.- flux d’amende; - 24 1 novembre 1987: Cour d’Appel de Luxembourg: vol, vol à l’aide de violences et de menaces, 5 ans de prison, 75.000.- flux d’amende; - 9 novembre 1988: Tribunal Correctionnel Luxembourg: infractions aux articles 7, 8 et 9 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie - 1 an de prison; - 13 novembre 1989 Chambre Criminelle Luxembourg: vol à l’aide de violences et de menaces dans une maison habitée, des armes ayant été employées, tentative de meurtre pour faciliter un vol - 8 ans de réclusion; - 26 mars 1993: Cour d’Appel Luxembourg; infractions aux articles 7 et 8 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie - 4 ans de prison et 100.000.- flux d’amende; - par son comportement l’intéressé constitue un danger grave pour l’ordre, la sécurité et la santé publics ».
Monsieur SANTOS DE CARVALHO a bénéficié à partir du 15 janvier 1995 d’une libération anticipée sous condition de ne plus revenir au pays.
Par lettre du 15 mars 1998, envoyée à partir de son domicile au Portugal, Monsieur SANTOS DE CARVALHO s’adressa à Madame S. du service central d’assistance sociale auprès du parquet général à Luxembourg afin d’obtenir une suspension ou un report du prédit arrêté d’expulsion. Madame S. transmit cette demande en date du 6 juillet 1998, avec une notice explicative de sa part, au service de la police des étrangers du ministère de la Justice.
Le ministre de la Justice fit parvenir une réponse négative à cette demande par courrier du 29 septembre 1998, adressé au parquet général, service central d’assistance social, service de la protection de la jeunesse, a.m. de Madame S.. La lettre était motivée comme suit: « j’ai le regret de vous informer que je ne suis pas en mesure vu la gravité des faits dont l’intéressé s’est fait coupable de rapporter mon arrêté d’expulsion pris à l’encontre de l’intéressé en date du 28 décembre 1994 ou de le tenir en suspens ».
Lors d’un contrôle de police en date du 1er octobre 1998, Monsieur SANTOS DE CARVALHO fut arrêté pour infraction à la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie.
Par décision du 16 octobre 1998, le délégué du procureur général d’Etat, chargé de l’exécution des peines, révoqua la libération anticipée de Monsieur SANTOS DE CARVALHO à la suite de son retour au pays.
Par jugement du tribunal d’arrondissement du 3 décembre 1998, il fut condamné à 3 mois de prison ainsi qu’à une amende de 20.000.- francs pour être rentré dans le Grand-Duché de Luxembourg, sans autorisation préalable, malgré l’arrêté d’expulsion du ministre de la Justice du 28 décembre 1994, pour infraction à l’article 31 de la loi précitée du 28 mars 1972.
Une mesure de sauf-conduit, consistant à accorder des congés pénaux réguliers de 2 jours par mois à Monsieur SANTOS DE CARVALHO, fut accordée par décision du ministre de la Justice le 10 février 1999, décision qui fut cependant rétractée par le même ministre le 26 février 1999 au motif que « je dois malheureusement revenir sur ma décision, alors que Monsieur SANTOS DE CARVALHO a de nouveau fait l’objet d’une condamnation en date du 3 décembre 1998 ».
2 Par requête déposée le 24 mars 1999, Monsieur SANTOS DE CARVALHO a introduit un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle du 29 septembre 1998, refusant de reporter ou de suspendre la mesure d’expulsion prise à son encontre par arrêté ministériel du 28 décembre 1994, pour défaut de motivation, erreur manifeste d’appréciation ainsi que pour atteinte disproportionnée au respect de sa vie familiale.
A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’en tant que ressortissant communautaire, la directive du Conseil n° 64/221/CEE du 25 février 1964 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique serait applicable et que celle-ci énumérerait de manière limitative les raisons pour lesquelles un ressortissant communautaire ne pourrait séjourner sur le territoire d’un Etat membre autre que son Etat d’origine. Il énonce que la loi précitée du 28 mars 1972 ainsi que le règlement grand-ducal d’exécution du 28 mars 1972 concernant les conditions d’entrée et de séjour de certaines catégories d’étrangers faisant l’objet de conventions internationales auraient transposé les principes communautaires de la directive précitée. En effet, le règlement grand-ducal disposerait dans ses articles 9 et 19 que les mesures d’ordre public prises à l’égard des étrangers doivent indiquer les raisons précises qui les motivent notamment pour permettre à la personne concernée de défendre ses intérêts. Il fait valoir que la décision critiquée ne répondrait pas à cette condition de la précision des motifs, en soutenant qu’elle emploierait des formules générales et abstraites prévues par la loi, sans préciser les raisons de fait concrètes permettant de justifier la décision.
Le demandeur avance dans un premier stade des moyens et arguments tenant au bien-
fondé de la mesure d’expulsion prise le 28 décembre 1994. Il souligne ensuite que si son comportement antérieur avait pu constituer une menace pour l’ordre public, le caractère actuel d’une telle menace n’aurait pas été établi par la décision critiquée du 29 septembre 1998. A ce sujet, il estime qu’un ressortissant d’un Etat membre de l’Union Européenne (U.E.), qui a fait l’objet d’une mesure d’éloignement, doit pouvoir demander un nouveau permis de séjour dans cet Etat après un délai raisonnable et ceci d’autant plus s’il établit un changement dans les circonstances ayant motivé la mesure d’éloignement.
Le demandeur fait exposer que depuis janvier 1995, il aurait eu un comportement irréprochable, et que, même avant sa libération anticipée, sa bonne conduite au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig lui a permis de bénéficier de congés pénaux réguliers.
Le ministre, en énonçant dans sa décision du 29 septembre 1998 à titre de motivation uniquement que « vu la gravité des faits dont l’intéressé s’est fait coupable », n’aurait tenu compte ni du changement intervenu dans son comportement, ni du temps qui s’est écoulé depuis le prononcé de l’arrêté d’expulsion en date du 28 décembre 1994, de sorte que la décision déférée serait manifestement trop sévère et disproportionnée.
Finalement, il invoque une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950, approuvée par une loi du 29 août 1953, en ce qu’il y aurait une ingérence injustifiée et disproportionnée par rapport aux faits reprochés dans sa vie privée et familiale. Il fait valoir qu’il aurait passé sa jeunesse au Luxembourg et que toute sa famille y habiterait. Après son expulsion, il aurait travaillé en tant que carrossier au Portugal, mais il s’y serait senti comme un étranger, étant donné qu’il avait quitté ce pays à l’âge de 5 ans et que sa famille était loin de lui. Dans la perspective de retourner au Luxembourg, il aurait par ailleurs entrepris toutes les démarches pour y travailler à nouveau et il y aurait reçu une 3 offre d’emploi, documentée par un certificat joint au recours. Il conclut que la décision refusant de rapporter l’arrêté d’expulsion ne serait dès lors pas justifiée au regard des dispositions de l’article 8 § 2 de la Convention précitée.
Le délégué du gouvernement demande le rejet du recours en réformation, un recours au fond n’étant pas prévu en la matière.
Concernant le recours en annulation, il conteste l’intérêt à agir du demandeur, au motif que le recours serait dirigé contre la seule décision du 29 septembre 1998, alors qu’entretemps son dossier aurait été réexaminé et une nouvelle décision aurait été prise le 26 février 1999, de sorte que le recours serait irrecevable.
Il soulève la forclusion du recours, étant donné qu’il aurait été introduit plus de trois mois après la décision du ministre de la Justice du 29 septembre 1998. Il soutient encore qu’il n’incombait pas au ministre de notifier la décision au demandeur, étant donné que la demande provenait directement du service central d’assistance sociale.
Quant au fond, il estime que la référence « à la gravité des faits que l’intéressé a commis » suffirait aux exigences de motivation de la décision litigieuse et que cette motivation serait précise et ne saurait donner lieu à une interprétation erronée étant donné qu’elle se référerait à l’arrêté d’expulsion qui énumérerait les faits qui ont été reprochés au demandeur.
Concernant le reproche que la seule existence de condamnations pénales ne serait pas une raison suffisante pour motiver un arrêté d’expulsion, le délégué du gouvernement considère que le demandeur conteste en fait la légalité de l’arrêté d’expulsion du 28 décembre 1994, qui serait coulé en force de chose décidée. A ce sujet, il relève que « la décision attaquée du 29 septembre 1998 ne saurait être assimilée à une nouvelle décision qui ouvrirait un nouveau délai de recours alors que la nouvelle décision confirme la décision d’expulsion antérieure et que l’administration n’a pas procédé à un réexamen du dossier ».
Enfin, concernant l’affirmation du demandeur, qu’il aurait eu un comportement irréprochable depuis janvier 1995, le représentant étatique constate qu’il s’agit d’une affirmation qui échapperait au contrôle des autorités luxembourgeoises, étant donné que le demandeur avait été refoulé le 15 janvier 1995 et qu’il n’est revenu au Luxembourg que le 30 août 1998. Il note que le demandeur est revenu au pays malgré une interdiction d’entrée et de séjour prononcée à la fois par l’arrêté d’expulsion et par le délégué du procureur général d’Etat, qui avait subordonné sa libération anticipée à la condition de ne plus revenir au pays. Il note encore que le demandeur a fait l’objet d’un procès-verbal n°6322 du 1er octobre 1998 dressé à son encontre pour infraction à la loi sur les stupéfiants.
Finalement, il fait valoir que compte tenu de la gravité des condamnation pénales prononcées à l’encontre du demandeur, l’ingérence de l’autorité publique dans l’exercice du droit à la vie privée et familiale serait justifiée.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur prend position par rapport aux différents moyens d’irrecevabilité développés par le représentant étatique, pour conclure à leur rejet. Il fait encore préciser ses moyens au fond.
4 La loi précitée du 28 mars 1972 ne prévoyant pas de recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation.
Concernant la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, le délégué du gouvernement soutient en premier lieu que la décision du 26 février 1999 refusant d’accorder un sauf-conduit au demandeur constituerait une nouvelle décision ayant pour effet de lui faire perdre l’intérêt à agir contre la décision du 29 septembre 1998, portant refus de rapporter l’arrêté d’expulsion du 28 décembre 1994.
Force est de constater que la « nouvelle » décision du 26 février 1999 concerne un refus d’accorder un sauf-conduit, c’est-à-dire d’accorder un congé pénal en prenant en considération l’éventuelle bonne conduite du demandeur dans l’établissement pénitentiaire.
Comme l’a relevé à juste titre la partie demanderesse, cette décision porte sur un objet différent que celle refusant de reporter l’arrêté d’expulsion, de sorte que ce moyen laisse d’être fondé.
Le délégué du gouvernement soulève en deuxième lieu l’irrecevabilité du recours pour dépôt tardif de la requête introductive d’instance.
Il est constant en cause que la décision faisant l’objet du présent recours a été prise en date du 29 septembre 1998 et que le recours a été déposé plus de trois mois après la prise de cette décision, soit le 24 mars 1999. Il est encore constant que la décision ne fut pas notifiée au demandeur, mais au service central d’assistance sociale, duquel émanait la demande qui était parvenue au ministre de la Justice en date du 15 juillet 1998. En outre, la décision litigieuse refusant de faire droit à la demande de Monsieur SANTOS DE CARVALHO ne contient aucune indication sur les voies de recours. Dès lors, indépendamment de la question de savoir si la décision déférée du 29 septembre 1998 avait valablement pu être notifiée au seul service central d’assistance sociale, le recours à l’encontre de cette décision est recevable, étant donné que la décision litigieuse ne contient aucune indication sur les délai et voies de recours conformément à l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, de sorte que le délai imparti pour le recours n’a pas commencé à courir.
Le recours en annulation est dès lors recevable pour avoir été introduit par ailleurs dans les formes de la loi.
Concernant le moyen tiré de l’absence de motivation sinon de l’insuffisance de motivation, le tribunal constate que la décision en question se réfère expressément à l’arrêté d’expulsion prononcé à l’encontre du demandeur ainsi qu’à la gravité des faits se trouvant à la base de ce dernier en indiquant que celle-ci ne permettrait pas d’envisager une suspension ou un report de la mesure d’expulsion.
C’est dès lors à tort que le demandeur conclut à l’insuffisance de motivation, étant donné que la référence à l’arrêté d’expulsion est suffisamment précise et complète pour lui permettre de cerner les reproches retenus à son encontre et d’assurer en conséquence sa défense. Il ressort dès lors des considérations qui précèdent que la décision déférée est motivée à suffisance de droit, que le demandeur n’a pas pu se méprendre sur la portée à attribuer à la décision déférée et qu’il a su utilement introduire un recours en vue d’assurer ses droits de la défense.
5 En ce qui concerne le reproche tiré du caractère disproportionné de la mesure prise, il échet de constater que l’arrêté d’expulsion du 28 décembre 1994 a été notifié au demandeur en date du 2 janvier 1995 et, à défaut par le demandeur d’avoir introduit un recours dans les délais légaux, l’arrêté a acquis force de chose décidée. Le demandeur ne peut dès lors plus contester sa légalité. Ainsi, les moyens et arguments ayant trait à la légalité de l’arrêté d’expulsion sont à écarter du débat.
Il résulte des considérations qui précèdent que le débat se limite aux moyens et arguments présentés par le demandeur en vue d’obtenir une suspension ou un report de la mesure d’expulsion.
S’il est vrai qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne précise les conditions et modalités permettant éventuellement une suspension ou un report d’une mesure d’expulsion, de sorte que le ministre dispose dans ce domaine d’un pouvoir d’appréciation discrétionnaire, il reste néanmoins que le tribunal doit pouvoir contrôler toute décision administrative individuelle faisant grief, en examinant notamment si elle n’a pas été prise de manière arbitraire.
A cet effet, le tribunal se limite à examiner les arguments invoqués par le demandeur tirés, d’une part, de son comportement irréprochable depuis l’arrêté d’expulsion et, d’autre part, des intérêts familiaux en cause.
Pour justifier la décision ministérielle du 29 septembre 1998, le délégué du gouvernement se réfère à juste titre à la gravité extrême des faits à la base de l’arrêté d’expulsion. Il est encore constant que le demandeur, nonobstant l’arrêté d’expulsion pris à son encontre et nonobstant le fait que sa libération anticipée a été subordonnée à la condition de ne plus retourner au Grand-Duché de Luxembourg, est revenu au pays au mois d’août 1998, soit un peu plus de 3 ans après son expulsion, ce qui est un délai bref pour soutenir de manière crédible qu’il aurait changé d’attitude et de comportement. Au contraire, son retour au Luxembourg, sans avoir attendu la réponse du ministre de la Justice quant à sa demande en suspension de l’arrêté d’expulsion précité et le fait qu’il a été arrêté en date du 1er octobre 1998 pour infraction à la loi sur les stupéfiants, constituent des indices qu’aucun changement d’attitude n’est intervenu dans son chef. Ces faits dénotent un certain état d’esprit du demandeur face aux institutions et notamment à la législation du pays d’accueil emportant la persistance dans son chef d’un comportement de nature à compromettre la sécurité et l’ordre publics.
C’est partant à juste titre que le ministre n’a pas fait droit à sa demande de rapporter ou de suspendre l’arrêté d’expulsion à son encontre.
Il est vrai qu’aux termes de l’article 8, al. 1er de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance et qu’en vertu de l’alinéa 2 du même article, il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
6 Les faits ci-avant décrits, et surtout les condamnations énoncées dans l’arrêté d’expulsion du 28 décembre 1994, caractérisent le comportement d’un étranger susceptible de compromettre à nouveau la sécurité, la tranquillité, l’ordre et la santé publics et justifient dans les circonstances de l’espèce l’ingérence de l’autorité publique dans le droit de cette personne au respect de sa vie privée et familiale.
Il s’ensuit que le refus de suspendre ou de reporter la mesure d’expulsion ne contrevient pas à l’article 8 de la Convention précitée.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision refusant de faire droit à la demande de Monsieur SANTOS DE CARVALHO de rapporter ou de suspendre l’arrêté d’expulsion à son encontre est légalement justifiée et que le recours en annulation est partant à rejeter comme n’étant pas fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;
se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation;
reçoit le recours en annulation en la forme;
au fond le déclare non justifié et en déboute;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par:
M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 28 juillet 1999, par le vice-président, en présence de M. Schmit, greffier en chef.
s. Schmit s. Schockweiler 7